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Que s'il en était autrement, il en résulterait que les tribunaux de commerce pourraient se mettre au dessus de la loi, et ordonner, dans tous les cas, l'exécution provisoire de leurs jugemens, sans caution et sans qu'il y eût possibilité d'une réformation sur ce point;

Attendu que cette supposition est inadmissible et qu'il doit toujours y avoir un moyen d'assurer le respect dû à la loi;

LA COUR, émendant, infirme le jugement en ce qu'il autorise l'exécution provisoire sans caution; ordonne que cette exécution provisoire n'ait lieu qu'à la charge de donner caution ou de justifier de solvabilité suffisante;

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Du 17 décembre 1838. Cour royale d'Aix, première chambre. -Prés. M. PATAILLE, P. P.— Plaid. MM. PERRIN et MOLLET.

Lettre de change. Domicile indiqué. — ProviDéfaut de protêt. — Faillite. Recours.

sion.

-Faillite.

Le tireur d'une lettre de change payable dans un autre lieu que celui du domicile du tiré, est-il tenu, pour justifier la provision, de prouver, non seulement que le tiré lui est redevable du montant de la traite, mais encore que les fonds ont été faits au lieu et au domicile indiqués pour le paiement? (Rés. aff.)

En conséquence, si le tireur ne rapporte pas cette dernière preuve, est-il tenu, en cas de non paiement de la traite à l'échéance, d'en rembourser le montant au porteur ? (Rés. aff.)

Le porteur a-t-il droit à ce remboursement, nonobstant le défaut de protét à l'échéance de la

lettre de change, si, d'ailleurs, à cette époque, le tiré était en faillite? (Rés. aff.)

En doit-il étre ainsi lors, surtout, que le tireur, postérieurement à l'expiration des délais fixés par la loi pour l'exercice du recours en garantie, a reçu du tiré, son débiteur, un dividende sur le montant de sa créance, destiné à étre la provision de la lettre de change non payée, et l'a libéré du surplus ? ( Rés. aff.)

Dans ce cas, l'offre de tenir compte au porteur du dividende reçu ne peut-elle affranchir le tireur de l'obligation de rembourser l'entier complément de la lettre de change? (Rés. aff. )

(Del Corral y Puente contre Braquety.)

LE 16 août 1837, le sieur Barthélemy Braquety tire de Marseille une lettre de change de 700 pistoles sur le sieur Samuel de M. Conquy, de Gibraltar, payable à trois mois de date, au domicile du sieur Pedro-Pascal Vela à Cadix.

La première est indiquée à l'acceptation chez le sieur Vela.

Cette lettre de change, négociée sur la seconde, est transmise, par suite d'endossemens successifs, au sieur Pierre del Corral y Puente, négociant, Cadix.

à

Le 10 septembre, celui-ci réclame du sieur Vela la première acceptée.

Le sieur Vela affirme ne l'avoir pas reçue.
Après plusieurs jours d'attente sans que

la

pre

mière arrive en mains du sieur Vela; le sieur del Corral y Puente envoie la copie ou seconde à Gi

braltar, pour la faire accepter par le tiré Conquy. Le sieur Conquy répond qu'il n'acceptera que la première originale.

Avant que la seconde envoyée à Gibraltar soit retournée au sieur del Corral y Puente, l'époque de l'échéance ( 16 novembre) arrive; dans l'intervalle, le sieur Conquy, tiré, était tombé en état de faillite.

Ce n'est que le 25 novembre 1837 que le sieur del Corral y Puente peut faire un protêt faute d'acceptation, et plus tard, en mars 1838, ayant fait représenter la traite au sieur Conquy, à Gibraltar, celui-ci répond que ses comptes avec le tireur ont été clôturés.

Le 12 mars, acte de protêt constatant cette réponse et le défaut de paiement.

Effectivement, le sieur Conquy ayant proposé à ses créanciers un arrangement à trente pour cent de leurs créances, le sieur Braquety s'était fait représenter et avait accepté le dividende offert sur le solde de son compte courant avec le sieur Conquy, dans lequel se trouvait compris le montant de la lettre de change payable à Cadix par lui fournie et dont il s'agit.

Le 6 juin 1838, le sieur del Corral y Puente signifie au sieur Braquety la traite et le protêt du 12 mars et l'assigne devant le tribunal de commerce de Marseille, à fins de paiement de la somme

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de 11,251 fr. 30 c., montant de la traite avec frais de protêt et de retour.

Dans le courant de l'instance et le 19 juin 1838, le sieur del Corral y Puente fait signifier au sieur Braquety le protêt faute d'acceptation fait à Cadix le 25 novembre 1837 et un acte dressé à Gibraltar le 18 mai 1838, portant déclaration, de la part du sieur Conquy, qu'il était devenu insolvable quelque temps avant l'échéance de la lettre de change dont il s'agit, et que le sieur Braquety avait consenti à recevoir 30 pour cent sur le solde de son compte courant avec lui.

Le 23 juin, le sieur Braquety, en réponse, fait signifier au sieur del Corral y Puente que, la traite n'ayant pas été protestée à son échéance, la provision qui en avait été faite en temps utile est restée définitivement pour le compte du porteur et à ses seuls risques; que, toute fois, le sieur Braquety ayant, par erreur, reçu du sieur Conquy 30 pour cent sur le montant de la traite, il reconnaît juste d'en tenir compte au sieur del Corral y Puente et il fait offre à ce dernier de lui compter ce dividende.

A l'audience, le sieur Braquety soutient que la provision de la lettre de change dont il s'agit existait en mains du sieur Conquy, tiré, puisque celuici lui était redevable d'une somme excédant celle qui formait le montant de la lettre de change.

Que, dès lors, le sieur del Corral y Puente, porteur, ayant négligé de faire constater par un protêt le défaut de paiement à l'échéance, il avait perdu

tout recours contre lui, tireur, aux termes des art. 116 et 170 du code de commerce.

Le sieur Braquety, conformément à l'acte par lui signifié le 23 juin, réitère l'offre de remettre au sieur del Corral y Puente les 30 pour cent reçus du sieur Conquy sur le montant de la traite.

Le sieur del Corral y Puente soutient que l'exception opposée par le sieur Braquely est inadmissible, parce que la provision n'est pas suffisamment justifiée, puisqu'il n'est pas établi que les fonds destinés à acquitter la lettre de change eussent été faits à Cadix chez le sieur Vela, lieu indiqué pour le paiement.

Que, d'ailleurs, la provision se trouvait détruite par l'état d'insolvabilité notoire dans lequel se trouvait le sieur Conquy le 16 novembre 1837, à l'époque de l'échéance de la traite, insolvabilité dont le sieur Conquy avait connaissance avant comme après cette époque.

JUGEMENT.

Attendu que le porteur de la lettre de change dont il s'agit n'a rempli aucune des formalités exigées par les art. 161 et suivans du code de commerce;

Attendu qu'il est justifié que le sieur Samuel Conquy, tiré, était redevable au sieur Braquety, au moment de l'échéance de la lettre de change dont il s'agit, d'une somme plus forte que celle qui faisait l'objet de ladite lettre de change; qu'il y avait donc provision chez le tiré, aux termes de l'art. 116 du code de commerce;

Qu'en supposant que la provision dût également exister au lieu où la lettre de change était payable, sa non existence

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