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Que

sur un blanc-seing qui ne lui avait été remis que pour adresser une requête à l'autorité administrative; - Attendu qu'à la suite de cette plainte une information criminelle a été dirigée contre Ravier; cette information a abouti à une ordonnance de non lieu fondée: 1° sur ce que la signature apposée au bas de l'acte de vente avait été reconnue par trois experts comme émanant du plaignant; 2° sur ce que les explications données par ce dernier étaient en contradiction avec l'état matériel de la pièce incriminée; Attendu, en effet, que Gourgue prétendait avoir écrit sa signature sur le recto d'une feuille de papier timbré et plusieurs lignes avant la fin de cette feuille, tandis que la signature apposée sur l'acte de vente produit par Ravier se trouvait au bas du verso;

Attendu qu'à la suite de cette ordonnance de non lieu Gourgue a actionné Ravier devant le tribunal civil de Mostaganem pour voir dire que la vente rapportée dans l'acte sous seing privé du 5 juillet 1880 n'a jamais été convenue ni réalisée et en entendre prononcer la nullité; Que dans ses conclusions de première instance il a demandé à prouver un certain nombre de faits; - Que par jugement du 11 juillet 1883, le tribunal, avant droit dire au fond, l'a autorisé à prouver : 1o qu'il n'a jamais vendu sa propriété à Ravier et n'en a jamais touché le prix; 2° que d'ailleurs Ravier était dans l'impossibilité de payer ce prix; 3° que Gourgue est demeuré toujours en possession de l'immeuble sans être inquiété par Ravier;

Attendu que Ravier a interjeté appel de ce jugement;

--

Sur la fin de non recevoir tirée de ce que Ravier ainsi que son défenseur ont assisté à l'enquête ordonnée par le jugement dont est appel : Attendu que l'acquiescement à un jugement peut être tacite et résulter de faits qui ne permettent point de douter que la partie a entendu l'accepter et l'exécuter; Mais que, dans l'espèce, l'assistance de Ravier à l'enquête n'a eu d'autre but que de reprocher les témoins produits par son adversaire; - Que d'ailleurs, avant l'audition de tous témoins, Ravier a formellement exprimé ses réserves à l'égard de son droit d'appel; Attendu que ces réserves indiquent suffisamment que Ravier n'a jamais entendu adhérer au jugement et renoncer à en interjeter appel;

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Au fond Attendu que les articulations dont la preuve a été admise par le tribunal ne sont ni concluantes ni pertinentes; Que Gourgue, ne pouvant plus désavouer formellement la signature apposée sur l'acte de vente qui lui est opposé par Ravier, se borne à demander à prouver qu'il n'a jamais vendu, sans même essayer d'établir que son consentement a été donné par erreur, extorqué par violence ou surpris par dol;

Que la preuve de la nullité de cet acte ne pourrait résulter que d'une vérification d'écritures ou d'articulations de faits de dol, de violence ou d'erreur qui ne sont nullement cités dans les conclusions de l'intimé;

Attendu que Ravier a établi qu'il s'était procuré les ressources suffisantes pour solder le prix de vente stipulé dans l'acte; - Qu'en effet, il avait emprunté, le 17 juin 1883, une somme de 3,000 francs par l'intermédiaire de Me. Cousinard, notaire à Oran et que le 29 juin, quelques jours avant la signature de l'acte, il avait reçu de ce notaire une somme de 1,000 francs;

Attendu il est vrai que Ravier semble ne pas avoir fait les diligences

nécessaires pour entrer en possession des immeubles achetés par lui immédiatement après l'expiration des délais de réméré stipulés dans l'acte, mais que ce retard, qui n'a duré que quelques mois, peut s'expliquer par le changement de domicile de Ravier; Qu'il résulte même des documents de la cause qu'au moment où, en février 1882, Gourgue a porté plainte contre Ravier, ce dernier se disposait à faire valoir ses droits;

Attendu, en cet état, qu'il échet d'infirmer le jugement interlocutoire dont est appel et que, la cause étant disposée à recevoir une solution définitive, il y a lieu de statuer sur le fond;

Attendu que la situation des parties est réglée par l'acte sous seing privé du 5 juillet 1880; que la demande d'enquête n'est, par les motifs ci-dessus déduits, point recevable; — Qu'il y a lieu, en conséquence, d'infirmer le jugement attaqué et de débouter Gourgue Pascal des fins de son exploit introductif d'instance;

En ce qui concerne les dommages-intérêts demandés par Ravier : Attendu qu'il y a lieu de faire droit à sa demande et que la Cour possède les éléments nécessaires pour en évaluer le montant;

Par ces motifs: Reçoit en la forme et au fond l'appel interjeté par Ravier; Infirme, en conséquence, le jugement interlocutoire du 11 juil let 1883; - Évoquant et faisant ce que les premiers juges auraient dù faire, -Dit que les faits articulés par Gourgue ne sont ni pertinents ni admissibles, le déboute en conséquence de sa demande; - Dit que l'acte de vente du 5 juillet 1880 fait foi entre les parties; Condamne en conséquence Gourgue à délaisser entre les mains de Ravier la propriété et libre possession des immeubles décrits dans cet acte; Condamne en outre Gourgue à payer à Ravier la somme de 500 francs tant pour indue possession que pour dommages-intérêts, etc.; - Le condamne aux dépens.

-

M. DU MOIRON, av. gén. Mes DOUDART DE LA GRÉE et AMAR, av.

COUR D'APPEL D'ALGER (Ch. des app. correct.).

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Les membres des tribunaux musulmans ne peuvent être traduits en justice, pour actes relatifs à leurs fonctions, qu'après une autorisation du gouverneur général de l'Algérie ;

Mais, cette autorisation accordée, c'est seulement à l'égard des assesseurs

près la Cour et les tribunaux que doivent être observées les formes établies au chapitre III du titre IV du Code d'instruction criminelle (D. 13 déc. 1866, art. 8);

En conséquence, la poursuite dirigée contre un cadi, pour crime ou délit, doit être exercée dans les formes ordinaires de procédure.

MINISTÈRE PUBLIC c. consorts EL MADANI.

Attendu qu'aux termes de l'article 8 du décret du 13 décembre 1866 les membres des tribunaux musulmans ne peuvent être traduits en justice, pour actes relatifs à leurs fonctions, qu'après une autorisation du gouverneur général de l'Algérie; Qu'en cas d'autorisation, les assesseurs près la Cour et les tribunaux ne peuvent être poursuivis que dans les formes établies au chapitre III du titre IV du Code d'instruction criminelle; Qu'il suit de là que les formes ordinaires de procédure doivent être observées dans les poursuites dirigées contre les autres magistrats musulmans; Attendu que, dans l'espèce, l'information dirigée contre le cadi de Mascara sur la plainte des prévenus a été précédée de l'autorisation du gouverneur général, en date du 28 août 1883; Que le juge d'instruction de Mascara était compétent, sans délégation spéciale, et que, l'ordonnance de non lieu par lui rendue étant devenue définitive, il s'ensuit que la fausseté des faits imputés au cadi est légalement et régulièrement démontrée ;

Au fond: - Attendu que les prévenus ont dirigé contre le cadi de Mascara les accusations les plus graves et les plus violentes dans un écrit qu'ils ont signé et qu'ils ont adressé au ministre de la justice, au gouverneur général de l'Algérie et au procureur général à Alger; - Que, mis en demeure de justifier ces accusations, ils ont été impuissants à en fournir la preuve; - Qu'ils persistent cependant à les maintenir devant la Cour comme ils l'ont fait à toutes les phases de la procédure;

Attendu que ces accusations ont été reconnues injustes et mal fondées par l'autorité compétente; -Qu'elles ne sont même pas vraisemblables, et qu'il serait déraisonnable d'admettre que le cadi de Mascara se fût livré aux malversations qu'on lui reproche en présence de ses assesseurs, ou qu'on lui eût offert des rémunérations supérieures à la valeur du litige engagé devant lui;

Attendu que les prévenus sont mal venus à soutenir qu'ils ont agi de bonne foi et qu'ils ont exercé loyalement le droit de plainte conféré à tout citoyen qui se croit lésé injustement; Que les termes dans lesquels la plainte est conçue, son envoi simultané au procureur général et au garde des sceaux, les procédés employés pour racoler les signatures qui devaient donner à ce document une plus grande valeur et la situation respective des plaignants envers le cadi démontrent d'une manière certaine qu'ils ont été dirigés uniquement par la pensée de nuire à ce magistrat;

Attendu que Mohamed ben Seddick, l'inspirateur et l'agent principal de la dénonciation, est allié par des liens étroits de famille à l'ancien cadi de Mascara, révoqué de ses fonctions; Que Ali Ould Hamadi et Kaddour ben Amar ont été incarcérés pour avoir outragé le cadi actuel dans l'exercice de ses fonctions; Que les frères Madani ont porté devant son tribunal plusieurs procès dans lesquels ils n'ont pas obtenu gain de cause;

- Que ces précédents peuvent donner l'explication des sentiments de rancune et de vengeance auxquels ils ont obéi en dénonçant ce magistrat avec l'espérance, non pas d'obtenir le redressement de griefs imaginaires, mais de le discréditer dans l'esprit de ses chefs et de provoquer contre lui des mesures rigoureuses;

Par ces motifs : - Confirme purement et simplement le jugement attaqué pour qu'il sorte son plein et entier effet.

M. DANDONNEAU, av. gén. Mes HONEL, PROBST et VANDIER, av.

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Les dispositions de l'article 37 de l'ordonnance du 26 septembre 1842 permettent aux tribunaux, dans les litiges entre musulmans et Français ou étrangers, d'admettre la preuve par témoins, même dans les cas où elle n'est pas admise par la loi française;

Mais encore faut-il que les faits articulés en preuve ne soient pas démentis par les propres déclarations de celui qui veut les prouver.

EL GHAOUTI OULD BOU MÉDINE GOURMALA C. PANCRACE.

Attendu que, suivant acte reçu par M° Daget, notaire à Tlemcen, le 28 août 1878, enregistré, El Ghaouti Ould Bou Médine Gourmala a vendu à Pancrace, moyennant le prix de 1,000 francs, une pièce de terre en nature de jardin, sise dans la banlieue de Tlemcen, connue sous le nom de Ziani, d'une contenance de 60 ares; Qu'aux termes du même acte le vendeur s'est réservé la faculté d'exercer le réméré pendant deux ans, à compter du 28 août 1878; - Qu'il était stipulé que, faute par le vendeur de rembourser à l'acquéreur, à Tlemcen, en l'étude du notaire rédacteur de l'acte, en un seul payement et dans le délai convenu, le prix principal de la vente, l'acquéreur resterait propriétaire incommutable de l'immeuble vendu, sans qu'il fût besoin d'autre acte de procédure qu'un simple avertissement donné par lui à son vendeur trois mois avant l'expiration du délai du réméré ;

Attendu que c'est seulement à la date du 1er septembre 1880 que El Ghaouti Ould Bou Médine Gourmala s'est présenté à l'étude de Me Dagel

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Que

et a offert à Pancrace de lui rembourser le prix de son acquisition; c'est donc avec raison que, se fondant sur les clauses de la convention intervenue entre les parties, Pancrace a refusé d'accepter le remboursement qui lui était offert; - Que d'une part, en effet, le délai fixé pour l'exercice du réméré était expiré; - Que, d'autre part, El Ghaouti Ould Bou Médine Gourmala avait été averti trois mois avant l'expiration de ce délai, ainsi qu'il l'a expressément reconnu dans une déclaration en date de fin mai 1880, par lui remise à Pancrace; - Attendu que, s'il résulte de cette déclaration et de l'acceptation qu'en a consentie Pancrace que le délai du réméré a été prorogé au 31 août 1880, le réméré ne pouvait plus être exercé utilement le 1er septembre 1880, le délai convenu ayant pris fin le 31 août à minuit;

Attendu que El Ghaouti Ould Bou Médine Gourmala prétend, il est vrai, que, le 31 août 1880, dans la soirée, il s'est présenté au domicile de Pancrace et lui a offert son remboursement; Que, ce fait étant énergiquement dénié par Pancrace, il demande, dans ses conclusions subsidiaires, à être autorisé à en rapporter la preuve par témoins;

Attendu que, si les dispositions de l'article 37 de l'ordonnance du 26 septembre 1842 permettent aux tribunaux, dans les litiges entre musulmans, et Français ou étrangers, d'admettre la preuve par témoins, même dans les cas où elle n'est pas admise par la loi française, encore faut-il que les faits articulés en preuve ne soient pas démentis par les propres déclarations de celui qui veut les prouver;

Attendu que dans sa requête introductive d'instance El Ghaouti Ould Bou Médine Gourmala reconnait de la manière la plus explicite que, le jour même où il s'est présenté chez Pancrace, il a déposé chez M° Daget, sur le refus de Pancrace de la recevoir, la somme de 1,000 francs qu'il avait offerte à celui-ci ; Que, les documents versés au procès par El Ghaouti Ould Bou Médine Gourmala établissant que le dépôt de la somme par lui offerte a été effectué le 1 septembre 1880, il s'ensuit que, de son propre aveu, c'est le 1er septembre qu'il a fait à Pancrace l'offre dont il cherche à se prévaloir; Qu'il ne peut donc être reçu à prouver que cette offre a été faite le 31 août 1880 dans la soirée;

Attendu, d'ailleurs, que les faits articulés par l'appelant ne sont pas pertinents; Que, fussent-ils établis, il ne s'ensuivrait pas, en effet, que l'offre qu'il prétend avoir faite à Pancrace, le 31 août au soir, fût valable, puisque, pour être régulière, cette offre, conformément à la convention des parties, devait être faite en l'étude de Me Daget et non au domicile de Pancrace;

Attendu que El Ghaouti Ould Bou Médine Gourmala succombe dans son appel et dans sa prétention; Qu'il doit, aux termes de l'article 130 du

Code de procédure civile, supporter les dépens;

Par ces motifs :

Reçoit l'appel comme régulier en la forme, et, sans

s'y arrêter ni avoir égard, - Dit qu'il a été bien jugé, mal appelé; Confirme en conséquence le jugement dont est appel.

M. MARSAN, subst. du proc. gén. Mcs DOUDART DE LA GRÉE et MALLARMÉ, av.

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