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plus ou moins sévères, selon que l'audace des fraudeurs, les rigueurs de la guerre, les combinaisons de la politique, le droit de représailles, les troubles de l'intérieur, et une multitude de circonstances plus ou moins graves le commandent. Comment aurait-on pu confondre ces réglemens temporaires avec les dispositions stables et permanentes du Code pénal? Parmi les autres matières, il en est qui font partie de divers Codes et réglemens généraux, tels que le Code rural, le Code militaire, les lois pénales maritimes, etc. On ne pourrait les en détacher sans nuire à l'ensemble de ces Codes et réglemens généraux, et sans les rendre extrêmement imparfaits.

Il est donc avéré que le nouveau Code ne contient qu'une faible partie de nos lois pénales, et qu'il est néanmoins aussi complet qu'il soit susceptible de l'être.

Quoique l'universalité de nos lois pénales n'ait pu être comprise dans le Code pénal, on sent qu'il est essentiel de les rapprocher, d'en former un recueil pour en faciliter la recherche, l'étude et l'application. Comment, en effet, sans ce recueil, les jeunes gens pourraient-ils les étudier, les comparer, les méditer ? Comment les officiers de police judiciaire, les juges, les magistrats pourraient-ils vérifier si le fait qui leur

est dénoncé ou qui parvient à leur connaissance est réputé crime, délit ou contravention? S'ils doivent instruire sur ce fait, ou le renvoyer à un fonctionnaire d'un autre ordre, et de quelle peine il doit être puni?

Lorsqu'un fait, qui paraît répréhensible, ne se trouve pas prévu par le Code pénal, on est actuellement obligé de recourir à la volumineuse collection de nos lois anciennes et modernes, et à celle des réglemens d'administration et de police; mais ces collections sont rares, dispendieuses, et sur-tout incomplettes: on trouvera, dans le Dictionnaire raisonné des Lois pénales, plusieurs dispositions qui n'avaient été auparavant insérées dans aucun recueil; après les avoir vainement cherchées dans les bibliothèques publiques, j'ai été obligé de les extraire des archives ministérielles. Il faut, d'ailleurs un temps considérable pour parcourir les vastes recueils de nos lois; et lorsque, après une recherche laborieuse, on parvient à découvrir une disposition applicable au fait dénoncé, il faut encore vérifier si cette loi n'a pas été dans la suite abrogée ou modifiée. La moindre négligence expose à commettre des fautes graves ou des excès de pouvoir.

Pour faire cesser cet embarras inextricable, que j'ai souvent éprouvé moi-même,

un recueil complet de toutes les dispositions pénales actuellement en vigueur m'a paru indispensable. Ce recueil n'existant pas, je l'ai d'abord rédigé pour mon usage, et je erois pouvoir l'offrir au public, persuadé, par ma propre expérience, de son utilité, principalement pour tous les fonctionnaires de l'ordre judiciaire.

Ce recueil ne comprend ni les lois relatives aux instructions et aux procédures criminelles, ni les dispositions pénales qui ne sont plus en activité. Les premières sont recueillies ou analysées dans plusieurs ouvrages qu'il est facile de se procurer; rarement on est dans le cas de consulter les autres; et leur insertion aurait rendu ce recueil trop volumineux. Il ne renferme donc que les dispositions des lois et réglemens actuellement en vigueur, servant à déterminer les caractères des crimes, délits, contraventions, et la nature des peines applicables à ceux qui en sont déclarés coupables. Les lois antérieures ne s'y trouvent rapportées ou analysées que lorsqu'elles sont nécessaires à l'intelligence du dernier état de la législation.

Il eût été avantageux, sous certains rapports, de présenter les diverses branches des lois pénales rangées par ordre de matières, et accompagnées d'observations qui

en auraient facilité l'étude. C'est à-peu-près l'ordre que je me propose de suivre dans un ouvrage plus étendu dont je m'occupe, et dans lequel toutes les parties de la législation criminelle seront rassemblées sous le titre de Lois criminelles de l'Empire français. Mais le Dictionnaire des Lois pénales n'est point un livre élémentaire : il ne comprendra que le texte pur des lois pénales, sans commentaire, accompagné seulement de quelques notes explicatives. L'ordre alphabétique m'a paru préférable, parce qu'il est le plus commode, et qu'il rend plus facile la recherche des dispositions que l'on a besoin de consulter. Il sera terminé par le Code pénal de 1810; et en regard de chaque article de ce Code, seront placées les dispositions analogues des Codes criminel, rural, et de police de 1791, et de quelques lois intermédiaires, afin que d'un coup-d'œil on puisse comparer la législation actuelle avec celle qui l'a immédiatement précédée.

Et quant aux règles générales qui doivent être soigneusement observées dans l'application de ces lois, j'en ai fait le sujet de la Dissertation qui va suivre.

SUR LES RÈGLES QUI DOIVENT ÊTRE OBSERVÉES
DANS L'APPLICATION DES LOIS PÉNALES.

I. Si les actions des hommes étaient toujours déterminées par leur intérêt véritable, elles ne cesseraient jamais d'être conformes aux règles de la justice, à l'intérêt général, et les lois criminelles seraient superflues, car l'intérêt individuel bien entendu se trouve toujours en harmone avec celui de la société; mais l'ignorance et les passions aveugles opposent leurs prestiges à ce puissant mobile, et entraînent souvent les individus dans de funestes égaremens, non moins nuisibles à leurs auteurs qu'à l'ordre social. Les lois interviennent pour la société dans ces luttes périlleuses des passions contre la sagesse, du faux intérêt contre le véritable; et les peines sont les moyens auxiliaires qu'elles emploient pour faire prédominer la vertu.

Ainsi, les lois pénales ne sont pas instituées, comme on le supposait autrefois, pour venger la société, car la vengeance est une passion inconciliable avec l'action des lois. On ne peut les considérer que comme un frein salutaire destiné à contenir la fougue des passions, et à prévenir les crimes, tam par la crainte que par l'exemple des supplices.

II. Le droit de punir appartient incontestablement à la société; il émane de celui qu'elle a d'assurer sa propre conservation. N'est-il pas constant, en effet, que les crimes étant des atteintes plus ou

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