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Lorsque deux polices d'assurance ont été successivement souscrites sur les mêmes facultés, faut-il, pour qu'il y ait lieu à l'annulation de la seconde police, aux termes de l'art. 359 du code de commerce, qu'elles existent l'une et l'autre, simultanément, au moment de la dénonciation du sinistre? (Rés. aff.)

En conséquence, si, avant la connaissance du sinistre, la première police a été annulée, de bonne foi, entre l'assuré et l'assureur, la seconde doit-elle recevoir son exécution? (Rés. aff. )

(Autchestky, Arnault contre Dublaix)

LE 17 décembre 1836, les sieurs Dublaix fils frères font assurer à Bordeaux :

10 Par les sieurs Léonce Adam et veuve Penne, 3,410 fr. sur 1io sacs farine, ainsi évalués de gré à gré, chargés sur le navire le Courrier-d'Abbeville, de sortie de St.-Valéry à Bordeaux;

2o Par le sieur Rousson, gérant de la Compagnie de l'Union des Ports, 2,497 fr. sur g2 sacs farine ainsi évalués, à bord du même navire et pour le même voyage.

D'un autre côté, l'un des commis de la maison Dublaix, ignorant l'existence de ces deux polices, donne ordre à un courtier d'assurances de faire assurer les mêmes marchandises.

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Le 24 décembre 1836, celui-ci fait souscrire cette assurance par les sieurs Autchestky et par les sieurs Arnault et comp.

Dès le même jour, on s'aperçoit de l'erreur, mais le lendemain 15 décembre, étant un jour férié, ce n'est que le 26, que les sieurs Dublaix peuvent en prévenir les derniers assureurs et leur annoncer qu'ils vont faire annuler les polices du 17.

Ce jour-là, en effet, ces polices sont résiliées, du consentement respectif des sieurs Léonce Adam et veuve Penne, du sieur Rousson et des sieurs Dublaix.

Au moment de cette résiliation, le sort du navire le Courrier-d Abbeville était encore entièrement ignoré à Bordeaux.

Plus tard et seulement dans le mois de janvier, on apprend que ce navire avait éprouvé un sinistre.

Les sieurs Dublaix dénoncent ce sinistre avec délaissement, aux sieurs Autchestky et, Arnault, souscripteurs de la dernière police du 24 décembre, et le 14 mars 1837, ils les assignent devant le tribunal de commerce de Bordeaux, à fins de paiement de la somme assurée.

Les sieurs Autchestky et Arnault soutiennent que la police qu'ils ont souscrite n'est point obligatoire pour eux, parce qu'elle doit être considérée comme non avenue, aux termes de l'art. 359 du code de commerce, puisque les risques qui leur avaient été proposés étaient déjà couverts par une précédente police.

Le 14 décembre 1837, jugement qui condamne les assureurs par les motifs suivans:

Considérant qu'au moment où furent résiliées les police souscrites par Adam et veuve Penne et Rousson, les risques couverts tant par ces assureurs que par Autchestky et Arnault, étaient entiers et qu'aucune partie ne pouvait alors avoir connaissance d'événemens changeant la nature de ces risques;

Que dans cette situation, la résiliation des deux polices du 17 décembre, proposée le 26, ne pouvait être présumée porter préjudice aux signataires de la troisième, pnisqu'elle laissait ceux-ci dans la position qu'ils s'étaient faite, mettant à leur charge précisément les mêmes risques qu'ils avaient consenti à assurer deux jours auparavant ;

Qu'ainsi, la résolution du contrat, au moment où elle a eu lieu, a été faite sans fraude et sans porter préjudice aux droits des tiers,

Les assureurs appellent de ce jugement.

ARRÊT.

Attendu que, si le contrat d'assurance est un contrat de droit étroit, il est aussi un contrat de bonne foi; que, dans le cours ordinaire des affaires maritimes, il peut arriver fréquemment qu'une double assurance soit souscrite sur le même objet; que l'on ne peut pas dire, dans ce cas, que la seconde assurance manque d'aliment, puisqu'il y a réellement en risque un objet assuré;

il est

Attendu que l'effet de l'une ou l'autre police est subordonnée à leur existence au moment du sinistre; que, dans cas, naturel et juste que la première soit seule maintenue, et que le second assureur soit libéré des obligations que lui imposait la seconde police, parce que, jusqu'à cet événement, la première ayant eu son effet, et le risque entier se trouvant couvert, la seconde est devenue inutile, et doit être déclarée non avenue; que c'est dans cè sens qu'il a été statué par l'art. 359 du code;

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Attendu qu'il en est tout autrement lorsque la première police a été résiliée d'un commun accord et sans fraude, entre le premier assureur et l'assuré; que, dans ce cas, le second assureur ne peut se plaindre d'un résiliement qui ne porte aucune atteinte à la convention qu'il a faite; qu'il se trouve absolument dans le même cas que. s'il n'était intervenu aucune assurance précé dente; que, quant aux obligations respectives, au paiement de la prime, au risque éventuel et à tous les effets du contrat, Ja position des parties est la même que si une première assurance n'avait pas été faite;

Que, dès lors, il n'est pas juste qu'après l'événement du sinistre, l'assureur pût faire annuler ses engagemens, lorsque l'assuré était forcé d'exécuter les siens;

Attendu que, dans l'espèce, il y a eu parfaite bonne foj dans la souscription des deux polices et dans le résiliement de la première ;

Adoptant; au surplus, les motifs du tribunal de commerce. LA COUR confirme (1)

Du 18 avril 1839. - Cour royale de Bordeaux première chambres- Prés, M. ROULLET, P. P. Plaid. MM. DE CHANCEL, GUIMARD, GUILLORIT.

Innavigabilité. — Preuve.

L'innavigabilité du navire est-elle suffisamment constatée à l'encontre des assureurs, quoique les formes tracées par le code de commerce n'aient pas été suivies, si, d'ailleurs, le capitaine s'est conformé à toutes les mesures prescrites par la legislation du pays où le navire a abordé, et lorsqu'on n'allègue, de sa part, aucune intention de fraude? (Rés. aff.)

(1) Voy ce Recueil, tom, Y, 11e part., pag. 217.

(Pelletreau contre assureurs.)

Par l'arrêt que nous avons rapporté ci-devant, pag. 29, la cour royale de Paris, deuxième chambre a jugé cette question pour l'affirmative.

Les assureurs se sont pourvus en cassation, pour violation de l'art. 4 de la déclaration du 17 août 1779, et des art. 237, 245, 246, 247, 369, 390 et 414 du code de commerce.

ARRÊT..

Sur les conclusions conformes de Mc GILLON, avocat général;

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;

Attendu que le cour royale de Paris déclare, en fait, que le capitaine Vivès a eu recours à toutes les mesures qu'autorisait la législation du pays où il avait été contraint de relâcher qu'il n'est pas même allégué que, de sa part, il y ait eu intention de fraude, et enfin, que l'innavigabilité du navire l'Alexandre était suffisamment constatée par les documens de la cause mis sous les yeux de ladite Cour et soigneusement approfon lis par elle; qne cette appréciation de faits rentre dans les attributions de la Cour royale et ne peut donner ouverture à cassation.

Attendu que la même cause a pu déclarer, en droit, que les formes tracées par le code de commerce pour constater l'in navigabilité d'un navire, ne sont point prescrites à peine de nullité absolue, qu'en jurisprudence maritime, la distance des lieux, la nature des événemens, l'impossibilité de remplir les formes légales, doivent être prises en considération;

Attendu que cette double déclaration, en fait et en droit, renfermée dans l'arrêt attaqué, le justifie suffisamment et ne viole nullement les art. 234, 237, 245, 246, 247, 369, 390 et 414 du code de commerce, ni l'art. 4 de la déclaration du roi du 17 août 1779, qui sont invoqués à l'appui du pourvoi.

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