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autorisés à faire, relativement aux biens qu'ils délaisseront à leur décès, des dispositions qui, en général, ne sont pas permises. Art. 1389 cbn. 1093 et 1094.

c. Certaines conventions qui ne seraient pas défendues d'après ce qui précède, sont expressément ou implicitement interdites aux futurs époux par des motifs particuliers tirés de la nature de l'association conjugale, et des rapports personnels que le mariage établit entre le mari et la femme. C'est ainsi que la loi prohibe expressément toute clause par laquelle la femme s'interdirait la faculté de répudier la communauté, ou par laquelle elle renoncerait, d'une manière absolue, à son hypothèque légale sur les biens du mari. Art. 1453 et 2140. Voy. aussi art. 1399 et 1521. D'un autre côté, on doit considérer comme virtuellement prohibées : la clause qui imposerait à la femme l'obligation de contribuer aux dettes de la communauté au-delà de son émolument (art. 1483); celle qui contiendrait de la part de la femme, renonciation à la faculté de provoquer, le cas échéant, la séparation de biens (art. 1443 et 1563); enfin, celles par lesquelles les futurs époux conviendraient, que la communauté établie entre eux continuera à subsister, en cas de séparation de corps 15 (art. 311 et 1441, n° 4), ou que les donations qu'ils se feront pendant le mariage, seront irrévocables. Art. 1096.

d. Si l'un des futurs conjoints a des enfants d'un précédent mariage, il ne peut faire avec son nouvel époux, aucune convention qui tendrait dans ses effets, à conférer à ce dernier des avantages excédant la portion réglée par l'art. 1098. Art. 1527 16.

4o La loi abandonne aux futurs époux le choix des termes ou des formules à employer dans la rédaction du contrat de mariage. Lorsqu'ils veulent adopter l'un des régimes prévus et réglés par le Code Napoléon, ils peuvent, ou reproduire en détail les règles tracées par la loi, ou se borner à indiquer, sans autre explication, le régime auquel ils entendent se soumettre. Art. 1391. Mais il ne leur est plus permis de déclarer, en termes généraux, que leur

riage, faire un affrérissement (unio prolium) entre ces enfants et ceux qui naîtront de leur nouveau mariage. Merlin, Rép., vo Affrérissemant. Mais rien n'empêche que les époux, en se soumettant au régime de la communauté, n'excluent les héritiers collatéraux du partage de la communauté. Une pareille stipulation vaudrait comme donation conditionnelle, au profit du survivant des époux, de la part du prémourant dans la communauté. Rodière et Pont, 1, 73. 15 Bruxelles, 28 mars 1810, Sir., 10, 2, 362.

16 Voy. l'explication de cet art. au § 690, texte et notes 14 à 21. Cpr. art. 1496.

association sera régie par telle ou telle coutume, ou qu'ils entendent adopter les dispositions d'un ou de plusieurs articles d'une coutume 17. Toute clause de cette nature serait à considérer comme non avenue. Art. 1390 et arg. de cet article 18. Du reste, rien n'empêche que les époux qui voudraient adopter le régime établi par une ancienne coutume ou s'approprier les dispositions d'un ou de plusieurs de ses articles, ne puissent le faire en reproduisant même littéralement le texte de cette

coutume.

5o La nullité d'une ou de plusieurs clauses d'un contrat de mariage, entraîne la nullité des conventions qui ont été consenties en considération de ces clauses, et de celles qui en sont des conséquences. Mais pour le surplus, le contrat de mariage doit recevoir son exécution 19.

6o Les époux sont présumés, lors même qu'ils ont fait un contrat de mariage, avoir voulu adopter le régime de la communauté légale dans tous les points auxquels ils n'ont pas dérogé. Ainsi, dans le doute, soit sur la portée des clauses d'une communauté conventionnelle, soit même, en général, sur le régime auquel les époux ont entendu se soumettre, les conventions matrimoniales

"Les futurs époux pourraient ils, pour les effets et l'exécution d'une clause insérée dans leur contrat de mariage, par exemple, pour la fixation d'un douaire assuré à la femme, se référer à un article d'une ancienne coutume? Toullier (XII, 7, à la note) enseigne l'affirmative. Mais son opinion nous paraît contraire à l'esprit de l'art. 1390. En l'adoptant, on retomberait indirectement dans l'inconvénient que cet article a eu pour objet de prévenir. Cpr. la note suivante. Duranton, XIV, 32. Odier, II, 639 et 640. Rodière et Pont, I, 74. Marcadé, sur l'art. 1390, no 1. Troplong, I, 138. Poitiers, 16 mars 1826, Sir., 26, 2, 274. Grenoble, 6 juin 1829, Sir., 30, 2, 152. Civ. rej., 28 août 1833, Sir., 33, 1, 744. 18 Les rédacteurs du Code Napoléou ont pensé que de pareilles clauses seraient de nature à porter atteinte à l'unité de la législation nouvelle, en perpétuant, en quelque sorte, comme lois de l'État, au gré de la volonté des particuliers, cette foule de coutumes et d'usages divers qui couvraient autrefois le territoire français. La disposition prohibitive de l'art. 1390, est-elle applicable à toute espèce d'actes ou de contrats, et notamment aux testaments? L'affirmative nous semble incontestable, lorsque les contractants où le testateur s'étant bornés à renvoyer en termes généraux, aux dispositions d'une ancienne coutume, il est impossible de saisir leur volonté sans recourir à cette coutume. Cpr. Merlin, Rép., vo Institution d'héritier, sect. IV, no 4 bis, et Quest., vo Testament, § 15; Rodière et Pont, I, 75; Marcadé, sur les art. 1390 à 1393, no 1, note 2; Req. rej., 19 juillet 1810, Sir., 10, 1, 361; Riom, 14 août 1809, Sir., 10, 2, 345; Req. rej., 23 décembre 1828, Sir., 29, 1, 155.

19 Duranton, XIV, 33.

doivent être interprétées d'après les principes qui régissent la communauté légale 20. Art. 1393 et 1528. Spécialement, les époux ne sont à considérer comme mariés sous le régime dotal, qu'autant qu'ils ont expressément déclaré vouloir se soumettre à ce régime, ou que leur intention à cet égard ressort d'une manière non équivoque des clauses du contrat de mariage. Art. 1392 21.

§ 504 bis.

De la loi à laquelle en l'absence de contrat de mariage, les époux sont censés s'être soumis.

Le principe d'après lequel les époux, tous deux Français dès avant leur mariage, sont censés, en l'absence de contrat de mariage, avoir voulu se soumettre au régime de la communauté légale, établi par la loi française, s'applique en général même au cas où le mariage a été célébré à l'étranger 1.

Cependant on pourrait dans ce cas admettre, suivant les circonstances, que les époux ont entendu adopter le régime de Droit commun du pays où ils se proposaient de fixer leur domicile matrimonial, c'est-à-dire le siége de leur association conjugale, et où de fait ils se sont établis 2.

Par une raison analogue, lorsque deux étrangers, appartenant à la même nation, se sont mariés en France, ils n'en doivent pas moins être considérés comme ayant voulu adopter le régime de Droit commun établi par leur loi nationale, à moins que l'intention contraire de se soumettre au régime de la com munauté légale selon la loi française, ne puisse s'induire de leur résidence en France dès avant le mariage, et de l'établissement dans ce pays de leur domicile matrimonial3.

Lorsqu'il s'agit de mariages contractés entre français et étran

** Bellot des Minières, I, p. 23. Turin, 23 juillet 1808, Sir., 9, 2, 322. Rouen, 11 juillet 1826, Sir., 27, 2, 15. Req. rej., 28 février 1828, Sir., 28, 1, 175. "Cpr. pour le développement de cet article, le § 533.

'Duranton, XIV, 88. Troplong, 1, 33.

Troplong, loc. cit. Req. rej., 29 décembre 1836, Sir, 37, 1, 437. 'Toullier, XII, 91. Demolombe, I, 87. Rodière et Pont, I, 33. Bellot des Minières, Du contrat de mariage considéré en lui-même, no 4. Aix, 27 novembre 1854, Sir., 56, 2, 222. Cette présomption aurait plus de force encore si, dès avant le mariage, les époux où l'un d'eux avaient été admis, conformément à l'art. 13, à établir leur domicile en France.

gers, on doit présumer que les époux ont entendu adopter le ré gime formant le Droit commun du pays où ils ont établi leur domicile matrimonial, quel que soit d'ailleurs le lieu où le mariage a été célébré. En l'absence de tout fait indiquant d'une manière certaine l'intention de la part des époux de fixer le siége de leur association conjugale ailleurs qu'au domicile du mari, c'est ce domicile qui est à considérer comme domicile matrimonial'.

La même présomption s'applique aux mariages contractés entre étrangers de nationalité différente.

Il en est ainsi dans l'un et l'autre cas, bien que la loi nationale de l'un des conjoints n'admette pas, ou défende même, le régime auquel les époux sont présumés avoir voulu se soumettre, en ce sens du moins que ce régime formera la règle d'après laquelle se détermineront leurs droits respectifs sur les biens situés dans le pays où ils ont établi leur domicile matrimonial 3.

Du reste, le régime de l'association conjugale, une fois fixé par la loi sous l'empire de laquelle les époux sont présumés s'être

* On convient généralement que la circonstance du lieu où le mariage a été célébré, ne peut avoir d'influence sur la solution de la question de savoir quel est le régime que les époux sont censés avoir adopté. Mais certains auteurs enseignent que c'est la loi du domicile du mari au moment du mariage qui, en l'absence de contrat, régit l'association conjugale. Voy. en ce sens Fœlix, Droit international et privé, nos 20, 27 et 66; Odier, I, 47 à 51. A notre avis, cette manière de voir n'est point exacte. Le domicile du futur époux ne saurait être considéré comme indiquant, par lui-même et nécessairement, de la part de la future épouse, l'intention de se soumettre à la loi de ce domicile. C'est le lieu où les futurs conjoints se proposaient de fixer le siége de leur association conjugale qu'il convient avant tout de prendre en considération, pour déterminer leur commune intention quant au régime auquel ils entendaient se soumettre; et ce n'est qu'en l'absence de circonstances de nature à indiquer le contraire, qu'ils doivent être présumés avoir voulu établir leur domicile matrimonial au lieu du domicile du mari. Merlin, Rép., vo Loi, § 6, no 2, et vo Conventions matrimoniales, § 2. Demolombe, loc. cit. Coin-Delisle, Revue critique, 1855, VI, p. 193. Paris, 3 août 1849, Sir., 49, 2, 420. Paris, 15 décembre 1853, Sir., 54, 2, 105. Civ. rej., 11 juillet 1855, Sir., 55, 1, 699. Civ. rej., 4 mars 1857, Sir., 57, 1, 247. La règle telle qu'elle est posée au texte était généralement suivie dans l'ancien Droit, pour les mariages contractés entre personnes domiciliées dans des provinces régies par des coutumes ou des lois différentes. Boullenois, Traité de la personnalité et de la réalité des lois, tit. II, part. II, chap. IV, obs. 38. Lebrun, liv. 1, chap. II, no 42. Pothier, no 14. Chabot, Questions transitoires, vo Communauté conjugale, no 3. Civ. rej., 29 juin 1842, Sir., 42, 1, 975. Req. rej., 25 janvier 1843, Sir., 43, 1, 247. Civ. cass., 7 février 1843, Sir., 43, 1, 282.

Civ. rej., 4 mars 1857, Sir., 57, 1, 247.

mariés, ne peut être modifié par celle du lieu où ils transportent plus tard leur domicile matrimonial ".

I. DU RÉGIME DE COMMUNAUTÉ.

A. DE LA COMMUNAUTÉ LEGALE.

§ 505.

Notion de la communauté légale.

La communauté légale est une société universelle de biens, qui se forme entre mari et femme par le fait même du mariage, et qui est soumise à des règles particulières, à raison des rapports personnels que le mariage établit entre les époux 1.

1° La communauté ne constitue point une personne morale distincte des époux 2.

2° Bien que le mari soit réputé seigneur et maître de la communauté, la femme n'en est pas moins, même durant le mariage, copropriétaire actuelle de tout ce qui compose le fonds commun 3.

*Civ. rej., 30 janvier 1854, Sir., 54, 1, 268.

A l'exemple du Code Napoléon, nous emploierons le mot communauté pour désigner, soit les époux eux-mêmes, en tant que communs en biens, soit le fonds commun entre eux, soit enfin le fait même de leur association. C'est en prenant cette expression dans la première acception que nous dirons que la communauté peut être créancière ou débitrice des époux, et qu'elle a l'usufruit de leurs biens propres ; c'est en la prenant dans la seconde, que nous parlerons de l'actif et du passif de la communauté; et c'est en la prenant dans la troisième, que nous dirons que la communauté commence à telle époque, et qu'elle se dissout par tel ou tel événement.

2

* Cette proposition n'est qu'une application spéciale de celle que nous avons' développée à la note 14 du § 377, à propos des sociétés civiles. Ici, comme en matière de société, il ne faut pas se laisser égarer par les formes du langage juridique. Si la loi parle de récompenses dues par les époux à la communauté, ou par la communauté aux époux, elle n'emploie pas le mot communauté pour exprimer l'idée d'un être de raison distinct des époux, mais simplement pour désigner les époux eux-mêmes en tant que communs en biens, et comme ayant en cette qualité des intérêts collectifs opposés aux intérêts individuels de chacun d'eux en particulier. Toullier, XII, 82. Battur, I, 150. Championnière et Rigaud, Des droits d'enregistrement, IV, 2835. Duvergier, Des sociétés, no 383. Rodière et Pont, I, 396. Odier, I, 210. Marcadé, sur les art. 1401 à 1403, no 1. Voy. en sens contraire: Proudhon, De l'usufruit, 1, 279; Troplong, I, 306 et suiv.

* Battur, 1, 64. Duranton. XIV, 96. Rodière et Pont, I, 293 à 295. Odier, I,

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