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de l'une ou de l'autre de ces époques, au profit de la femme on de ses héritiers 33. Art. 1570.

Si le mariage a été dissous par la mort du mari, la femme peut, au lieu d'exiger les fruits et les intérêts de sa dot pendant l'année qui suit la dissolution du mariage, se faire fournir, durant cet espace de temps, sa nourriture et son entretien aux dépens de la succession du mari *. Du reste, quel que soit le choix de la femme, la succession du mari lui doit toujours l'habitation pendant une année, à partir de la mort de ce dernier, ainsi que les habits de deuil, sans imputation sur les fruits et les intérêts auxquels elle a droit. Art. 1570, al. 2. La femme jouirait des différents droits que lui attribue le second alinéa de l'art. 1570, lors même que le mari lui aurait fait un legs, à moins qu'il n'eût subordonné sa libéralité à la condition qu'elle renonce à ces droits.

15 et 16; § 494, texte n° 3 et note 13. Rodière et Pont, II, 645 et 859. Limoges, 17 juin 1835, Sir, 36, 271. Voy. cependant Duranton, XV, 570; Odier, III, 1399; Troplong, IV, 3672. Suivant ces auteurs, l'usufruit du mari ne cesserait qu'à partir du jugement de séparation, parce que, disent-ils, le mari a jusque là supporté les charges du mariage. Ce motif n'est rien moins que concluant, puisque, d'après notre manière de voir, l'obligation imposée à la femme par l'art. 1448, en ce qui concerne la contribution aux charges du mariage, remonte également au jour de la demande en séparation de biens.

33 La Cour de cassation (Req. rej., 28 mars 1848, Sir., 48, 1, 354) a cependant décidé, contrairement à l'opinion émise au texte, que les intérêts des sommes dotales dont le mari doit la restitution, ne courent, en cas de séparation de biens, que du jour du jugement qui l'a prononcée, et non du jour de la demande. Quelque graves que soient les motifs de cette décision, nous ne croyons pas pouvoir y adhérer. Il ne s'agit pas ici, comme la cour suprême paraît le supposer, de véritables intérêts moratoires, mais bien d'intérêts légaux, qui sont dus indépendamment de toute demande, et indépendamment même de la possibilité pour le débiteur de se libérer immédiatement. Si l'art. 1570 ne devait pas s'appliquer au cas de séparation de biens, comme à celui de dissolution du mariage par le décès de l'un des époux, on se trouverait ramené à la règle posée par l'art. 1153, de telle sorte que les intérêts ne courraient plus de droit même à partir du jugement de séparation, et ne seraient dus que du jour où ils auraient été demandés. Que si l'on admet l'extension de l'art. 1570 au cas de séparation, il n'y a plus de motifs pour ne pas y appliquer également l'art. 1445. Cpr. art. 1473; § 516, texte no 6 et note 46.

34 La femme, en optant pour ce dernier parti, perd donc, pendant une année, tout droit aux intérêts des sommes dotales ainsi qu'aux fruits naturels ou civils des immeubles dotaux. Le second alinéa de l'art. 1570 ne parle, il est vrai, que des intérêts de la dot, mais il est évident que ces expressions ont été employées comme synonymes de revenus dotaux. Duranton, XV, 574. — Cpr. sur le cas où la femme aurait reçu ses aliments au delà de l'année de deuil : Bastia, 26 đẻcembre 1855, Sir., 56, 2, 13.

35 Tessier, II, p. 264. Aix, 2 mai 1839, Sir., 39, 2, 528.

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Par exception à la règle générale admise en matière d'usufruit ordinaire, les fruits naturels et les fruits civils irréguliers 7 des biens dotaux sont, en ce qui concerne la répartition à en faire, lors de la cessation de la jouissance du mari 39, entre ce dernier ou ses héritiers et la femme ou ses héritiers, entièrement assimilés à des fruits civils réguliers. Art. 1571 40. Il en résulte que les fruits des biens dotaux, de quelque nature qu'ils soient, perçus ou à percevoir pendant l'année dans laquelle la jouissance du mari vient à cesser, comme constituant le revenu de cette année ", doivent être confondus dans une seule masse, laquelle se partage entre le mari ou ses héritiers et la femme ou ses héritiers, dans la proportion du nombre de jours qui se sont écoulés à partir du jour anniversaire de la célébration du mariage jusqu'à celui de la cessation de l'usufruit 42.

La règle de partage établie par l'art. 1571 doit être appliquée, non-seulement aux récoltes annuelles, mais encore à celles qui ne se font qu'à des intervalles de plusieurs années, de sorte que le

**Sous l'expression fruits naturels, nous comprenons, comme à l'ordinaire, les fruits naturels proprement dits et les fruits industriels. Cpr. Proudhon, De l'usufruit, V, 2707 et 2708; Benoît, II, 195 et suiv.

* Cpr. Proudhon, op. cit., II, 911; V, 2702 à 2706; Benoît, II, 205 et suiv. ** Quoique l'art. 1571 ne parle que des fruits des immeubles dotaux, il nous paraît incontestable que la disposition de cet article doit être étendue aux fruits naturels ou civils irréguliers de tous les biens dotaux, par exemple, au croît des animaux Est eadem ratio. Rodière et Pont, II, 656. Taulier, V, p. 371.

** L'art. 1571 dit, à la dissolution du mariage; mais il est hors de doute que les dispositions de cet article s'appliquent à tous les cas où, pour quelque cause que ce soit, la jouissance du mari vient à cesser. Proudhon, op. cit., V, 2696. Troplong, IV, 3678.

* Cet article reçoit application, même au cas où la jouissance du mari vient à cesser dans le cours de la première année du mariage. Cpr. § 535, note 22.

"Pour déterminer quels sont les fruits de la dernière année auxquels s'applique l'art. 1571, il faut principalement s'attacher à reconnaître quels sont, eu égard aux fruits précédemment récoltés ou perçus, ceux qui doivent être considérés comme des revenus de l'année dans laquelle cesse la jouissance du mari. Cette observation suffit pour lever tous les doutes auxquels peuvent donner lieu des récoltes précoces ou tardives. C.pr. Benoît, II, 197 et 198; Proudhon, op. cit., V, 2713 et 2714; Marcadé, sur l'art. 1571, no 1. — Il résulte également de cette observation que la décision donnée par Papinien, dans la L. 7, § 2, D. sol. matrim. (24, 3), ne doit plus être suivie sous l'empire du Code. Cpr. Benoît, II, 202; Duranton, XV, 453; Proudhon, op. cit., V, 2716 à 2734.

42 Ainsi, cette masse se divise en trois cent soixante-cinq parties; le mari ou ses héritiers prennent autant de ces parties que l'usufruit a duré de jours pendant la dernière année; le surplus appartient à la femme ou à ses héritiers.

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mari ne peut garder les récoltes de la dernière espèce que dans la proportion de la durée de sa jouissance comparée aux intervalles qui séparent ces récoltes, et que, réciproquement, il a droit, dans la même proportion, à la récolte qui se fera à l'expiration de la période pendant laquelle sa jouissance a pris fin “3.

Les frais de semence, de culture et de récolte se prélèvent sur les fruits".

5o De l'époque à laquelle la restitution peut être exigée.

La restitution des objets dotaux dont la femme a conservé la propriété, peut, en général, être exigée immédiatement après la cessation de la jouissance du mari". Art. 1564.

La restitution de la dot constituée en argent, ainsi que celle de l'estimation ou de la valeur des objets dotaux dont le mari est devenu propriétaire et du prix de ceux qu'il a valablement aliénés, soit en vertu d'une clause du contrat de mariage, soit en vertu de son droit d'administration ", ne peut, à moins de stipulation contraire", et sauf le cas de séparation de biens ", être exigée qu'un

43 Toute autre solution de cette difficulté qui n'a pas été prévue par la loi. conduirait, soit pour le mari, soit pour la femme, à de choquantes injustices, et serait évidemment contraire à l'esprit de la loi, qui a voulu prévenir de pareilles injustices, même pour des récoltes annuelles. Delvincourt, III, p. 119. Toullier, XIV, 314. Duranton, XV, 458. Proudhon, op. cit., V, 2735 à 2737. Tessier, II, p. 172. Bellot des Minières, IV, p 373. Sériziat, no 303. Odier, III, 1407. Rodière et Pont, II, 650. Marcadé, sur l'art. 1571, no 2. Voy. en sens contraire Troplong, IV, 3675.

"Arg. art. 548. Cpr. L. 7, § ult. D. solut. matrim. (24, 3); Tessier, II, p. 172. Benoît, II, p. 275. Duranton, XV, 449. Odier, III, 1408. Rodière et Pont, II, 650, Voy. cependant Maleville, sur l'art. 1571.

45 Cette règle s'applique également à la restitution de la valeur de pareils objets qui auraient péri par la faute du mari.

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Cpr. art. 1557; § 535, texte n° 1. · Quoique l'art. 1565 ne parle expressément que des meubles mis à prix par le contrat, il nous paraît qu'il doit être appliqué à ceux dont le mari est devenu propriétaire à raison de leur nature, et mème à ceux dont il a valablement disposé sans en être devenu propriétaire, puisque le motif d'équité qui sert de base aux dispositions de cet article, se reproduit toutes les fois que le mari se trouve, sans aucune faute qui lui soit imputable, dans l'impossibilité de rendre en nature les objets dotaux. Cpr. Bellot des Minières, IV, p. 234 et suiv.; Duranton, XV, 550; Sériziat, no 253; Rodière et Pont, II, 620; Marcadé, sur les art. 1564 et 1565.

* Delvincourt, III, p. 116. Bellot des Minières, IV, p. 240. Taulier, V, p. 362 Rodière et Pont, II, 626.

48 La disposition de l'art. 1565 est inapplicable lorsque la restitution de la dot devient exigible par suite de séparation de biens. Dans ce cas, la femme ou

an après la cessation de la jouissance du mari. Art. 1565 et arg. de cet article. La femme ou ses héritiers n'ont pas même, en pareil cas, le droit d'exiger une caution pour la garantie de cette restitution". La disposition de l'art. 1565 cesse d'ailleurs d'être applicable dans tous les cas où le débiteur est, de Droit commun, privé du bénéfice du terme qui lui avait été accordé 50.

6o Dispositions spéciales à l'hypothèque légale qui garantit la restitution de la dot, et au rapport de celle-ci.

L'hypothèque légale dont la femme jouit pour la restitution de sa dot, n'est point privilégiée quant à son rang. Art. 1572 1.

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Lorsqu'une fille dotée, soit par son père, soit par sa mère "2, a épousé un homme qui se trouvait déjà insolvable lors de la constitution de dot, et qui n'avait à cette époque ni métier ni profession qui pût lui tenir lieu de bien, elle n'est tenue, en cas de perte ou de dépréciation de sa dot, de rapporter à la succession de son père ou de sa mère, que l'action qui lui compète contre le mari ou ses héritiers pour se la faire restituer, et non la dot elle-même 5.

ses héritiers peuvent immédiatement réclamer la remise en nature ou le paiement de la valeur de tous les objets dotaux sans distinction. Arg. art. 1563 cbn. 1444 et 1188. Duranton, XV, 553. Tessier, II, p. 258. Sériziat, no 245. Odier, III, 1387. Rodière et Pont, II, 623. Troplong, IV, 3637. — Mais au cas de séparation de corps ou de déclaration d'absence, le mari ou ses héritiers jouissent du délai établi par l'art. 1565. Duranton, XV, 554. Rodière et Pont, loc. cit. Voy. en sens contraire Sériziat, no 243.

* Merlin, Rép., vo Dot, § 11, no 5.

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Cpr. art. 1188; § 303. Duranton, XV, 553. Odier, III, 1387. Rodiêre et Pont, II, 622.

L'objet de cet article été d'abroger la loi 12, C. qui pot. in pign. (8, 18), d'après laquelle la femme se trouvait, pour la restitution de sa dot, préférée aux créanciers qui lui étaient antérieurs en hypothèque. Exposé de motifs, par Berlier, et Rapport au Tribunat, par Duveyrier (Locré, Lég., XIII, p. 297, no 43, p. 391, no 75). Maleville, sur l'art. 1572.

**L'art. 1573 ne parle, il est vrai, que de la dot constituée par le père; mais il doit, par identité de raison, être appliqué à celle qui l'a été par la mère. Il n'existe aucun motif rationnel de distinguer entre le père et la mère, puisque le premier n'est pas plus que la seconde civilement obligé de doter ses enfants. Delvincourt, II, p. 41. Vazeille, Des successions, sur l'art. 850. Duranton, VII, 418, et XV, 576. Sériziat, no 315. Rodière et Pont, I, 124. Troplong, IV, 3680 à 3683. Marcadé, sur l'art. 1573, no 2. Demolombe, XVI, 211. Voy. en sens contraire Bellot des Minières, IV, p. 282. Cpr. Grenier, Des donations, II, 530. 53 Il en est ainsi, que la dot ait été constituée en meubles ou en immeubles : Lex non distinguit. Vazeille, op. et loc. citt. Duranton, VII, 419. Marcadé, sur l'art. 1573, no 1. Voy. en sens contraire: Chabot, Des successions, sur 34* IV.

Mais si le mari n'est devenu insolvable que depuis la constitution de dot, ou bien si, à cette époque, il avait un métier ou une profession, la perte ou la dépréciation de la dot est exclusivement à la charge de la femme. Art. 1537 54.

B. DES BIENS PARAPHERNAUX.

§ 541.

1° Tous les biens de la femme qui n'ont été ni constitués en dot ni donnés par contrat de mariage, ou qui ne se trouvent pas légalement subrogés à des biens de l'une ou de l'autre de ces catégories, sont paraphernaux. Art. 1574.

Les acquisitions à titre onéreux faites, soit par la femme seule, soit conjointement par le mari et la femme, appartiennent en propre à celle-ci pour la totalité ou pour moitié, qu'elles aient été soldées de ses deniers ou de ceux du mari1; et sauf le cas de subro

l'art. 883, no 12; Grenier, op. cit., II, 531; Delvincourt, II, p. 41; Demante, III, 202; Demolombe, XVI, 214.- Il semble cependant que la femme ne serait pas dispensée de rapporter la valeur des immeubles dotaux dont le contrat de mariage n'avait permis l'aliénation que sous la condition de son consentement, et à la vente desquels elle aurait effectivement concouru. Rodière et Pont, I, 123. 54 Cet article s'applique-t-il à la fille mariée sous le régime de la communauté, ou sous un régime exclusif de communauté, comme à la fille mariée sous le régime dotal? On peut dire, pour l'affirmative, que la disposition de cet article, uniquement fondée sur la négligence du père ou de la mère qui a constitué la dot, ne saurait être considérée comme la conséquence d'un principe particulier au régime dotal. Mais la négative nous paraît préférable. En effet, l'art. 1573 a été tiré de la novelle 97, chap. VI, et de l'authentique quod locum (ad L. 4, C. de collat., 6, 20), dont les dispositions n'ont jamais été reçues que dans les pays de Droit écrit ; et en plaçant l'art. 1573 dans le chapitre qui traite du régime dotal, les rédacteurs du Code ont clairement manifesté l'intention de ne reproduire qu'en faveur des habitudes des pays de Droit écrit une disposition qui a toujours été étrangère aux pays coutumiers. Cpr. § 499, texte no 2 et note 1. Chabot, op. et loc. citt. Grenier, op. cit., II, 529. Duranton, VII, 416 à 420; XV, 576. Marcadé, sur l'art. 1573, no 2. Demante, III, 185 bis, 11. Demolombe, XVI, 210. Voy. en sens contraire: Vazeille, op. et loc. citt.; Delvincourt, II, p. 41; Zachariæ, § 540, note 28. Voy. aussi Rodière et Pont, I, 125.

Nous nous bornerons à renvoyer pour la justification de cette proposition aux explications données à la note 2 du § 531. Odier, III, 1187 bis à 1192. Nîmes, 13 août 1857, Sir., 58, 2, 360. Cpr. Grenoble, 1er février 1812, Sir., 28, 2, 44, à la note; Grenoble, 30 juin 1827, Sir., 28, 2, 191; Montpellier, 14 février 1843, Sir., 43, 2, 222. Voy. en sens contraire: Riom, 22 février 1809, Sir., 12, 2, 198. Cpr. aussi Rodière et Pont, II, 685. — Mais s'il résultait des circonstances que la

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