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Duchem

OBSERVATIONS PRATIQUES.

Discipline. Pourvoi en cassation. —

-

Syndic et membres de 5304 la chambre de discipline devant la Cour de cassation. — Leur caractère et leur rôle.

(2o article).

Nous disions, en terminant un premier article sur les chambres de discipline des notaires, sur leur fonctionnement et leurs pouvoirs (V. Revue, no 4948, 1875, p. 561), que nous n'avions point épuisé la matière et que nous étions disposé à la reprendre si nous étions appelé par les circonstances à traiter quelques-unes des questions qui restaient. encore à résoudre.

L'honorable président d'une chambre de discipline d'un des arrondissements les plus importants de la France nous a demandé de compléter notre travaail en exposant avec quelques détails tout ce qui touche au pourvoi en cassation, à sa recevabilité, aux parties qui peuvent saisir la Cour, et particulièrement au rôle et au caractère du syndic de la Chambre devant cette haute juridiction. Nous essayerons de répondre à cette demande en étudiant : 1° quelles décisions sont susceptibles de recours en cassation; 2° par qui et contre qui le pourvoi peut être formé; 3o en quelles formes et sous quelles conditions la Cour doit être saisie.

I.

Quelles décisions disciplinaires émanant de Chambres de discipline des notaires sont susceptibles de pourvoi en cassation.

Nous n'avons que très-peu d'explications à donner sur ce point. Nous l'avons dit dans notre premier article, pen

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dant longtemps la doctrine et la jurisprudence n'admirent point le pourvoi en cassation contre les décisions des Chambres de discipline, mais on finit par reconnaître que si intime que fût l'exercice des pouvoirs disciplinaires, de cette castigatio domestica, qu'il appartient aux Chambres d'exercer, il n'était pas possible de laisser un notaire inculpé exposé aux abus de ce pouvoir, et le pourvoi fut admis contre les décisions entachées d'incompétence et d'excès de pouvoir; l'on comprit même dans la catégorie des excès de pouvoirs la violation des formes essentielles de la procédure disciplinaire, l'oubli des règles touchant à l'organisation de la Chambre, et même l'application de peines disciplinaires à des faits qui ne constituaient point un manquement aux devoirs ni aux principes de l'honneur et de la délicatesse.

Mais la Chambre des notaires a des attributions diverses; elle a des pouvoirs d'administration, des pouvoirs de conciliation et enfin des pouvoirs de juges.

Tous les actes qu'elle accomplit en ces diverses qualités ne sont pas également susceptibles de pourvoi en cassation.

La Chambre des notaires exerce son pouvoir d'administration en préparant des règlements (art. 23 de la loi du 4 janvier 1843), en donnant des avis, en délivrant des certificats attestant la moralité, la capacité, le stage des aspirants au notariat (art. 44 de la loi de ventôse an Ix, art. 5 de l'ordonnance de 1843), en délibérant sur l'établissement de la bourse commune et en proposant la répartition à l'assemblée générale (art. 39 de l'ordonnance).

Pour tous ces actes elle ne relève que du garde des sceaux qui réprime les empiétements, les irrégularités et les erreurs sur le rapport du procureur général près la Cour d'appel du lieu où est établie la Chambre des notaires.

Il est manifeste que l'intervention de la Chambre comme conciliatrice (art. 1er, §§ 3 et 18 de l'ordonnance) et les actes qu'elle accomplit en cette qualité n'étant point des actes de juridiction, ne peuvent être l'objet d'un pourvoi en cassation;

il faut mème reconnaître que si un de ces actes, tout en prenant la forme d'une décision, garde le caractère d'avis, tout pourvoi est irrecevable.-Morin, p. 351, t. 1.-Arrêt de la Chambre des requêtes du 4 mars 1864, Dall. 64.1.297. - Si au contraire l'avis de la Chambre, quoique présentant les apparences de l'acte conciliatoire, emporte une décision, une condamnation, il peut être déféré à la Cour de cassation. - Chambre civile, 29 janvier 1855. 1.55.1.119. 23 déc. 1868, Ch. civ. Dall., 69.1.140.-Ch. civ., 24 juill. 1854, Dall. 54.1.308.

Si un tiers est lésé par un avis de la Chambre, ou du moins s'il est intéressé à ce que cet avis ne soit pas maintenu, c'est par action principale contre le notaire qui veut s'en servir que ce tiers doit saisir le Tribunal civil.

Quand la Chambre de discipline a été réunie pour statuer disciplinairement et comme juge, nous avons dit plus haut que sa décision était toujours susceptible d'être déférée à la Cour de cassation, si elle est entachée d'excès de pouvoir et d'incompétence.

II.

Qui peut se pourvoir en cassation et contre qui le pourvoi peut-il être formé.

On ne peut d'abord, dans le cas où une décision, ayant visiblement le caractère d'un jugement disciplinaire, a été rendue, dénier au notaire condamné le droit de se pourvoir en invoquant l'incompétence et l'excès de pouvoir avec le sens et l'extension que nous avons donnés plus haut à ces mots.

Le syndic a également le même droit; s'il lui paraît que la Chambre n'a point observé les règles de sa compétence et de son organisation et est sortie des limites de ses pouvoirs, il est, aux termes de l'article 6 de l'ordonnance de 1843, la partie poursuivante, et puise dans cette qualité le droit de se pourvoir devant la Cour chargée de réprimer

les abus et les irrégularités substantielles que révèle la décision.

Quant à la partie plaignante, peut-elle, en cas d'acquittement du notaire poursuivi, saisir la Cour de cassation par un pourvoi?

Quel serait son intérêt ? Ce n'est point elle qui peut requérir l'application d'une peine, et dès lors, si le syndic accepte la décision de la Chambre qui rejette son action, son pourvoi n'aurait aucun intérêt à ce premier point de vue. Faut-il se préoccuper de ses intérêts civils? Mais la loi ne reconnaît pas d'action civile devant la juridiction disciplinaire, puisqu'elle défend à la Chambre de prononcer aucune condamnation à des dommages-intérêts ou à des restitutions; dès lors encore le pourvoi, en supposant qu'il pût amener la cassation de la décision, n'aurait aucun effet utile pour la partie plaignante qui, devant la Chambre de discipline à laquelle l'affaire serait renvoyée, ne pourrait rien obtenir.

C'est ce que la Cour de cassation a décidé par un arrêt du 4 février 1873, Dalloz, 73.1.11, que nous avons d'ailleurs rapporté en substance dans notre précédent article (Voy. 1875, page 566).

C'est donc bien entre le notaire inculpé et le syndic que le débat doit s'engager. On a vu quelquefois cependant le notaire demandeur en cassation diriger son pourvoi contre le président de la Chambre en même temps que contre le syndic.

Suivant nous, le pourvoi contre le président de la Chambre est absolument irrecevable; nous supposons, bien entendu, qu'il ne s'agit pas de prise à partie, procédure qui suppose de la part du juge dol, fraude et forfailure, et dont l'application à un membre d'une chambre de discipline. demanderait une étude particulière, laquelle présenterait assurément de graves difficultés.

Mais, réduit à une critique pure et simple de la décision, abstraction faite du dol du président de la Chambre, le pourvoi ne saurait être admis.

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