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Quant au sieur Danguy, créancier seulement de 300 fr., le sieur OEuf soutient que ses moyens d'opposition sont sans fondement, parce que les irrégularités reprochées aux livres du failli ne sont point un obstacle au concordat, tant que le failli ne se trouve point dans le cas de banqueroute frauduleuse; que, dès lors, et quand la majorité des créanciers trouve juste de consentir le concordat, le tribunal a la faculté d'en accorder l'homo, logation;

Qu'à l'égard du sieur OEuf, la justice, tout en le condamnant comme banqueroutier simple pour quelques irrégularités reconnues dans ses livres, a constaté que ces irrégularités étaient exemptes de fraude;

Que ce failli ne s'est donc point trouvé dans un cas qui le rendit indigne de la commisération de ses créanciers et l'empêchât d'obtenir un concordat.

Les syndics de la faillite se joignent au sieur Oeuf pour demander le rejet des oppositions dont il s'agit, tant comme non-recevables que comme mal fondéés.

JUGEMENT.

Attendu que les expressions génériques de créanciers opposans, employées dans l'art. 523 du code de commerce, ne permettent pas de restreindre le droit d'opposition aux seuls créanciers vérifiés et affirmés avant le concordat;

Qu'il suffit de ne pas se trouver dans l'une des exclusions prononcées par l'art. 520, et qu'au moment de l'opposition la créance ait été reconnue, pour que l'action compète;

Que c'est dans ce sens que la nouvelle loi sur les faillites du

28 mai 1838 a expliqué et interprété, dans son art. 312, la disposition de l'art. 523 du code;

Qu'il est, d'ailleurs, de principe général qu'il suffit d'avoir intérêt pour avoir action, et que les fins de non-recevoir ne peuvent se suppléer;

Attendu que, dans l'espèce, les sieurs Delpuget et Marini et R. de Piccioto fils ont fait vérifier et ont affirmé leurs créances dans la huitaine du concordat, et par conséquent, avant l'expiration du délai prescrit par l'article précité; qu'ils étaient donc créanciers reconnus lorsqu'ils ont formé leur opposition, et que, dés lors, aucune fin de non-recevoir, ne saurait leur être utilement opposée ;

Sur le fond:

Attendu que la prohibition du concordat, déclarée par l'art. 521 du code de commerce, ne s'applique qu'au banqueroutier frauduleux, qu'il suffit, pour s'en convaincre, de rapprocher cet article avec la disposition de l'art. 613 qui admet à la réhabilitation le banqueroutier simple;

Que l'on ne peut, en effet, supposer que la loi ait voulu attacher plus d'importance au concordat qu'elle n'en a mis à l'acte qui restitue au failli la plénitude de ses droits, et le replace dans le même état où il était avant la faillite;

Que si, donc, elle a autorisé la réhabilitation dans le cas de banqueroute simple, il faut en conclure qu'elle n'a pas entendu, dans le même cas, défendre le concordat;

Que la jurisprudence, il est vrai, n'est pas uniforme sur ce point; mais qu'aujourd'hui, bien que la faillite du sieur OEuf soit régie par les dispositions de l'ancienne loi sur les faillites, toute incertitude doit cesser, en l'état de la disposition précise de l'art. 511 de la nouvelle loi (1);

1

Attendu que les faits d'incertitude et de fraude qui autorisent

(1) Ainsi conçu: «si le failli a été condamné co mme banqueroutier simple, le concordat pourra ètre formé.

fe tribunal à refuser l'homologation du concordat, sont laissés à l'appréciation du juge; que l'on ne peut considérer comme telle l'irrégularité dans les écritures;

Attendu que le jugement du tribunal de police correctionnelle qui a déclaré le sieur Joseph-Basile OEuf, banqueroutier simple, est uuiquement motivé sur l'irrégularité de ses écritures, et qu'il exclut formellement le fait de fraude;

Attendu que les créanciers opposans n'ont justifié d'aucun nouveau fait qui puisse déterminer le tribunal à déployer contre le sieur OEuf une sévérité dont il n'a pas usé jusqu'ici envers les faillis qui se sont trouvés placés dans les mêmes circonstances;

Attendu que toutes les formalités qui, d'après la loi, doivent précéder et accompagner le concordat, ont été remplies;", Ouï M. PLAGNIOL, juge-commissaire de la faillite;

LE TRIBUNAL, admet les sieurs Delpuget et Marini et R. de Piccioto fils, dans leurs oppositions, envers le concordat dont il s'agit, pour la forme seulement; et de même suite, sans s'arrêter à cette opposition non plus qu'à celle formée par le sieur Danguy aîné, faisant droit, au contraire, aux fins prises par le sieur OEuf et par les syndics provisoires de sa faillite, homologue le susdit concordat pour être exécuté suivant sa forme et teneur à l'égard de tous les créanciers chirographaires du sieur OEuf; déclare le sieur Joseph-Basile OEuf excusable et susceptible d'être réhabilité; condamne les sieurs Delpuget et Marini R. de Piceioto fils et Danguy aîné, opposans, aux dépens de la présente instance (2).

(2) En admettant que le code de commerce ne fût pas assez explicite pour permettre d'appliquer au failli, condamné comme banqueroutier simple, le bénéfice du concordat, la nouvelle lor a fait cesser tous doutes sur ce point par la disposition de son art. 511, disposition établie non moins en faveur du failli reconnu innocent de fraude, que dans l'intérêt de ses créanciers, à qui l'interdiction du concorder pouvait nuire essentiellement, taudis qu'il restait au failli banqueroutier simple,

Da 17 juin 1889. Prés. M. CANAPLE. Plaid. MM. MAURANDI, Pour OEuf, ODDO, pour les syndics; FRAISSINET, pour Marini, etc.; MONDIN, pour Danguy.

Vente. -Terme. Prorogation. Consentement tacite.

L'acheteur qui s'est réservé la faculté d'annuler ou de proroger le marché à l'expiration du terme convenu pour l'arrivée et la livraison de la marehandise, est-il, par contre, dans l'obligation, à l'expiration du terme, de dénoncer son option au vendeur ? (Rés. aff.)

Par suite, lorsque, interpellé par le vendeur de déclarer s'il annule ou proroge le marché, l'acheteur garde le silence, ce silence emporte-il de sa part un consentement tacite à la prorogation? (Rés. aff.)

(Amodeo contre Pissin, Cucurny, Paul et Armand.)

LE 22 janvier 1838, le capitaine Amodeo, commandant le navire napolitain Nuova-Sincerita vend aux sieurs Paul Auguste fils et Armand, Alphonse Pissin et Cucurny oncle et comp., une partie pierres ponces de Lipari, à recevoir de son

les avantages de la cession de biens et de la réhabilitation. Voy. Arrêt de la cour de cassation du 31 janvier 1837, rapporté dans le Journal du Palais avec la note des décisions en sens divers, rendues sur la question, tom. 1er de 1837, pag. 331 et observation des auteurs du Recueil général des lois et ordonces sur la section du concordat, tom. de 1$38, pag. 152,

navire, à raison d'un tiers chacun, sur le quai, dans le courant des mois d'avril et mai suivans. Les acheteurs se réservent la faculté d'annuler ou de proroger la vente, dans le cas où le navire n'arriverait pas dans le temps convenu.

Les pierres ponces vendues n'arrivent qu'après l'expiration des deux mois.

Le capitaine Amodeo, vendeur; interpelle ses acheteurs de déclarer s'ils entendent annuler ou proroger le marché.

Les sieurs Paul Auguste et Armand et le sieur Cucurny, consentent à proroger.

Le sieur Pissin garde le silence.

Le 12 juin, le capitaine Amodeo assigne les acheteurs devant le tribunal de commerce; il demande l'autorisation de faire débarquer, met:re en magasin et vendre aux enchères publiques la partie pierres ponces dont il s'agit, à leurs risques et péril, et condamnation contre eux au paiement de tous frais et différence de prix.

Les sieurs Cucurny oncle et comp. offrent de recevoir le tiers les concernant.

Les sieurs Paul Auguste et Armand, pour ce qui les regarde, font une offre pareille.

Le sieur Pissin conteste; il soutient que la vente a été résolue par l'expiration du terme convenu pour la livraison, et que son silence sur l'interpellation du vendeur, indiquait qu'il n'entendait pas proroger le marché, mais l'annuler, comme il l'était par le fait.

JUGÉMÉNT.

Attendu qu'il est convenu au procès que les acheteurs avaient

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