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n'avait trouvé d'autre ressource que de se jetter dans un port de la Guadeloupe. Nous nous flattons qu'avant trois mois il ne restera pas aux Français une seule colonie dans toutes les Antilles.

Une fregate française de 40 canons, allant à Corfou avec des munitions, a été prise dans l'Adriatique, par la frégate anglaise la Belle Poule. La nouvelle en est venue par la frégate le Success de 36 canons, qui vient d'arriver de Malte, d'où elle est partie le 2 de ce mois, et d'où elle amene, dit-on, deux messagers venant d'Autriche.

Depuis quelque temps, les prises de bâti ments français se multiplient avec une abondance et une rapidité qui étonnent. Lorsque l'on songe à la détresse à laquelle ces captures doivent réduire les sujets de Buonaparté, on serait presque tenté de souhaiter qu'il conservât quelques colonies en Amérique et en Asie; l'appât qu'elles présenteraient aux armateurs de Bayonne, de Bordeaux et Nantes, suffiraient, au défaut de licences et de neutres, à nous approvisionner de vins et eaux-devie de France. Nous avons vu les canots de la frégate la Résistance enlever dernierement, dans le port de St. Sebastien, 5 chassemarées, chargés de vivres pour l'armée française d'Espagne, et la goëlette qui les escortait; la corvette le Plover, capitaine Brown, a pris, le 22, le fameux corsaire l'Amiral Martin de Bayonne, de 4 canons de 18, et 104 hommes d'équipage, qui infestait la mer depuis quatre ans. Nous venons d'apprendre encore l'arrivée dans nos ports de la Célestine, navire de 500 tonneaux, allant de l'Isle de France à Lorient, avec une cargaison extrémement riche, prise par le Cossack. Les frégates l'Amethyst et I'Emerald, que les matelots appellent plaisamment les deux bijoux de la marine, ont pris et conduit à Plyinouth le Serpent de 6 canons et 42

hommes, allant de Bayonne à la Guadeloupe avec des provisions; la Caroline de 16 canons, idem ; la goëlette l'Aventure de Bordeaux à la Guadeloupe; et un autre brigantin richement chargé, allant de Bordeaux à l'Isle de France. La corvette le Subtle, a pris à l'Ouest de Madere une lettre de marque, allant de Bordeaux à la Martinique, avec de la farine et des piastres pour la solde de la troupe, &c. &c.

A la Martinique, les Français ont brûlé leur frégate l'Amphitrite qui venait d'arriver avec des troupes et des provisions, et deux corvettes anglaises qui avaient été capturées par des forces supérieures.

Dans la Méditerranée, nous avons perdu la frégate la Proserpine, qui faisait partie de l'escadre bloquant Toulon. Cette frégate se risquant trop près de ce port, fut surprise, attaquée, et finalement enlevée après une vigoureuse résistance par les deux frégates françaises, la Pénélope et la Pauline.

Flottes de Rochefort et Brest.

L'amiral lord Gambier a joint avec plusieurs vaisseaux de ligne les deux escadres anglaises qui, seules, bloquaient déjà avec 7 vaisseaux les 11 de Brest et de Rochefort, qui sont embossés devant l'Isle d'Aix, et il les bloque de près avec douze vaisseaux de ligne, &c. Le célebre capitaine Congreve vient de partir de Portsmouth avec plusieurs brûlots, un détachement d'artilleurs de la marine, et une pacotille des fusées phosphoriques de son invention, dont l'effet dégoûtera probablement pour long-temps les narins français du mouillage de l'Isle d'Aix, malgré les formidables batteries de cette ile. La relation que le Moniteur a publiée de la traversée des escadres de Brest et de Lorient, de leurs exploits et de leur jonction, mérite d'être comparée à celle que la Gazette de Londres contenait sur le même sujet. Dans celle-ci, on dit les frégates françaises échouées et totalement perdues; dans la gazette française, on les dit entrées et en sûreté dans le Port des Sables d'Olonne. Or, nous savons, de visu, que ce port n'a jamais contenu ni pu contenir de frégates. Voici cette relation française:

Rapport à Sa Majesté l'Empereur et Roi.

Sire,

Paris, le 28 Février, 1809.

Sur le compte que j'ai eu l'honneur de rendre à V. M., que deux divisions anglaises, fortes chacune de quatre vaisseaux et de plusieurs frégates, bloquaient ses rades de Lorient et de l'Isle-d'Aix, et que la manœuvre habituelle de la derniere était d'occuper le mouil

lage de la rade des Basques, V. M. a ordonné que son escadre de Brest appareillerait pour débloquer ses rades et attaquer l'ennemi.

En conséquence, le contre-amiral Willaumez reçut avec l'ordre de mettre sous voiles, celui de se porter d'abord sur Lorient, d'en chasser l'ennemi, et de se faire rallier par la division mouillée dans ce port, si la marée permettait son appareillage au moment où il paraîtrait.

Dans le cas où cette réunion éprouverait des retards, le contreamiral Willaumez ne devait point s'arrêter, mais continuer sa route en toute diligence, pour aller surprendre en rade des Basques, l'ennemi qui semblait ne pouvoir lui échapper, à moins qu'il ne fût prévenu plusieurs heures d'avance du mouvement de l'escadre de Votre Majesté.

Le contre amiral est parti de Brest le 21, avec 8 vaisseaux et 2 frégates, il a paru le soir devant Lorient; la marée empêchait alors la sortie de la division du capitaine Troude, qui s'est borné à faire appareiller le soir, et lorsque l'escadre de Brest, n'était plus à vue, la frégate la Cybele, avec l'Italienne et la Calypso, bâtiments de moindre tirant d'eau.

Ces trois bâtiments, chassés par quatre vaisseaux ennemis vẹ nant du large, n'ont pu rallier votre escadre; ils se sont embossés dans la rade des Sables, où ils ont soutenu un engagement de plus de deux heures contre un vaisseau de 80, mouillé à portée de pistolet, et les trois autres vaisseaux combattant sous voiles.

Les cables et embossures des bâtiments de Votre Majesté, ayant été coupés dans le combat, ils se sont échoués sur le sable, et le vais seau anglais qui avait combattu à l'ancre s'est retiré en talonnant sur les roches, et tellement maltraité, que, suivant le rapport que je reçois, toute sa poupe ne faisait plus qu'une vaste embrâsure. Le capitaine anglais a été tué; l'on s'occupe à sauver les bâtiments.

Cependant, le contre-amiral Willaumez, qui sans doute n'avait pas connaissance de cet événement qui se passait de l'arriere, continuait sa route pour la rade des Basques, où il arriva le 24 avec toute son escadre.

La division ennemie qu'il devait surprendre dans ce mouillage, avait été avertie de son approche pendant la nuit, et avait pris chasse aussitôt.

L'opération s'est donc bornée à la réunion de l'escadre de Brest à la division de Rochefort sur la rade de l'Isle-d'Aix; et l'ennemi

ayant été chassé de devant Lorient, le capitaine Troude en est appareillé avec une division, pour remplir la mission que Votre Majesté a daigné lui confier.

Je joins à ce rapport les premieres dépêches que j'ai reçues du contre-amiral Willaumez et du capitaine Jurien.

Je suis avec respect,

Sire,

De Votre Majesté,

Le fidele serviteur et sujet,

DECRÉS.

Le Contre-Amiral Willaumez au Ministre de la Ma

Monseigneur,

rine.

Pertuis d'Antioche, 24 Février 1809,

à bord de l'OCÉAN.

J'ai l'honneur de rendre compte à V. Exc. de la navigation de l'escadre de S. M. sous mon commandement.

Votre Exc. aura su que je suis appareillé de Brest le 21 au point du jour, aux premiers souffles des vents du Nord. Ils furent trèsjustes pour la sortie à la bordée. A 9 heures, les derniers vaisseaux étaient parvenus à doubler la Vendrée; je fis route en ligne pour le Ras avec une brise fraîche du N. N. E. Avant de le passer, la fré gate que j'avais en tête signala une voile dans le Sud. Je la reconnus pour une frégate ennemie. Cette rencontre m'ota l'espoir de cerner la division auglaise devant Lorient.

Cette frégate, qui sans doute était en observation entre les Saints et Pennemark, en faisait partie; car elle fit, aussitôt qu'elle eût reconnu l'escadre de S. M., porter sous toutes voiles vers les Glenans; elle avait trop d'avance sur moi pour la joindre, ou lui couper la terre. A 5 heures du soir, étant par le travers des Glenans, j'aperçus quatre vaisseaux prenant chasse au S. E. La division du contre-amiral Gourdon les chassa quelque temps; mais mon but, dans ce moment, n'étant que de les éloigner de la côte, je fis rallier les chasseurs, et ces vaisseaux prirent alors la bordée de l'Ouest.

Le vent avait molli dans l'après-midi; je n'arrivai sur l'île de Groix que deux heures après le coucher du soleil; mais j'avais ex

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