Page images
PDF
EPUB

toute la décence et la dignité possibles. Je n'en attendais pas moins de votre zèle pour la gloire de la religion, pour l'avancement de la piété, et pour le salut des ames. Il n'est point de culte, en effet, plus utile et plus nécessaire même dans un siècle comme le nôtre, où la foi ne fut jamais plus combattue par la présomption et l'ignorance. Qu'elle conserve du moins son principal appui dans la tendre reconnaissance qui est due au divin Rédempteur, qui en nous commandant la foi, nous l'inspire si efficacement, par l'amour dont son cœur est embrasé pour nous.

» Je ne puis assez vous témoigner combien je suis charmé en mon particulier du culte que vous ordonnez envers ce cœur adorable; et celle-ci n'étant à autre fin, je prie Dieu qu'il vous ait, Monsieur l'évêque de Toul, dans sa sainte et digne garde.

» Écrit à Lunéville, ce 14 novembre 1763.

STANISLAS, Roi. »

XAVIER DE CHAMPORCIN,

QUATRE-VINGT-ONZIÈME ET DERNIER ÉVÊQUE.

(1774.) Pendant trois cents ans les bourgeois et les évêques de Toul avaient presque toujours été en opposition les uns avec les autres pour des motifs politiques, et à peine une querelle était-elle terminée qu'une autre renaissait; mais une fois devenus Français, nos pères et leurs prélats furent contraints de se soumettre à l'autorité toute-puissante d'un gouverneur royal, et les questions de pouvoir public dans la ville de Toul n'ayant plus occasion d'être agitées, et les troubles de la ligue étant éteints, la paix et l'harmonie reparurent naturellement et se continuèrent sous les six épiscopats illustrés par les du Saussay, les de Fieux, les de Bissy, les de Camilly, les Bégon et les Drouas. C'est donc avec un étonnement mêlé de regrets que nous allons voir cette concorde troublée de nouveau sous le dernier de nos évêques, et succéder sur le siége de Toul aux personnages éminens que nous venons de citer, un prélat qui, malheureusement, nous sommes forcés d'en convenir, ne déploya ni le même amour pour les Toulois, ni le même zèle pour la prospérité du pays.

On sait déjà que depuis plusieurs siècles le vaste diocèse de Toul était menacé d'un démembrement; que maintes fois les ducs de Lorraine mirent tout en œuvre pour obtenir dans leur capitale et à SaintDié l'érection d'un siége épiscopal, et que la politique de la France s'y opposa constamment. Sous le règne de Stanislas, des tentatives furent faites auprès de MM. Bégon et Drouas, à l'effet de leur arracher un consentement dont on ne pouvait se passer, selon les constitutions de l'Église, pour morceler leur diocèse, consentement qu'ils refusèrent de donner l'un et l'autre de la manière la plus positive. A la mort du dernier de ces évêques, des démarches pressantes furent faites auprès de Louis XV, par M. Hector de Sabran, primat de Nancy et grandaumônier de la Reine, conjointement avec M. de la Galaizière, prévôt de la Collégiale de SaintDié, secondés et fortement appuyés par le fameux de Calonne, alors intendant de la province des Trois-Evêchés. Louis XV promit son assentiment à l'érection de deux nouveaux siéges, et le bruit se répandit à Toul que la nomination de M. de Champorcin venait d'être effectuée sous la condition qu'il ne s'opposerait pas au démembrement. Ce prélat, originaire de la Provence, et ancien évêque de Senez, arriva dans cette ville sous les préventions les plus défavorables. La nouvelle du démembrement causa dans Toul une consternation générale, et les officiers municipaux s'empressèrent d'exposer dans

un mémoire au Ministre les tristes effets de cet acte désastreux. Voici comment ils s'exprimaient :

De tous les événemens qu'a jamais éprouvés la ville de Toul, il n'en est point qui lui prépare un sort plus accablant que la division du Diocèse.

» Témoins des alarmes des citoyens de cette ville et des habitans des campagnes voisines sur la ruine inévitable et prochaine dont ils sont menacés par ce démembrement et par l'érection d'un siége épiscopal à Nancy et à Saint-Diez, il n'est pas possible aux officiers municipaux de fermer les yeux sur le tableau des suites funestes que doit entraîner un événement aussi malheureux pour cette partie de la province.

. Il est douloureux pour nous d'être si près voisins d'une ville qui veut s'ériger en capitale, d'une ville qui vient de s'enrichir des dépouilles de Metz et de Pont-à-Mousson, par la translation du Parlement et de l'Université; d'une ville riche et commerçante qui peut subsister sans tous ces avantages, qui veut tout engloutir, dépeupler le voisinage et enlever à la ville de Toul le seul mérite qui lui reste, et tout à la fois la seule ressource qu'elle a pour faire subsister ses habitans et ceux des villages voisins.

• Pourrons-nous voir d'un oeil sec deux villes se disputer à l'envi la gloire de nous ruiner de fond. en comble et s'illustrer par nos malheurs !

»

Étions-nous destinés à faire le triomphe de la ville de Nancy, qui était anciennement sous notre juridiction et qui faisait partie de notre ressort!

[ocr errors]

Étions-nous réservés à voir une petite ville inconnue telle que Saint-Diez, qu'on peut avec justice qualifier de bourgade, marcher d'un pas égal avec la ville de Toul, qui est une des plus anciennes de la Gaule belgique!

[ocr errors]

Capitale d'une grande province dès le tems de Jules César, elle a eu les Romains pour maîtres, et successivement les premiers rois de France. Son territoire est devenu l'apanage des enfans de Clovis, Les rois l'ont possédée jusque sous la deuxième race, tems auquel il fut détaché de la France, néanmoins toujours sous sa protection.

» Dès les premiers siècles de l'Église, la ville de Toul fut en possession d'avoir un siége épiscopal; elle a seule la gloire d'avoir établi les premiers fondemens de la religion sur le trône français; Clovis, premier roi chrétien, ayant fait vou de recevoir le baptême, se fit instruire par saint Vaast, prêtre de la Cathédrale de Toul, qui le conduisit à Rheims où il fut baptisé par saint Remy.

» Ce fait, en même tems qu'il prouve l'ancienneté d'un siège épiscopal à Toul, est encore pour cette ville un titre d'en demander la conservation, tel qu'il a toujours subsisté.

En vain objecterait-on que le diocèse est trop

« PreviousContinue »