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miner celui-ci, j'ai introduit la substance dans une large éprouvette munie d'un thermomètre sensible, à O exact. Celui-ci était fixé au moyen d'un tube en caoutchouc très souple qui, tout en empêchant l'accès de l'air humide, permettait de se servir du thermomètre comme agitateur. L'éprouvette était entourée d'un manchon en verre, de façon à interposer entre la substance et le mélange réfrigérant une couche d'air, comme dans les déterminations cryoscopiques par la méthode de Beckmann. Le tout ayant été plongé dans de l'eau glacée, la substance se solidifia à 19°, et après éloignement du bain réfrigérant, au moment où les premières traces de fusion apparurent, le thermomètre marqua 17°,5: cette température s'est maintenue constante pendant presque toute la durée de la fusion. On peut donc admettre que le point de fusion est situé à 18°.

Pour le reste, la phénotoluquinone se comporte absolument comme les composés de la classe des corps à laquelle elle appartient. Elle est différente des crésophéno-quinones, quoiqu'elle ait la même composition centésimale, ainsi qu'il résulte de ce qui précède. De même que ce composé, le produit de l'

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constitue un liquide sirupeux d'un rouge foncé, qui se solidifie par refroidissement à quelques degrés au-dessus de 0 et qui se montre absolument différent de la thymo

phéno-quinone avec laquelle cependant il a pour formule brute

CHO

Il résulte de tout ce qui vient d'être exposé qu'on peut obtenir des phénoquinones mixtes, soit en combinant deux phénols monoatomiques différents à une même quinone, soit en faisant agir deux molécules d'un même phénol monovalent sur une molécule de quinone substituée; les phénoquinones de même composition centésimale qu'on peut obtenir ainsi par deux voies différentes, sont différentes entre elles; celles produites suivant la première méthode ont notamment un point de fusion plus élevé que celles qu'on obtient par la seconde.

Ce fait renverse-t-il la formule atomique attribuée aux phénoquinones et aux quinhydrones? Je ne le crois pas : de même que l'identité des quinhydrones mixtes engendrées au moyen de matériaux différents n'est pas un argument probant de leur constitution atomique, de même la différence des phénoquinones en question n'est pas une preuve absolue de leur nature additionnelle. En effet, si l'on admet pour les phénoquinones la formule de MM. Loring-Jackson et G. Oenslager :

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on conçoit très bien, puisque la liaison ne se fait que

par une atomicité, que la différence des positions occupées par les substituants (qui sont ou dans les phénols, ou bien dans la quinone) puisse entraîner une différence de propriétés.

Pour les quinhydrones mixtes, comme je l'ai fait remarquer dans un travail antérieur, il n'est guère possible de déterminer par l'expérience si l'identité des produits obtenus différemment est due à leur constitution atomique ou si elle est engendrée par une transformation des matériaux mis en œuvre, avant leur combinaison. Dans ce dernier cas, puisque, même aux dépens d'une hydroquinone d'homologie supérieure et d'une quinone inférieure, on obtient toujours la quinone supérieure et l'hydroquinone inférieure, on est forcé d'admettre que les hydroquinones moins substituées sont des réducteurs plus puissants que leurs homologues supérieurs, ou, ce qui revient au même, que le pouvoir oxydant des quinones décroît à mesure qu'elles sont plus élevées en homologie.

Quoique, je le répète, l'expérience ne puisse pas donner de réponse décisive sur cette hypothèse, j'ai fait cependant quelques essais dans ce sens : il m'a notamment paru intéressant d'examiner si, lorsqu'on prépare ces quinhydrones mixtes en solution au moyen de l'hydroquinone substituée et de la quinone inférieure, la production de la quinone substituée et de l'hydroquinone simple est ou non instantanée, soit qu'elle ait lieu d'ailleurs par transformation préalable, soit qu'elle s'accomplisse par l'intermédiaire d'une combinaison atomique.

J'ai choisi pour exécuter ces expériences la thymohydroquinone et la quinone ordinaire la raison en est que cette hydroquinone se dissout dans l'eau en quantité

appréciable, de même que la benzoquinone, tandis que la thymoquinone est presque entièrement insoluble dans ce liquide et devait, par conséquent, précipiter au fur et à mesure qu'elle se formerait.

1,46 de quinone ordinaire pure sont dissous dans un minimum d'eau tiède ayant environ 50°; d'autre part, une quantité équimoléculaire (2,25) de thymohydroquinone est dissoute dans de l'eau bouillante. Dès que cette dernière solution s'est refroidie jusqu'à n'avoir plus que 50° (*), on la verse dans la première. Immédiatement et dès que les premières portions de la solution d'hydroquinone viennent au contact de la solution de quinone, il se produit une multitude de petites gouttelettes huileuses jaunes, qui répandent très fortement l'odeur caractéristique de la thymoquinone. Après quelque temps, le refroidissement du liquide continuant, ces gouttelettes se prennent en de petits amas de cristaux jaunes qui, après séparation et dessiccation, présentent quelques points verdâtres. Ayant éloigné ces derniers, on trouve que ces cristaux possèdent le point de fusion exact de la thymoquinone (45°).

Comme contrôle, j'ai épuisé la solution aqueuse par l'éther et j'ai obtenu, par l'évaporation de ce dernier, à côté de quelques cristaux bronzés de quinhydrone mixte, des aiguilles blanches formées d'hydroquinone ordinaire dont elles avaient le point de fusion exact (169°).

Ce fait était à prévoir les quantités de thymohydroquinone et de benzoquinone mises en œuvre étant entre

(*) On a soin d'ajouter de temps en temps un peu d'eau tiède pour empêcher la recristallisation de la thymohydroquinone.

elles dans le rapport des poids moléculaires de ces corps, après la précipitation de la majeure partie de la thymoquinone formée, il devait nécessairement rester en solution un excès d'hydroquinone. D'un autre côté, comme la thymoquinone n'est pas absolument insoluble dans l'eau, la formation d'un peu de quinhydrone mixte aux dépens de l'hydroquinone présente et de la faible quantité de thymoquinone dissoute dans l'eau, était inévitable.

Ayant repris la même expérience avec des solutions froides, nécessairement plus étendues, j'ai obtenu exactement le même résultat de la thymoquinone fut immédiatement précipitée et il resta dans la solution aqueuse un excès d'hydroquinone ordinaire.

:

La formation de la quinone d'homologie supérieure et de l'hydroquinone inférieure aux dépens de la quinone inférieure et de l'homologue supérieur correspondant de son hydroquinone, est donc instantanée. Cette transformation a-t-elle lieu directement ou par l'intermédiaire d'une combinaison atomique? C'est ce qu'on ne saurait établir expérimentalement par cette méthode.

Les expériences, tant ébullioscopiques que cryoscopiques, que j'avais antérieurement (*) exécutées sur les quinhydrones mixtes, m'avaient montré leur dédoublement complet en solution neutre et étendue, ce qui tend à les rapprocher des composés additionnels. C'est pourquoi je résolus de les soumettre, de même que les phénoquinones, à de nouvelles déterminations ébullioscopiques et de poursuivre celles-ci jusqu'en solution saturée. Il

(*) Bull. de l'Acad. roy. de Belgique, 3 série, t. XXXII, no 8, pp. 300 et 301, 1896.

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