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lui-même présider les assises ce jour-là, pour maintenir la dignité de l'audience; encore n'a-t-il pu la sauvegarder qu'en faisant expulser le forcené qui remplissait la salle de sa voix stridente. Douloureux spectacle dont il faut se détourner bien vite et dont nous console à peine l'universelle horreur témoignée par le peuple à l'assassin. Naples aussi, à ce que l'on nous apprend, vient d'avoir son Verger: triste contagion que celle du crime !

A Mgr. Sibour, dont on aimait la bonté et la douceur, succède un prélat distingué, Son Eminence le cardinal Morlot, archevêque de Tours. Le choix du gouvernement a partout, et dans toutes les classes, rencontré bon accueil, même chez ceux dont l'assentiment devrait nous rendre suspect celui qui en a été l'objet, si le digne prélat pouvait être atteint par de compromettants éloges.

L'ambassadeur de Perse, Feruk-Khan, a eu son audience solennelle de l'Empereur, et la réponse que lui a faite Sa Majesté nous porte à croire que les difficultés sérieuses qui se sont élevées récemment entre le Schah et le gouvernement de la Gande-Bretagne ne tarderont pas à s'aplanir. Déjà le télégraphe a publié partout, la soumission de la Perse; soumission est trop dire sans doute : l'acceptation de certaines conditions peut être le résultat de la prise de Buschir et de l'occupation de Karrak par les forces anglaises, mais il est difficile de croire que le Schah adhère sans restriction aux lois un peu dures que voudrait lui imposer la Grande-Bretagne. Une soumission pareille ne saurait d'ailleurs être sincère, et alors mieux vaudrait, pour l'Angleterre, qu'elle se départît un peu de ses rigueurs afin de rendre la paix durable. Nous ne croyons pas, et une étude publiée dans ce numéro de la Revue nous semble, le démontrer clairement, que l'Angleterre ait beaucoup d'avantages à retirer d'une guerre portée à l'extrême contre la Perse. Nous voyous, au contraire, beaucoup de dangers pour elle à se jeter dans une aventure dont on ne saurait, en ces pays d'Orient, prévoir ni les conséquences, ni la fin. La sagesse du cabinet britannique épargnera au monde cette nouvelle épreuve, dont l'Europe, autant que l'Asie, aurait sans doute à souffrir quteng og loobu „ber one

Plus souvent tristes que gais, les événements ont abondé dans ces derniers temps. Une femme à qui son grand esprit aussi bien que son haut rang avait donné une situation exceptionnelle et très considérable, non pas seulement dans le monde où ses qualités aimables lui assuraient un grand empire, mais même dans la politique, madame la princesse de Liéven, est morte à Paris, où elle avait longtemps exercé, comme on sait, une haute influence pendant le gouvernement de juillet. Mademoiselle Dorothée de Benkendorff, tante du ministre actuel de Russie à Stuttgard, appartenait à l'une des premières familles de la Livonie, et était née en 1784. L'impératrice Marie, femme de l'infortuné Paul Ier, avait pris un soin tout particulier de son enfance et de son éducation. Elle la maria à seize ans au comte de Liéven, ministre de la guerre, qui fut ensuite ambassadeur de Russie à Londres de 1812 à 1834. Elle joua un grand rôle en Angleterre, où son esprit vif et délicat, son intelligence solide et pénétrante, la faisaient beaucoup rechercher par les hommes d'Etat et par les diplomates. Mais son

véritable empire fut à Paris. Elle vint l'y établir en 1835, et l'exerça avec une grande autorité jusqu'à la révolution de Février. L'empereur Nicolas lui avait donné le titre de princesse, et, si l'on en doit croire des indiscrétions que le haut esprit de la princesse rend d'ailleurs vraisemblables, elle aurait, à partir de cette époque, et plus encore qu'en Angleterre lorsqu'elle était ambassadrice en titre, rempli chez nous de véritables et très sérieuses fonctions diplomatiques, de ces fonctions délicates et difficiles qui appartiennent naturellement aux femmes, dont l'esprit délié se prête mieux que celui des hommes à exercer une grande influence en paraissant soi-même la subir. La princesse de Liéven avait au plus haut degré cet art exquis d'insensible persuasion, et son action sur les hommes d'Etat était d'autant plus sûre qu'elle la faisait moins sentir de tard

Comme M. Berlioz, avec qui son talent présente, dans une autre sphère, plus d'une analogie, M. Eugène Delacroix a forcé enfin les portes de l'Institut. Si l'Institut n'était fait que pour les grands artistes, on s'étonnerait à bon droit que M. Eugène Delacroix d'un côté, et M. Berlioz de l'autre, y fussent entrés si tard. Mais quand on songe que l'Institut est le gardien des traditions, que ses plus grands efforts doivent tendre à conserver, et non pas à révolutionner l'art, que tout ce qui se présente avec des allures de bruyante innovation doit en être écarté, du moins jusqu'à l'heure où ces nouveautés auront fait leur place et créé elles-mêmes des traditions, on sera moins étonné que deux hommes d'un aussi grand talent aient fait un si long stage aux portes de l'honorable compagnie. Ce système exclusif peut paraître singulier aux esprits superficiels; mais si l'on va au fond des choses, 'si l'on s'avise de mesurer les dangers qui pourraient résulter pour l'art d'une introduction trop facile et trop prompte des innovateurs ou des talents originaux, fougueux, désordonnés parfois, au sein de l'Institut, il sera facile de voir que l'injustice reprochée à l'Académie a moins d'inconvénients qu'on ne se plaît à le dire, et que sa lutte contre les talents populaires, sans affaiblir ceux-ci, finit par leur donner plus de mesure, et, sans étouffer leur originalité, les empêche d'entraîner les jeunes gens dans des écarts que le génie individuel ne justifierait pas. prob site P

On se plaint quelquefois que la littérature se tait en ce moment; combien ce reproche est étrangé lorsque chaque jour voit naître tant de volumes, et chaque quinzaine tant de gros cahiers de revues et de recueils de toute nature! Jamais les presses françaises n'ont autant produit qu'aujourd'hui. Mais où sont les chefs-d'œuvre? nous demandera-t-on. Il en est quelques-uns, mais vous passez devant eux sans les voir, trop heureux lorsque les ayant vus, et ne les ayant pas compris, vous ne cherchez pas à les étouffer au berceau dans le linceul de votre critique! Si la génération qui entre aujourd'hui dans l'âge viril vous paraît peu soucieuse des choses de l'esprit, que ne vous en prenez-vous à ceux qui, il y a quinze ans, étaient chargés de la former? Il y a longtemps que nous l'avons dit, et on l'a répété depuis avec un vif accent de vérité, le vide dont vous vous plaignez, c'est vous qui l'avez fait.

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Bien que les livres d'histoire, de philosophie et même de pure imagination ne nous fassent guère défaut, et que nous en alimentions très suffisam

ment le marché des deux mondes, il faut reconnaître pourtant que les livres pratiques, les livres immédiatement utiles sont plus abondants encore. Chaque quinzaine notre Revue critique en témoigne. Ce n'est pas précisément dans cette catégorie que nous placerions pourtant le nouveau livre de M. Véron, Quatre ans de règne1. Ce livre singulier tient un peu de tous les genres, de la politique, de l'histoire, de l'anecdote, de l'almanach et du roman. L'esprit satirique, mais d'une satire douce et voilée, s'y manifeste même quelquefois, et çà et là un trait de naïveté lui assure une place à part parmi les œuvres de la politique moderne. « Ce qui a manqué jusqu'ici à l'Empereur, dit M. Véron, c'est du soleil. » Au moment où nous transcrivons cette phrase, le soleil luit dans toute sa splendeur; nous sommes donc autorisés à penser qu'il ne manque plus rien à la France, et que désormais les conseils du spirituel docteur ne sont plus nécessaires à sa santé.

Le livre de M. Edouard Gourdon sur le Congrès de Paris 2, est tout à fait un livre d'histoire, comme son titre et son sujet le commandaient. Dans ce volume se trouvent réunis tous les textes, mais ces textes sont expliqués, élucidés, mis en relief par un récit rapide, et complet pourtant, des événements qui les ont amenés, depuis leur origine jusqu'à la conclusion de la paix. Les détails que l'auteur donne des opérations intérieures du Congrès offrent le plus vif intérêt et font suivre pas à pas la marche des Conférences. M. Gourdon nous montre en même temps le mouvement des affaires au dehors, nous signale le rôle de la presse, ses contradictions, ses indiscrétions à l'étranger, sa prudence, sa réserve en France, et nous fait bien apprécier la valeur d'institutions qui permettent d'accomplir de si grandes choses sans jeter le pays dans l'agitation et sans y mêler la vanité des hommes. M. Gourdon paie un juste tribut d'éloges à tous ceux qui ont participé à ce grand et fructueux événement de la paix, à chacun suivant la position qu'il occupait et le rôle qu'il a joué dans ce grave débat ; il rend enfin au président du Congrès la justíce qui lui est due et lui prépare la place que l'histoire générale lui assígnera un jour.

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TABLE DES MATIÈRES DU VINGT-NEUVIÈME VOLUME.

DÉCEMBRE 1856 ET JANVIER 1857. (5e année.)

LE GOUVERNEMENT IMPÉRIAL ET L'OPPOSITION NOUVELLE, par M. DE FORCADE LA ROQUETTE, maître des requêtes au conseil d'Etat.

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DE LA COLONISATION ET DE L'ADMINISTRATION EN ALGÉRIE, par M. MERCIER-LACOMBE, préfet...

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LES GRECS MODERNES, par M. H. REYNALD, ancien pensionnaire de l'école d'Athènes
La Fille du PRÉTEUR, poème dramatique, par feu EUGÈNE MORDRET.
LES NOIRS, LES JAUNES ET LA LITTÉRATURE FRANÇAISE EN HAÏTI, par M. ALEXANDRE
BONNEAU..

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REVUE CRITIQUE: Des Comédies de Plaute et des Tragédies d'Atticus, à Rome, deux Thèses, de M. Boissier, par M. MAURICE MEYER. Hallenfahrt, etc. (Voyage infernal, de M. Henri Heine, par M. EDOUARD GOEPP. Deutsche Rechtsalterthümer (Antiquités da Droit germanique), de M. Grimm, par M, WILLIAM REYMOND. Essai sur la Rhythmique française, de M. J.-A. Ducondut, par M. E. HERVÉ. MÉLANGES: La Carte de France et les autres travaux du Dépôt de la Guerre, par M. G. DE CHAMBERET.- La Presse périodique dans le pays de Galles, par M. OCTAVE SACHOT. Académie française: Réception de M. Ponsard, par M. AUGUSTE LACAUSSADE. REVUE MUSICALE, par M. WILHELMI ♪.

CHRONIQUE DE LA QUINZAINE : Politique,
CALONNE.

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LA RELIGION NATURELLE, de M. Jules Simon, par M. E. CARO. ...

Buenos-Ayres ET LES PROVINCES ARGENTINES (1re partie), par M. CHARLES CHAUBET. UN INTENDANT DE PROVINCE SOUS LOUIS XIV, par M. PIERRE CLEMENT, membre de l'Institut.

.

LE ROMAN D'UNE FILLE LAIDE (nouvelle), par M. LOUIS MOLAND

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HISTORIENS ET CHRONIQUEURS DE LA GUERRE D'ORIENT, par M. XAVIER ROBERT. Recherches SUR LES CAUSES DU RENCHÉRISSEMENT DES DENRÉES, par M. PAUL LACROIX. 342 REVUE CRITIQUE: Recueil des Ordonnances de la Principauté de Liége, de M. Polain, par M. ALP. DANTIER. Etude sur Colbert, de M. F. Joubleau, par M. RATHERY. Die Republik Costa-Rica, etc. (la République de Costa-Rica), de MM. Wagner et Sherzer, par M. OCTAVE SACHOT. Henri Esmond, de M. Thackeray, par M. DUMESNIL. The works of the late Edgar Allan Poë, par M. THALÈS BERNARD. Petites Ignorances de la Conversation, de M. Ch. Rozan, par M. A. SAYOUS. Notice sur le Manuscrit intitulé Cartulaire de la ville de Provins, de M. Félix Bourquelot; Recherches sur l'Origine des premiers temps de Nancy, de M. H. Lepage; Du lieu de naissance de Godefroy de Bouillon, de M. Barbe, par M. LOREDAN LARCHEY. Obras de D. Antonio de Vinageras, par M. J. DE PEREZ, Bibliothèque impériale, etc.; Samuel Johnson, de M. H. Reynald, par M. J.-J. WEISS. - La Famille, de M. Paul Janet; Edmond Reille, de M. Th. Vibert, par M. VICTOR FOURNEL. Dictionnaire sanscrit de Wilson, etc., par M. P.-E. F. Annales algériennes, de M. Pelissier de Reynauld, par M. le baron HENRI AUCAPITAINE, - Discours sur la vie et les écrits du duc de Saint-Simon, de M. Amédée Lefèvre-Pontalis, par M. Ed. B. Exposition de la Doctrine catholique, etc., de Bossuet, par M. C. L. MÉLANGES: Chansons populaires sur la guerre du Bien Public et sur la bataille de Montlhéry, par M. LE ROUX DE LINCY..

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LES DEUX LE SAGE: NOTICES LITTÉRAIRES ET PSYCHOLOGIQUES SUR UN PÈRE ET SON FILS, par M. ANDRÉ SAYOUS.

.....

BUENOS-AYRES ET LES PROVINCES ARGENTINES (2 partie), par M. CHARLES CHAUBET.
SAINT-SIMON ET CHAVIGNY, par M. A. CHÊRUEL. .

LES CONFESSIONS DE VAUVENARGUES, par M. EMILE CHASLES.

POÈTES ET ROMANCIERS CONTEMPORAINS DE L'ANGLETERRE WILLIAM MAKEPEACE THACKERAY, par M. L. ÉTIENNE.

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REVUE CRITIQUE: Nouveau Voyage au Pays des Nègres, de M. Anne Raffenel, par M. LEJEAN. Souvenirs de la guerre d'Espagne dite de l'Indépendance, de M. A. L. Fée, par M. L. LARCHEY. — Lettres inédites de la marquise de Créquy à Senac de Meilhan, etc., de MM. Sainte-Beuve et Edouard Fournier; Notice sur la marquise de Créquy, de M. Percheron; Notions claires et précises sur l'ancienne noblesse de France, etc., de M. le comte de Soyecourt, par M. LE ROUX DE LINCY. — Histoire de la Révolution dans les Deux-Siciles, de M. le baron d'Hervey-Saint-Denis, par M. le baron ERNOUF. — Rubens et l'Ecole d'Anvers, de M. Alfred Michiels, par M. F. BORGELLA. Mélodies pastorales, etc., de M. Thalès Bernard, par M. L. ENAULT. Annuaire de la Société archéologique de la province de Constantine; The Paragreens on a visit to the Paris Universal Exhibition (La famille Paragreen à l'Exposition universelle de Paris), de l'auteur de Lorenzo Benoni et du Docteur Antonio, par M. O. SACHOT. Histoire des Echelles du Levant, etc., de M. Ed. Salvador, Glossaire du Patois normand, de M. Louis Du Bois, par

par M. C. DE BELLEUSE. M. CH. ALLEAUME.

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M. G. DE CHAMBERET.

MÉLANGES: La Carte de France 'et les autres travaux du Dépôt de la Guerre (2e partie), par
Des Études universitaires en Prusse, par M. EDOUARD SIMON.
La Métallurgie de la Bible; Nouvelle découverte de Monuments antiques dans l'Amérique
centrale, par M. O. SACHOT...
CHRONIQUE DE LA QUINZAINE: Politique,
CALONNE..

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DU SOMMEIL NATUREL ET DE L'ÉTAT DE L'AME FENDANT LES SONGES, par M. ADRIEN DELONDRE, professeur de philosophie . .

HÉRAT ET LA QUESTION ANGLO-PERSANE, par M. ALEXANDRE BONNEAU.
L'AGRICULTURE PENDANT LA RÉVOLUTION FRANÇAISE, par M. le baron ERNOUF.

L'ALGÉRIE EN 1856, par M. LOUIS DUSSERT.

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LES NIÈCES DE MAZARIN, ET SON DERNIER PETIT-NEVEU, LE DUG DE NIVERNAIS, par M. SAINTEBEUVE, de l'Académie française.

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L'ÉCONOMIE POlitique et le SYSTÈME PROTECTEUR, par M. J. BURAT..

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LE PORTRAIT DE la Marquise (roman), 1′′ partie, par M. A. DE BERNARD REVUE CRITIQUE: Wanderings in north Africa (Excursion dans le nord de l'Afrique), de M. James Hamilton, par M. O. SACHOT. — Etude sur Charles-Quint, de M. A. Duméril, par M. LARCHEY. Histoire de Justinien, de M. Isambert, par M. LÉO JOUBERT. Pariser Stereoscopen, etc. (Stéréoscopes parisiens), de M. E. Kossak; Pariser Bilderbuch, etc. (Livre de scènes parisiennes), de M. Julius Rodenberg, par M. E. GOEPP. 54 REVUE MUSICALE, par M. WILHELM..

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