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état de rupture de ban, le 11 mars 1868, dans l'arrondissement de Nantes, a été condamné à une année d'emprisonnement; attendu qu'antérieurement il avait été, pour pareille infraction à son ban de surveillance, frappé par défaut, au tribunal de Mayenne, d'une peine de six mois de prison, le 28 sept. 1863; attendu que les circonstances de temps et de lieux qui accompagnaient les deux délits ainsi punis n'avaient rien de commun entre elles; que la quotité des deux peines prononcées est, en tout cas, inférieure au maximum qu'autorise l'art. 46 C. pén.; attendu, en droit, qu'il ne saurait, dès lors, être excipé en faveur du prévenu de la maxime Non bis in idem, sous prétexte que, s'agissant d'un délit continu et successif, une nouvelle peine ne pouvait l'atteindre après une première condamnation pour fait de rupture de ban, tant qu'il n'aurait pas réintégré sa résidence forcée: attendu qu'il est de doctrine comme de jurisprudence, au contraire, que les infractions commises à leur ban de surveillance par les individus qui y sont assujettis à temps ou pour la vie sont susceptibles d'engendrer l'état de récidive par elles-mèmes, dans les cas prévus en l'art. 58 C. pén.; qu'en effet, chaque fois qu'ils sont trouvés hors de leur résidence obligée, leur désobéissance aux ordres de l'administration et aux décisions de la justice les constitue en état de délit flagrant; que cet état ne peut, en devenant permanent, avoir pour conséquence de les affranchir de toute répression ultérieure à une première condamnation, sans quoi le renvoi des condamnés sous la surveillance de la haute police serait illusoire, et aurait pour la société, qu'il est destiné à protéger, des effets funestes; rejette, etc.

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Comme officier de police judiciaire, ayant droit de constater le délit de chasse qui serait commis en sa présence dans un bois communal, le maire ou adjoint, prévenu d'un tel délit, n'est justiciable que de la Cour impériale, 1re chambre civile 1.

LA COUR;

ARRET (Forêts c. Lerouge).

Attendu que Lerouge, adjoint de la commune de Gernelle, a été assigné par l'administration forestière, devant le tribunal correctionnel de Charleville, pour délit de chasse qui aurait été commis dans un bois appartenant à cette commune, lequel est soumis au régime forestier; qu'en sa qualité d'adjoint au maire, Lerouge, aux termes des art. 9 et 11 C. instr. crim., fait partie des officiers de police judiciaire, et qu'à ce titre il devait, confor

1. Si l'imputation était contre un garde champêtre, dont la fonction consiste à surveiller les propriétés rurales pour verbaliser contre les délinquants, nul doute qu'on pût le considérer comme étant en fonctions lors de son délit. Mais il est douteux qu'on puisse raisonner de même à l'égard d'un maire ou adjoint, qui ne parcourait le bois communal que pour y chasser: car nonseulement il n'est pas alors et ne saurait être « dans l'exercice de ses fonctions,» mais mème on ne peut exactement dire avec l'arrêt qu'il est dans leur exercice expectant.

mément aux art. 483 et 479 dudit Code, ètre traduit directement devant la Cour impériale, à la requête du procureur général près cette Cour, qui aurait prononcé sur la poursuite, sans qu'il pût y avoir appel; attendu qu'à la vérité, l'art. 483 précité n'accorde ce privilége de juridiction à l'officier de police judiciaire que s'il est prévenu d'avoir commis le délit dans l'exercice de ses fonctions; mais qu'il ne faut pas conclure de ces expressions que le délit doive nécessairement avoir été commis pendant que l'officier de police judiciaire procéderait à un des actes de sa compétence; que cette concomitance ou simultanéité de l'exercice des fonctions et de la perpétration d'un délit peut ne pas se manifester clairement, lorsque les fonctions dont il s'agit, au lieu d'ètre l'unique et principal objet des occupations de l'officier de police judiciaire, ne sont, comme au cas particulier, exercées par cet officier qu'accidentellement, quand se produisent devant lui les faits délictueux qu'il n'a pas mission spéciale, mais seulement pouvoir de constater; attendu que, dans le cas ci-dessus spécifié, qui est celui du procès, l'officier de police judiciaire, quoiqu'il ne remplisse pas habituellement quelques-unes des fonctions pour lesquelles il est compétent, n'en conserve pas moins le droit et le devoir de les exercer, le cas échéant; que, sous ce rapport, il faut dire que l'officier de police judiciaire, alors même qu'il n'agit pas pour remplir des fonctions dont l'exercice est plus ou moins de temps suspendu, demeure néanmoins, s'il ne se trouve pas dans des conditions qui ne soient pas inconciliables avec cette situation, dans l'exercice permanent et expectant de ses fonctions, puisque, à défaut d'autres agents spéciaux, il peut être à tout instant appelé à les remplir; - attendu que le 12 sept. 1868, date du procès-verbal dressé contre lui par un garde forestier pour délit de chasse dans le bois communal de Gernelle, Leronge, qui ne s'était pas rendu dans ce bois pour y exercer ses fonctions d'officier de police judiciaire, était tenu cependant, s'il y eût été témoin d'un délit de chasse commis sous ses yeux, de le constater par un acte régulier dont la validité serait incontestable; qu'il importe peu que cette fonction soit particulièrement exercée par des agents spécialement chargés de la surveillance et de la recherche des délits dans cette partie du territoire et des propriétés de la commune; qu'il est certain qu'aux termes du droit commun écrit dans les art. 9 et 11 C. instr. crim., aussi bien qu'en vertu de l'art. 22 de la loi sur la chasse du 3 mai 1844, Lerouge avait qualité pour constater un délit de la nature de celui qui lui est imputé; qu'il était donc en ce sens, dans l'exercice de ses fonctions, encore bien qu'au lieu de les remplir, il commit, d'après la prévention, le délit qu'il était lui-même chargé de surveiller et de faire réprimer; — attendu qu'il résulte de ce qui précède que Lerouge, adjoint au maire de Gernelle, et, comme tel, officier de police judiciaire, se trouvant dans l'exercice de ses fonctions, a été mal à propos assigné devant le tribunal correctionnel de Charleville et, par suite, sur l'appel de l'administration forestière, devant la Cour, chambre des appels de police correctionnelle, qui n'est pas compétente pour le juger; vu les art. 9, 11, 479 et 483 C. instr. crim., et 22 de la loi du 3 mai 1844, sans s'arrêter à l'appel de l'administration forestière, qui est rejeté, se déclare incompétente, etc.

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Du 44 avril 1869. C. de Metz, ch. corr. M. Sérot, prés.

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Les auteurs ou compositeurs de musique, ayant des droits sanctionnés par l'art. 428 C. pén., ne peuvent y soumettre des airs de danse, joués dans un bal non public, eût-il lieu dans une salle d'auberge, si c'est sans coopération directe de l'aubergiste.

Mais il en est autrement vis-à-vis du cafetier qui, même sans spéculation et accidentellement, fait entendre au public un concert exécuté par des musiciens ambulants.

ARRÊT (Auteurs, etc., c. Landereau, etc.).

LA COUR; - Attendu que l'arrêt attaqué déclare que le bal à l'occasion duquel ont été joués des airs de danse appartenant aux auteurs ou éditeurs réprésentés par la société demanderesse en cassation a en lieu à Rochecorbon le 22 févr. 1868, dans une des salles de l'hôtel du Croissant ; que ce local avait été mis gratuitement par Landereau, principal locataire de cet hôtel, à la disposition de jeunes gens qui ont organisé et dirigé ce bal, en ont fait tous les frais, ont choisi et payé les musiciens, et n'ont admis dans la salle que les personnes invitées réellement à l'avance, sur présentation de cartes à elles adressées et sans rétribution; attendu que la Cour impériale, dans cet état de faits souverainement constatés, a pu, sans violer l'art. 428 C. pén., déclarer que ce bal était une réunion privée, et par suite, qu'il ne devait pas être assimilé, dans l'espèce, à une représentation théâtrale publique rentrant dans les prévisions de cet article; attendu d'ailleurs que le même arrêt affirme que Landereau n'a apporté aucune coopération quelconque, ni à l'organisation ou à la direction du bal, ni au choix ou à l'exécution des morceaux de musique; que l'orchestre était dirigé par un membre correspondant de la société plaignante, et qu'il a dû supposer, dans ces conditions, que la propriété des auteurs ou éditeurs de musique serait efficacement protégée; · attendu qu'il appartenait exclusivement aux juges du fait de préciser les circonstances qui résultaient des débats; attendu qu'en renvoyant Landereau des poursuites dirigées contre lui et en le relaxant, soit comme auteur principal, soit comme complice, la Cour impériale a usé légalement du pouvoir de constater les faits et de connaître la bonne foi du prévenu; qu'en statuant ainsi elle n'a violé aucun des articles de lois ci-dessus visés ; rejette.

Du 22 janvier 1869. C. de cass.

rapp.

pén. :

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M. Saint-Luc-Courborieu,

ARRÊT (Composit. de mus. c. Champagne).

LA COUR ; - Vu l'art. 1er de la loi des 19-24 juill. 1793 et l'art. 428 C. attendu que l'art. 1er de la loi de 1793 précitée attribue aux compositeurs de musique le droit exclusif de vendre, faire vendre, distribuer leurs ouvrages et d'en céder la propriété en tout ou partie, et que ce droit se trouve sanctionné par l'art. 428 C. pén.; - attendu que les mots entrepreneurs de spectacles, dont se sert l'art. 428, ne doivent pas être limités aux industriels qui font de l'exploitation d'une entreprise théâtrale leur profession spéciale,

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mais qu'ils s'appliquent également à tous ceux qui, accidentellement ou d'une manière plus ou moins permanente, entreprennent de faire jouir le public de la vue ou de l'audition d'œuvres dramatiques ou musicales; attendu que l'arrêt de la Cour impériale de Pau (rendu le 29 mai 1868) reconnaît, en fait, que, le jour indiqué par la citation, le sieur Champagne, cafetier à Pau, a volontairement reçu dans son établissement une troupe d'artistes ambulants, qui, après avoir annoncé leur concert par leur programme, ont chanté, en présence du public réuni dans le café, différents morceaux de musique, sans avoir préalablement obtenu le consentement écrit de leurs auteurs; que ce fait constitue, de la part de cette troupe d'artistes, le délit prévu et puni par l'art. 428 C. pén.; attendu qu'en mettant son établissement à la disposition de ces artistes, en les autorisant à y donner un concert dont il connaissait la composition, puisque le programme est resté déposé sur le comptoir, le sieur Champagne a sciemment et personnellement concouru au délit; qu'il doit d'autant plus en être déclaré responsable que les plaignants l'avaient, un mois auparavant, averti par une sommation extrajudiciaire d'avoir désormais à s'abstenir de semblables représentations; attendu qu'il importe peu, dès lors, qu'il s'agisse de pauvres artistes ambulants; qu'aucun théâtre n'a été dressé; que le sieur Champagne n'a pas agi dans un but de spéculation, toutes circonstances qui ne sont point admises comme excuses par la loi; attendu qu'il suit de ce qui précède que c'est à tort que l'arrêt attaqué a renvoyé le sieur Champagne de la poursuite dirigée contre lui; casse.

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ART. 8937.

M. Guyho, rapp.

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1° De ce qu'un juge de police n'a pas compétence hors de son canton, il ne suit point que celui qui a été saisi par voie de cassation, avec attribution de compétence pour le jugement, ne puisse procéder sur les lieux litigieux aux vérifications qu'il croit utiles.

2o Les notes d'audience, faisant foi, peuvent suppléer à l'insuffisance des énonciations du jugement relatives à la prestation de serment des témoins entendus lors de la visite des lieux.

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ARRÊT (Min. publ. c. Nageotte).

LA COUR; Sur le moyen tiré de ce que le juge de paix de Pont-surYonne aurait été incompétent pour procéder à des actes d'information en dehors de sa juridiction territoriale : attendu que ce juge, saisi, en vertu du renvoi prononcé par le précédent arrêt de cette chambre, rendu à la date du 6 décembre 1867, et portant cassation d'un jugement du tribunal de simple police de Melun, avait compétence pour ordonner toutes les mesures préparatoires et pour se livrer, sur les lieux qui faisaient l'objet du litige, à tous les actes d'investigation qu'il jugeait utiles à l'effet d'éclairer sa religion et de lui permettre de statuer sur le fond de ce litige, dont la connaissance lui était dévolue; qu'il a donc compétemment accompli les actes d'information régulièrement ordonnés par son jugement préparatoire du 7 mars 1868;

sur le moyen tiré de la violation prétendue de l'art. 155 C. inst. crim. : attendu que, si les mentions contenues dans les qualités du jugement attaqué et relatives à la prestation de serment de quelques-uns des témoins entendus dans l'enquête faite sur les lieux litigieux sont irrégulières, il y a lieu de les compléter par les notes d'audience; que de ces notes, produites devant la Cour, il résulte expressément que chacun des témoins entendus a préalablement prété le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité; qu'ainsi il a été satisfait aux prescriptions de l'art. 155 précité; et attendu, en fait, que, dans le jugemet attaqué, le juge de police déclare, en appréciant les résultats de la visite des lieux et de l'enquête auxquelles il a été régulièrement procédé, que les constatations du procès-verbal, quant à l'existence des faits qui ont servi de point de départ aux poursuites, sont détruites par la preuve contraire; qu'en prenant pour base du jugement par lequel il a prononcé le relaxe, cette appréciation, qui rentrait dans son droit de prononcer souverainement sur le fait, le juge n'a violé aucune loi; rejette, etc. Du 13 février 1869. C. de cass. M. Barbier, rapp.

JURÉS.

ART. 8938.

INCOMPATIBIlité.

INGENIEUR HYDROGRAPHE.

Étant officier de l'armée de mer en activité de service, un ingénieur hydrographe attaché au dépôt des cartes et plans de la marine remplit une fonction incompatible avec celle de juré.

LA COUR ;

ARRÊT (Bouquet de Lagrye).

...

Vu l'art. 3 de la loi du 4 juin 1853, la loi du 19 mai 1834, les art. 1, 2, 14 du décret du 5 mars 1856 : - attendu qu'aux termes de l'art. 3 de la loi du 4 juin 1853, les fonctions de juré sont incompatibles avec celles de ... « militaire des armées de terre ou de mer en activité de service et pourvu d'emploi »; — que, d'après l'art. 3 de la loi du 19 mai 1834, sur l'état des officiers, l'activité consiste dans « la position de l'officier appartenant à l'un des cadres constitutifs de l'armée et pourvu d'emploi »; — attendu qu'aux termes des art. 2 et 14 du décret du 5 mars 1856 le corps des ingénieurs hydrographes forme un des cadres constitutifs de l'armée de mer; que les ingénieurs qui le composent sont des officiers de l'armée de mer en activité de service lorsqu'ils sont attachés au dépôt des plans et cartes de la marine, puisque, exclusivement chargés par l'art. 1er dudit décret des reconnaissances hydrographiques, du levé et de la construction des cartes marines, ils sont, en vertu de l'art. 4 du mème décret, à la disposition du ministre, soit pour remplir des missions hydrographiques sur les côtes de France et à l'étranger, soit pour être attachés aux stations navales pour l'exécution des travaux de même nature; — attendu qu'il résulte des divers documents officiels produits au procès que le sieur Bouquet de Lagrye, ingénieur hydrographe de 2e classe, est pourvu d'un emploi de ce titre au dépôt des plans et cartes du ministère de la marine, et qu'il en exerce les fonctions; que, dès lors, en tant que militaire de l'armée de mer, il est en activité de service; qu'il y a, par suite, incompatibilité entre ses fonctions et celles de juré, et qu'ainsi, en ordonnant que son nom serait maintenu sur la liste du jury, la Cour d'assises de la Seine a formellement violé les articles susvisés; casse, etc.

Du 25 mars 1869. C. de cass. - M. Zangiacomi, rapp.

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