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pour voisines des villes plus riches et plus considérables! Si les premières possèdent quelques établissemens publics un peu avantageux, les secondes ne cessent de les convoiter, et tôt ou tard elles parviennent à les leur ravir, presque toujours au mépris des droits les plus légitimes 1.

De ce moment, la ville de Toul changea de face: d'épiscopale, d'ecclésiastique et d'éminemment religieuse qu'elle était en général, elle devint purement civile ct presque indifférente en matière de religion. L'ancien prestige de grandeur et même de sainteté qui l'entourait depuis si long-tems disparut sans retour; elle ne fut plus qu'une ville de souvenirs. Capitale autrefois d'un petit état, et siége du plus grand diocèse de France, elle perdit ces anciens titres pour recevoir celui de chef-lieu de district ou d'arrondissement.

1 Le siége épiscopal de Toul avait donc implanté dans notre soi des racines de quatorze siècles; Nancy nous en a dépouillés. En 1822, Nancy, dont l'arrondissement était déjà deux fois plus populeux que le nôtre, nous enleva nos sept plus belles communes, pour les ajouter encore au sien. Une décision ministérielle avait fixé à Toul l'école normale de la Meurthe; elle n'y resta pas deux ans, Nancy se l'appropria en 1831. Nous ne faisons pas ici la guerre à notre belle voisine, nous avons oublié le passé, et nous voulons vivre avec elle en bonne harmonie; d'ailleurs, nous n'avons plus rien qui soit digne d'exciter sa convoitise, si ce n'est peut-être notre cathédrale ; mais nous espérons qu'elle voudra bien ne pas nous l'enlever,

HISTOIRE

DE

TOUL.

PÉRIODE DE 1790 A 1840.

Un décret de l'Assemblée nationale du 23 août 1790, sanctionné par le Roi, le 11 septembre suivant, déclara qu'il n'y aurait plus pour la ville de Toul que deux paroisses, savoir: celle de SaintÉtienne, qui serait desservie dans l'église ci-devant Cathédrale, et celle de Saint-Gengould, qui serait desservie dans l'église ci-devant collégiale de ce nom. En vertu de ce décret, les six anciennes paroisses de Toul furent donc supprimées. C'étaient celle de Saint-Jean, dont l'entrée était située dans le cloître de la Cathédrale; celle de SainteGeneviève, rue du Parge, contiguë au palais épiscopal; celle de Saint-Agnan, qui n'était autre que l'église des chanoines réguliers de Saint-Léon; celle de Saint-Amand, sur l'emplacement de laquelle a

été bâtie, en 1822, la nouvelle Halle au blé; celle de Saint-Pierre, placée au milieu du faubourg Saint-Mansuy, et dont le bâtiment qui existe encore est devenu la propriété d'un particulier; enfin celle de Saint-Maximin, au faubourg Saint-Èvre. Toutes ces églises ou paroisses sont aujourd'hui démolies, à l'exception de celle de Saint-Pierre. Pour mieux approprier la Cathédrale à sa nouvelle destination, on abattit le jubé ou tribune qui coupait la nef en deux parties, et on supprima le choeur des chanoines qui était en avant de l'autel et qui régnait entre les quatre derniers piliers jusque sous le jubé. La ville et sa banlieue furent divisées en deux parties, dont chacune forma la dépendance de l'une des deux paroisses 1.

Le premier juin 1791, M. Lalande, évêque constitutionnel de la Meurthe, venant de Paris et allant à Nancy prendre possession de son siége, s'arrêta à Toul, et fut reçu avec solennité par les autorités municipales. Celles-ci lui offrirent, à l'Hôtelde-Ville, un banquet de trente couverts.

Dans le cours de cette année, tous les monastères et abbayes de la ville et des faubourgs se dépeuplèrent insensiblement. Une grande partie des religieux et des religieuses vinrent à la Mairie, faire la déclaration exigée par la loi du 13 février, en vertu de

M. Aubry fut élu curé constitutionnel de Saint-Étienne, et M. Roussel le fut de Saint-Gengould,

laquelle ils annonçaient l'intention de renoncer à la vie commune, et de rentrer dans la vie civile.

De tous ces établissemens laissés vides, et dont les constructions étaient si vastes et si régulières, trois seulement furent affectés à des services publics. Ce furent l'abbaye de Saint-Léon, où l'on plaça le collége de la ville; le couvent des dames du SaintSacrement, dont on fit un quartier pour la gendarmerie, et le palais épiscopal que la ville échangea avec l'État contre la maison Commune située sur la place du Marché.

La Constitution ayant été décrétée le 3 septembre 1791, une lecture solennelle de cet acte eut lieu dans les rues et faubourgs de la ville; les officiers municipaux vinrent ensuite le déposer en grande cérémonie sur un autel élevé dans la nef de la Cathédrale, et y assistèrent à un Te Deum.

A l'Assemblée nationale succéda l'Assemblée législative, à laquelle le département de la Meurthe envoya, au nombre de ses députés, Joseph Carez, imprimeur à Toul, l'un des inventeurs de la stéréotypie. Joseph Carez fut membre du comité des assignats, à la confection desquels il apporta le tribut de ses lumières dans l'art typographique 1.

C'est en 1785 que Joseph Carez commença ses premiers essais d'éditions qu'il appela d'abord omotypes, pour exprimer la réunion de plusieurs types en un seul. Il fut encouragé dans ses travaux par trois de ses amis, Caffarelli,

L'année 1792 vit éclater les premières hostilités entre la France et les puissances du Nord. C'est en mai que s'ouvrit cette longue période de combats et de triomphes qui portèrent si haut la gloire de nos armes, et le premier général français, tué sur le champ d'honneur, au début de nos campagnes, fut un Toulois, Jean-Baptiste Gouvion, général de brigade dans le corps d'armée de Lafayette, et frère de ce Louis Gouvion qui était mort si glorieusement devant Nancy, deux ans auparavant. Dumouriez, alors ministre de la guerre, fit l'éloge du général Gouvion, à la tribune de l'Assemblée législative, et celle-ci exprima dans son procès-verbal les regrets qu'elle éprouvait de la perte de ce généreux citoyen 1.

qui devint préfet de l'Ardêche, Curel, qui était capitaine du génie et directeur des fortifications à Toul, et Thouvenin, ancien échevin de cette ville. Carez, entre autres livres, imprima avec sa méthode une bible (la vulgate) qui est considérée comme un chef-d'œuvre en ce genre. « Ce que je viens d'exposer, dit Camus dans son Histoire du polytypage, assure au citoyen Carez une des premières places parmi les artistes qui ont fait des tentatives heureuses dans la stéréo, typie. » Joseph Carez fut le premier sous-préfet de Toul. Nommé en 1801, il mourut la même année.

'Jean-Baptiste Gouvion naquit à Toul en 1747; il fit la guerre d'Amérique sous Lafayette, qui l'estimait et l'aimait beaucoup. En 1789, il fut nommé major-général de la garde nationale de Paris. En 1791, il fut chargé d'aller donner

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