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Attendu en effet que l'article 103 du décret de 1808 a établi des règles générales pour la discipline des huissiers; - Que l'article 75 du décret de 1813 a expressément maintenu les dispositions de l'article 103 du décret de 1808; Que le maintien des dispositions de l'article 103 du décret de 1808 a été formellement reconnu par un arrêt de la Cour de cassation en date du 29 novembre 1837; Et que jamais l'article 103 du décret de 1808 n'a pu faire et n'a fait obstacle à l'application de l'article 45 du décret de 1813;

Attendu que l'arrêté ministériel de 1842, spécial à toute l'Algérie, a été modifié par le décret de 1860, en ce point seulement que ledit décret a rendu au ministre de la justice les attributions temporairement et exceptionnellement déléguées au ministre de la guerre, mais que ledit arrêté n'a été modifié en aucun autre point; Attendu que les articles 21 et 22 dudit arrêté se bornent à rendre applicables à l'Algérie les dispositions de l'article 103 du décret de 1808, sous certaines modifications, telles que la substitution du ministre de la guerre au ministre de la justice et le droit de suspension provisoire accordé au gouverneur général; - Attendu que lesdits articles ne font pas plus obstacle que l'article 103 du décret de 1808 à l'application de l'article 45 du décret de 1813; Attendu que ledit article 45 n'a jamais cessé d'être en vigueur en Algérie et qu'il a été notamment appliqué par un jugement du tribunal correctionnel d'Alger en date du 5 février 1872 (affaire de l'huissier Villain) et par un arrêt de la Cour d'appel en date du 26 octobre 1876 (affaire de l'huissier Henriet);

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Attendu en outre que, si le tribunal d'Alger s'était trouvé incompétent en vertu de l'article 21 de l'arrêté de 1842, la Cour se trouverait compétente en vertu de l'article 22 du même arrêté;

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Attendu enfin que, d'une part, le sieur Daube est huissier depuis longtemps, qu'il est parfaitement connu à Alger, et que sa réputation est intacte; Attendu que le fait professionnel à lui imputé n'a causé préjudice à personne et n'entache aucunement sa juste réputation de probité; - Attendu que, s'il a fait signifier des actes par un de ses clercs, ce fait est notoirement toléré dans les grandes villes;

Attendu que spécialement dans sa dépêche du 3 octobre 1875 M. le garde des sceaux Dufaure déclare que la longue tolérance qui existe à cet égard ne pourrait cesser brusquement sans qu'il en résultat un trouble fâcheux;

Attendu que d'autre part le décret de 1813 ne donne pas à la Cour le droit d'accorder des circonstances atténuantes, et que le sieur Daube ne peut sur ce point que s'adresser à la clémence de M. le président de la République; Par ces motifs : Se Annule et met à néant le jugement dont est appel; déclare compétente; Et faisant au sieur Daube application de l'article 45 du décret du 14 juin 1813, lequel est ainsi conçu: «< Tout huissier qui ne remettra pas lui-même à personne ou domicile l'exploit et les copies de pièces qu'il aura été chargé de signifier sera condamné, par voie de police correctionnelle, à une suspension de trois mois, à une amende qui ne pourra être moindre de 200 francs, ni excéder 2000 francs, et aux dommages et intérêts des parties; >> Le condamne à la peine de trois mois de suspension et à 200 francs d'amende; condamne en outre à tous les frais.

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Mc CHÉRONNET, av.

· Le

Sur le pourvoi formé par Daube, la Cour de Cassation a ainsi statué: Sur le moyen unique, pris de la violation des articles 20, 21 et 22 de de l'arrêté ministériel des 26 novembre-17 décembre 1842, portant règlement général sur l'exercice de la profession d'huissier en Algérie, et de la violation, par fausse application, des articles 102-103 du décret du 30mars 1808 et de l'article 25 de l'arrêté précité : — Attendu que l'article 25 de l'arrêté ministériel du 26 novembre 1842 déclare applicables aux huis

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siers, en Algérie, les lois, ordonnances qui règlent en France la profession de ces officiers ministériels, en tout ce qui n'est pas contraire à ce même arrêté et à la législation spéciale de l'Algérie, et qu'il indique notamment comme étant applicable aux huissiers en Algérie l'article 45 du décret du 14 juin 1813;

Attendu que, de même qu'en France la disposition de cet article 45 qui prononce à la fois la peine de la suspension et celle d'amende par voie de police correctionnelle contre la faute grave qu'il prévoit et réprime n'a rien d'irréconciliable avec les articles 102-103 du décret du 30 mars 1808, de même, en Algérie, cet article 45, expressément maintenu sans réserve, se concilie avec les mesures de discipline organisées par l'arrêté ministériel de 1842 pour tout ce qui concerne l'exercice général de la profession. d'huissier en Algérie; - D'où il ressort qu'en appliquant à l'infraction spéciale réprimée par la disposition de l'article 45 du décret de 1813, à laquelle l'arrêté même se réfère, les peines de la suspension et d'amende que la juridiction correctionnelle, au cas particulier, pouvait seule compétemment prononcer, l'arrêt attaqué, loin d'avoir violé les dispositions légales précitées, en a fait, au contraire, une exacte application; Par ces motifs: Rejette le pourvoi.

MM. SAINT-LUC COURBORIEU, cons. rapp.; TAPPIE, av. gén. (concl. conf.). Mc DARESTE, av.

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COUR D'APPEL D'ALGER (1TM Ch.).

Présidence de M. SAUTAYRA, Premier Président.

5 avril 1882.

Compétence des tribunaux français.
cier français. - Action en licitation.

Succession musulmane.—Créan

Les tribunaux français sont compétents pour connaître d'une demande en licitation formée par un créancier français contre son débiteur musulman et le cohéritier de ce dernier.

Consorts GпNASSIA C. ABDALLAHI BEN EL MILOUD et autres.

Attendu que l'appel est régulier en la forme; - Attendu que, les intimés n'ayant pas constitué défenseur, il y a lieu de statuer par défaut à leur égard;

Attendu que la seule question soumise à la Cour est celle de savoir si

le tribunal civil d'Orléansville est compétent pour connaître d'une demande en licitation formée par un créancier français contre son débiteur musulman et le cohéritier de ce dernier;

Attendu que les décrets et ordonnances sur la justice musulmane en Algérie ne règlent que les rapports des musulmans entre eux; - Qu'aux termes de l'article 1er du décret du 13 décembre 1866 la loi musulmane régit les conventions entre les musulmans à moins qu'ils n'aient déclaré contracter sous l'empire de la loi française; Que dans ce cas et lorsqu'ils ont traité avec des Français les musulmans ne relèvent que des tribunaux de droit commun;

Attendu que l'article 40 du même décret charge les cadis de procéder aux partages et liquidations des successions musulmanes lorsqu'ils en sont requis par les parties intéressées; Que cette attribution spéciale de compétence ne peut avoir d'autre portée que celle de l'article 1er susvisé, puisque l'action en partage fait partie du statut réel et que des tiers ont pu contracter avec des musulmans et acquérir des droits réels que la loi française leur permet d'exercer sur les biens soumis au partage;

Attendu que le système contraire aurait pour résultat, s'il était admis, de priver les citoyens français de la justice qui leur est due; - Qu'ils ne pourraient réaliser leur gage, puisque, d'une part, le cohéritier débiteur est intéressé à rester dans l'indivision, que le créancier ne pourrait intervenir devant le cadi pour surveiller la fraude dans le partage, et que, d'autre part, les tribunaux français ne pourraient connaître d'une demande qui, aux termes de l'article 2205 du Code civil, est le préliminaire obligatoire de la saisie réelle; Qu'il est impossible d'admettre ces conséquences qui seraient la négation de toute justice;

Attendu que le créancier porteur d'un titre exécutoire peut en poursuivre l'exécution par tous les moyens que la loi a mis à sa disposition; que la saisie réelle est le moyen le plus efficace pour la réalisation du gage hypothéqué; Que ce mode d'exécution est subordonné au partage ou à la licitation des immeubles indivis entre son débiteur et les cohéritiers de ce dernier;

Attendu que Jacob et Joseph Ghnassia, naturalisés Français, sont créanciers de Tahar en vertu de diverses décisions judiciaires émanant d'un tribunal français; - Qu'ils ont pris inscription sur les biens de leur débiteur; qu'ils sont donc fondés à exercer ses droits conformément à la loi française, sous l'empire de laquelle ils ont contracté;

Attendu que, l'action en partage étant indivisible, Ben Abdallah ben Miloud ne peut se soustraire à la compétence d'une juridiction que son copropriétaire est obligé de subir;

Par ces motifs :

Donne défaut contre les intimés, qui n'ont pas constitué défenseur ; Reçoit l'appel en la forme'; Dit que le tribunal civil d'Orléansville est compétent pour connaître de l'action en partage ou licitation formée par les appelants; Infirme, en conséquence, le jugement dont est appel et renvoie la cause et les parties devant ce tribunal autrement composé.

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COUR D'APPEL D'ALGER (1 Ch.).

Présidence de M. SAUTAYRA, Premier Président.

18 mars 1884.

Succession musulmane. -Loi du 26 juillet 1873.- Époque antérieure. -'Action en partage. Imprescriptibilité.

Les immeubles dépendant de la succession d'un indigène musulman ont été régis au moins jusqu'à la loi du 26 juillet 1873 par la loi musulmane;

D'après la loi musulmane, l'action en partage est imprescriptible. En admettant même que la prescription pût être admise, elle ne serait encourue, conformément au texte de Sidi Khalil, que par une possession continue et sans trouble de quarante ans.

EL HADJ MOHAmed ben CheIKH AHMED et consorts c. consorts BEN CHEIKH AHMED.

Attendu que El Hadj Mohamed ben El Hadj Mohamed ben Cheikh Ahmed et consorts ont interjeté appel du jugement rendu, le 26 juillet 1883, par le tribunal civil de Bône; Qu et appel est régulier en la forme;

Attendu que Menadi ben Choubi et Mustapha ben Menadi ne comparaissent pas quoique dûment réassignés; - Qu'il échet de donner contre eux itératif défaut et de statuer entre toutes les parties;

Attendu que les appelants, après avoir reconnu dans leurs conclusions. qu'ils avaient reçu communication des pièces par lesquelles les intimés établissent leurs droits, élèvent deux exceptions tirées l'une de la chose jugée et l'autre de la prescription;

Sur le premier moyen: - Adoptant les motifs des premiers juges;

Sur la prescription: - Attendu que les immeubles dépendant de la succession de El Hadj Mohamed ben Sheikh Ahmed, décédé à Bône, en 1829, ont été régis jusqu'à la loi du 26 juillet 1873 par la loi musulmane; que la prescription invoquée, ayant commencé à courir à partir du dernier partage, celui de 1843, est régie, aux termes de l'article 2281 du Code civil, par la loi alors applicable, c'est-à-dire par la loi musulmane; - Attendu qu'aux termes de cette loi, l'action en partage est imprescriptible, ainsi que l'a reconnu une jurisprudence constante: - Qu'en admettant même que la prescription pût être admise en pareille matière, elle ne serait encourue, conformément au texte de Sidi Khalil, que par une possession continue et sans trouble de quarante ans; Que, sans avoir à rechercher si, dans l'espèce, l'échange fait entre parties en 1853 et l'instance ouverte en 1867 ont interrompu la prescription, il suffit de rapprocher la date du dernier partage effectué en 1843 de celle de l'assignation introductive de l'instance actuelle, 1881, pour constater que la possession dont se préva

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lent les appelants n'a pas eu la durée fixée par la loi musulmane entre parents pour prescrire; - Attendu que la loi française n'est pas applicable à l'espèce, qu'elle ne pourrait, au surplus, l'être devenue qu'en vertu des dispositions de la loi du 26 juillet 1873, c'est-à-dire depuis un temps insuffisant pour emporter la prescription des articles 2262 et 2265 du Code civil;

Au fond: Attendu que les intimés prétendent que les immeubles dont le partage est demandé font partie de la succession de l'auteur commun; Que les appelants le dénient formellement; - Que les parties sont ainsi contraires en fait et que les pièces produites par elles sont insuffisantes pour permettre à la Cour de statuer en pleine connaissance de cause; Qu'il y a lieu, par suite, de recourir à un préparatoire ; — Que c'est là ce à quoi ont conclu les intimés par leurs conclusions additionnelles et subsidiaires;

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Par ces motifs : Donne ilératif défaut contre le sieur Menadi ben Choubi et le sieur Mustapha ben Menadi; - Déclare régulier l'appel de El Hadj Mohamed ben Cheikh Ahmed; Donne acte à la dame Khedidja bent El Hadj Mohamed ben Cheikh Ahmed, veuve de Mohamed Medani, de ce qu'elle déclare ne pas s'associer à la demande formulée par les intimés; Déclare les appelants mal fondés dans leurs exceptions de chose jugée et de prescription, les en déboute; - Infirme de ce chef le jugement attaqué; Au fond, Et avant de faire droit, Dit que par trois experts, dont les parties conviendront dans les huit jours de la prononciation du présent arrêt, sinon par Lecoat, Murat et Causse à ce commis, les immeubles désignés par les intimés seront vus et visités à l'effet de rechercher : 1o si ces immeubles ont fait partie de la succession de El Hadj Mohamed ben Cheikh Ahmed; 2° Si ces immeubles ont été en tout ou en partie compris dans les partages de 1842 et de 1843 ou dans l'échange de 1853; — 3° Si tout ou partie de ces immeubles se trouve en nature entre les mains des appelants ou a été vendu et moyennant quel prix; Pour, sur leur rapport déposé au greffe de la Cour, etc.

M. CUNIAC, subst. du proc. gén. Mes HURE et ROBE, av.

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Les avoués de tous les tribunaux du ressort d'une Cour d'appel peuvent pré

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