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DISSERTATION

CRITIQUE

SUR L'ILIADE
46667
D'HOMERE,

Où à l'occafion de ce Poëme on
cherche les régles d'une Poëti-
que fondée fur la raison, & fur
les exemples des Anciens &
des Modernes.

Par Monfieur l'Abbé TERRASSON,
de l'Academie Royale des
Sciences

ΤΟ ΜΕ ΙΙ·

A PARIS,

Chez FRANÇOIS FOURNIER, rue S. Jacques,
Et ANTOINE-URBAIN COUSTELIER, Quay
des Auguftins.

M. D CC X V.

Avec Approbation & Privilege du Roy.

888

H810 T32

SARA

SARA

The most Noble

John Duke of Bedford

17/36

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Des Mœurs des Dieux.

E ne crois point qu'il foit neceffaire de rappeller ce que les Anciens Auteurs, foit Ecclefiaftiques, foit prophanes, ont écrit contre les Dieux de la Fable, tels qu'Homere fur tout les a dépeint, A l'égard des Auteurs Ecclefiaftiques ce n'eft point ici un Livre de Théologie III. Partie.

A

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où l'on puiffe faire profeffion de les citer, bien que je prévoie que Me D. m'obligera d'avoir quelquefois recours à eux & pour les Auteurs prophanes quoique je ne veüille pas négliger leur autorité qui eft forte contre des Admirateurs éclairez des lumieres de la Religion, je conferverai neanmoins, autant qu'il me fera poffible, l'efprit de la vraie Philofophie qui s'appuie principalement fur la raifon dans tous les points dont la raifon peut décider. Au refte j'avoue qu'au lieu que fur tous les autres chefs, j'attaque plûtôt Homere que Me D. fur celui-ci, au contraire, j'attaque beaucoup moins Homere que je ne l'attaque elle-même, & avec elle, Mr D. & le P. le Boffu. En effet la groffiereté du fiecle d'Homere, & les ténébres du Paganifme où il étoit enveloppé le rendent peutêtre digne de quelque pardon; mais il eft étonnant qu'en un fiecle où la Religion & les bienféances ont pris le deffus comme dans le nôtre, on s'efforce encore de foûtenir ces peintures affreufes & ridicules de Dieux qui prennent le bon ou le mauvais party fuivant leur pure fantaisie, qui fe battent, qui tombent enfin dans toutes fortes de fotifest & de défordres. Ces indignitez ont fait

de la peine aux plus grands Admirateurs qu'Homere ait eu parmi les Payens ; car fans parler de Platon, de Ciceron & de plufieurs autres qui l'ont abfolument condamné fur cet Article, ceux même qui ont entrepris de l'excufer, comme Ariftote, Plutarque, Longin, ont marqué leur embarras par les expreffions humbles dont ils fe fervent, & en infinuant qu'Homere au fond auroit pû mieux faire. Plutarque fur tont lui applique ce vers qui fe trouve plus d'une

fois dans l'Iliade.

οἶσθα καὶ ἄλλον μύθον ἀμείνονα τουδε νοῆσαι Novifti & alium fermonem meliorem hoc excogitare.

qu'Amiot a traduit plaisamment dans
fon vieux ftile par ces deux ci.

Tu pouvois bien, fi tu euffes voulu,
Tenir propos qui cußent mieux valu.

Cependant abandonner ou condamner Homere fur l'article des Dieux comme ont fait les plus grands hommes de tous les fiecles, c'eft nous accorder contre lui plus qu'on ne penfe : car il eft impoffible que des Dieux trés-vitieux emploiez dans un Poême autant qu'Homere emploie les fiens dans l'Iliade, ne

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