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devant le juge du lieu où est le siége de cette société, sans égard au domicile particulier de ses membres;

Qu'il n'y a d'exception à cette règle générale qu'au cas prévu par l'art. 14 du code civil, et que le sieur Cheillant ne peut invoquer cette exception, puisque Philip, Alexandre et comp. sont français :

LE TRIBUNAL faisant droit au déclinatoire proposé par Philip, Alexandre et comp., se déclare incompétent et renvoie les parties et matière à se pourvoir devant qui de droit, avec dépens (1).

Du 19 décembre 1836.-Prés. M. BENSA fils. Plaid. MM. MAURANDI pour Philip, F. GILLY pour Cheillant.

Assurance. Facultés. - Délaissement.

-Navire.

- Dénomination. Assuré commissionnaire.— Ordre. Bonnes ou mauvaises nouvelles. Départ. - Réticence.

Lorsque le navire porteur des facultés assurées a été désigné sous diverses dénominations avec la clause ou tel autre nom qui serait plus exact, l'assureur est-il non-recevable à se plaindre de l'insuffisance de la désignation? (Rés. aff.)

l'assu

La clause avec ou sans ordre consentie par reur autorise-t-elle l'assuré commissionnaire à ne pas lui faire connaître l'ordre d'assurer qu'il a reçu de son commettant? (Rés. aff.) Toutefois, l'assuré commissionnaire qui se pré

(1) Voy. ce Recueil, tom, xvII, 1re part., pag. 33.

vaut, en justice, des lettres d'ordre qu'il a reçues, peut-il se dispenser de les communiquer dans la partie qui concerne l'assurance commise? (Rés. nég.)

Lorsque l'assurance a été faite sur bonnes ou mauvaises nouvelles, l'assureur ne peut-il exciper de ce que la perte a eu lieu avant l'assurance qu'autant qu'il prouve que l'assuré en avait connaissance au moment du contrat? (Rés. aff. )

L'assuré n'est-il tenu de déclarer le départ du navire, antérieur à l'assurance, que dans le cas où à cette époque le navire serait en retard, c'est-à-dire qu'il aurait déjà dépassé d'un certain temps la durée ordinaire du voyage qu'il effectue? (Rés. aff.)

En consequence, l'assureur ne peut-il exciper de la réticence résultant du défaut d'indication de l'époque du départ du navire, lorsque, non seulement il n'est pas prouvé que l'assuré en ait eu connaissance, quand il a commis l'assurance, mais qu'il est justifié, au contraire, qu'à cette époque, le navire avait un temps de navigation moindre que la durée ordinaire du voyage? (Rés. aff.)

(Rodoconachi contre assureurs.)

LE 21 avril 1838, les sieurs Rodoconachi fils et comp., négocians à Marseille, font assurer par la compagnie d'assurances de Marseille, gérée par le

sieur Bouquet, avec la clause de bonnes ou mauvaise nouvelles, la somme de 6,700 fr., pour compte de qui que ce puisse être, telle désignation de pour compte que portent le ou les connaissements, avec ou sans ordre, de sortie de Constantinople jusques à Trieste, sur deux balles soies marquées D, nos 5 et 6, évaluées de gré à gré à raison de 3,500 fr., chaque balle, chargées ou à charger à bord du navire sous pavillon autrichien, appelé Anna ou Hanna ou Anaïs, ou de tel nom qui plus exact serait, commandé par le capitaine B. Voïcovich ou tout autre pour lui, reçu ou non reçu.

La prime est convenue à raison d'un pour cent.

Le 24 du même mois d'avril, les sieurs Rodoconachi fils et comp., font assurer par divers assureurs particuliers de la place Marseille, 7,600 fr. sur deux caisses opium marquées V, nos 1 et 2, évaluees de gré à gré à 3,800 fr. chaque caisse, chargées sur le navire sous pavillon autrichien Hanau ou Anna ou tel autre nom qui plus exact serait, avec les mêmes clauses, la même désignation de capitaine, pour le même voyage, que dans la précédence assurance et pour la prime de un et un quart pour cent.

Le navire porteur des facultés assurées et dont le véritable nom est Hanau périt en cours de voyage, le 24 mars, entre Ipsara et Mételin.

Les 11 et 17 mai 1838, les sieurs Rodoconachi fils et comp. signifient à leurs assureurs délaissement des facultés assurées et les assignent à fins de paiement de la pertę,

Les assurés produisent les pièces justificatives du chargement et de la perte et ils communiquent deux lettres à eux écrites les 13 et 15 avril 1838, par le sieur Ralli de Trieste, leur commettant, dans la partie de ces lettres relative à l'assurance dont il s'agit.

Les assureurs contestent les délaissemens.

Ils soutiennent que l'assurance est nulle.

1o Pour fausse désignation du navire porteur des facultés assurées;

2° Parce que les commettans des sieurs Rodocochi avaient dû avoir connaissance de la perte lorsqu'ils avaient donné l'ordre de faire assurer;

3o Pour cause de réticence sur l'époque du départ du navire, de Constantinople, départ qui avait eu lieu le 10 mars.

Les assureurs demandent, avant toute décision au fond, la copie entière des lettres d'ordre produites par l'assuré.

La réponse des sieurs Rodoconachi, en fait et en droit, est reproduite dans les motifs du jugement ci-après.

JUGEMENT.

Attendu qu'en désignant dans la police sous les noms de Anna, Hanna ou Anaïs le navire sur lequel étaient chargées les facultés assurées, les assurés ont fait connaître aux assu→ reurs leur incertitude sur son véritable nom; que c'était à ceuxci, s'ils avaient voulu de plus amples renseignemens sur le navire qu'ils prenaient en risque, à les demander ou à se les procurer; qu'ayant accepté la condition ou tel autre nom qui plus exact serait, ils sont non-recevables à se plaindre de l'insuffisance de la désignation

Attendu que la clause avec ou sans ordre, consentie par les assureurs, autorisait les assurés à ne pas leur faire connaître les ordres qui pouvaient leur avoir été transmis par leur commettant à raison des assurances dont s'agit; mais les assurés, s'étant prévalus de ces lettres d'ordre dans le procès, ne sauraient se retrancher derrière cette clause pour se refuser à les communiquer; que cette communication ayant toutefois été faite au défenseur des assureurs, dans la partie desdites lettres qui avait trait aux assurances dont il s'agit, les assurés ne peuvent être tenus au-delà; qu'au surplus, les originaux desdites lettres ayant été produits au tribunal, il a pu se convaincre qu'elles ne contenaient rien en dehors de la partie qui avait été communiquée aux assureurs dont ceux-ci pussent se faire un moyen dans leur défense;

Attendu que les ordres donnés de Trieste pour effectuer les deux assurances en question sont à la date des 13 et 15 avril dernier ;

Que, l'assurance étant faite sur bonnes ou mauvaises nouvelles, ce serait aux assureurs à prouver, ainsi que l'art. 367 du code de commerce leur en fait l'obligation, qu'aux susdites époques, l'assuré commettant savait la perte du navire; que, loin que cette preuve soit rapportée par les assureurs, il est au contraire établi que la perte du navire, bien qu'encourue le 24 mars, entre Ipsara et Mételin', n'a été connue à Trieste, d'où est parti l'ordre de faire assurer, que le vingt du mois d'avril:

'Attendu que la réticence, 'grammaticalement parlant, est la suppression ou l'omission volontaire d'une chose qu'on devrait dire:

Qu'en droit, pour qu'il y ait réticence, dans le sens de l'art. 348 invoqué par les assureurs, il faut le concours simultané des deux circonstances suivantes : 1o que le fait non déclaré soit à la connaissance de l'assuré; 2o que le fait soit de

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