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JACQUES DE FIEUX,

QUATRE-VINGT-SIXIÈME ÉVÊQUE.

(1677.) Docteur en Sorbonne et condisciple du grand Bossuet, M. Jacques de Fieux fut appelé à. succéder à André du Saussay sur le siége de Toul. Il fut sacré à Paris, à l'âge de 56 ans, par l'archevêque du Harlay, et fit son entrée dans sa ville épiscopale, le 19 août 1677.

M. de Fieux suivit les exemples de son sage prédécesseur ; il encouragea et propagea l'instruction dans le clergé et dans les autres classes de la société ; il étendit et compléta l'œuvre de M. de Gournay, en faisant construire les bâtimens du grand Séminaire sur l'emplacement de la maison du Saint-Esprit. Quoique modeste, il veilla avec soin au maintien de ses priviléges. A l'exemple des évêques ses prédécesseurs, il prenait le titre de comte de Toul, et ce titre lui ayant été contesté par le Procureur-général du Parlement de Metz, i en référa au conseil du Roi; là, ayant prouvé que, depuis un tems immémorial, les évêques de Toul jouissaient du droit de le porter, il obtint un arrêt qui le lui confirma. Excellent orateur et

théologien du premier ordre, M. de Fieux publia un livre sur l'usure et le prêt à intérêt, qui fut très estimé alors, et des statuts synodaux qui restèrent en vigueur dans le diocèse de Toul jusqu'à la suppression du siége.

Ce Prélat étant allé à Paris pour chercher dans la médecine des soulagemens à ses infirmités, y mourut le 15 janvier 1687, après avoir institué pour héritiers dans son testament les pauvres et le séminaire de la ville de Toul.

HENRY DE THYARD DE BISSY,

QUATRE-VINGT-SEPTIÈME ÉVÊQUE.

(1687.) M. de Bissy était fils de M. Claude Thyard de Bissy, lieutenant-général des armées du Roi, et commandant supérieur de la province des Trois Évêchés. Louis XIV le nomma évêque de Toul en 1687, mais ce nouveau Prélat ne reçut ses bulles que près de six ans après, par suite des différens survenus entre le pape Innocent XI et la cour de France. M. de Bissy était un évêque d'un mérite éminent et d'une modestie extrême.

Cette dernière vertu le porta à refuser l'archevêché de Bordeaux, auquel le Roi voulut le nommer en 1692. Il eut de longues contestations avec la cour de Lorraine, au sujet de la juridiction ecclésiastique. Ayant fait imprimer à Toul, en 1700, le rituel du diocèse composé par Claude de Laigle, grand archidiacre de la Cathédrale, Léonard Bourcier, procureur-général de Lorraine présenta une requête à la cour souveraine de Nancy, aux fins de ne permettre la publication dudit rituel qu'avec certaines limitations.

La même année, dans un mémoire adressé aux doyens ruraux de son diocèse, M. de Bissy prétendant que les ecclésiastiques, pour toutes actions personnelles, civiles et criminelles, étaient obligés, sous peine de censures, de décliner la compétence des tribunaux séculiers, le même procureur-général soutint que cette doctrine ne tendait à rien moins qu'à soustraire les ecclésiastiques à l'autorité des princes, et la Cour rendit un arrêt conforme aux conclusions de ce magistrat. Enfin, en 1701, le duc Léopold ayant publié son code sur l'administration de la justice dans ses états, Thyard de Bissy déféra ce code à Clément XI, comme renfermant plusieurs propositions contraires à la liberté de l'Église; celui-ci condamna ce livre et en défendit l'usage et la lecture sous peine d'excommunication. Léopold se plaignit à Clément XI de la violence de son procédé, et écri

vit en même tems à l'évêque de Toul pour lui demander les raisons qui avaient inspiré sa démarche. L'Évêque répondit par une grande lettre au Duc, dans laquelle il fit valoir, entre autres griefs, les entraves que les officiers de son Parlement ne cessaient d'apporter aux libertés de l'Église. Le Prince et le Prélat convinrent ensemble que des conférences auraient lieu à la Malgrange, pour tâcher d'aplanir ces difficultés; mais on ne put y réussir, et M. de Bissy quitta le diocèse avant de les avoir terminées.

La querelle des juridictions entre les évêques de Toul et la cour souveraine de Lorraine remontait à l'établissement de cette dernière, et se perpétua jusqu'à l'érection d'un siége épiscopal à Nancy.

Cette collision pénible était-elle le résultat des prétentions illégales de deux pouvoirs jaloux, ou l'effet de l'absence de droits bien définis, ou provenait-elle, du côté du Parlement et des princes lorrains, notamment sous les règnes de Charles IV, de Charles V et de Léopold, de l'obligation de se soumettre à l'autorité exercée dans le duché par un prélat étranger, par un évêque français? C'est ce que nous n'entreprendrons pas de décider. « L'évêque du Saussay, dit l'auteur de la Défense de l'Église de Toul, se vit continuellement en butte aux contradictions d'un prince prévenu contre son Église, (Charles IV), et qui mit tout en œuvre pour saper la juridiction épiscopale dans ses états. Les ar

rêts des parlemens de Metz, de St.-Mihiel et du conseil du Roi, des années 1661, 1663, 1664 et 1665, prouvent à quels excès on porta ces entreprises. Heureuse encore l'Église de Toul, si ces entreprises eussent fini avec le règne de ce prince! Mais l'on ne sait que trop avec quelle force et quelle étendue on les a renouvelées de nos jours, (en 1727), sans que depuis trente ans, ni les plaintes, ni les remontrances, ni les prières, ni même les conférences, où elles ont été examinées sous les derniers évêques, les aient pu terminer. On a même poussé ces entreprises jusqu'à ôter aux évêques la liberté d'exercer en Lorraine aucun acte de juridiction sans la permission des juges laïques, et d'y faire signifier aucune ordonnance, jugement ou monitoire, sans un pareatis de la cour souveraine, et sans le ministère de ses huissiers; et lorsque les évêques, ou quelques particuliers l'ont voulu faire autrement, on a emprisonné leurs officiers, leurs appariteurs, ou décerné des prises de corps contr'eux 1. »

Quoiqu'il en soit, Léopold, dans l'espérance qu'un autre évêque serait plus conciliant que M. Thyard de Bissy, sollicita du Roi le changement de ce Prélat, et Louis XIV, pour plaire au duc de Lorraine, nomma M. de Bissy, en 1704,

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