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ABSENTS

(Art. 116 du règlement) :

MM. Déroulède. Marcel Habert.

ABSENTS PAR CONGÉ :

Arenberg

MM. Agoult (comte d'). Andrieu. (prince d'). Astier. Babaud-Lacroze. Bansard des Bois. Borie. Boudenoot. Bourrat. BroChabrié (Adrien). glie (prince de). Brunet. Cornudet (Creuse). Cosmao-Dumenez. CouyDevins. ba. David (Henri) (Loir-et-Cher). Forni. Fould (Achille). François. Hémon (FiJonnart. Laronistère). Holtz. Isambard. che-Joubert. Morinaud. Morlot. Paulin-Méry. Theulier. Vacher (Léon) Quilbeuf. Sicard.

'Corrèze).

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La Bourdonnaye (comte de). La Ferronnays
(marquis de). Laniel (Henri). Lanjuinais
(comte de). Lannes de Montebello. Largen-
taye (Rioust de). Lasies. Lasserre (Maurice).
Lebret. Lechevallier. Le-
Lebaudy (Paul).
grand (Arthur) (Manche). Lemire (Nord). Le
Lévis-
Lerolle.
Moigne. Le Myre de Vilers.
Mirepoix (comte de). Loyer.
Mackau (baron de). Magne. Maret (Henry).
Massabuau. Maurice Binder. Maurice-Binder.
Maussabré (marquis de). Méline. Millevoye.
Miossec. Monsservin. Montaigu (comte de).
Montalembert (comte de). Morillot (Léon).
Moustier (marquis de).
de). Muzet.

Mun (comte Albert

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ges).
Constant. Cornet (Lucien). Coutant.
David (Alban) (Indre).

Dauzon.

Dasque.
David (Fernand) (Haute-Savoie). Debève. De-
bussy. Decker-David. Defontaine. Dejeante.
Delarue. Delbet. Delestrac (Gustave). Délieux.
Delmas. Denêcheau. Denis (des Landes).
Derveloy. Desfarges. Deshayes. Devèze.
Disleau. Dorian. Doumergue (Gaston). Dron.
Dubief. Dubois (Victor) (de Dreux).

Dubois

(Emile) (Seine). Dubuisson. Dufour (Jacques)
(Indre). Dufour (Eugène) (Isère). Dujardin-
Beaumetz. Dulau (Constant). Dumas (Ju-
lien). Dumont (Charles). Dunaime. Duques-
nay. Dutailly.

Éliez-Evrard. Emile Chauvin. Empereur.
Escanyé. Estournelles (d'). Etienne. Euzière.
Fernand Brun.
Fanien (Achille). Fenal.
Ferrero. Ferroul. Fiquet. Florent. Four-
nière. Fournol.

Gabriel-Denis. Gacon. Gaffier. Galley. Gal-
Garnier. Gau-
lot (Yonne). Galy-Gasparrou.
vin. Gellé. Genet. Gentil. Gervais (Seine).
Gerville-
Gervaize (Meurthe-et-Moselle).
Réache. Giacobbi. Girardin. Goujat. Goujon
(Théophile) (Gironde). Goussot. Gouzy. Gras
(Drôme). Grousset (Paschal). Groussier. Gue-
neau. Guieysse. Guillain. Guillemet. Guyot-
Dessaigne.

Henrique-Duluc. Herbet.
Hugues (Clovis) (Seine).
(Aisne).

Hubert. Hugon. Hugues (François)

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Saint

Saint (Charles). Saint-Martin (de).
Quentin (comte de). Salignac-Fénelon (de).
Savary de Beauregard. Schneider (Eugène).
Sibille. Solages (marquis de). Stanislas-Fer-

Bischoffsheim. Blanc (Edmond) (Hautes-Py-rand. Suchetet. rénées). Boucher (Henry). Bouctot. Bougère

(Ferdinand).

Bougère (Laurent).

(Paul) (Vendée). Boury (comte de).

Tailliandier.
Thierry-Delanoue.

Ternaux-Compans.

Thierry.

Bourgeois

(Jules) (Meurthe-et-Moselle).

Brice
Brice (René)

Victor Gay. Viellard (Armand). Villiers.

(Ille-et-Vilaine). Brindeau.

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Castellane (comte
Chambrun

ONT VOTE CONTRE:

(marquis de). Chastenet (Guillaume). Chenel. Chevallier (Emile). Cibiel.

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Claudinon. Co-
chin (Denys) (Seine). Cochin (Henry) (Nord).
Colle. Cornudet (vicomte) (Seine-et-Oise).
Cruppi.

Daudé. Delombre (Paul).
Dansette (Jules).
Delpech-Cantaloup. Déribéré-Desgardes. Der-
Drake (Jacques).
rien. Desjardins (Jules).
Drumont (Edouard). Dubochet.
Dussaussoy. Duvau (Jules).

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Dupuytrem.

Estourbeillon

Fachard. Farjon (Adrien). Faure (Firmin).
Fleury-Ravarin.
Ferry (Charles).
Ferrette.
Forest. Fouquet (Camille).

Gabiat. Gailhard-Bancel (de). Gaillard (Jules).
Galot (Jules) (Loire-Inférieure). Galpin (Gas-
ton). Gauthier (de Clagny). Gautret. Gayraud.
Gérard (baron). Gévelot. Gonidec de Traissan
(comte le). Gontaut-Biron (comte Joseph de).
Goujon (Julien) (Seine-Inférieure).
Grandmaison (de). Guérin (lieutenant-colonel).
Guibert. Guyard.

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mez. Astima (colonel). Aucouturier. Augé.
Bachimont. Balandreau. Barrois. Barthou.
Baulard.
Baudon (Oise).
Basly.
Bazillon.
Beauquier. Bénézech. Bérard (Alexandre).
Bernard (Paul)
Bernard (Charles) (Gironde).
(Seine). Bersez. Berteaux. Berthet. Berton.
Bizot.

Jacob. Jacquey (général). Jaouen.
Jourde. Jumel.
(Louis).

Kelsch. Klotz. Krauss.

Legitimus.
Léon Pommeray.
Leroy

La Batut (de). Labussière. Lachaud. Lachièze. Lafferre. Lagasse. Laloge. Lamendin. Laroze. Lassalle. Lauraine. Laurençon. Laville. LéLebrun. Le Clec'h. Leffet. glise. Leglos. Lemasson. Leroy (Arthur) (Côte-d'Or). Lepez. (Modeste) (Eure). Lesage. Lespinay (marquis de). Létang. Le Troadec. Levet (Georges). Levraud. Leygue (Honoré) (Haute-Garonne). Leygue (Raymond) (Haute-Garonne). Lhopiteau. Limouzain-Laplanche. Lockroy. Loriot. Louis Blanc (Drôme). Louis Martin (Var). Loup.

Magniaudė. Mahy (de). Malaspina. Mando. Marchal. Martin (Bienvenu) (Yonne). Maruéjouls. Massé. Mathey. Maurice-Faure. MayMelliet (Léo). Menier (Gaston). Mercier (Jules). Merlou. Mesureur. Michel. Mirman. Mollard. Monfeuillard. Morcrette-Ledieu. MoMotte. Mougin. Muteau.

mac.

rel.
Bonard.
Blanc (Henri) (Haute-Loire).
Bordier. Borne. Bourgeois
Bony-Cisternes.

(Léon) (Marne). Boutard. Boyer (Antide).
Boysset. Breton (Jules-Louis) (Cher). Breton
Brune.

(Seine-Inférieure).

Bussière.

Brisson (Henri).

Cardon.

Narbonne. Noël.

Odilon-Barrot. Olive.

Pajot. Palix. Pams. Papelier. Pasqual (Nord). Pastre. Paul-Faure. Pavie. Peignot. Périer (Germain) (Saône-et-Loire).

Car

(comte du) (Gironde).

Cadenat. Calvinhac. Canet.
naud. Castelin. Castillard. Cauvin. Cazals.
Cère (Emile).
Cazauvieilh. Caze (Edmond).

Périer de Larsan

Périllier. Péronneau.

Pourteyron.

Rajon (Claude).

Perrin. Peschaud. Philippe. Pochon. Poullan. Pourquery de Boisserin.

Chabert (Rhône). Chambige. Chambon. Cha-
Rabier (Fernand). Ragot.
merlat. Chandioux. Chanoz, Chapuis. Charles
Razimbaud. Rendu (Oise). Renou (Seine).
Bos. Charles Chabert (Drôme). Charles-Gras.
Chaus- Rey (Emile). Ricard (Henri) (Côte-d'Or). Ri-
Charonnat.
Chassaing.
Charruyer.
card
Richard
(Louis) (Seine - Inférieure).
sier. Chautemps. Chauvière. Chavet. Che-
Ridouard. Riou. Rivals. Rivet
navaz. Chevillon. Chiché (Albert). Chopinet. (Pierre).
Roche
Roch.
Robert Surcouf.
Christophle (Albert) (Orne). Clament (Clément). | (Gustave).
Rolland (Pyrénées-Orien-
Clédou. Clémentel. Coache. Cochery (Geor- (Ernest) (Seine).

34

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CHAMBRE DES

DÉPUTÉS

SÉANCE DU MARDI 29
DU MARDI 29 JANVIER
JANVIER 1901

SOMMAIRE.

Excuse. = Présentation, par M. le ministre de l'agriculture: 1o d'un projet de loi relatif à la taxe du pain; 2o d'un projet de loi relatif à l'enseignement départemental et communal de l'agriculture. Suite de la discussion: 1o du projet de loi relatif au contrat d'association; 2o de la proposition de loi de M. Cuneo d'Ornano; 3o de la proposition de loi de M. Charles-Gras et plusieurs de ses collègues ; 4o de la proposition de loi de M. Lemire et plusieurs de ses collègues, concernant le droit d'association. — Suite de la discussion du contre-projet de M. Lemire: MM. Lemire, Trouillot, rapporteur; Charles-Gras. Rejet, au scrutin. Contre-projet de M. Cuneo d'Ornano: MM. Cuneo d'Ornano, le rapporteur. Rejet, au scrutin. Contre-projet de M. Puech: MM. Puech, le rapporteur, Camille Pelletan, le président du conseil, ministre de l'intérieur et des cultes, Millevoye. Non-prise en considération, au scrutin. = Dépôt, par M. le ministre des affaires étrangères, d'un projet de loi portant approbation de la convention commerciale signée, le 9 janvier 1901, entre la France et la république du Salvador. = Dépôt, par M. le ministre de l'intérieur, de deux projets de loi concernant les villes de Caen et du Puy. Dépôt par M. Astier, au nom de la commission du commerce et de l'industrie, d'un rapport sur la proposition de loi de M. Astier, relative à l'usage des récompenses industrielles. Dépôt par M. Perreau, au nom de la commission du budget, d'un rapport sur le projet de loi ayant pour objet de faire remise aux communes de sommes payées en excédent sur les annuités concédées en vertu de la loi du 20 juin 1885 pour la construction d'établissements d'enseignement primaire. Dépôt, par M. Albert-Poulain et plusieurs de ses collègues, d'une proposition de loi ayant pour objet de donner la faculté aux communes de remplacer les prestations par des centimes communaux additionnels.

=

PRÉSIDENCE DE M. PAUL DESCHANEL

La séance est ouverte à deux heures. M. Robert Surcouf, l'un des secrétaires, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

Le procès-verbal est adopté.

EXCUSE

M. le président. M. Dunaime s'excuse de ne pouvoir assister à la séance de ce jour.

PRÉSENTATION DE PROJETS DE LOI

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture pour un dépôt de projets de loi.

M. Jean Dupuy, ministre de l'agriculture. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre un projet de loi relatif à la taxe du pain.

J'en demande le renvoi à la commission du commerce et de l'industrie.

M. le président. Le projet de loi sera imprimé, distribué et, s'il n'y a pas d'opposition, renvoyé à la commission du commerce et de l'industrie. (Assentiment.)

M. le ministre de l'agriculture. J'ai l'honneur de déposer également un projet

de loi relatif à l'enseignement départemen-
tal et communal de l'agriculture.
J'en demande le renvoi à la commission
de l'agriculture.

M. le président. Le projet sera imprimé,
distribué et, s'il n'y a pas d'opposition,
renvoyé à la commission de l'agriculture.
(Assentiment.)

SUITE DE LA DISCUSSION DES PROJET ET PRO-
POSITIONS DE LOI RELATIFS AU CONTRAT ET
AU DROIT D'ASSOCIATION

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion : 1o du projet de loi relatif au contrat d'association; 2° de la proposition de loi de M. Cuneo d'Ornano; 3o de la proposition de loi de M. CharlesGras et plusieurs de ses collègues; 4o de la proposition de loi de M. Lemire et plusieurs de ses collègues, concernant le droit d'association.

La parole est à M. Lemire pour continuer son discours sur son contre-projet.

M. Lemire. Hier, j'ai eu l'honneur d'expliquer à la Chambre que je reprenais comme contre-projet ma proposition de loi sur la liberté des associations, parce que j'adressais au projet de la commission un triple reproche.

Il me semblait d'abord que ce projet était contraire à l'égalité des personnes devant

la loi. Son article 11 renferme une triple exclusion celle des étrangers, celle des Français suspects de recevoir une direction de l'étranger, et enfin l'exclusion des associations de personnes qui vivent en commun. J'en étais à ce point.

Par association de personnes qui vivent en commun, que faut-il entendre ?

Après une série de précisions qui ne figurent pas dans le texte du projet, mais qui sont dans l'esprit de la Chambre, j'en étais arrivé à conclure qu'on vise par là uniquement et exclusivement les congrégations catholiques qui font des vœux, qui vivent en commun et qui restent en communion avec le Saint-Siège, centre de la foi et de l'autorité. Je disais : Pourquoi cette exclusion?

On a invoqué pour l'obtenir de la Chambre toutes sortes de motifs dont la plupart ont été tour à tour exposés et réfutés à cette tribune par des bouches éloquentes.

Parmi ces motifs, je n'en vois qu'un qui peut-être encore dans l'esprit de nos collègues reste, sinon entier, du moins pas assez entamé. On a dit: Nous voulons atteindre les réguliers parce que nous trouvons qu'entre eux et les séculiers, à l'heure actuelle, il y a rupture d'équilibre, il y a conflit; et par conséquent, nous qui avons le souci de la place que doit conserver dans la société française le clergé que nous connaissons,

dont nous sommes responsables, c'est sa défense que nous prenons en ce moment. Permettez-moi, messieurs, de dire ce que vaut cette raison là à mes yeux.

Qu'il y ait de temps en temps des conflits entre les réguliers et les séculiers, mon Dieu! je ne le nie pas. Ce serait fermer les yeux à l'évidence. Les conflits entre réguliers et séculiers, mais ils sont historiques! Ils sont échelonnés à toutes les pages de l'histoire non seulement de l'Eglise de France, mais de toutes les Eglises. Je ne saurais donc en être surpris, et vous, messieurs, vous ne devez pas en être surpris plus que moi, car vous devez constater même dans l'Etat, entre ce que j'appellerai les corps ordinaires et ceux qui sont à côté comme un complément ou un correctif, des conflits semblables, au point de vue politique et civil. C'est pour cela précisément qu'est institué le tri

bunal des conflits.

N'avons-nous pas voté la loi organisant l'armée coloniale parce que les jeunes soldats voulaient tous entrer dans un corps spécial, l'infanterie de marine? Et pourquoi le voulaient-ils ? Parce qu'ils trouvaient là le plus court chemin vers la gloire.

Est-ce que nous ne constatons pas tous les jours des rivalités entre les maires qui représentent l'autorité locale, élus par le

suffrage universel, et les représentants du pouvoir central? (Très bien! très bien! à droite et au centre.)

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veines toute la sève de notre généreux | sont pas le ministère ordinaire. Le minis-
pays; ils ont vécu sa vie; ils se sont trouvés tère ordinaire de l'Eglise est rempli par
côte à côte avec vous à toutes les pages les desservants, les curés et les évêques, en
de votre histoire. Avec vous, messieurs, ils union avec le souverain pontife. Il n'est
étaient aux états-généraux de 1789, et sans parlé que d'eux dans la hiérarchie. Nul reli-
eux vous n'aviez pas la majorité! Sans eux gieux ne m'a jamais demandé de dire le
vous ne pouviez pas briser l'enceinte des contraire, et, s'ils me l'avaient demandé,
ordres dans lesquels vous étiez enfermés. Ils j'aurais répondu : « Non, ce n'est pas exact.
sont allés avec vous dans la salle du Jeu de Vous remplissez un ministère extraordi-
Paume, et ils étaient derrière Mirabeau lors- naire, un ministère qui fait partie des
qu'il répondait qu'il était là par la volonté du droits et des devoirs de l'Eglise, mais un
peuple et qu'il n'en sortirait que par la ministère qui peut, à certaines heures, se
force des baïonnettes. Ils étaient là, les pe- modifier, se porter ailleurs, cesser sur cer-
tits curés, pour faire la majorité nécessaire! tains points. Dans les missions mêmes pour
M. Albert Gallot (Yonne). Il n'y en avait lesquelles vous avez des aptitudes spéciales,
pas beaucoup !
vous êtes un ministère de conquête et non
pas d'occupation permanente. Lorsque vous
allez en Chine, en Amérique ou ailleurs,
vous n'y allez pas pour y rester. Vous cher-
chez à y constituer des églises locales des-
servies par un clergé indigène avec une
hiérarchie régulière. Les organisations fon-
dées par vous s'appellent des vicariats
apostoliques et non pas des diocèses. En
France, vous êtes des auxiliaires que nous
aimons et estimons, et dont nous sommes
heureux d'obtenir le concours; mais enfin,
vous êtes une branche greffée sur le tronc,
et ce tronc, c'est l'Eglise avec sa hiérarchie.
nombreuses, admirables, dont on a fait
Je sais bien que vous avez fondé des œuvres
l'éloge à cette tribune, mais l'institution

M. Lemire. Il y avait ceux dont vous
aviez besoin pour faire une Constituante !
Ils ont ensuite refusé le serment à la cons-

titution civile du clergé; mais à la première
heure, heure d'enthousiasme et de con-
corde, ils étaient avec vous.

M. Augé. Ils n'y seraient plus tous au-
jourd'hui, mon cher collègue.

A gauche. Oui! ils ont changé, depuis! M. Lemire. Ils sont encore debout, et vous le savez fort bien. Et vous connaissez leur bon sens, leur droiture, leur dévouedans les détails d'une casuistique, qui, à ment! Je ne dis pas qu'ils se complaisent force de raisonner, mériterait le reproche que fait Molière quelque part, lorsqu'il dit

que

Raisonner est l'emploi de toute la maison
Et le raisonnement en bannit la raison.
(On rit.)

Je ne m'étonne donc pas de conflits semblables dans l'ordre ecclésiastique. Mais là comme ailleurs ils sont l'indice d'une concurrence dans le bien dont la société Ils n'en sont pas moins des hommes de tout entière profite et ils peuvent être grande sagesse pratique. Vous ne pouvez tranchés non pas par nous, mais par les pas leur reprocher je ne sais quel cléricapas leur reprocher je ne sais quel cléricaintéressés, par les supérieurs hiérarchiques. lisme obstiné, dominateur et pharisaïque; Je ne prêterais pas facilement l'oreille à vous savez très bien qu'à travers ces souun curé qui viendrait se plaindre de l'ingé- tanes trouées qui se font honorer dans rence de réguliers. Je lui répondrais ce tous les coins de la France transpire touque tout le monde doit répondre : «Je re-jours le vieux reflet de l'éternel Evangile. grette que vous ne fassiez point usage de (Applaudissements à droite et sur divers vos droits. Prenez les responsabilités qui vous incombent. Vous êtes maître dans votre église. Ce n'est point à l'Etat de se mêler de vos affaires. »

Mais on a moins insisté sur ces prétendus conflits que sur une sorte d'infériorité où serait tombé le clergé séculier.

Vous comprenez, messieurs, que je suis assez mal placé pour toucher ce point délicat. Je crains de paraître à la fois juge et partie, et de ne point tenir la balance d'une main assez équitable. Il m'est cependant permis de dire un mot.

Des séculiers, j'en suis! Je suis du nombre de ces curés dont on a parlé à cette tribune, avec quelque émotion, je le reconnais, et une réelle éloquence. Je suis du nombre de ces curés qui, par toute la France, touchent le sol de notre patrie et, depuis la côte de Provence jusqu'aux plaines de la Flandre, en touchant ce sol, font entrer en eux quelque chose de ce patriotisme à la fois universel et local. Ils sont de la vieille race française; ils ont dans leurs

bancs au centre.)

C'est pour cela que je suis fier de faire partie des séculiers et heureux d'en dire un mot.

Les réguliers, je les connais aussi! J'ai été longtemps leur commensal et je suis encore leur hôte. Vingt fois, professeur, j'ai vu partir de ma classe des jeunes gens qui étaient la fleur de mes élèves; ils s'en allaient vers les ordres religieux, et je puis dire qu'ils partaient tous épris d'un idéal de dévouement et de sacrifice.

Les ordres religieux m'ont pris tout près de moi ce que j'avais de plus cher au monde, et je connais ces câblogrammes qui viennent un jour du fond de l'Afrique ou de l'Amérique, qui abrègent la vie du vieux père et qui font au cœur de ceux qui restent une blessure toujours saignante: « Mort de la fièvre jaune ».

Oui, les réguliers, je les connais! Mais ils n'ont jamais demandé que, pour les défendre, j'exagère ou je dénature leur role. Ils m'ont dit eux-mêmes qu'ils ne

n'est nécessaire qu'aussi longtemps que le but qu'elle poursuit subsiste. La preuve, c'est que si l'œuvre pour laquelle les moines ont été fondés cesse d'être nécessaire dans la société, eux-mêmes sont remplacés ou disparaissent. Tel ou tel ordre peut donc dispaganiser d'autres ne disparaît pas, parce que les ordres religieux sont la floraison d'une liberté de l'Eglise.» (Très bien! très bien! à droite.)

raître! Mais la faculté d'en créer et d'en or

Telles sont les affirmations que je maintiens, messieurs.

Cela posé, les choses étant mises à leur place, lorsqu'on me parle de l'infériorité du clergé séculier je réponds: Jamais une institution quelconque ne se relèvera en en rabaissant une autre; jamais le mal d'autrui ne fera mon bien. Jamais, par conséquent, je n'admettrai qu'on fasse un tort quelconque à ceux qui sont à côté de moi en alléguant le prétexte que cela pourrait bien m'être utile. (Très bien! très bien! à droite.)

Si je suis faible, si je suis inférieur, je ne dois pas regarder en face, je dois me regarder moi-même. (Très bien ! très bien!)

Ah! si le clergé séculier vous fait une impression pénible, messieurs du Gouvernement, moi qui suis ici depuis huit ans, je commence à comprendre pourquoi.

Que sommes-nous en effet dans la société qui nous entoure et vis-à-vis des pouvoirs publics? De quelle considération jouissons-nous? De celle qui s'attache aux fonctionnaires? Oui, dites-vous, et elle résulte de ce que tous les ans vous discutez le budget des cultes et vous le votez.

veut trouver les causes vraies. >>

comment faire pour établir l'unité et la symétrie, toujours chères aux législateurs? Toute la question est là.

Soyons de bonne foi, messieurs. Y a-t-il | remonter aux causes sociales lorsqu'on | par le Concordat ni protégés par la loi, un quelconque de nos budgets qui soit examiné avec les mêmes dispositions que celui des cultes? Y en a-t-il un autre qui soit traité avec cette attention superficielle, avec ce dédain sommaire ? Il est expédié comme une chose à laquelle on se résigne momentanément, mais qu'on compte bien ne plus voir continuer. Voilà la situation.

Et qu'en résulte-t-il? Quelle est la répercussion dans le pays de cette attitude des Chambres à l'égard du clergé séculier ? C'est que partout où il y a un prêtre, il y a, aux yeux de beaucoup, une compromission à craindre, un danger à fuir!

A l'heure actuelle, dans les plus petites communes de France, un instituteur ne peut pas aller au lutrin pour chanter le Domine, salvam fac rempublicam, sans devenir suspect, sans être dénoncé. (Très bien! très bien! à droite.)

M. Simyan. Ce n'est pas sa place!

M. Lemire. Si l'Etat croit bon de rester uni avec nous, si l'Etat nous demande de chanter des prières pour lui, pourquoi faites-vous un crime à l'instituteur de se joindre à nous? Il ne s'humilie point! Il imite le vieux Charlemagne, dont on a rafraîchi le souvenir dans cette discussion, et qui, de retour d'Espagne ou d'Italie, s'en venait chanter les psaumes avec les chan

tres à Aix-la-Chapelle. (Très bien! à droite

et au centre.)

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M. Lasies. Les instituteurs ne peuvent pas chanter au lutrin, mais les fonctionnaires de l'Université vont prêcher dans les temples et les synagogues sans qu'on leur dise rien; au contraire, on les décore et on leur donne de l'avancement! (Bruit.)

M. Lemire. Tout cela c'est de l'histoire quotidienne et de l'histoire vécue.

Qu'on ne vienne pas alors nous parler de relever notre prestige en frappant quelques religieux ! Il y a autre chose à faire.

Le prestige qui nous manque-si, comme vous le dites, il nous manque s'en est allé parce que nous avons une situation sociale indécise qui empêche chacun de nos mouvements, qui entrave chacune de nos volontés.

|

Eh bien! les causes sociales de ce que l'on nous reproche d'être, elles sont là, messieurs. Par suite de l'attitude des pouvoirs publics - et cela ne date point d'aujourd'hui, malheureusement nous avons, aux yeux des masses, l'apparence de fonctionnaires humiliés et paralysés qui n'ont ni les droits des hommes libres, ni les jouissances des hommes publics! (Très bien! très bien! à droite.)

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Théoriquement, il n'y a que deux solutions possibles, et chacun les connaît. Elles dépendent de l'idée que l'on se fait du rôle de l'Etat à l'égard des cultes.

Si l'Etat n'a d'autre mission que de garantir la sécurité intérieure et extérieure, s'il doit intervenir le moins possible dans le domaine de la liberté individuelle, s'il

Or, quand on est jeune, entreprenant, doit respecter, comme des choses intangihardi, on veut les coudées franches, l'auda- bles, d'un ordre à la fois plus relevé et plus cieuse liberté. Et cette liberté, l'avons- intime qui appartiennent à l'humanité en nous ? Voilà pourquoi d'excellents jeunes général et à l'initiative de chacun, la gens n'entrent pas dans le clergé séculier science, l'art, la religion, si c'est là l'idée auquel cependant ils feraient honneur et que l'on se fait du rôle de l'Etat, il n'y a dans les rangs duquel ils travailleraient qu'une solution logique et possible : l'Etat pour la France. ne doit pas connaître les cultes. (Très bien! très bien! à l'extrême gauche.) Il ne doit connaître ni les congrégations pour les persécuter ni les prètres séculiers pour les protéger.

N'est-il pas vrai aussi que nous ne pouvons pas faire émerger de notre milieu les hommes de valeur qui pourraient tenir un bon rang parmi leurs contemporains? | Il suffit, pour détruire tout un avenir, d'une dénonciation jalouse, d'une délation mesquine et anonyme trouvées dans un dossier quelconque (Très bien! très bien! à droite.)

Et l'esprit de corps, que tout homme généreux rêve de trouver quand il entre dans un groupement, pouvons-nous l'avoir avec

le système bureaucratique?

On va chez les religieux parce qu'on
trouve chez eux une société dans laquelle on
s'abrite, où l'on est sûr du lendemain, où

l'on sait qu'en cas de maladie, de vieillesse,
on trouvera un morceau de pain et un
asile. Au contraire, les prêtres des paroisses
sont isolés; s'ils s'avisent de se réunir pour
s'encourager, pour se sentir les coudes, ils
sont immédiatement l'objet d'un soupçon
et il plane sur eux je ne sais quel discrédit.
M. Fernand Rabier. Tout cela est très
exagéré.

M. Augé. J'ai vu le contraire partout.
M. Lemire. Il y a eu, je le sais, des
exceptions très honorables, et je remercie
ceux qui nous ont fait l'honneur de nous
les accorder. Mais nous savons fort bien
de quelles préoccupations nous sommes
l'objet et de quelles mesures aussi nous
pourrions être victimes.

Permettez-moi de dire, messieurs, que
dans toutes ces causes que j'énumère à la
hâte, en les indiquant à peine, réside, selon
moi, l'explication de l'état actuel du clergé
français. Les religieux ne doivent pas être
mêlés à ce qui nous regarde, et nous n'ac-
cepterons pas non plus d'être dressés contre
eux à l'heure du péril!

Que faire alors? A quelle solution faut-il s'arrêter?

Je sais très bien que la situation est difficile, car une question fondamentale se pose. Puisqu'en France, il y a, d'un côté, des ministres de la religion catholique qui sont protégés par le Concordat et la loi, et d'un autre côté des hommes qui s'occupent L'honorable M. Viviani disait : « Il faut aussi de religion et qui ne sont ni visés

Voilà une solution simple et nette. Elle est théorique, car elle repose sur une idée. des Etats-Unis. Elle peut se réclamer d'une pratique, celle

Les Etats-Unis, qui ont débuté par un état social assez chaotique dans lequel il y avait toutes sortes de confessions religieuses et toutes sortes d'opinions, ont adopté forcément ce modus vivendi. Ils ont décidé que le gouvernement ne serait chargé que de maintenir l'ordre et laisserait chacun dire (Applaudissements à gauche.) ce qu'il pense et pratiquer ce qu'il croit.

L'autre doctrine est celle que j'appellerai la doctrine romaniste par opposition à celle des Anglo-Saxons.

plus possible parce qu'il se regarde comme Dans cette doctrine, l'Etat intervient le la source de tout droit. Il ne se dit point qu'il doit avant tout respecter l'individu, l'initiative privée, toutes les variétés humaines; il se regarde comme chargé de faire l'unité, de tracer toutes les règles. De ce concept, qui est celui des peuples néo-latins, dérivent les idées d'art classique et officiel, d'enseignement officiel, de culte officiel, participant des ressources, de la force et du prestige de l'Etat. C'est la seconde théorie.

On peut nous inviter à la suivre aujourd'hui, et par conséquent à rattacher les réguliers aux séculiers et à les mettre à côté d'eux sous l'abri du Concordat et dans la loi française.

Mais on ne nous apporte ni l'une ni l'autre de ces doctrines, on n'applique ni l'un ni l'autre de ces principes.

Je reconnais les difficultés de l'heure présente. Nous sommes, en effet, à une période de transition. Ni les partisans de l'Etat s'abstenant, ni les partisans de l'Etat intervenant, les premiers ayant le souci de la variété, les autres celui de l'unité, peuvent oublier dans quelles conditions spéciales se trouve la France. Elle a un passé historique : quinze siècles de catholi

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