Page images
PDF
EPUB

mer pour le bien et le salut communs, doit-elle être toujours fixée au tiers de l'estimation, quoique l'expert chargé de cette estimation n'ait admis la déduction que pour un quart? (Rés. aff.)

Les frais d'expertise pour la vérification et constatation des avaries et dommages éprouvés par une marchandise dont partie a été jetée à la mer pour le bien et le salut communs, doiventils être admis en avarie commune? (Rés. aff. ) En est-il de même des frais relatifs au curateur nommé pour représenter à l'expertise les assureurs de la marchandise? (Rés. nég.)

(Colary contre divers consignataires).

LE 17 avril 1838, le navire Aristoteli part de Constantinople pour Marseille avec un chargement composé de diverses marchandises, adressées à divers consignataires, entr'autres, des blés et des haricots.

Dès le 18, le navire est assailli d'une violente tempête qui le fatigue beaucoup et lui occasionne de l'eau qu'on est obligé de pomper de deux en deux heures.

Le 19, plusieurs coups de mer tombent successivement à bord, arrachent la chaloupe de ses amarres et la remplissent d'eau ainsi que le canot. Le navire incline fortement sur le côté sans pouvoir se relever.

Dans cette position périlleuse, le capitaine et

l'équipage délibèrent et décident pour le bien et le salut communs, afin de soulager le navire et de l'aider à se relever, de faire jet à la mer de divers objets appartenant au navire et d'une partie de haricots qui se trouvait placée dans la chambre et le carré de l'équipage.

Ce jet étant exécuté, le navire parvient à se relever; on cesse de jeter, et l'équipage parvient à franchir les pompes.

la mer, continue

Le navire, toujours fatigué par sa route, et le 25 avril, il arrive au port du Frioul, où il est mis en quarantaine.

Pendant la quarantaine, la cargaison est débarquée.

Ensuite et après l'admission du navire à la libre pratique, le capitaine fait le rapport de sa navigation devant le président du tribunal de commerce.

Le 30 juin suivant, le capitaine Colary assigne les consignataires de la cargaison devant le tribunal de commerce, à fins de règlement d'avaries com

munes.

Le 2 juillet, jugement qui nomme un expert répartiteur.

Les consignataires des haricots, dont une partie a été jetée à la mer, obtiennent, de leur côté, du président du tribunal, la nomination d'un expert pour la vérification des avaries et dommages éprouvés par les haricots chargés à leur adresse, et d'un curateur chargé d'assister à cette expertise pour leurs assureurs absens.

Les experts procèdent et remettent leur rapport.

Le capitaine fait signifier aux consignataires l'état des articles dont il demande l'admission en avaries communes, savoir :

10 Valeur de la cuisine et de ses ustensiles jetés à la mer, 220 fr.;

2o Valeur de 25 quintaux bois à brûler aussi jetés, 25 fr., 3o Réparation du dommage de la chaloupe sabordée pour faire écouler l'eau, 50 fr.

4o Remplacement du grand canot jeté à la mer, 380 fr.; 5o Remplacement d'un autre canot de 13 pieds aussi jeté, 350 fr.;

60 Remplacement d'une ancre de 9 quintaux., aussi jetée, 360 fr.;

7. Remplacement de deux bonnettes basses aussi jetées, 190 fr.;

80 Remplacement d'une bonnette de hune, aussi jetée, 60 fr.; 9o Remplacement de cinquante planches à l'usage du bord, aussi jetées, 150 fr.;

10° Remplacement de sept paires avirons de différentes dimensions, 50 fr.;

11. Remplacement de deux barriques à eau, de 12 milléroles chacune, 120 fr.;

20 fr.;

12° Remplacement de deux carreaux cerclés en fer, 13° Remplacement de la partie haricot jetée à la mer, 1100 fr.

55 c.,

14° Coût de l'expédition du rapport du capitaine, 9 fr. 35 c.;

15. Frais d'expertise du navire à Marseille, 46 fr. 10 c.; 160 Enfin, frais faits dans l'instance en règlement d'avaries, pour mémoire.

Cet état est débattu par les consignataires ;

lls demandent que les art. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 10 et 12, ne soient admis que pour les deuxtiers, les art. 9 et 11 pour la demie seulement,

T. XVIII.

ire P.

16

et ils déclarent, quant aux autres articles, s'en rapporter à justice, offrant de payer la contribution qui sera mise à leur charge.

Les consignataires des haricots demandent, en outre, l'admission en avaries communes de la partie jetée à la mer, d'après l'évaluation qui en a été faite par l'expert et des frais de l'expertise, dans lesquels ils comprennent ceux du curateur qui y a représenté les assureurs de cette marchandise.

JUGEMENT.

Attendu qu'il résulte du consulat fait devant M. le président du tribunal de commerce par le capitaine Colary, dans les vingt-quatre heures de son admission à la libre pratique, ledit consulat dûment affirmé par les principaux de son équipage, qu'à la suite d'une violente tempête qui assaillit le navire Aristotely le 19 mars, plusieurs coups de mer tombèrent successivement dans le navire et le firent incliner tellement sur le côté, qu'il ne pouvait plus gouverner; que, dans cette situation, véritablement critique, le capitaine Colary consulta son équipage et il fut délibéré, à l'unanimité, d'alléger le navire et de faire jet à la mer de presque tous les objets qui se trouvaient sur le pont appartenant au navire, ainsi que d'une partie de haricots qui était placée dans la chambre et dans le carré de l'équipage, ce qui fut exécuté; que le même consulat contient la nomenclature des divers objets qui furent jetés;

Attendu qu'en droit, et aux termes de l'art. 400 du code de commerce, la loi répute avaries communes tous les objets qui sont volontairement sacrifiés après délibération motivée pour le bien et le salut communs du navire et de la cargaison; que l'état d'avarie présenté par le capitaine, à l'exception des frais de justice, qui sont un accessoire de l'avarie, ne se composant que du remplacement des divers objets qui ont été jetés, et

la réparation de ceux qui ont été volontairement endommagés par suite de la délibération de l'éguipage et en vue du Lien et du salut communs du navire et de la cargaison, il y a lieu de les admettre tous indistinctement dans le règlement sollicité par le capitaine;

Attendu, relativement à la quotité pour laquelle ces divers objets doivent être admis dans le règlement, qu'il résulte du rapport fait par l'expert nommé par le tribunal, pour constater l'avarie et en faire l'estimation, que cet expert, sans avoir sous les yeux aucun point de comparaison et s'en rapportant simplement à la déclaration du capitaine, n'a déduit qu'un quart, pour différence du neuf au vieux, sur les objets de remplacement qui en étaient susceptibles, qu'en opérant ainsi cet expert, s'est écarté de la jurisprudence du tribunal qui, dans pareille circonstance, porte toujours la réfraction à faire pour l'usé, au tiers; qu'il y a donc lieu de rectifier, quant à ce, l'estimation portée audit rapport;

Attendu que la prétention, élevée par les sieurs Martel et Boeuf, de faire admettre en avaries communes, non seulement les frais par eux faits pour la vérification et constatation des avaries souffertes par la partie haricots venue à leur consignation, mais encore les frais de nomination d'un curateur et assistance de ce curateur à l'expertise, ne saurait être accueillie en totalité par le tribunal;

[ocr errors]

Que, si l'on peut considérer, en effet, les frais d'expertise desdits haricots comme une conséquence de l'avarie, puisqu'elle a été nécessitée pour déterminer la partie qui en avait été jetée à la mer, et établir leur valeur contribuable dans l'avarie commune, il ne saurait en être de même des frais relatifs au curateur; que ces frais n'ayant eu lieu que pour régulariser l'expertise à l'encontre des assureurs étrangers, doivent rester à la charge de ceux dans l'intérêt desquels ils ont été faits; qu'il y a donc lieu de les rejeter de l'avarie commune et de n'y admettre que la partie, seulement, qui peut être considérée comme l'accessoire de cette avarie;

« PreviousContinue »