Page images
PDF
EPUB

nant l'accomplissement des conditions prescrites par les art. 1434 et 1435 38

[ocr errors]

5o L'application combinée des règles posées sous les quatre numéros précédents conduit, pour le cas de partage de biens indivis entre la femme et des tiers, et pour celui où elle se rend adjudicataire sur licitation de pareils biens, aux conséquences sui

vantes :

a. En cas de partage d'une hérédité, ou autre universalité de biens, indivise entre la femme et des tiers, les biens qui tombent dans son lot deviennent dolaux, lorsque sa part indivise forme spécialement l'objet de la constitution de dot, ou que cette part se trouve comprise dans une constitution, soit de biens présents, soit de biens à venir. Que si la femme s'était constitué, soit ses meubles, soit ses immeubles seulement, le caractère de la dotalité s'appliquerait aux meubles ou aux immeubles tombés dans son lot, et ne s'attacherait qu'à ces biens, encore qu'elle eût reçu une part de meubles ou d'immeubles proportionnellement plus forte que celle à laquelle elle aurait eu droit, en vertu de l'art. 832, dans l'une ou l'autre de ces deux classes de biens 39.

b. Lorsque la femme s'est spécialement constitué sa part indivise dans un immeuble, et qu'elle se rend adjudicataire sur licitation de la totalité de cet immeuble, il ne devient dotal que dans la proportion de la part que la femme y avait, et demeure paraphernal pour le surplus". La même solution devrait être admise,

38 Bordeaux, 14 mai 1857, Sir., 57, 2, 547.

39 Nous n'établissons pas cette proposition sur l'art. 883 qui, d'après notre manière de voir, est complétement étranger à la question. Cpr. § 625, texte no ↑ et note 18. Nous la fondons sur cette idée que la femme, en se constituant en dot des biens héréditaires, est censée avoir voulu se les constituer tels qu'ils lui échéeraient par le partage. La solution contraire supposerait d'ailleurs la possibilité de l'annulation du partage, par cela seul que les dispositions de l'art. 832 n'auraient pas été complétement observées; ce qui nous paraît inadmissible, du moins en l'absence de tout concert frauduleux. Cpr. Caen, 19 mars 1839, Sir., 39, 2, 351. 40 Cette solution est généralement admise. On la fonde d'ordinaire sur ce que la constitution de dot étant spéciale et restreinte à la part indivise de la femme, cette circonstance s'oppose à l'application de l'art. 883, que l'on considère comme devant résoudre en principe, non-seulement la question de savoir si la propriété des biens licités est acquise avec effet rétroactif, mais encore celle de savoir si les biens ainsi acquis sont ou non dotaux. A notre avis, ce point de vue n'est point exact, ainsi que nous l'établirons à la note suivante. Delvincourt, III, ̧ p. 110. Tessier, I, p. 275, no 54. Duranton, XV, 361. Odier, III, 1305. Rodière et Pont, II, 395. Troplong, IV, 3050. Marcadé, sur les art. 1542 et 1543, no 1. Limoges, 22 juillet 1835, Sir., 39, 2, 299.

bien que la constitution de dot portât sur tous les biens présents, et que le paiement du prix de licitation eût été effectué avec des deniers dotaux, à moins que ces deniers ne fussent sujets à remploi ". Elle s'appliquerait même, sauf cette dernière restriction, au cas où la constitution de dot comprendrait tous les biens présents et à venir 42.

c. Lorsque la part indivise de la femme dans une succession, ou autre universalité juridique, se trouve spécialement constituée en dot, ou forme partie intégrante d'une constitution générale de tous biens présents ou de tous biens présents et à venir, et que la femme se rend adjudicataire sur licitation d'un ou plusieurs des immeubles communs, ces immeubles deviennent dotaux pour le tout, à supposer que les consorts de la femme soient exclusivement remplis de ce qui leur revient en valeurs provenantes de la masse commune; et dans l'hypothèse contraire ils ne le deviennent que sous déduction d'une portion correspondante à la soulte que la femme aura à payer de ses propres deniers ❝3.

41 Nous croyons devoir nous écarter sur ce point de l'opinion suivie par la grande majorité des auteurs, qui admettent que, dans l'hypothèse prévue au texte, les immeubles acquis par la femme sur licitation deviennent dotaux pour le tout, par le motif que rien ne s'opposerait plus dans cette hypothèse à l'application de l'art. 883. A notre estime, le point de départ de cette opinion est complétement erroné. Invoquer l'art. 883 pour la solution d'une question de dotalité, c'est le détourner de son objet, et en étendre l'application en dehors de la sphère d'intérêts que le législateur a entendu régler, en consacrant la rétroactivité du partage et de la licitation. Les questions de dotalité qui peuvent s'élever à l'occasion d'acquisitions faites pendant le mariage, doivent exclusivement se décider par les dispositions combinées des art. 1543 et 1553, qui sont spéciales à la matière. Il ne saurait dépendre de la volonté de la femme d'augmenter ou de transformer sa dot durant le mariage, en se rendant adjudicataire sur licitation de la totalité d'immeubles dans lesquels elle ne possédait qu'une part indivise, au moment de la passation du contrat de mariage. Voy. en ce sens : Marcadé, sur l'art. 1558, no 5. Voy. en sens contraire: Tessier, I, p. 283, let. D.; Duranton, Odier, Rodière et Pont, locc. citt.; Troplong, IV, 3051 et 3052.

**Cette proposition n'est pas seulement contredite par les auteurs que nous avons cités à la fin de la note précédente; elle est même rejetée par Marcadé qui, tout en écartant l'argument tiré de l'art. 883, se fonde sur ce que la dot, comprenant tous les biens à venir, n'est pas augmentée par une acquisiton faite avec des deniers dotaux. En raisonnant ainsi, cet auteur a perdu de vue que ce n'est pas seulement l'augmentation de la dot, mais encore sa transformation qui se trouve formellement prohibée par les art. 1395, 1543 et 1553. Cpr. texte n° 4 et note 29 supra.

43 Dans la première hypothèse, la femme ne reçoit en définitive que le montant de ce qui lui revient dans la masse commune, et les résultats de l'opération doivent être assimilés à ceux d'un partage ordinaire. Dans la seconde hypothèse,

§ 535.

Des droits respectifs des époux sur les biens dotaux. 1o Des droits

du mari.

Le mari a l'administration et la jouissance des biens dotaux. Art. 1549, al. 1 et 2.

1° Bien que le mari ne puisse plus être considéré comme dominus dotis, les pouvoirs dont il jouit en qualité d'administrateur des biens dotaux, sont plus étendus que ceux qui, sous le régime de la communauté, lui compètent sur les biens propres de la femme.

Ainsi, le mari a non-seulement le droit de louer, sous les restrictions indiquées aux art. 1429 et 1430, les immeubles dotaux, et de former les actions possessoires qui y sont relatives, de poursuivre le recouvrement des créances dotales, d'en donner quittance avec main-levée des inscriptions hypothécaires prises pour leur sûreté, et de les céder par voie de transport3, de vendre les meubles dotaux corporels, enfin, de recevoir le compte de tutelle qui peut être dû à la femme lorsqu'elle s'est constitué en dot, soit

au contraire, il y a de la part de la femme acquisition nouvelle au point de vue de la dotalité, et le sort de cette acquisition est réglée par les dispositions de l'art. 1553.

'Cela résulte du texte même de l'art. 1549 qui, en ne conférant au mari que l'administration et la jouissance des biens dotaux, lui dénie virtuellement, du moins en général, la qualité de propriétaire de ces biens, qualité qui, même en Droit romain, ne lui appartenait pas dans un sens absolu et exclusif de tout droit de la femme. C'est aussi ce que supposent les art. 1551, 1552, 1555, 1556, 1564 à 1567. Merlin, Rép., vo Dot, § 7, no 6; vo Usufruit, § 4, no 2. Tessier, De la dot, II, p. 121 et 177; Questions sur la dot, nos 1 à 49. Odier, III, 1162 à 1170. Rodière et Pont, II, 397 et 436 à 439. Marcadé, sur l'art. 1549, no 2. Voy. en sens contraire: Troplong, IV, 3102 à 3104.

* Cette proposition s'applique même aux rentes perpétuelles faisant partie de la dot. La controverse qui existait à cet égard dans l'ancien Droit, à raison de ce que ces rentes étaient rangées dans la classe des immeubles, ne peut plus s'élever aujourd'hui en présence de la disposition de l'art. 529. Merlin, Rép., vo Dot, § 7, no 4. Tessier, II, p. 131. Benoît, I, 125. Duranton, XV, 404. 'Odier, III, 1175. Rodière et Pont, II, 440. Cpr. Req. rej., 11 juillet 1843, Sir., 43, 1, 576; Caen, 13 juillet 1848, Sir., 50, 2, 100; Req. rej., 1er décembre 1851, Sir., 51, 1, 808.

C'est ce qui est aujourd'hui généralement reconnu, même dans le système de l'inaliénabilité de la dot mobilière. Cpr. § 537 bis, texte et note 7.

spécialement le reliquat de ce compte, soit tous ses biens présents'; il est, en outre, autorisé à intenter, sans le concours de la femme, les actions pétitoires concernant les immeubles dotaux 3, à défendre à de pareilles actions et à former, en cas d'aliénation volontaire de l'immeuble affecté à une créance dotale, la surenchère admise par l'art. 21857.

6

Il y a plus, les pouvoirs attribués au mari, quant à l'exercice des actions dotales de quelque nature qu'elles soient, sont attachés à sa personne d'une manière exclusive; et la femme est, même avec l'autorisation du mari, sans qualité pour les intenter. A plus

* Duranton, XV, 405. Montpellier, 20 janvier 1830, Sir., 30, 2, 121.

* Les termes d'en poursuivre les débiteurs et les détenteurs, employés dans le deuxième alinéa de l'art. 1549, prouvent clairement, surtout en les rapprochant de l'art. 1428, al. 2, que les rédacteurs du Code Napoléon ont voulu adopter sur ce point les principes du Droit romain, d'après lesquels le mari avait l'exercice, en demandant, comme en défendant, des actions, tant réelies que personnelles, concernant les biens dotaux. Cpr. L. 11, C. de jur. dot. (5, 12); L. 9, C. de rei vind. (3, 52). Merlin, Rép., vo Puissance maritale, sect. II, § 3, art. 3, n° 8. Duranton, XV, 394. Bellot des Minières, IV, p. 64. Benoît, I, 105. Odier, III, 1180. Rodière et Pont, II, 479. Troplong, IV, 3104 et 3105. Marcadé, sur l'art. 1549, no 2. - Suivant Toullier (XII, 392 et 393) et M. Tessier (I, p. 136), le mari serait bien autorisé à exercer seul les actions immobilières relatives aux biens dotaux, mais il ne pourrait agir ainsi que dans son intérêt comme usufruitier, et sans préjudicier aux droits de la femme. D'après cette opinion, les pouvoirs du mari comme administrateur des biens dotaux, seraient absolument les mêmes que ceux dont il jouit sous le régime de la communauté, relativement aux immeubles de la femme dont la communauté a l'usufruit. Mais c'est là confondre les règles essentiellement différentes des deux régimes. Cpr. § 509, texte no 3 et note 20.

* Le droit de former une action emporte, en général, celui d'y défendre, et l'on ne voit aucun motif pour ne pas appliquer cette règle en ce qui concerne les actions dotales. Rodière et Pont, II, 482. Troplong, IV, 3107. Voy. encore les autorités citées à la note 5 supra. Voy. en sens contraire Bordeaux, 16 mars 1827, Sir., 28, 2, 49; Riom, 28 janvier 1844, Sir., 46, 2, 17.

'Montpellier, 27 mai 1807, Sir., 7, 2, 916. Caen, 20 juin 1827, Sir., 28, 2, 183. Cpr. Civ. rej., 16 décembre 1840, Sir., 41, 1, 11. Cet arrêt décide que, sous le régime de la communauté, le mari ne peut former une surenchère sur l'immeuble hypothécairement affecté à une créance propre de la femme. Cette décision, fondée sur le motif que la surenchère constitue l'exercice d'une action réelle immobilière, et que sous le régime de la communauté le mari n'a que l'exercice des actions mobilières ou possessoires, n'est pas contraire à la proposition émise au texte.

* Duranton, XV, 402. Benoît, I, 106. Odier, III, 1177. Marcadé, sur l'art. 1549, n° 2. Montpellier, 27 mai 1807, Sir., 7, 2, 916. Limoges, 4 février 1822, Sir., 22, 2, 247. Bordeaux, 27 juillet 1857, Sir., 58, 2, 65. Grenoble, 23 avril 1858, Sir., 58, 2, 397. Voy. en sens contraire Toullier, XIV, 141; Bellot des Mi

forte raison serait-elle non recevable à les exercer avec la simple autorisation de justice".

Les jugements rendus sur les actions dotales exercées par le mari ou contre lui, lient la femme, tout comme si elle avait figuré dans l'instance 10, sauf à elle à les attaquer par voie de tierce opposition, s'ils avaient été obtenus par suite d'une collusion entre le mari et l'autre partie.

Par exception à la règle qui confie au mari l'exercice des actions dotales et la défense à de pareilles actions, il ne peut, sans le concours de la femme, ni provoquer le partage de biens dotaux indivis entre elle et des tiers ", ni même défendre à la demande en

11

nières, IV, p. 65; Tessier, II, 835; Sériziat, no 76; Taulier, V, p. 264 ; Rodière et Pont, II, 481; Zachariæ, § 535, note 2; Turin, 10 août 1811, Sir., 12, 2, 271; Lyon, 16 janvier 1834, Sir., 35, 2, 52. Cette dernière opinion nous paraît repoussée par le texte même de l'art. 1549, dont le second alinéa porte: non pas que le mari a le droit d'en poursuivre seul les débiteurs et détenteurs ; mais qu'il a seul le droit d'en poursuivre les débiteurs et détenteurs. En vain objecte-t-on que l'autorisation du mari équivaut de sa part à un mandat. Cette assimilation est complétement inexacte: on ne saurait voir un véritable mandat dans le pouvoir donné à une personne pour agir, non point au nom du mandant, mais en son propre nom. Cpr. § 536, texte et notes 4 à 6; § 537, texte no 1 et note 18. La plupart des auteurs qui, contrairement à notre manière de voir, enseignent que la femme peut exercer les actions dotales avec l'autorisation de son mari, reconnaissent avec nous qu'elle ne le pourrait pas avec la simple autorisation de justice. Voy. cep. Taulier, loc. cit.

9

10 La proposition énoncée au texte ne peut souffrir difficulté, dès que l'on admet que le mari a seul qualité pour intenter les actions dotales et pour y défendre, non-seulement dans l'intérêt de son droit d'usufruit, mais quant au fonds même, comme représentant des intérêts dotaux. Duranton, XV, 398 et 399. Odier, III, 1480. Rodière et Pont, II, 483. Troplong, IV, 3106. Marcadé, loc, eit. " Art. 818. Toullier, XIV, 156 et 157. Chabot, Des successions, sur l'art. 818, no 4. Malpel, Des successions, no 244. Vazeille, Des successions, sur l'art. 818, no 3. Bellot des Miniéres, IV, p. 137 et 412. Tessier, De la dot, II, note 838; Quest. sur la dot, nos 51 à 53. Duranton, VII, 125; XV, 395 et 396. Marcadé, sur l'art. 818, no 2, et sur l'art. 1549, no 3. Odier, III, 1181. Rodière et Pont, II, 484. Agen, 24 février 1809, Sir., 35, 2, 295, à la note. Nîmes, 12 mars 1835, Sir., 35, 2, 294. Paris, 14 juillet 1845, Sir., 45, 2, 501. Civ. rej., 21 janvier 1846, Sir., 46, 1, 263. Voy. en sens contraire: Delvincourt, III, p. 382; Benoît, I, 127; Troplong, IV, 3108 et suiv.; Aix, 9 janvier 1810, Sir., 11, 2, 468. A l'appui de cette dernière opinion on dit que l'art. 818, décrété à une époque où il n'avait pas encore été admis que le régime dotal dût prendre place dans le Code, est étranger à la discussion, et que la question doit exclusivement se décider par la disposition générale de l'art. 1549. On ajoute que si en Droit romain le mari n'était pas autorisé à intenter seul les actions en partage (L. 2, C. de fund. dot., 5, 23), cela tenait uniquement à ce que le partage y était regardé

« PreviousContinue »