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« Dans les affaires litigieuses, personnelles ou de commerce, qui ne pourront se terminer à l'amiable sans la voie des tribunaux, le demandeur sera obligé de poursuivre son action devant les juges naturels du défendeur, à moins que les parties ne soient présentes dans le lieu même où le contrat a été stipulé, ou qu'elles ne fussent convenues des juges par-devant lesquels elles se seraient engagées à discuter les difficultés. »

Les sieurs Baudin soutiennent n'être dans aucune des deux exceptions admises par cet article; qu'en conséquence, ils doivent être renvoyés devant leurs juges naturels.

Le 3 juillet 1838, jugement qui fait droit au déclinatoire.

Appel par Bourguignon et Hourlier devant la cour royale de Paris.

ARRÊT.

Sur les conclusions conformes de M. GODOU, substitut de M. le procureur général;

Considérant que, par l'art. 3 du traité conclu entre la France et la Confédération Helvétique, le demandeur est obligé de poursuivre son action devant les juges naturels du défendeur; Que ce principe est général et n'admet que deux exceptions prévues par l'art. 3 précité l'une, la présence des parties dans le lieu où le contrat a été stipulé; l'autre, l'engagement de soumettre à des juges convenus à l'avance les difficultés qui pourraient s'élever;

:

Considérant qu'aucune autre exception ne peut être opposée, puisque le traité international dont il s'agit a eu pour objet d'assurer aux Français comme aux Suisses, réciproquele droit exclusif d'être actionnés devant les juges de leur nation;

ment,

Considérant que Baudin frères, de Genève, ont été assignés devant le tribunal de commerce de Rheims, quoique le contrat

en litige n'eût pas été stipulé dans cette ville, où, d'ailleurs, les parties n'étaient pas présentes, et qu'en admettant que le paiement eût dû être fait à Rheims, il n'en résulterait pas une dérogation aux principes de droit public constitués par le traité du 28 juillet.

LA COUR confirme.

Du 13 avril 1839.- Cour royale de Paris, première chambre. - Prés. M. JACQUINOT-GODARD. Plaid. MM. Ferdinand BARROT et CHOPIN.

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L'abandon du navire et du fret, par l'armateur, le libère-t-il des engagemens licites contractés par le capitaine dans les bornes de son mandat et pour les besoins du navire? (Rés. nég.)

(Dupuis contre Esclavy.)

EN octobre 1836, le nav re les Trois-Frères part de Bordeaux avec un chargement de fer et de vin en destination pour Rouen.

Dès le lendemain de son départ, il éprouve en rivière des avaries considérables.

Le capitaine les fait réparer, et pour faire face aux dépenses qui s'élèvent à 1000 fr., il emprunte cette somme à la grosse sur corps du navire.

Dans le mois suivant, de nouvelles avaries nécessitent un nouvel emprunt de 1,452 fr. 91 c.

Enfin, en vue de Cherbourg, le navire essuie un

abordage, à la suite duquel il est sur le point de se perdre.

A raison de cet évènement, un expert nommé par le tribunal de commerce de Cherbourg, évalue les réparations nécessitées par l'abordage à 14,016 fr. 25 c.

Le capitaine souscrit encore un emprunt à la grosse, à l'ordre du sieur de Surmont, pour la somme de 13,228 fr. qu'il effectue sur corps, agrès, apparaux, fret et chargement et tous ses biens.

Le contrat de grosse est transmis par endossement au sieur Moinard, et ensuite, aux sieurs Esclavy.

A l'arrivée à Rouen, le contrat soit billet de grosse n'est point acquitté.

Les porteurs le font protester faute de paiement, et assignent le capitaine devant le tribunal de com

merce.

Jugement qui condamne le capitaine à payer.

La demoiselle Dupuis et autres, propriétaires du navire, signifient aux sieurs Esclavy, déclaration d'abandon du navire et du fret, afin de se libérer de toute responsabililé aux termes de l'art. 216 du code de commerce.

Les sieurs Esclavy protestent et assignent les propriétaires, afin de faire déclarer commun et exécutoire contre eux le jugement qui a condamné le capitaine au remboursement du billet de grosse. Jugement qui accueille cette demande par les

motifs suivans:

*Attendu que la jurisprudence de la cour de Rouen, con

firmée par plusieurs arrêts de la cour de cassation, a reconnu en principe que l'art. 216 du code de commerce n'était applicable qu'au cas d'une responsabilité civile ordiuaire et non au cas d'emprunt à la grosse pour les besoins du navire;

Attendu que, si de nombreuses réclamations se sont élevées; de la part des armateurs et propriétaires de navires, dont les intérêts peuvent être compromis par leurs capitaines et qui voudraient que toute garantie cessât par l'abandon du navire et du fret, ces réclamations ont été constamment repoussées par les affréteurs et chargeurs qui voient dans la jurisprudence établie, une garantie pour les bons choix des capitaines et contre la connivence qui pourrait exister entre les armateurs et les capitaines de mauvais navires dont la valeur serait toujours couverte par les assureurs.

Appel de la part des propriétaires du navire les Trois-Frères.

ARRÊT.

Sur les conclusions conformes de M. ROULAND, avocat général;

Attendu que le fait du capitaine lie les armateurs, lorsqu'il agit dans les limites de son mandat ; qu'il ne s'agit point, dans l'espèce, de la responsabilité dont parle l'art. 216 du code de commerce, mais de la responsabilite mentionnée en l'art. 234 du même code, qui prévoit les diverses obligations contractéés par le capitaine, à raison desquelles les armateurs ne peuvent se dégager par l'effet du délaissement;

En adoptant les motifs des premiers juges;

LA COUR confirme (2).

Du 6 juin 1839. - Cour royale de Rouen, troisième chambre.- Prés. M. AROUX.

(1) Sur cette question encore controversée, malgré la jurisprudence adoptee par la Cour de cassation, Voy. ce Recueil, tom. XIV, 11o part. et décisions notées; voy. ibid, pag. 145 et suiv.; voy. Mémorial du Commerce par MM. Lainné et Leblond, tom. 111, 11o part., pag. 56.

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L'incompétence des tribunaux civils, en matière commerciale, peut-elle être couverte par le consentement ou le silence des parties? (Rés. aff.) En conséquence, si le déclinatoire n'a été proposé ni en première instance, ni en appel et avant toutes défenses au fond, la partie n'est-elle plus recevable à s'en faire un moyen de cassation? (Rés. aff.)

(Crabère contre Schilt.)

ARRÊT.

Sur les conclusions conformes de M. HERVÉ, avocat général; Attendu en fait que ni en première instance, ni en appel, l'incompétence du tribunal civil n'a été proposée par le demandeur et qu'en appel il a conclu au fond;

Attendu, en droit, que l'incompétence des tribunaux civils pour statuer en matière commerciale n'est pas absolue; que les commerçans peuvent renoncer à demander leur renvoi, et qu'ils sont présumés y avoir renoncé, s'ils ne l'ont pas demandé in limine litis;

Attendu, enfin, que les qualités de l'arrêt indiquent que la matière était disposée à recevoir une décision définitive; LA COUR rejette (1).

Du 18 mars 1839. -Cour de cassation, chambre des requêtes.-Prés. M. ZANGIACOMI. JAUBERT.-Plaid. M. MOREAU.

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Rapp. M.

(1) Voy. Décision conforme de la même Cour dans le Journal du Palais, tom. 1er de 1838, pag. 631 et notes. Voy. aussi ce Recueil, tom, XIV, 11e part., pag. 189 et 195.

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