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stantia, dit Dumoulin, préface, no 115, in sold fidelitate quæ est ejus forma essentialis, subsistit. Cætera vero dependent à pactis et tenore investituræ.—La fidélité constatée par l'hommage était donc un signe essentiellement caractéristique de la convention féodale, quoique assurément au dix-huitième siècle, l'hommage ne fût plus depuis longtemps qu'une vaine cérémonie (Championnière, Eaux courantes, no 342).-Les jurisconsultes n'en considéraient pas moins cette cérémonie comme constitutive du lien féodal et essentielle au fief. On n'aurait qu'une idée incomplète de la théorie de ce contrat, si l'on ne connaissait pas l'opinion qu'en avaient les feudistes : « L'acte solennel, dit Hervé (cod., t. 1, p. 371), que nous appelons hommage et qui, comme nous l'avons vu, est une action réglée depuis tant de siècles, prouve bien que les caractères propres et distinctifs de la féodalité, est d'entretenir sans cesse dans le cœur du vassal, une reconnaissance toujours active pour son seigneur, et de lui remettre perpétuellement sous les yeux la main de qui il a reçu ce qu'il tient. Aussi au moment où cette reconnaissance cesse, au moment où le vassal méconnalt son seigneur, le lien moral qui les unissait est rompu, et il n'y a plus de rapport féodal entre eux. Aucun autre contrat qui transfère d'une manière quelconque la propriété ou la possession d'une chose, ne porte les mêmes caractères. La donation exige bien une reconnaissance de la part du donataire; s'il se montrait ingrat envers son bienfaiteur, d'une manière révoltante et caractérisée, il pourrait perdre le don qu'il en aurait reçu; mais cette obligation de reconnaissance et cette peine d'ingratitude ne passent pas au delà de la personne du donataire, encore n'exige-t-on pas de lui des actes positifs et formels de reconnaissance... : de tous les contrats il n'y a donc que le fief qui exige une reconnaissance perpétuelle. C'est là la différence propre et caractéristique. >> Nul doute que la stipulation de foi et hommage ne fût en conséquence un droit essentiellement féodal; aussi la loi des 15-28 mars 1790 portait expressément tit. 1, art. 2: « La foi, hommage et tout autre service purement personnel auquel les vassaux, censitaires et tenanciers ont été assujettis jusqu'à présent, sont abolis. »

304. Les aveux et reconnaissances n'étaient pas exclusifs aux contrats féodaux toute transmission précaire et perpétuelle emportait la nécessité d'un acte renouvelé à certaines époques, pour conserver le droit du seigneur, lequel ne possédant que par autrui, était naturellement exposé à voir s'effacer les preuves de son droit. La stipulation d'une reconnaissance n'était donc pas caractéristique et se retrouvait dans les contrats purement fonciers; nous en parlerons plus au long.

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305. Lorsque les fiefs n'étaient assujettis qu'à l'aveu ou à la reconnaissance, ils devaient toujours l'hommage qui se réduisait alors à ce qu'on appelait la bouche et les mains. Cette expression s'explique par les formalités de l'hommage, qu'il est au moins intéressant sous le rapport historique, de conserver. L'art. 63 de la coutume de Paris traçait ainsi les formes de l'hommage « Le vassal, pour faire la foi et hommage et ses offres à son seigneur féodal, est tenu aller vers ledit seigneur, au lieu dont est tenu et mouvant ledit fief, et y étant, demander si le seigneur est au lieu, ou s'il y a autre pour lui ayant charge de recevoir la foi et hommage et offres. Et ce faisant, doit mettre un genou en terre, nue tête, sans épée ni éperons, et dire qu'il lui porte et fait la foi et hommage qu'il est tenu de faire à cause dudit fief mouvant de lui; et déclarer à quel titre ledit fief lui est avenu, le requérant qu'il lui plaise le recevoir. »

306. Lorsque l'obligation de l'hommage n'était pas accompagnée de celle d'un droit utile, dont le vassal, aux termes de l'article sus-transcrit, devait faire offre, l'hommage consistait dans ce qu'on appelait la bouche et les mains. Les auteurs n'étaient pas d'accord sur le sens propre et rigoureux de ces termes; on convenait généralement qu'anciennement le vassal mettait ses mains entre celles du seigneur en signe d'alliance ou plutôt de soumission. Quelques coutumes, et notamment celle de Bretagne, art. 333, exigeaient encore cette attitude de dévouement. Quant au mot bouche, bien des commentateurs pensaient qu'il désignait un baiser que le seigneur donnait au vassal, qui présentait la bouche pour le recevoir. Les auteurs entraient à cet égard dans des détails curieux; les uns faisaient une distinction entre les nobles et les roturiers; on ne faisait point à ceux-ci

V.

l'honneur de les baiser. Dumoulin, sur l'art. 3 de la coutume de Paris, nous apprend qu'il avait été jugé que par bienséance, les femmes pouvaient faire hommage sans présenter le baiser. au surplus le Glossaire de Ragueau et la note de Delaurière, vo Bouche et mains.

307. L'obligation de l'hommage était de rigueur et necessa pas d'être exigée jusqu'aux derniers temps du régime féodal. Les auteurs ne font pas savoir si les formalités prescrites par la coutume de Paris étaient observées; il est à croire que la signification par écrit avait été généralement substituée à ces formes, qui répugnaient évidemment aux mœurs de cette époque. Mais l'hommage lui-même ne tomba point en désuétude à cause de la 1econnaissance essentielle au droit du seigneur qu'il contenait.— Cette formalité fut maintenue rigoureuse dans certains flefs, nommés fiefs de danger, consacrés par un assez grand nombre de coutumes, et dans lesquels tout nouveau vassal qui se mettait en possession avant d'avoir accompli l'hommage, perdait son fief. Les auteurs de l'ancien Répertoire, vo Fief de danger, demandent la suppression de ces règles avec trop d'insistance pour qu'il n'en résulte pas qu'à l'époque où ils écrivaient la loi coutumière ne fût encore en pleine vigueur et fréquemmment exécutée.

308. Aussi la loi des 15-18 mars 1790 ne se contenta pas d'abolir la formalité de la foi et hommage, ce qui supprimait virtuellement la condition des fiefs de danger, mais encore elle porta, art. 3: « Les fiefs qui ne doivent que la bouche et les mains ne sont soumis à aucun aveu pi reconnaissance. »> Ainsi la directe, réduite au seul élément de l'hommage, disparaissait complétement et ne subsistait plus même à l'état de droit abstrait, et le dernier lien du vassal au seigneur étant détruit, le fief s'évanouissait.

309. Non-seulement la fidélité constatée par l'hommage était caractéristique du fief, mais encore cette condition était essentielle, comme on vient de le voir. Il en résultait qu'un contrat, quelle que fût sa qualification, n'était pas un fief, s'il ne contenait pas le devoir de fidélité. Cette considération est décisive dans un arrêt où elle est ainsi exprimée: «que ce contrat n'est pas un bail à fief, parce que, suivant les principes du droit allemand, il n'y a pas, il ne peut pas y avoir de convention de ce genre sans une clause expresse qui ne se rencontre pas dans l'espèce » (Cass. 10 fév. 1806, MM. Malleville, pr., Zangiacomi, rap., aff. Hertzeis C. enreg.).— Ce qui était particulier au droit allemand, invoqué par l'arrêt, c'était la nécessité que la stipulation de la fidélité fût expresse; mais le devoir de la fidélité était essentiel partout, quoique la stipulation ne fût pas partout exigée.

310. Les expressions amé, féal, employées dans les actes, ne supposent pas nécessairement la fidélité ou l'obligation de foi et hommage. Il ne faut pas confondre d'ailleurs la fidélité promise au seigneur féodal, avec celle que tout sujet doit et promet à son supérieur dans la hiérarchie administrative. La fidélité du sujet était purement personnelle, celle du vassal, purement réelle. Il en résultait que les concessions faites par un supérieur à un inférieur, pouvaient mentionner ou supposer la fidélité de sujet, sans être essentiellement féodale.

311. Il en était de même de l'investiture, et par conséquent des rénovations d'investiture. L'investiture n'était pas autre chose que la tradition ou mise en possession du preneur par le bailleur ; féodale ou censuelle dans le fief ou la censive, elle était purement foncière dans les emphyteoses ou baux à rente foncière. La nécessité de l'investiture des nouveaux possesseurs était même essentielle à l'emphytéose, et, comme nous le dirons tout à l'heure, expressément établie par la loi romaine.—Cette condition soit implicite, soit expresse, n'emportait donc pas par elle-même la féodalité du contrat, lors même que la rénovation d'investiture était accompagnée d'une perception. C'était la condition de presque tous les contrats de l'ancien régime, et son exécution avait engendré la théorie des droits de mutation, sur laquelle les feudistes ont écrit de volumimeux ouvrages, dont l'étude est aujourd'hui fructueuse pour l'application des lois fiscales en matière d'enregistrement.

312. L'origine des droits de mutation remonte selon toute apparence aux impôts établis par Auguste et Caracalla. Per

dant toute la durée du régime seigneurial, les coutumes et les titres particuliers ont présenté des droits de mutation faisant partie des justicies seigneuriales (V. Championnière, Eaux courantes, no 188 et suiv.). Des droits semblables ou analogues se percevaient également dans le fief; nous avons déjà fait observer qu'une multitude d'actes d'inféodation du dixième siècle portaient stipulation au profit du bailleur des mêmes droits que percevait le seigneur justicier dans la localité. Beaumanoir, aux coutumes de Beauvoisis, chap. 27, indiquait le droit de quint comme féodal : « Quand héritage est vendu, se il est fief, li sire a le quint denier du prix de la vente. »>

313. La perception du droit de relief et de lods et ventes ou quint, les premières sur les successions, les secondes sur les mutations entre-vifs, fut réglée par les coutumes, et devint à peu près le principal produit des fiefs et des censives. Ces droits constituaient avec les rentes et redevances annuelles, les droits seigneuriaux utiles, et formaient l'objet principal des obligations du vassal ou du censitaire; c'était à peu près le but unique du contrat, lorsque les services militaires cessèrent d'être une nécessité de l'existence sociale. La loi des 15-28 mars 1790, tit. 3, art. 1 et 2, les soumit au rachat, en ces termes : «< Seront simplement rachetables,... tous les droits casuels qui, sous le nom de quint, requint, treizième, lods et treizains, lods et ventes, ventes et issues, mi-lods, rachats, venterolles, reliefs, relevoisons, plaids et autres dénominations quelconques, sont dus à cause des mutations survenues dans la propriété ou la possession d'un fonds, par le vendeur, l'acheteur, les donataires, les héritiers et tous autres ayants cause du précédent propriétaire ou possesseur. »

314. Dans cette loi, les droits de cette espèce étaient présumés, sauf la preuve contraire, être le prix et la condition d'une concession primitive de fonds. Cette hypothèse n'était pas, comme nous venons de le faire observer, rigoureusement conforme à l'histoire; mais cette considération ne fut pas le motif déterminant de la loi du 18 juin 1792, qui déclara les mêmes droits, supprimés sans indemnité, « à moins que lesdits droits ne soient justifiés par le titre primitif d'inféodation, d'acensement ou de bail à cens, être le prix et la condition d'une concession du fonds pour lequel ils étaient perçus, auquel cas lesdits droits continueront d'être perçus et d'être rachetables. » — On voit que la disposition suppressive des droits primitivement reconnus rachetables et consacrée définitivement par la loi du 25 août 1792, pour tous les droits seigneuriaux, avait d'abord séparément frappé les droits casuels.

315. Les droits casuels dont il vient d'être parlé, n'étaient pas exclusivement attachés aux contrats féodaux; ils existaient également dans l'emphytéose. Justinien avait sanctionné (Cod., De jure emphyt.) la perception du droit de 2 p. 100 du prix des ventes opérées par l'emphytéole comme prix du consentement imposé au propriétaire. Cette disposition était probablement l'origine des droits de mutation perçus sur les censives seigneuriales. Mais, en présence des lois abolitives de la féodalité, les

(1) (Les hospices de Châlons C. Aublin). — NAPOLÉON, etc., — Vu les requêtes présentées, les 18 mai et 1er juin 1807, par la commission des hospices de Châlons, département de la Marne, tendantes à l'annulation d'un arrêté du conseil de préfecture du même département, du 18 déc. 1806, qui abolit, comme féodale, une rente de 75 fr., due par le sieur Aubin, aux hospices de Châlons, en vertu d'un titre constitutif du 28 sept. 1546, d'une transaction du 11 mars 1683, et d'une autre transaction du 1er vent. an 11, par laquelle la demoiselle Aublin s'est reconnue débitrice de cette rente, et a été, en même temps, déchargée des arrérages; Considérant que les expressions de cens, emportant lods et ventes, défaut et amendes, ne laissent aucun doute sur l'origine et la nature féodale de la redevance, et que la demoiscile Aublin n'ayautoint transigé dans l'acte du 1er ventôse an 11, sur la question de la féodalité, n'a par conséquent point renoncé au bénéfice de la loi du 17 juillet 1793; Les deux requêtes présentées par la commission des hospices de Châlons, département de la Marne, sont rejetées.

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Du 24 juin 1808.-Décr. du c. d'Etat.

(2) Espèce:- Archantebebère et autres C. de Ruthie.) - Le tribunal civil de Saint-Palais, par jugement du 23 therm. an 11, et la cour de Pau, par arrêt confirmatif du 17 janv. 1807, avaient maintenu des redevances auxquelles étaient annexés des droits de lods et ventes, des

droits attachés à l'emphyteose furent considérés comme ayant le même caractère que ce contrat, et en conséquence leur existence ou stipulation ne supposèrent pas la nature féodale à la convention. La jurisprudence reconnut aux droits casuels de l'emphytéose la même nature qu'à la directe emphyteotique, et fit application des lois abolitives suivant qu'elle rencontra dans les conventions les conditions de la féodalité ou de la stipulation purenient foncière. Dans les arrêts que nous devons examiner, nous retrouverons la même distinction que nous avons vue dans la jurisprudence relative aux redevances annuelles; la décision est le plus souvent déterminée par le caractère du concédant, seigneur ou simple propriétaire, par la nature de la terre, noble ou roturière, par la règle contumière, allodiale ou soumise à la maxime nulle terre sans seigneur.

316. L'influence des décrets des 7 mars 1808 et 2 fév. 1809 se fait profondément sentir sur la jurisprudence, à l'égard des droits de mutation; nous avons rapporté ces décrets suprà, n° 158, et discuté leur importance sous le rapport du caractère des concédants et de la nature des terres concédées. Nous devons faire ici quelques observations sur le sujet particulier dont nous nous occupons. -Les décrets semblent se rattacher à trois systèmes différents, en ce qui concerne les droits de lods et ventes et leur influence sur les contrats litigieux. Dans celui du 25 niv.an 13 (V. eod.), le caractère féodal est reconnu à la stipulation des lods et ventes, mais le législateur n'en déduit pas l'abolition des rentes établies par le même titre; il décide seulement qu'elles seront à l'avenir servies sans la charge des lods. Le décret du 7 mars 1808 interpréta le précédent et déclara qu'il ne s'appliquait qu'aux emphyteoses à terme, et non aux emphyteoses perpétuelles.

317. De cette décision résultait cette conséquence que les lods et ventes étaient essentiellement féodaux, dans quelques contrats qu'ils fussent stipulés, encore que ceux-ci fussent purement fonciers; en effet, s'ils n'eussent point eu ce caractère aux yeux du législateur, on ne voit pas pourquoi il les eût déclarés supprimés dans les emphytéoses à terme. Mais alors pourquoi leur suppression n'entraînait-elle pas celle de ces derniers contrats, par suite du mélange avec des droits féodaux? Sur ces nouvelles difficultés intervint le décret du 2 fév. 1809, qui décida « que toutes les redevances perpétuelles établies par des titres qui portent en même temps stipulation de lods et ventes, sont comprises dans les abolitions sans indemnité, quelle que soit la qualité de la personne au profit de laquelle les redevances ont été établies. >>

318. Il résultait évidemment de ces décrets que les lods et ventes infectaient de leur annexe les contrats dans lesquels ils étaient stipulés et en caractérisaient la féodalité. Une décision confirme cette interprétation (cons. d'Et. 24 juin 1808) (1). — Un arrêt considère également l'annexe des droits de lods et ventes comme constitutive de féodalité et devant, par suite, entrainer l'abolition des redevances auxquelles ces droits se trouvaient annexés (Cass. 27 fév. 1809) (2). Cet arrêt suppose expressément que les lods et ventes « ne pouvaient légalement émaner

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droits de banalité, etc.; ces décisions étaient fondées sur ce que les redevances étant établies en pays de franc-alleu où le seigneur qui les possédait n'avait point de directe, n'étaient point féodales.

Pourvoi en cassation pour violation de l'art. 1, et fausse application de l'art. 2 de la loi du 17 juill. 1793. Arrêt.

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LA COUR;-Vu les art. 1 et 2 de la loi du 17 juill. 1793;-Considé rant que si de l'art. 1, chap 1 de la coutume de Sole, on peut co. clure que le pays régi par cette coutume était un pays de franc-alleu, il n'en résulte autre chose, sinon que, sous le ressort de cette coutume, comme sous celui des coutumes les plus allodiales, il n'y avait pas de seigneur sans titre; Considérant que, les guerres civiles et religieuses ayant détruit, dans cette contrée, les titres des différents propriétaires, il fat passe, en 1628 et 1629, différentes reconnaissances, dans lesquelles l'un des auteurs du sieur de Ruthie traite et stipule, en qualité de seigneur direct, des maisons et dépendances dont il s'agit; il y parle des droits dus à la maison de Ruthie, seigneurs et dames d'icelle de leur côté, les tenanciers reconnaissent leurs maisons et terres mouvantes de la directité de la maison noble de Ruthie ; ils y déclarent qu'ils ont accoutumé de payer annuellement aux seigneurs et dames de ladite maison des redevances en grains et de faire des journées de travail pour faucher les prés et sarcler les blés : ils ajoutent qu'ils satisferont, en outre, à tous autres devoirs d'empnéotytes, tenanciers et @vatiers, suivant et conforme

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que de la puissance féodale, » et, dès lors, abolir les redevances | nécessairement supprimés. Ils ne sont donc censés s'y être réstipulées par le même contrat. Il est remarquable en ce qu'il ne rattache point sa décision aux principes des rentes mélangées de féodalité, principes que nous expliquerons plus loin, mais à l'esprit même des lois abolitives. C'est évidemment la même inspiration à laquelle se rattache le décret du 2 fév. 1809.

319. Ce que les décrets précités ont décidé pour le territoire d'Aix et, par suite, en thèse générale, un avis du conseil d'Etat, du 8 avr. 1809, l'a décidé pour le pays de Porentruy. Cette localité a fait partie de la France de 1793 à 1815, et appartient aujourd'hui au canton de Berne.

320. Un arrêt reconnut simple possession foncière les droits des seigneurs de Bâle et de leurs ayants cause, sur le territoire du Porentruy, dont ils avaient disposé par emphytéose. Les droits de lods et ventes, stipulés dans les contrats, furent considérés comme caractéristiques de l'emphytéose roturière (Cass. 10 fév. 1806, MM. Malleville, pr., Zangiacomi, rap., aff. Hertzeis. C. enreg.). M. Merlin argumentait à cet effet au décret du 9 vend. an 13, relatif aux départemnts de la rive gauche du Rhin, d'après lequel les droits de laudemium doivent être présumés purement fonciers, lors même qu'ils sont dus à des ci-devant seigneurs. «Que sont en effet, disait-il, les droits du laudemium? | Rien autre chose que des droits récognitifs de la directe. Les cidevant seigneurs à qui sont dus ces droits, ont donc anciennement concédé, avec réserve de la directe, les héritages sur lesquels ces droits sont assis. Mais quelle directe s'y sont-ils réservée en les concédant? Ce n'est sûrement pas la directe féodale, puisque, si cela était, leurs droits de laudemium seraient

ment à la coutume; c'est-à-dire qu'ils se soumettent à la juridiction du seigneur, suivant les art. 1 et 2, tit. 10 de la coutume, à payer des droits de lods et ventes; conformément aux art. 2 et 5, tit. 18, et à la banalité du moulin, d'après l'art. 3, tit. 12;-Qu'il résulte de là que ces redevances sont de véritables redevances seigneuriales ou qu'en tout cas elles sont entachées de féodalité;-Considérant que c'est en vertu du droit de banalité, consacré par la coutume et exercé par l'auteur du sieur de Ruthie, qu'il a été jugé, en 1747, par sentence de la cour de Licharre, confirmée le 5 juill. 1757, par arrêt du parlement de Pau, que le moulin construit par quelques-uns des auteurs des demandeurs serait démoli; qu'il fut donné acte au sieur de Ruthie qu'il ne prenait pas la qualité indéfinie de seigneur d'Aussuruc, et qu'il fut maintenu en la qualité de seigneur féodal et direct des maisons et dépendances comprises dans les reconnaissances; que défenses furent faites aux tenanciers de reconnaître d'autre seigneur direct et féodal ponr raison desdites maisons et dépendances; enfin, qu'on leur enjoignit de porter au sieur de Ruthie le respect qui lui était dû en sa qualité de seigneur; Qu'en supposant non Susceptible de contradiction tout ce que la cour d'appel établit pour affaiblir ou pour détruire les conséquences qui sortent de là contre le sieur de Ruthie, celui-ci n'en devait cependant pas être plus heureux. - En effet, l'esprit général de la législation relative à la suppression des droits féodaux, est d'en détruire toutes les traces, même dans ce qui, n'ayant pas pour base le pouvoir féodal, en réveillerait cependant l'idée par des stipulations qui en supposent l'existence, et qui ne pouvaient légalement émaner que de lui; Que c'est aussi dans ce sens que s'expliquent et l'avis du conseil d'Etat du 13 mess. an 13, et le décret du 23 avr. 1807; Considérant, dans l'espèce, qu'aux redevances en question, déclarées par les reconnaissances de 1628 et 1629, sont annexés des droits de lods et ventes, des droits de banalité et autres qui ne pouvaient légalement émaner que de la puissance féodale, et qui sont supprimés par les lois; que dès lors la cour d'appel de Pau, en maintenant ces redevances, sous le prétexte que le sieur de Ruthie ne les possédait pas à titre de seigneur direct, a contrevenu à l'art. 1, et a faussement appliqué l'art. 2 de la loi du 17 juill. 1795; - Casse, etc.

Du 27 fév. 1809.-C. C., sect. civ.-MM. Liborel, pr.-Vallée, rap. (1) (Salomon C. Belot.) LA COUR; Vu l'art. 1 de la loi du 18 juin 1792, qui place le droit de relief au nombre des droits qu'il supprime sans indemnité; - Et l'art. 1 de la loi du 17 juill. 1793, qui supprime également sans indemnité toutes redevances ci-devant seigneuria les; Vu aussi l'avis du conseil d'Etat du 13 mess. an 13;- Le décret du 23 avr. 1807, rendu à l'occasion des redevances provenant de concessions faites à titre de cens annuel et perpétuel, emportant lods et ventes, retenue, et tous autres droits censaux et seigneuriaux, quoique l'abbaye de Sainte-Bénigne de Dijon ne possédât pas lesdits terrains à titre de fief, et qu'il n'y eût aucun droit de seigneurie; Et l'avis du conseil d'Etat du 17 janv. 1809, approuvé le 2 fév. suivant; - Vu pareillement l'avis du 8 avr. suivant, rendu pour le ci-devant pays de Porentruy, qui, attendu que les emphythéoses perpétuelles y énoncées sont consenties par les bailleurs à titre de fief sous la réserve de la seigneurie, et avec la stipulation de lods et ventes à chaque mutation,

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servé que la directe emphytéotique. » Mais un avis du conseil d'État en décida autrement; prenant en considération l'avis précédent du 7 mars 1808, et celui du 2 fév. 1809, relatif aux hospices d'Aix, il déclara les emphytéoses du pays de Porentruy comprises dans l'abolition de la féodalité, « attendu que les titres représentent des emphytéoses perpétuelles, consenties par les bailleurs à titre de fief, sous la réserve de la seigneurie et avec la stipulation de lods et ventes à chaque mutation » (avis du cons. d'Ét. 8 avr. 1809). En conséquence, la cour de cassation a changé sa jurisprudence par divers arrêts qui ont jugé que doivent être déclarés supprimés comme féodaux ou mélangés de féodalité, 1o l'acte qui contient une réserve de seigneurie directe, un droit de lods et ventes, un de relief, et la soumission à la justice du bailleur pour toutes les contestations relatives à la terre concédée (Cass. 4 juill. 1809) (1); - 2o Celui qui contient la stipulation d'un droit de relief, et une soumission par le preneur à la justice du bailleur (Cass. 5 juill. 1809, aff. Thévenot, V. no 160-2o); 3o Le bail emphytéotique suivi d'une cession des héritages y énoncés, dans laquelle le bailleur est qualifié seigneur direct, et qui porte que les héritages sont dans sa mouvance, que le cessionnaire en jouira en nature de fief, qu'il sera payé un droit à chaque mutation par décès, et que le cessionnaire acquittera les autres charges féodales (même arrêt); 4o Celui qui est passé dans le pays de Porentruy, et où sont stipulés des droits de mutations, de relief, et la peine de commise, encore que celui qui a constitué la redevance ne se soit pas qualifié seigneur (Cass. 12 juill. 1809,

pense que « les emphythéoses existant dans le ci-devant Porentruy, et auxquelles se rapporte la décision ministérielle du 23 flor. an 11, sont comprises dans l'abolition de la féodalité, et que les dispositions de l'avis du 2 fév. leur sont applicables; »— - Et attendu que des dispositions de ces lois combinées avec les dispositions de ce décret et des avis du conseil d'Etat, dûment approuvés, rendus en interprétation, il résulte évidemment que toutes redevances emphytéotiques établies à perpétuité par des titres qui portent en même temps, soit des droits de lods et ventes à chaque mutation, soit réserve de seigneurie directe, sont, dans le ci-devant pays de Porentruy même, comme dans tous les pays de l'ancienne France, comprises dans l'abolition de la féodalité, quelle que soit d'ailleurs la dénomination du titre, ou la qualité de celui en faveur duquel ces redevances sont conseuties; - Attendu que la redevance emphyteotique, comprise au bail du 29 janv. 1745, et dont il s'agit, est de ce genre; et en effet: -1° Elle est dite à perpétuité; - 2o Elle contient une réserve de seigneurie, puisqu'elle soumet le preneur à l'obligation de reconnaître le bailleur comme seigneur direct de la terre gre→ vée de cette redevance; - 3o Elle est accompagnée d'un droit de lods et ventes, puisque le preneur s'oblige à payer un droit de deux sous par livre du prix de la vendition ou cession qu'il fera;-Attendu qu'il est stipulé, en outre, dans ce bail, un droit de relief, puisque le preneur s'y oblige, à chaque changement de main par décès, ou tout autrement, de reprendre cette terre, dans le délai de six semaines, des mains du bailleur, de lui payer à chaque reprise huit livres bâloises, et de renouveler alors la lettre de fief; - Attendu que le preneur s'oblige de plus, pour lui et ses successeurs, de prendre jugement du bailleur dans toutes les contestations qu'il aura à l'occasion de cette terre ;- Et que de cette soumission, il résulte que le bailleur avait un droit de justice sur cette terre, dont l'existence serait, au besoin, attestée notamment par la sentence arbitrale de 1486, jointe aux pièces et invoquée par le demandeur, droit éminemment féodal, et compris comme tel dans l'abolition du régime féodal; Attendu que si, comme le prétend le défendeur, à l'aide d'une transaction de 1492, postérieure à cette sentence arbitrale, mais dont la forme pourrait être critiquée, le chapitre de Saint-Ursanne a alors renoncé à tout droit de justice sur le territoire dans lequel est assise la terre sur laquelle est affectée cette redevance, il en résulterait alors que le chapitre aurait usurpé, en 1745, ce droit de juridiction qui avait cessé de lui appartenir, et se serait, dès lors, arrogé un devoir féodal, auquel il n'avait aucun droit, ce qui suffirait, d'après l'avis du conseil d'Etat, approuvé le 28 mess. an 13, et le décret du 23 avr. 1807, pour faire tomber cette redevance dans la suppression de la féodalité; - Attendu enfin que, de tout ce que dessus, il suit que la redevance emphyteotique dont il s'agit était, sinon seigneuriale de sa nature, du moins mélangée de droits et devoirs féodaux, et comprise, dans tous les cas, dans cette suppression; Et que l'arrêt attaqué, en confirmant purement et simplement le jugement dont était appel, qui avait déclaré cette redevance purement foncière, et ordonné que le payement en serait continué comme par le passé, a évidemment violé les lois, ainsi que le décret et l'avis du conseil d'Etat ci-dessus cités; Par ces motifs, casse.

Du 4 juill. 1809.-C. C., sect. civ.-MM. Gandon, pr.-Balille, rap.

aff. Charriotte, V. no 225). On doit remarquer sur ces arrêts, que le premier et le dernier statuent particulièrement, dans leurs motifs, pour le pays de Porentruy, tandis que celui du 5 juill. repose sur des considérations générales et suppose que, dans toutes les emphytéoses perpétuelles, la stipulation de lods et ventes est caractéristique de la féodalité et emporte l'application de la loi du 17 juill. 1793 Nous ferons néanmoins observer que l'avis du 8 avr. 1809 est moins absolu que celui du 2 fév. précédent, en ce qu'il considère que les emphytéoses dont il s'agit ont été consenties par le bailleur à titre de fiefs; en sorte que la question consiste à savoir si le bailleur est recevable à contester la qualité de fief que lui-même a donnée à la concession; c'est la même question que celle de savoir s'il peut contester la qualité de seigneur qu'il a prise dans l'acte, ce qui ramène le procès aux termes de l'avis du 13 mess. an 13, « que, lorsque le titre constitutif de la redevance ne présente aucune ambiguïté, celui auquel ce titre est opposé, ne peut pas être admis à soutenir qu'il n'avait pas de seigneurie. » — Ainsi, ces décrets ne font pas autre chose que mettre sur la même ligne la stipulation de lods et ventes, comme droits féodaux, et la prise de la qualité de seigneur par la réserve de la directe seigneuriale; ce n'est, en effet, qu'une seule et même chose, dans le rapport sous lequel les décrets ci-dessus cités les ont envisagés.

321. Dans l'application de ces décrets aux conventions de lods et ventes, la jurisprudence a subi les mêmes vicissitudes que dans leur interprétation concernant la qualité du bailleur, c'est-à-dire, qu'après les avoir entendus d'une manière absolue et considérés comme des mesures générales, elle a fini par les interpréter contradictoirement et les tenir pour des décisions particulières. Il a été jugé 1o que la stipulation des lods et ventes prouve que la rente « a été constitué avec les emblêmes de la féodalité » (Riom, 6 janv. 1809, 1re sect., M. Redon, pr., aff. Cathol C. Boizon et autres); -2° Qu'il faut comprendre dans la suppression des redevances féodales ou mélangées de féodalité

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(1) Espèce: (Dorel C. époux Vercasson.) En 1735, acte par lequel le sieur Bollioud, seigneur de Broguieux, Mortier et Sonier, alberge à Guérin des terres dépendantes de sa seigneurie, moyennant trois barreaux de vin, avec réserve d'un denier et droit de lods pour le cas où il n'y aurait pas de seigneur direct. En 1774 et 1776, nouveaux actes par lesquels Dorel, gendre de Guérin, reconnaît l'acte de 1735 et déclare tenir du sieur Bollioud et de la directe seigneurie de Prognieux, à titre d'emphyteose perpétuelle, un fonds sous le cens annuel et perpétuel, portant lods et ventes de deux pugnères d'avoine. Le sieur Bollioud poursuit, en 1820, le payement de la rente des trois barreaux de vin et de celle des deux pugnères d'avoine. Dorel prétend qu'elles sont supprimées pour cause de féodalité, et subsidiairement il oppose la prescription. Le titre primitif n'est pas rapporté. Jugement du tribunal civil de Tournon, du 16 août 1824, qui ordonne le service des rentes réclamées et le payement des arrérages échus depuis 1815, même de ceux qui ont couru depuis 1790 jusqu'à 1794 inclusivement; - «Attendu qu'il résulte du titre de 1755 que le sieur Bollioud ne se prétendait pas seigneur, puisqu'il chargeait le preneur de payer les tailles et rentes; qu'ainsi il n'avait rien de féodal, et qu'il n'a pu changer de nature par l'effet de la reconnaissance de 1776, encore qu'elle contienne la stipulation de cens avec droit de lods et ventes, parce que le sieur Bollioud n'y a pas pris la qualité de seigneur, et que ces termes sont insignifiants, puisqu'il est de la nature d'un bail emphyteotique de produire des lods; qu'ils ne sont donc pas caractéristiques de la féodalité;—Et attendu, quant à la preseription, que l'art. 2, tit. 3, de la loi du 20 août 1792, suspend celle des droits corporels et incorporels appartenant à des particuliers depuis le 2 nov. 1789 jusqu'au 2 nov. 1794. »

Pourvo en cassation de la part de Dorel contre les époux Vercasson qui se trouvent aux droits de Bollioud: 1° Viola ion de la loi du 17 juill. 1793, art. 1, en ce que le jugement maintient la rente des trois barreaux de vin et celle des deux pugnères d'avoine, quoiqu'elles aient été frappées par les lois suppressives de la féodalité; 20 Violation de 'art. 1, tit. 3, 1. 20 août 1792, en ce que le tribunal a rejeté la prescription quinquennale établie pour les arrérages des rentes, aux termes de cette loi.

Les défendeurs combattent le second moyen, en soutenant que la suspension prononcée par l'art. 2, L. 20 août 1792, a eu pour effet de mettre en réserve et de conserver les cinq années d'arrérages exceptées de la prescription au propriétaire, et qu'il n'y a plus que la prescription trentenaire qui lui soit opposable. Arrêt (ap. délib. en ch. du cons.). LA COUR; Sur le premier moyen de cassation, en ce qui concerne la redevance des trois barreaux de vin : Considérant que, d'après le

l'acte constitutif d'un premier cens, avec lods et ventes, et un droit de feu (Cass. 4 nov. 1818, aff. Rigal, V. no 160-8o); 3° Qu'est atteinte, par les lois suppressives de la féodalité, la redevance de deux pugnères d'avoine, lorsque la dénomination de cens annuel et perpétuel portant lods et ventes, est insérée dans la reconnaissance de cette prestation, et que le titre primordial n'étant pas représenté, rien ne justifie la non-existence du caractère de féodalité attribué par l'acte recognitif (Cass. 16 avril 1828) (1).

322. Mais il a été jugé que les stipulations de lods, ventes, seigneuries et autres, faites dans les baux emphyteotiques en pays de franc-alleu, ne constituaient, à la différence des mêmes sti pulations dans les baux à cens et à fief passés dans les pays de féodalité, que des rentes purement foncières et non seigneuriales, à moins que des clauses n'obligeassent les preneurs à des prestations réelles, essentiellement et exclusivement féodales (Req. 16 avr. 1838, aff. Plasse, V. no 161; V. aussi nos 160, 162).

323. Un autre arrêt juge que, dans le ressort de la cour de Colmar, « la défense de vendre sans l'agrément du bailleur, ainsi que le droit de celui-ci de recevoir des laudêmes en cas de vente, sont des droits ordinaires appartenant aux bailleurs emphyteotiques, et ne font pas dégénérer l'emphytéose en inféodation, lorsque le bailleur n'a stipulé ni devoirs ni réserves appartenant uniquement à la féodalité » (Cass. 8 fév. 1814, aff. Patocky, V. no 485). 324. Dans la Franche-Comté, les droits de lods et ventes n'étaient pas caractéristiques de la féodalité. Et il a été jugé : que la redevance stipulée dans un bail emphytéotique passé dans une province régie par la loi romaine n'a pas été supprimée par les lois abolitives de la féodalité, par cela que l'acte a été qualifié d'acensement, et qu'il renferme une stipulation de lods et retenue, lorsque, d'ailleurs, il ne s'y trouve aucune clause appartenant exclusivement au régime féodal (Rej. 13 déc. 1820 (2), Conf. Req. 28 mars 1821, MM. Lasaudade, pr., Menerville, rap., aff. Chavanne C. Perruchon).

325. La directe censuelle ne comportait ni la foi ni l'hommage

-

titre constitutif, en date du 3 avr. 1735, et d'après les déclarations postérieures, le tribunal a reconnu que cette redevance était purement foncière, sans mélange de féodalité, ce que confirment les termes dudit acte de 1735;-Rejette ce premier moyen à l'égard des trois barreaux de vin; Mais à l'égard de la prestation de deux pugnères d'avoine : - Vu les art. 1 et 2 de la loi du 17 juill. 1793; - Considérant que la reconnaissance du 16 mars 1776 donne à la redevance d'un ras d'avoine, dont les deux pugnères en question font partie, la dénomination de cens annuel et perpétuel, portant lods et ventes; que le titre primitif n'étant point rapporté et rien ne justifiant que le caractère de féodalité attribué par la reconnaissance de 1776, n'appartienne pas à ladite prestation, comme cet acte le déclare, le premier moyen se trouve fondé à l'égard des deux pugnères;

-

Et sur le deuxième moyen relatif à la prescription des arrérages courus depuis le mois de nov. 1789 jusqu'en nov. 1794: - Vu l'art. 2, tit. 5, de la loi du 20 août 1792; - Considérant que la suspension accordée par la loi, pour les cinq années dont il s'agit, n'a pas soustrait ces cinq ans à la prescription qui, depuis 1794, aurait pu courir et s'acquérir; qu'ainsi, ces cinq années sont devenues prescriptibles, et que les juges n'ont pu, rejetant cette prescription acquise en nov. 1799, condamner au payement de ces cinq années, sauf pourtant ce qui en aurait été offert par le sieur Dorel; qu'en jugeant le contraire, le tribunal a violé ledit art. 2; Casse, en ces deux dispositions seulement, le jugement, etc. Du 16 avr. 1828.-C. C., ch. civ.-MM. Brisson, pr.-Piet, rap. (2) (Les frères Petit C. Titon.) Le 1er mars 1765, acte notarié par lequel le sieur Titon donne, à titre d'acensement perpétuel, aux frères Petit, un domaine qu'il possédait au lieu de la Charme. L'acte porte que les preneurs s'obligent d'entretenir toujours les fonds baillés dans le même bon état où il est convenu qu'ils sont actuellement; savoir: qu'ils payeront à perpétuité toutes les tailles, cotes et impositions royales, municipales et autres, quelles qu'elles soient, prévues ou non prévues, auxquelles, chaque année, seront assujettis les fonds acensés; qu'ils ne pourront, ni les leurs, vendre, aliéner, ni échanger en tout ou partie sans l'exprès consentement par écrit du délaissant. — Il est ajouté: « Le présent et perpétuel acensement est fait à ces conditions et moyennant le cens foncier, annuel, irrédimable, indivisible et imprescriptible, portant lods et retenue en faveur de Titon, dans les cas requis et accoutumés, de la somme de 108 livres, payable le 25 décembre de chaque année. »>- Enfin, on y lit: « A défaut de payement de trois termes da présent acte constitutif, il demeurera nul et résilié de plein droit, si Titon le juge à propos, et il lui sera permis et aux siens, de rentrer dans son héritage et d'en disposer à la part qu'il jugera à propos, sans être

qui appartenaient exclusivement au fief proprement dit; mais elle contenait essentiellement l'obligation des droits censuels, soit qu'ils consistassent en une redevance annuelle, soit qu'ils n'eussent pour objet que des droits casuels. La foi et l'hommage, c'est-àdire la fidélité personnelle du vassal, étaient remplacés dans le bail à cens par la sujétion de la terre; la portion acensée demeurait soumise et inférieure à la portion du fief ou de l'alleu dont elle était détachée; c'était dans cette sujétion que consistait le caractère seigneurial du contrat. On ne le retrouvait pas dans l'emphytéose. C'est pourquoi on disait, dans le bail à cens, que la redevance était stipulée in recognitionem dominii; mais la redevance n'était pas nécessairement annuelle, et la reconnaissance de la seigneurie s'attachait aussi bien aux droits casuels qu'au cens proprement dit. Il faut voir sur ce point Hervé, eod., t. 5, p. 148 et suiv.

326. Les droits casuels n'étaient pas plus distinctifs dans la censive que dans le fief, et la jurisprudence qui précède a le plus souvent eu pour objet de reconnaître dans les actes si les droits stipulés étaient seigneuriaux, comme appartenant au bail à cens, ou purement fonciers, comme appartenant à l'emphytéose. La loi des 15-28 mars 1790, tit. 1, art. 10, portait : « Le retrait féodal, le retrait censuel, le droit de prélation féodale ou censuelle et le droit de retenue seigneuriale sont abolis. »

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obligé de passer à aucune voie juridique. » Titon n'avait ni fief mi directe dans le territoire de la Charme, et la redevance stipulée avait été régulièrement payée jusqu'en 1810, où trois termes échurent sans payement. Le 19 juin 1813, Titon, héritier du bailleur, fit citer les frères Petit devant le tribunal civil de Lons-le-Saulnier, pour faire résilier l'acte du 1er mars 1793. Les frères Petit opposent les lois abolitives de la féodalité. Jugement du 10 fév, 1827, qui déclare la redevance supprimée comme mélangée de féodalité à cause du droit de lods et retenue qui se trouvait stipulé dans le contrat. Appel par Titon. Arrêt infirmatif de la cour de Besançon du 13 fév. 1818. - Attendu que les fonds compris dans l'acte du 1er mars 1763 étaient de roture; que Titan ne possédait ni fief ni justice à la Charme; que, dans le ressort de la cour, on ne suivait pas la maxime nulle terre sans seigneur; qu'en Franche-Comté, les baux à cens roturiers étaient très-communs; qu'ils étaient régis par le droit romain relatif aux emphyteoses ou par les conditions stipulées dans les actes, telles que celles qui sont stipulées dans l'acte de 1763; qu'aucune loi ne les défendait; que ces conditions faisaient partie du prix foncier ; qu'elles n'étaient ni féodales ni honorifiques, mais seulement des droits utiles représentant une partie du prix des fonds concédés aux preneurs, et que la redevance avait même été dénommée foncière dans le titre ; que les intimés sont en retard de plus de trois termes; qu'il a été convenu, dans l'acte d'acensement, qu'il demeurerait résilié de plein droit à défaut de payement de la redevance pendant trois années consécutives; que cette clause n'est pas comminatoire, et qu'aucun délai ne peut être accordé... >>

Pourvoi par les frères Petit: 1° pour violation de l'art. 5 de la loi du 25 août 1792, de l'art. 1 de celle du 17 juill. 1793, et fausse application de l'art. 2 de cette dernière loi, en ce que l'acte de 1763 était un bail à cens seigneurial; que le cens qui s'y trouve stipulé étant déclaré irrédimable, imprescriptible et portant lods et retenue dans les cas requiз et accoutumés, lui imprimait un caractère de féodalité; qu'il n'y avait pas lieu d'examiner si Titon était ou n'était pas seigneur des biens donnés à cens, et qu'il suffisait de ces stipulations féodales pour faire declarer comprise dans la suppression la redevance à laquelle elles s'appliquaient; 2o pour fausse application de l'art. 1912 c. civ. qui, disaientils, ne disposait que pour l'avenir, la cause de l'acte de 1763. relative à la résiliation, n'étant que comminatoire; que, d'après l'ancienne jurisprudence, les tribunaux accordaient toujours des délais dans des cas pareils et ne prononçaient la résiliation du contrat qu'après la mise en demeure du débiteur, d'où ils concluaient que, n'ayant jamais été constitués en demeure, la résolution du contrat n'avait pu être prononcée contre eux par l'arrêt attaqué. — Arrêt (ap. dél. en cb. du cons.).

LA COUR;-Attendu que l'arrêt attaqué a décidé et a pu décider, d'après les clauses particulières de l'acte du 1er mars 1763, et la qualité des fonds qui en sont l'objet, que cet acte présente tous les caractères d'un bail emphyteotique; - Attendu que, d'après le droit romain qui régissait la Franche-Comté, le droit de lods et retenue était une dépendance de ces sortes de baux, dans lesquels la loi 3, au code De jure emphyteutico, nonseulement autorisait la stipulation de ce droit, mais l'y suppléait même, quand elle y était omise; et que, dès lors, cette stipulation dérivant d'une loi municipale totalement étrangère à la féodalité, ne peut être réputée appartenir au régime féodal; - Attendu que ce même acte ne renferme d'ailleurs aucune autre clause qui puisse être attribuée à ce régime; Attendu enfin qu'en ordonnant que le bail demeurerait résolu, faute par les demandeurs d'avoir payé les trois dernières annuités de la

Le droit de retrait était le droit que le seigneur avait de se mettre au lieu et place de l'acquéreur, lorsque le vassal revendait son fief. Le droit de retrait existait indépendamment de toute convention dans le fief. Dans la censive, le retrait n'était admis que par certaines coutumes assez peu nombreuses. 327. Les droits de prélation et de retenue seigneuriale n'étaient que des modifications du droit de retrait ou plutôt le retrait exercé sous un autre nom (Cass. 22 janv. 1828, aff. Mariette et hospice de Paris C. David). Le retrait s'exerçait également dans l'emphytéose; c'était même une des conditions primitives du contrat tel qu'il avait été constitué par Justinien. - Il en résultait que l'existence d'un droit de retrait n'était pas essentiellement caractéristique et prenait lui-même la nature des contrats auxquels il s'attachait. La jurisprudence des lods et ventes est applicable aux retraits, et il a été jugé, 1o qu'est abolie la rente due au concédant qui était seigneur en partie du territoire, et qui s'était réservé les droits seigneuriaux de retrait et de deshérence (Cass. 16 fév. 1813) (1); 2o Que toutes les redevances seigneuriales, quelles que puissent être les causes de leur création, même celles dont le payement avait été ordonné par jugement sous l'empire de la loi du 25 mars 1790, ont été abolies sans indemnité par les lois des 25 août 1792 et 17 juill. 1793 (Rej. 6 avr. 1842) (2); et que bien

redevance stipulée, la cour royale de Besançon n'a fait que se conformer aux conventions des parties et n'a violé aucune loi; Par ces motifs, rejette.

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Du 13 déc. 1820.-C. C., sect. civ.-MM. Desèze, 1er pr.-Trinquelague, r. (1) (Lorge et Leclerc C. Messate.) — LA COUR ; - Vu l'art. 1 de la loi du 17 juill. 1793, le décret de la convention nationale du 7 vent. an 2, les avis du conseil d'Etat des 21 frim. an 11 et 30 mess. an 13, enfin le décret du 23 avr. 1807;-Et attendu que les deux redevances dont il s'agit sont qualifiées cens par leur titre constitutif du 25 août 1696; Que Jérémie Messate, en faveur duquel ce cens a été alors créé, était seigneur en partie du territoire où sont assises les terres acensées à cette époque;-Que ce fait important, mal à propos dénié par l'arrêt attaqué, est établi par une copie de ce titre constitutif, signifiée par les défendeurs eux-mêmes, le 19 therm. an 5, en tête de leur exploit introductif d'instance, et résulte même d'un contrat de vente du 16 nov. 1726, portant vente, par le fils de Jérémie Messate, de la portion que ce titre lui assignait dans la seigneurie de Verny; - Et qu'ainsi ces redevances étaient évidemment seigneuriales au moment où le régime féodal a été aboli sans indemnité;-Attendu d'ailleurs que le bailleur de 1696 s'est expressémunt réservé « le droit de retrait, au cas que lesdits acquéreurs vendent les susdits héritages, et, à faute de lignée et parenté, le droit d'héritier suivant le droit des seigneurs du lieu ; »> Que par là il a stipulé en sa faveur, le cas y échéant, un droit de retrait seigneurial, et même un droit de déshérence alors attaché à la haute justice: en sorte que si, ce qui n'est pas, le cens dont il s'agit pouvait être regardé comme purement foncier, il était du moins mélangé de féodalité; Attendu que, soit comme seigneuriales, soit comme entachées de féodalité, les redevances dont il s'agit étaient dans le cas de la suppression sans indemnité; - Et qu'en les déclarant, au contraire, foncières et comme telles non comprises dans cette suppression, l'arrêt attaqué a manifestement violé les lois précitées; Par ces motifs, casse, etc. Du 16 fév. 1813.-C. C., sect. civ.-MM. Mourre, pr.-Babille, rap. (2) (Marquis de Galiffet C. com. d'Istres.) LA COUR; Sur le moyen fondé sur la prétendue fausse application des lois de 1792 et 1793, abolitives du régime féodal: Attendu que l'art. 5 de la loi du 25 août 1792 a aboli toutes les redevances seigneuriales annuelles en argent, grains, volailles, denrées, fruits, servies sous la dénomination de cens, censives, surcens, en tant qu'elles tenaient de la nature des redevances féodales ou censuelles, à moins que les ci-devant seigneurs ne justifient par l'acte primitif d'inféodation ou d'acensement qu'elles avaient pour cause une concession de fonds; et que l'art. 10 de la même loi a ordonné que les arrérages des droits supprimés, même ceux qu pourraient être dus en vertu de jugements, accords ou conventions, ne pourraient pas être exigés; Attendu que la loi du 17 juill, 1793 a prononcé, art. 1, l'abolition sans indemnité de toutes les redevances cidevant seigneuriales, même de celles conservées par la loi du 25 août précedent;-Que, du rapprochement de ces deux lois, il résulte que toutes les redevances seigneuriales, quelles que pussent être les causes de leur concession, ont été supprimées sans indemnité, et que, depuis la première de ces lois, les arrérages desdites redevances, dus même en vertu de jugements, n'ont pas pu être exigés :- Attendu que si, dans certains pays allodiaux, la qualité de seigneur, prise par le bailleur dans un bail à rente, et même la dénomination de cens, donnée à la redevance, n'était pas toujours un signe certain de féodalité, le caractère féodal ne pouvait pas être contesté, lorsque le bailleur tenait des stipulatious qui ne

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