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Cour d'assises.

Jury. Loi du 21 septembre 1872.

Algérie. Non promulgation. Décret du 7 août 1848. Conseiller de préfecture. Non incompatibilité.

La loi du 21 novembre 1872 sur le jury n'ayant pas été promulguée en Algérie, le décret du 7 août 1848, rendu applicable en Algérie par le décret du 24 octobre 1870, y est demeuré en vigueur et continue d'y régler la matière des incompatibilités;

Aux termes du décret de 1848, il n'existe pas d'incompatibilité entre les fonctions de conseiller de préfecture et celles de juré.

ABDELKADER BEN TAÏEB et BOUDJEMAH BEN CHERIF C. MINISTÈRE PUBLIC.

Sur le moyen pris de la violation de l'article 3 de la loi du 21 novembre 1872, en ce qu'au nombre des jurés de jugement figurait un conseiller de préfecture, fonctions incompatibles avec celles de jurés :- Attendu que la loi du 21 novembre 1872 sur le jury n'a pas été promulgée en Algérie; qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de cette loi d'organisation et de fonctionnement du jury qu'elle n'est pas applicable à l'Algérie; que, dès lors, le décret du 7 août 1848 sur le jury, rendu applicable à l'Algérie par le décret des 24 octobre-10 novembre 1870, est demeuré en vigueur dans cette région et continue à y régler la matière des incompatibilités ; Attendu que le décret du 7 août 1848 ne comprend pas les conseillers de préfecture dans les catégories des fonctionnaires dont les fonctions sont incompatibles avec celles de juré, et qu'il est de principe que les

dispositions sur les causes d'incompatibilité sont de droit étroit; que, conséquemment, la présence d'un conseiller de préfecture parmi les douze jurés de jugement n'a nullement pu vicier la composition du jury; — Et attendu, au surplus, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par le jury;

Par ces motifs :- Rejette le pourvoi.

MM. GAST, cons. rapp.; RONJAT, av. gén. Mes HOUSSET et ROBIQUET, av.

CONSEIL D'ÉTAT.

Présidence de M. DU MARTROY.

27 avril 1877..

Taxe sur les loyers. Algérie. Contrainte. -Annulation. Dépens. Receveur municipal. Recours au conseil d'État.

Un receveur municipal est sans qualité pour demander au conseil d'État la réformation de la décision d'un conseil de préfecture annulant la contrainte qu'il avait décernée contre un locataire principal dont les sous-locataires avaient déménagé sans payer leurs contributions;

Mais il peut demander la nullité de cette décision, en tant qu'elle l'a condamné aux dépens de l'instance engagée par le contribuable.

BERGE.

Considérant que l'arrêté par lequel le conseil de préfecture a annulé la contrainte décernée contre la dame Vuillemot n'a pas eu pour effet de mettre les sommes non acquittées par cette dernière à la charge du sieur Berge, receveur municipal; - Que le maire de la commune de Constantine, au profit de laquelle devaient être perçues les taxes réclamées à la dame Vuillemot, avait seul intérêt à obtenir l'annulation de l'arrêté attaqué; Qu'il suit de là que le sieur Berge est sans qualité pour demander sur ce point la réformation de la décision du conseil de préfecture;

Mais considérant que par le même arrêté ledit conseil a condamné le sieur Berge aux dépens de l'instance engagée par la dame Vuillemot ; — Qu'il y a lieu d'annuler de ce chef ledit arrêté ;

(Réformation de l'arrêté en tant qu'il a condamné le sieur Berge aux dépens; Rejet du surplus des conclusions.)

MM. CHAUFFARD, rapp.; BRAUN, com. du. gouv.

Mariage.

trainte.

COUR D'APPEL D'ALGER (Ch. des app. musulm.).

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Père de famille. Droit de con-
Nécessité du consentement

de l'enfant.

Le sénatus-cónsulte du 14 juillet 1865 ayant décidé, en conférant aux indigènes musulmans la qualité de Français, qu'ils continueraient à être régis par la loi musulmane, il n'appartient pas aux tribunaux de refuser au père de famille le droit de contrainte matrimoniale, ce droit étant un des principes fondamentaux de la loi musulmane;

Seulement, comme les indigènes musulmans ont la faculté d'adopter dans le règlement de leurs intérêts civils les solutions admises par l'un ou l'autre des quatre imams tenus pour orthodoxes, alors même qu'ils se rattacheraient, au point de vue religieux, à une école différente, le juge peut à plus forte raison user de la même faculté dans l'intérêt supérieur de la justice et appliquer aux litiges qui lui sont soumis les règles de telle école sunnite de préférence aux règles de telle autre;

En conséquence, quant au droit de contrainte matrimoniale du père de famille, les tribunaux peuvent suivre les prescriptions du rite hanéfite, qui reconnait aux enfants, quel que soit leur sexe, le droit absolu de ne contracter mariage que de leur plein consentement, dès qu'ils ont atteint la puberté (1).

Demoiselle KHEIRA C. KHEIRA père.

Attendu que l'article premier du sénatus-consulte du 14 juillet 1865, en conférant aux indigènes musulmans la qualité de Français, a décidé qu'ils continueraient à être régis par la loi musulmane; - Qu'à ce titre il n'appartient pas aux tribunaux français de refuser au père de famille le droit de contrainte matrimoniale, ce droit, tout exorbitant qu'il est, étant un des principes fondamentaux de la loi musulmane;

Mais attendu que rien n'interdit au juge d'appliquer aux litiges qui lui sont soumis les règles de telle école sunnite de préférence aux règles de telle autre; qu'en effet il appartient, dans un grand nombre de cas, aux parties elles-mêmes d'adopter dans le règlement de leurs intérêts civils les solutions admises par l'un ou l'autre des quatre imams tenus pour orthodoxes, alors même qu'elles se rattacheraient, au point de vue reli

(1) V. Alger, 27 juin 1881 (Bull. jud., 1882, p. 75), et la note; Adde Alger, 29 mars 1881 (Bull. jud., 1882, p. 156).

gieux, à une école différente; qu'ainsi, en matière de habous, notamment, le constituant a pleine liberté pour déclarer que les dévolutions se feront d'après le rite malékite ou d'après le rite hanéfite; - Attendu que, si les parties jouissent de cette faculté, d'où la conséquence que le fait de se rattacher temporairement à une école à laquelle on n'appartient pas au point de vue religieux, pourvu que celle-ci soit également sunnite, n'est en rien contraire à l'esprit de la loi musulmane, ni par conséquent à l'ordre public, les tribunaux peuvent a fortiori user de cette même faculté dans l'intérêt supérieur de la justice;

-

Attendu que l'école hanéfite ne fait aucune différence entre les enfants des deux sexes; qu'elle leur reconnaît le droit absolu de ne contracter mariage que de leur plein consentement, dès qu'ils ont atteint leur puberté, ce qui est le cas pour Kheira; que ce principe, conforme à la Sounna, puisque le prophète lui-même a consulté sa fille vierge nubile Fathma, avant de la marier à Ali, ne porte aucune atteinte à la puissance paternelle; qu'en effet, la fille vierge nubile ne peut, en aucun cas, contracter mariage de son chef; que son père est simplement tenu de la consulter, ce qui a pour résultat d'empêcher les abus auxquels l'étendue du droit de contrainte a donné lieu; qu'ainsi tous les intérêts se trouvent sauvegardés sans que la loi soit violée; Attendu que l'école malékite elle-même admet que le père consulte sa fille avant de la marier; Attendu que cette solution éminemment orthodoxe a encore le mérite de se rapprocher du droit français, d'après lequel nul ne peut être contraint au mariage, la contrainte matrimoniale étant considérée avec raison comme un véritable attentat contre l'autonomie de la personne humaine ; Attendu, dans l'espèce actuelle, qu'il importe d'autant plus d'appliquer ces principes que le père de Kheira n'a, à aucune époque, témoigné une affection désintéressée à sa fille, qu'il s'est séparé à deux reprises de la mère de celle-ci et qu'il a fallu le forcer judiciairement à payer avec réguarité la chétive pension alimentaire de 0,35 centimes par jour qu'il devait à son enfant; qu'il est même allégué contre lui qu'il a été amené à consentir le mariage dont s'agit par des considérations de lucre; - Attendu, d'ailleurs, que sa résistance obstinée aux conseils du cadi, aux prières de la mère de Kheira, aux supplications de cette dernière, prouve le cas qu'il fait de ses préférences et de son bonheur;

Attendu, d'ailleurs, que surabondamment le mariage imposé à Kheira serait contraire aux prescriptions mêmes de l'interprétation malékite; qu'en effet, le droit de contrainte doit toujours s'exercer dans l'intérêt exclusif de l'enfant, que ce n'est pas un moyen d'oppression mis à la disposition du père; qu'il n'y a aucun résultat avantageux à espérer d'une union à la conclusion de laquelle l'épouse cherche à se soustraire avec une grande énergie, à tel point qu'elle manifeste même l'intention d'attenter à ses jours si elle y est contrainte;

Attendu, enfin, que la mère est armée par la loi du droit d'adresser au père des représentations lorsqu'il abuse de son pouvoir; que la mère de Kheira proteste contre l'union projetée; que le cadi, à son tour, lui qui est le protecteur né de tous les interdits et le surveillant légal de tous les tuteurs, la tutelle fût-elle exercée par le père, a, par la décision attaquée, blamé hautement le mariage projeté par le père de Kheira;

Par ces motifs: En la forme, reçoit l'appel de M'hamed El hadj ben

El hadj Abdallah; - Au fond, confirme la décision attaquée pour être exécutée selon sa forme et teneur et condamne l'appelant aux dépens; Charge le cadi de Miliana de l'exécution du présent arrêt.

M. RACK, av. gén. Mes HONEL et DOUDART DE LA GRÉE, av.

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Sous l'empire de l'ordonnance du 26 septembre 1842, qui leur conservait seulement leur statut personnel, les israélites algériens étaient soumis, pour leur statut réel, à la loi française, et par suite cette loi était seule applicable à la liquidation et au partage de leurs successions (1);

En admettant même que la succession d'un israélite algérien ouverte sous l'empire de ladite ordonnance soit régie par la loi mosaïque, comme il est de principe dans cette loi qu'en l'absence de toute disposition du père de famille les filles doivent toutes retirer les mêmes avantages de la succession paternelle et être traitées sur le pied d'une complète égalité, le fils du défunt ne saurait méconnaître les droits successoraux de l'une de ses sœurs, lorsqu'il a reconnu ceur de ses autres sœurs.

Dame SEMHA EDDERIC C. JACOB JAïs et consorts.

Sur la recevabilité de l'appel : - Attendu que le tribunal de première instance a été appelé à se prononcer sur l'homologation de la liquidation préparée par le notaire sur la qualité d'héritière de la femme Semha Jaïs, et à attribuer la somme de 4,852 francs; qu'il n'a pu statuer sur une pareille demande qu'en premier ressort, et par suite que l'appel relevé contre sa décision est recevable en la forme;

Au fond: Attendu que Jacob Jaïs est décédé en 1856 laissant pour lui succéder ses cinq enfants, la dame Semha Edderic appelante et les quatre intimés; Que cette succession était régie par la loi française; que les intimés l'ont formellement reconnu, savoir: Cohen Solal, l'un d'eux, en déclarant dans son exploit introductif d'instance que la maison dépendant de la succession dont s'agit était indivise entre toutes les parties en cause,

(1) V. en ce sens Alger, 2 janvier 1883 (Bull. jud., 1883, p. 112).

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