Page images
PDF
EPUB

étrangères, et, s'appuyant là-dessus pour
peser sur nos décisions, il nous dit: Prenez
garde; si vous vous permettez de faire une
loi visant les congrégations je serai forcé
de faire passer à d'autres ce protectorat que
vous considérez comme si important.
M. Denys Cochin. C'est évident, s'il n'y à droite). Or, à la même époque, l'orateur
a plus de missionnaires français.
M. Lasies. Toute la question est là.

tes de tous les pays et particulièrement de
donner au parti socialiste français des indi-
cations formelles sur la question de savoir
si l'on devait tolérer ou réprouver la pré- |
sence d'un ministre socialiste dans un ca-
binet qui ne l'était pas! (Applaudissements

M. Marcel Sembat. Il s'appuie, en outre, << sur ces mérites...»-etje signale la phrase pour montrer l'imprudence qu'il y a dans certaines interventions et dans certaines distinctions honorifiques accordées non pas à un point de vue religieux, mais à un point de vue patriotique, mais dont on tire ensuite argument sur le terrain religieux << sur ces mérites, dit la lettre, plus d'une fois reconnus par les hommes les moins suspects, plus d'une fois honorés par des récompenses publiques. >>

Là, je suis forcé de dire, comme je le serai encore tout à l'heure, que nous avons mis un argument contre nous dans les mains du pape qui s'en sert aujourd'hui. Il y a longtemps que nous avons mis des arguments dans sa main, car ce n'est pas la première fois que le Vatican intervient dans notre politique intérieure, mais toujours nous avons protesté contre son intervention. Le Vatican est intervenu déjà, lorsqu'il a prêché le ralliement, lorsqu'il a dit aux catholiques : vous ne devez plus être ni royalistes, ni impérialistes, faitesvous républicains.

Si certains républicains ont été assez imprudents pour applaudir à cette intervention contre laquelle vous protestiez, messieurs de la droite, à ce moment-là, nous

autres, dans le parti socialiste, jamais nous n'avons admis, jamais aucun républicain avancé, radical ou socialiste, n'a admis cette intervention. (Applaudissements à l'extrême gauche et à gauche.)

A droite. Vous en avez profité !

M. Marcel Sembat. Je dis que tous les républicains (Nouveaux applaudissements à l'extrême gauche et à gauche) ont protesté énergiquement contre cette intervention papale soi-disant en faveur de la République, parce que vous saviez tous très bien, mes chers collègues, que chaque fois que le pape intervient, ce n'est jamais utile à la République, c'est toujours nuisible, au contraire, aux idées laïques. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)

Cette lettre se relie étroitement aux instructions données lors du ralliement. Pourquoi donc le pape, à l'heure actuelle, prend-il cette attitude en face de la République ?

M. Paul de Cassagnac. Vous en avez fait tout autant vous-même. Voulez-vous me permettre de le prouver?

M. Marcel Sembat. Prouvez.

M. Paul de Cassagnac. Au mois de septembre dernier, un congrès socialiste a été tenu en Belgique; il avait pour président un député belge, M. Vandervelde. Son but était d'assurer l'union des socialis

qui est à la tribune et qui a l'imprudence d'attaquer le pape, le souverain pontife... (Interruptions à l'extrême gauche.)

M. le président. L'orateur a consenti à cette observation; veuillez écouter, messieurs.

mettre à M. de Cassagnac de m'interrompre quand il le désire...

M. Paul de Cassagnac. Je ne me le permettrais pas.

M. Marcel Sembat. ... et je m'en félicite toujours, parce que ces interruptions me permettent d'abord de rectifier une insuffisance de documentation.

Je ne me permettrais pas, monsieur de Cassagnac, d'apporter à la tribune des documents aussi inexacts que les vôtres. Vous dites que le congrès auquel vous avez fait allusion a eu lieu en septembre en Belgi

M. Paul de Cassagnac. La démonstration que! C'est à Paris, salle Wagram, qu'il s'est vous gêne? tenu! (Rires à l'extrême gauche.)

M. Marcel Sembat. Elle ne nous gêne pas, puisque nous l'avons provoquée.

M. Paul de Cassagnac. M. Sembat, je le répète, qui a l'imprudence d'attaquer le souverain pontife à propos d'une ingérence que le pape avait non seulement le droit, mais le devoir de manifester, puisqu'il a le droit et le devoir, dans un pays éminemment catholique comme le nôtre (ProtestaM. le ministre tions à l'extrême gauche)

des affaires étrangères du cabinet actuel

l'a reconnu lui-même (Applaudissements à droite de déclarer qu'il vient prendre la défense et la protection morale de nos idées, de nos croyances, dont il est le chef, eh bien! M. Sembat, à cette époque-là, lui qui est opposé aux ingérences étrangères, écrivait à M. Vandervelde ce qui suit:

« Nous demandons que la commission interparlementaire que vous avez créée donne comme mot d'ordre à tous les députés socialistes de tous les pays: pas un soldat, pas un sou pour les folies guer

rières de la classe capitaliste. En ce qui concerne la participation d'un socialiste au pouvoir bourgeois, je m'inclinerai ainsi que mes amis devant les décisions du congrès international.» (Rires et applaudissements à droite.)

M. Alexandre Zévaès. Cette citation ne nous gêne pas du tout.

M. Paul de Cassagnac. Et M. Marcel Sembat continue, implorant les ordres d'un député belge...

M. Marcel Sembat. Non!

M. Paul de Cassagnac.... et lui disant : «Je demande aux camarades étrangers de préciser le sens de la motion. Parlez nettement et prenez les responsabilités que vous ne pouvez éviter, car ce qui se produit en France a sa répercussion dans tous les pays voisins. >>

Messieurs, quand on s'est permis de réclamer l'intervention ou l'ingérence des socialistes de la Belgique et de tous les autres pays étrangers (Applaudissements à droite. Bruit à l'extrême gauche), on n'est pas qualifié pour interdire au chef du catholicisme, au saint-père le pape, de s'occuper des intérêts religieux de notre pays, qui, au point de vue religieux, est aussi le sien! (Applaudissements à droite.)

M. Marcel Sembat. J'ai l'habitude, chaque fois que je suis à la tribune, de per

A droite. Peu importe le lieu où il s'est tenu.

M. Marcel Sembat. Cela prouve que la documentation est inexacte. Mais tout cela n'a aucun intérêt.

M. Paul de Cassagnac. Le congrès a été tenu à Paris, vous avez raison; mais vous avez fixé à Bruxelles le siège du bureau international, c'est-à-dire du gouvernement révolutionnaire international.

M. Marcel Sembat. Les paroles que j'ai prononcées, je serai toujours fier de les ternationalistes... (Exclamations au centre prononcer. En effet, nous sommes des in

et à droite.

gauche.)

Applaudissements à l'extrême

M. Gayraud. Et nous, nous sommes des catholiques.

M. Marcel Sembat. ... vous le savez tous très bien; nous ne l'avons jamais nié. M. Alexandre Zévaès. Nous l'avons assez dit.

M. Marcel Sembat. Et vous savez aussi qu'il ne nous convient pas de mettre ce

drapeau dans notre poche. Si je suis à la tribune, c'est pour vous rappeler au respect d'une loi reconnue par vous, proclavote de la loi de finances nous venons demée par vous; et lorsqu'au moment du mander à la Chambre de ne pas voter le budget des cultes et que vous nous répondez: « Il y a le Concordat », il serait étrange que nous n'ayons pas le droit, quand vous violez le Concordat, d'invoquer le traité en vertu duquel vous nous faites payer! (Applaudissements à l'extrême gauche. - Bruit à droite.

Comment! il y a un traité en vertu duquel nous payons 40 millions tous les ans aux prêtres de ces messieurs, et nous n'aurions pas le droit de les contraindre à observer les clauses qu'ils ont inscrites dans ce traité ?

M. Julien Goujon Et quand vous violez la loi de 1872? (Bruit.)

M. Jules Dansette. L'orateur ne répond pas à M. de Cassagnac.

M. Marcel Sembat. Comment! je ne lui réponds pas? Je dis à M. de Cassagnac : Si nous avons, en effet, proclamé au congrès de la salle Wagram que certaines questions pouvant se reproduire ce sont mes paroles mêmes qu'il vous lisait -- dans tous les pays, nous étions fondés à demander sur ce point l'avis scientifique des représen

tants socialistes des autres pays... (Exclamations et rires à droite et au centre.)

M. Marcel Sembat. ...tout comme, si je ne me trompe, les congrès du même ordre... (Interruptions à droite.)

et

On se dit qu'on ne peut pas mettre la main sur la République parce qu'on est parti trop tôt, qu'on a trop vite jeté le masque, heureusement pour nous, et, trouvant les républicains en éveil, nos adversaires se disent: Il est inutile de ruser, il est temps de passer aux attaques de vive force.

dogme et non pas sur une matière législative | parce que ce complot a avorté qu'on reou sur un acte de l'autorité publique. C'é- | lève la tête. (Nouveaux applaudissements à M. Gayraud. Nous recevons, nous, les tait une pure et simple question religieuse; gauche.) avis théologiques du saint-père. on remerciait les catholiques français qui s'étaient prononcés en faveur du dogme de l'infaillibilité. Ce sont ces remerciements que l'empire n'a pas voulu laisser passer, c'est en face d'un acte de ce genre-là que le gouvernement impérial répondait par des paroles que, j'imagine, la Chambre actuelle ne voudra pas renier : « Notre droit public interdisant formellement dans l'intérieur de l'empire ce genre de communication, et assimilant en tous points le nonce du SaintSiège aux ambassadeurs étrangers, le mi

M. le comte Albert de Mun. Il ne s'agit pas d'une consultation; vous avez institué un comité permanent à Bruxelles. (Bruit à droite.)

M. Marcel Sembat. Vous me posez des questions et vous ne permettez pas que j'y réponde. Je n'ai pas l'habitude de reculer devant mes idées...

M. le comte Albert de Mun. Répondez nistre des affaires étrangères s'est vu dans
sur le comité permanent.
l'obligation d'appeler l'attention de Mgr Chigi
sur une pareille irrégularité.

M. Marcel Sembat. Monsieur de Mun, je vous rappelle que je ne possède qu'une bouche et que je ne peux prononcer à la fois qu'une phrase. Attendez, et vous verrez que je suis prêt à m'expliquer sur tous les points qu'il vous plaira de soulever.

J'en appelle à tous mes collègues pour ne pas faire dévier indéfiniment le débat du point sur lequel je demande à le préciser. Nous demandons un avis aux socialistes de l'étranger pour toute question qui nous touche et qui les touche. (Interruptions à droite. Mouvements divers.)

C'est moi-même qui ai insisté pour la formation de ce bureau international chargé de grouper et de coordonner nos efforts. Je professe vis-à-vis de ce bureau international représentant par là même l'avis de tous les socialistes du monde entier la déférence la plus absolue; mais c'est mon droit; je suis socialiste, j'appartiens à un parti; nous ne sommes pas un Etat. Vous me reprochez de ne pas répondre; mais vous estimerez peut-être que j'ai répondu sur ce point. Laissez-moi vous dire que je n'ai pas l'audace de vous demander des subventions pour le parti socialiste, alors que vous en demandez chaque année pour les catholiques. (Vifs applaudissements à l'extrême gauche.)

Messieurs, c'est en vain qu'on voudrait détourner notre attention du fait sur lequel je vous demande la permission de la ramener obstinément.

<< Les explications de Mgr Chigi ont établi que ladite publication a été faite par erreur.» (Rires à gauche.)

Je ne sais pas si cette publication a été faite par erreur, mais il me paraît impossible que le Gouvernement actuel se montre moins strict, moins rigoureux pour la défense de nos droits, ou que le ministre de l'empire ou que M. Casimir-Perier qui disait: « Dès que j'ai appris l'existence de la circulaire dont il s'agit, j'ai été autorisé à rappeler et j'aurais manqué à mon devoir si je ne l'avais pas fait les principes généraux en cette matière » et M. Casimir-Perier ajoutait qu'il avait télégraphié à Rome : « Gardien de la loi, des droits de la société civile et de toutes les traditions, nous ne pouvons admettre un acte de cette nature. »

Par conséquent, tous les gouvernements: monarchie, empire ou république, se sont élevés contre des actes infiniment moins graves que celui dont aujourd'hui je prie la Chambre de vouloir bien s'occuper.

Lorsque la lettre dont je vous cite quel-
ques passages fait appel au Concordat pour
peser sur vos délibérations, lorsqu'on vous
menace de certaines modifications dans ce

que vous considérez comme votre prépon-
dérance extérieure, pensez-vous, messieurs,
qu'il n'y a pas là une connexité, un lien
étroit entre la communication que je rap-
pelais tout à l'heure et les appels chaleu-
reux du pape aux catholiques qu'il priait
de se rallier à la République?

Je vous le disais, sous tous les régimes, sous M. de Chateaubriand comme sous M. de Damas, en 1850 comme en 1870, du Mais détrompez-vous; c'est parce qu'on temps d'Emile Ollivier comme du temps n'a pas retiré de cette première opération plus récent de M. Casimir-Perier, la tradi- le résultat qu'on en attendait qu'aujourtion unanime, imbrisée, continue, de tous d'hui on jette le masque et qu'on se tourne les gouvernements français, a toujours été ouvertement contre vous. (Applaudissed'empêcher résolument les moindres inter-ments à l'extrême gauche et à gauche.) ventions du Vatican dans notre politique intérieure.

Et, messieurs, je viens de vous parler de celle qui s'est produite sous l'empire. Son objet n'était pas de donner un conseil politique aux catholiques; elle n'avait pas pour but de leur indiquer s'il convenait de se rallier à une loi en discussion ou au contraire s'il fallait la combattre; non, il s'agissait de leur transmettre des remereiements pour s'être prononcés sur un

Vous le savez bien, on espérait, sous couleur de ralliement, faire de la République je ne sais quel gouvernement bâtard qui n'aurait plus eu de République et de démocratie que le nom, qui se serait prosterné devant le pape; et nous avons vu éclater ces dernières années tout un complot formé par ces gens-là pour étrangler la gueuse, comme ils disent. (Applaudissements à l'extrême gauche et à gauche. Rumeurs à droite et sur divers bancs au centre.) C'est

1

Dans ce document, on fait allusion à d'autres Etats qui, dit le pape, ont connu les guerres religieuses, au Kulturkampf allemand, et on dit : « Prenez garde de le provoquer! » Mais nous sommes en plein Kulturkampf. Ce sont les congrégations qui nous ont déclaré la guerre, c'est à nous de nous défendre. Et la loi des congrégations n'est pas autre chose qu'une réponse nécessaire, indispensable au salut de la République. (Applaudissements à l'extrême gauche et à gauche.)

C'est pourquoi aujourd'hui l'on essaye de grouper toutes les forces cléricales dans un suprême assaut contre nous. C'est aussi

pour une autre raison que je me permets de rappeler à la Chambre ce que j'ai déjà dit au moment où nous demandions la suppression du budget des cultes. Nous disions au Gouvernement: Sans manquer de logique on ne peut pas à la fois attaquer les congrégations et vivre en bon accord avec le Vatican et avec le clergé régulier. (Mouvements divers.) J'ai trouvé alors de ce côté de la Chambre (la droite) des approbations qui peut-être me manqueront aujourd'hui. Vous me disiez que j'avais raison... M. le comte Albert de Mun. Je vous le dis encore aujourd'hui.

M. Paul de Cassagnac. Oui; c'est un bloc.

[ocr errors]

M. Marcel Sembat. que les congréganistes entraient pour une forte part dans le budget du Vatican et que par conséquent tolérerait pas que d'attaquer les congrégace serait porter au Vatican un coup qu'il ne tions. Aujourd'hui c'est là qu'est le nœud de la question, c'est dans ce fleuve d'argent qui s'en va de France pour tomber à Rome. (Exclamations à droite.)

M. Gayraud. Vous rapetissez bien la question!

M. Marcel Sembat. Ah! nous en avons aperçu une faible partie dans le coffre-fort des assomptionnistes (Exclamations à droite et au centre), où nous avons vu passer des millions. Nous ne les avons pas saisis, nous les avons salués au passage. Quel grand tort nous avons eu! Aujourd'hui le pape, ne pouvant pas permettre qu'on touche à une source aussi importante de son budget, écrit la lettre que vous connaissez et elle recevait ces jours derniers un commentaire singulièrement éloquent de la part d'un homme qui se vante de n'être pas en mauvais termes avec M. le président du conseil, de la part du P. Du Lac... (Applaudissements ironiques à droite.)

M. Delpech-Cantaloup. C'est son confes-! seur, son directeur de conscience! (On ril.) M. de Baudry d'Asson. C'est le P. Du Lac qui fait tous ses discours. (Nouveaux rires.)

M. Marcel Sembat. Le P. Du Lac écrivait dans un livre récent une phrase singulièrement éloquente sur les raisons secrètes de ce déchaînement contre toute loi réglant l'état des congrégations. Il disait :

Messieurs, je vous disais que dans un second numéro la Semaine religieuse de Paris a reproduit une fois encore cette lettre; mais elle l'a reproduite précédée de commentaires singulièrement éloquents. Ce n'est plus seulement le fait de l'intervention du pape dans nos affaires intérieures, ce n'est plus seulement le fait de la publication contraire au Concordat et aux articles organiques dont j'ai à vous saisir, c'est d'un troisième fait qui est le suivant : con

« La réponse était la même de la part de trairement au droit public et aux artitoutes:

« Nous avons remarqué que les maisons reconnues ne se développaient pas. Il y avait tant de démarches à faire auprès du conseil d'Etat pour la moindre opération, il fallait attendre la réponse qui souvent était un refus, pendant si longtemps, plusieurs années quelquefois, que nous avons renoncé à nous faire reconnaître. »

A droite. C'était leur droit.

cles organiques, notamment à l'article 2,
ainsi conçu: « Aucun individu se disant
nonce, etc...» l'archevêque de Paris s'est
fait l'intermédiaire entre le pape et les évê-
ques et archevêques.

Voici ce que la Semaine religieuse porte
en tête sous la rubrique : « Partie officielle.
Paris »:

---

été commis par un autre souverain que le
pape et où les règles diplomatiques au-
raient été violées par une autre cour.
M. Paul de Cassagnac. Le pape n'a ni
royaume, ni armée, ni flotte!

M. Anthime-Ménard. Ce n'est pas un souverain politique!

M. Marcel Sembat. J'entends bien qu'on nous dit Mais le pape n'est pas un souverain. Et quand il s'agit de faire voter l'ambassade du Vatican, ces messieurs nous disent: C'est un souverain fort important, auprès duquel vous ne pouvez pas ne pas avoir de représentant. (Très bien! très bien! à l'extrême gauche.)

Je demande s'il y a ici, dans cette Chambre, un seul parti qui puisse admettre que, tant que nous aurons un ambassadeur au Vatican, cet ambassadeur puisse ne pas être soumis aux règles ordinaires de « S. Em. le cardinal Richard avait été la diplomatie. Il est certain que s'il s'était chargé par le pape de communiquer immé-agi d'une autre cour étrangère on aurait diatement à NN. SS. les Archevêques et présenté, comme l'ont fait antérieurement Evêques de France la lettre que Sa Sainteté tous les gouvernements, des observations lui a adressée le 23 décembre 1900. Le Car- et, au besoin, rappelé notre ambassadeur. dinal reçoit chaque jour des réponses de (Très bien! très bien! à l'extrême gauche.) ses vénérables collègues qui expriment leur profonde reconnaissance pour la sollicitude avec laquelle Léon XIII a traité la question des congrégations religieuses et leur entière adhésion aux enseignements du Souverain-Pontife. On pourrait résumer en trois mots les considérations exposées avec tant de sagesse et d'autorité dans la get du Vatican. (Applaudissements à gauche.) lettre du Pape importance des congrégaEt vous voulez que le Vatican Je passe tout ce qui cela? Non, messieurs; le Vatican devait nécessairement intervenir; c'est pourquoi il est intervenu et vous menace quand il vous dit:

M. Marcel Sembat. Vous voyez, sous cette phrase, la confirmation de ce que je vous indiquais à propos de la lettre du pape. Qu'est-ce qui les gêne dans cette loi? C'est que toute loi qui les soumet à l'autorisation, à la surveillance, gêne les opérations, comme dit le P. Du Lac. (Interruptions à droite.) Cela gêne la captation et toutes les opérations grâce auxquelles on constitue ces immenses fortunes des congrégations sur lesquelles on prélève ensuite une part annuelle pour aller grossir le bud

permette

tions religieuses... » —
suit. Et voici la fin :

« ...Son Eminence a voulu que la lettre
du Souverain-Pontife fût imprimée de nou-
veau en tête de ce numéro de la Semaine
Religieuse.

[ocr errors]

Je demande si le Gouvernement a formulé auprès de la cour du Vatican les observations nécessaires. Il est essentiel que nous le sachions (Très bien! très bien ! sur les mêmes bancs) parce que, comme je vous le disais, messieurs, nous sommes décidés à voter la loi sur les associations... A droite. Contre les associations!

M. Marcel Sembat. ... contre les congrégations...

M. le comte Albert de Mun. C'est là une excellente parole!

M. Marcel Sembat.... nous sommes décidés à en finir avec cette arme d'attaque et avec ces assauts contre la République.

Mais pour y arriver, si nous apportons, nous, toute la méthode, toute la discipline et toute l'énergie dont nous sommes sus

Cette déclaration prouve donc, sans conpossible, que l'archevêque de Paris a accepté sur ce point une mission, qui le fait tomber directement sous le coup de l'article 204 du code pénal, dont je ceptibles - parce que la loi ne sera votée

vous donnais lecture tout à l'heure.

M. le général Jacquey. Il faut le bannir !
M. le marquis de Keroüartz. A la Haute
Cour!

«Dans ces conjonctures, ce ne serait pas seulement répondre à tant de services... » - les services, c'est l'invitation au rallie-testation ment ...par une inexplicable ingratitude; ce serait évidemment renoncer du même coup aux bénéfices qui en dérivent que d'ôter aux congrégations religieuses, à l'intérieur, cette liberté et cette paix qui seules peuvent assurer le recrutement de leurs membres, et l'œuvre longue et laborieuse de leur formation. D'autres nations en ont fait la douloureuse expérience. Après avoir arrêté à l'intérieur l'expansion des congrégations religieuses et en avoir tari graduellement la sève, elles ont vu, à l'extérieur, décliner proportionnellement leur influence et leur prestige. »

[blocks in formation]

qu'à cette condition nous demandons au Gouvernement de nous faire sentir en revanche qu'il est libre de son côté de toute attache, de toute négociation et de tout lien avec le Vatican. Nous lui demandons M. Marcel Sembat. La Haute Cour n'a s'il est exact qu'en compensation de la loi rien à voir là-dedans. Quant au code pénal, sur les associations on soit prêt à donner vous savez aussi bien que moi qu'on ne le des gages, comme semblait nous le faire lui appliquera pas, parce qu'il n'est pas fait craindre une récente décision de M. le mipour les archevêques. Le code pénal est nistre de la guerre. (Applaudissements irofait pour les grévistes et les ouvriers (Ap-niques à droite et au centre. plaudissements à l'extrême gauche); quant très bien! à l'extrême gauche.) aux archevêques, ils peuvent faire tout ce qui leur plaît, ils sont absolument à l'abri: ils sont certains d'avance qu'on ne leur appliquera pas le code pénal.

A droite. C'est bon pour les gendarmes! M. Marcel Sembat. Et maintenant, je demande à la Chambre si elle sera moins soucieuse de ses droits et de la défense de la société laïque que ne l'ont été ses devancières et les Gouvernements qui ont précédé celui-ci. Je demande simplement à chacun de mes collègues de se placer dans l'hypothèse où un acte du même genre aurait

[ocr errors]

Très bien !

je ne vous disais pas l'effet déplorable que Messieurs, je manquerais à mon devoir si produit dans le pays républicain cette renonciation qui, je veux le croire, n'est pas définitive, à la formule qui a été tant raillée de ce côté (la droite) et qui, par conséquent, était excellente : « Les curés, sac au dos! » Nous demandons que sur aucun point nous ne puissions sentir qu'il y aurait une négociation quelconque engagée entre le Gouvernement et le Vatican; et quand des journaux italiens, amis de la cour de Rome, publient que des négociations existeraient

[ocr errors]

non seulement entre le Vatican et le Gou-
vernement, mais entre le Vatican et une
personnalité politique plus haute encore
(Mouvements divers), nous voulons croire
qu'ils ne disent pas la vérité, nous voulons
croire que c'est un mensonge, et nous vou-
lons entendre M. le président du conseil
nous déclarer que dans la lutte anticléri-
cale il restera ferme à la tête du parti ré-
publicain. (Applaudissements à l'extrême
gauche et sur divers bancs à gauche.)
M. le président. La parole est à M. Ri- (Très bien! très bien ! au centre.)

pays: il n'y a que le pouvoir civil, repré-
senté par les Chambres et le Gouverne-
ment, qui puisse dire le dernier mot sur
l'existence légale et la capacité civile des
associations. (Très bien! très bien !)

bot.

M. Ribot. Messieurs, personne ne peut se méprendre à cette heure sur ce qu'a voulu M. Sembat en déposant son interpellation. (Interruptions à l'extrême gauche.) Son dessein éclate à tous les yeux il a voulu et j'espère que la Chambre ne le suivra pas... (Exclamations à gauche.)

A l'extrême gauche. Vous êtes le porteparole du pape! (Bruit.)

M. Ribot. ...il a voulu c'est assurément son droit - donner au grave débat qui s'engagera demain une préface irritante et violente. (Interruptions à l'extrême gauche et à gauche.)

[ocr errors]

Mais, si nous restons fermes sur ce terrain, qui a été celui du droit et du Gouvernement dans ce pays, nous ne voulons nous associer et j'ai eu le droit de protester de mon banc - ni au langage, ni à l'attitude, ni aux desseins de M. Sembat.

Nous ne voulons pas qu'on tienne ce langage vis-à-vis du pape, qui est, non pas un souverain étranger, comme vous le dites, mais le chef spirituel, reconnu par nous, des catholiques dans ce pays. (Très bien ! très bien! au centre et à droite. - Interruptions à l'extrême gauche.) Oui, messieurs, c'est le chef de la religion catholique (Très

[ocr errors][merged small][ocr errors]

M. le président. La parole est à M. de Ramel.

Sur divers bancs à droite. Nous attendons la réponse du Gouvernement! C'est à M. le président du conseil de monter à la tribune!

M. Fernand de Ramel. J'ai demandé à M. le président du conseil s'il voulait prendre la parole: il m'a répondu négativement.

M. le président. J'appelle les orateurs dans l'ordre où ils sont inscrits.

La parole est à M. de Ramel.

M. Fernand de Ramel. J'espérais que bien! très bien! au centre et à droite), et répondre à l'interpellation et de venir déM. le président du conseil aurait hâte de nous avons le droit de protester...

M. Coutant. Le pape n'a rien à faire ici! (Bruit.) J'ai autre chose à faire que de soutenir le pape!

M. le président. Je vous rappelle à l'ordre.

M. Ribot. En vertu même du Concordat Un membre à gauche. Ce n'est pas lui qui a défini les rapports de l'Etat et de qui l'a voulu, c'est le pape! (Bruit.) l'Eglise, le pape a le droit non pas de s'inM. Ribot. Il a voulu, avant que nous dis-l'Eglise, le pape a le droit non pas de s'ingérer dans nos affaires, entendez-le bien, mais d'élever la voix quand il croit qu'un intérêt religieux peut être menacé. (Applaudissements au centre et à droite. - Inter

cutions...

Un membre à gauche. Il a voulu vous rappeler à votre devoir!

M. Ribot. S'il n'est plus permis de parler,

je descendrai de la tribune. (Vifs applau

dissements au centre et à droite.)

M. le président. Rien dans les paroles de l'orateur ne justifie ces interruptions.

On a écouté M. Sembat; veuillez, messieurs, écouter M. Ribot.

M. Ribot. Je dis que le dessein de M. Sembat était trop clair, qu'il faudrait être aveugle pour ne pas le voir. (Bruit à gauche.)

Au centre. Ces interruptions sont intoléra

bles!

M. le président. Je demande que ce débat soit libre et loyal! (Applaudissements.) M. Ribot. M. Sembat ne veut pas seulement que nous discutions dans notre pleine liberté, comme nous le ferons, la loi sur les associations; il veut porter la lutte ailleurs, il veut nous pousser à des attaques violentes contre le chef spirituel des catholiques. (Très bien! très bien! au centre et à droite.) C'est une politique à laquelle ni mes amis, ni moi, ni, j'en suis sûr, le Gouvernement ne voudront s'associer. (Bruit à gauche.)

ruptions à l'extrême gauche.)

[ocr errors]

clarer ici que la lettre écrite par le pape au cardinal Richard était un acte légal et légitime. (Exclamations à l'extrême gauche.) facile, parce qu'il aurait pu trouver dans La chose lui eût été particulièrement des précédents auxquels il était personnellement mêlé le souvenir d'une intervention du souverain-pontife, toute spéciale et de politique intérieure celle-là, qui avait été provoquée par le Gouvernement.

Mais puisqu'il ne veut pas monter à la tribune en ce moment et que mon tour de parole m'y appelle, ce sera, par une singulière ironie, un royaliste et un cathoM. le président. Mais enfin, messieurs, lique absolument soumis à l'autorité du il n'est pas nécessaire que vous interrom-saint-père en matière religieuse, et qui cepiez à chaque phrase pour qu'on sache que vous n'êtes pas de l'avis de l'orateur! (Très bien! très bien !)

l'at

M. Ribot. Nous avons tous lu la lettre
du pape. Vous pouvez ne pas écouter les
paroles qui y sont contenues; nous avons
tous le devoir d'observer tout au moins à
l'égard du pape Léon XIII, qui a signé cette
lettre, et je souhaite qu'il ait toujours
des successeurs qui s'inspirent de sa sa-
gesse et de son esprit politique (Applau-
dissements au centre et à droite),
titude qui convient. Vous pouvez faire une
réserve en ce qui concerne la forme de la
lettre adressée à un archevêque et sa pu-
blication par un archevêque (Ah! ah! à
gauche) - M. le président du conseil
pourra faire cette réserve au point de vue
des articles organiques mais ce n'est
pas seulement à la forme que s'est adressé
M. Sembat; il avait un tout autre dessein :

Il ne faut pas qu'il y ait d'équivoque dans il visait nos rapports avec le pape. ce débat.

Il ne peut pas y avoir deux opinions sur la souveraineté du pouvoir civil. En ce qui concerne la loi qui va venir en discussion, notre indépendance est absolue! (Très bien ! très bien! au centre.)

Nous avons tenu, mes amis et moi, à marquer par un ordre du jour l'esprit dans lequel nous aborderons cette discussion. Nous sommes fidèles à la tradition de ce

1901. DÉP., SESSION ORD. ANNALES, T. I. (NOUV. SÉRIE, ANNALES, T. 63.)

Eh bien même ceux qui ne suivent pas la direction spirituelle du pape doivent reconnaître qu'il y a dans le langage tenu dans cette lettre une très grande modération. (Exclamations à gauche. · Applaudissements au centre et à droite.)

J'ai toujours soutenu et je maintiens autant que personne ici les droits de la société laïque; mais je ne m'associe à aucun degré à vos desseins, et j'espère que le chef du Gouvernement tiendra à honneur

pendant, comme royaliste, a su faire de respectueuses et formelles réserves en un temps où une intervention politique s'était produite; ce sera un royaliste, dis-je, qui aujourd'hui viendra défendre la juste et légitime intervention du pape touchant une question qui concerne exclusivement les intérêts de l'Eglise. (Applaudissements à droite.)

En venant ici défendre le droit qu'a exercé le souverain pontife par sa lettre au cardinal, je reste dans la tradition de l'Etat français, jaloux de son indépendance politique, mais respectueux des droits de l'Eglise. Et ce serait un étrange retour des choses si le Gouvernement républicain qui, naguère, semblait oublier ces traditions et provoquait l'intervention du pape dans la politique intérieure, venait contester aujourd'hui le droit exercé par le chef de la chrétienté. Autant que nous soyons habitués à ces revirements, à ces attitudes successives, il convient cependant de les préciser et de s'en souvenir.

En 1883, M. le président Grévy écrivait. à S. S. le pape Léon XIII une lettre où je lis :

« Dans ce funeste conflit de passions contraires, je ne puis malheureusement que fort peu sur les ennemis de l'Eglise; Votre Sainteté peut beaucoup sur les ennemis de la République. Si elle daignait les maintenir dans cette neutralité politique, qui

5

est la grande et sage pensée de son pontificat, elle nous ferait faire un pas décisif vers un apaisement si désirable. »

On le voit, l'invitation était directe; on demandait au pape d'intervenir pour engager les catholiques à accepter la constitution républicaine. Et M. Waldeck-Rousseau, alors ministre de l'intérieur et des cultes, n'ignorait pas cette démarche, c'est pourquoi j'invoquais tout à l'heure ses souvenirs et je visais un précédent auquel il était mêlé, puisque, à la fin de cette lettre, M. le président Grévy, faisant allusion à la nature de ses fonctions et à la responsabilité de ses ministres, disait :

<< Mais le caractère de ma fonction ne me permet pas d'entrer personnellement dans une discussion que la loi réserve aux ministres responsables. Je leur ai communiqué la lettre de Votre Sainteté en recommandant à leur plus vive sollicitude les griefs qu'elle renferme. Je suis assuré qu'ils feront tout ce qui dépendra d'eux pour leur donner toute satisfaction possible.

[ocr errors]

Ainsi le ministère responsable était initié à la démarche faite par M. le président Grévy, démarche qui devait plus tard, à la suite de négociations persistantes, avoir son dénouement et sa conclusion par la fameuse encyclique du 16 février 1892, où le pape, dans un noble et beau langage assurément, et dans un esprit d'apaisement, invitait les catholiques à se rallier à la République.

Certes, je rends le plus grand hommage à la pensée élevée, au sentiment d'apaisement et de concorde qui inspiraient le Saint-Siège; mais j'ai gardé aussi le souvenir des commentaires impératifs que, de la part de certains républicains, on voulait nous imposer, nous traitant presque en hérétiques, parce que, respectueusement, nous avions fait entendre nos réserves, voulant rester fidèles en même temps à notre foi politique royaliste et à notre foi catholique. (Applaudissements à droite.)

serve pour demain la loi sur le stage sco-
laire, entrave à la liberté de l'enseigne-
ment de l'Eglise et d'autres projets aussi
attentatoires à la liberté de conscience.
(Très bien! très bien! sur les mêmes bancs.)
Ainsi, lorsque des républicains viennent
protester contre ce qu'ils considèrent au-
jourd'hui comme un envahissement, une
ingérence de la part du pape, alors qu'il
parle sur une question essentiellement
religieuse, ils se mettent en contradiction
avec eux-mêmes et oublient qu'ils ont sol-
licité son concours dans une question es-
sentiellement politique. Nous croyons donc,
en rétablissant les rôles, rester dans la
vérité historique de la France, nous qui
nous sommes étonnés de l'intervention
sollicitée en 1892 et qui venons actuelle
ment défendre le droit sacré et indiscutable
à notre sens qu'a exercé le saint-père en
adressant au cardinal Richard l'important
document dont il s'agit. (Très bien ! très
bien! à droite.)

C'est cependant cette lettre que l'on con-
sidérait tout à l'heure, à gauche, comme un
empiétement, alors qu'aucune voix, sur ces
mêmes bancs, ne s'est élevée pour protester
contre l'encyclique du 16 février 1892!
Quant à nous, nous prétendons qu'en
écrivant ces belles pages, si fermes en
même temps que modérées et sages, le
pape est resté dans la légalité et qu'il a
légitimement et opportunément exercé son
droit. (Bruit à gauche.)

Quelle est enfin la conclusion de cette lettre?

Lisez-la avec l'attention qu'elle mérite, lisez la dernière phrase comme la première, et vous verrez que le pape se borne à inviter ceux auxquels il s'adresse à éclairer les esprits afin que la vérité se fasse jour et qu'on puisse discuter en toute loyauté.

N'est-ce pas l'exercice d'un droit légitime et n'y avait-il pas opportunité pour lui, au moment où la discussion n'est pas encore engagée, où on semble rechercher une obscurité voulue, d'apporter sa part de clarté et de lumière dans les esprits? C'est ce qu'il a fait.

Mais si on ne peut contester que cette lettre du Saint-Père était à la fois opportune et légitime, on lui reproche de n'être pas apparue dans les formes légales, et M. Sembat, entrant dans une discussion quelque peu juridique ou d'apparence juridique, prétend que le Concordat ne permettait pas une intervention de ce genre, pas plus que les articles organiques, pas plus encore que l'article 207 du code pénal.

Je crois qu'il me sera aisé de lui répondre.

Parlons d'abord du concordat. Le concordat, dans ses dix-sept articles, est absolument muet en ce qui concerne la faculté pour le pape de correspondre avec ses auxiliaires, les évêques de France. Aucune prohibition, aucune défense, ni explicite, ni implicite, n'y figure, et par conséquent rien ne fait obstacle à ce qu'il puisse communiquer avec les représentants de l'épiscopat. Voilà pour le texte du Concordat. Or, c'est le Concordat seul qui peut être opposé au souverain pontife. Le Concordat, veuillez vous le rappeler, d'après son titre même est une convention entre le pape Pie VII et le gouvernement français, une convention bilatérale qui lie les deux parties, lesquelles ne peuvent être liées en dehors d'elle.

[ocr errors]

Voyons d'abord ce qu'est cette lettre. Que contient-elle ? Est-ce un acte d'autorité? Pas du tout. Quel en est le caractère? A la veille d'une discussion, qui n'est pas encore engagée et autour de laquelle on crée la confusion, en faisant naître sur les congrégations des légendes qui peuvent obscurcir la vérité dans l'esprit public, le pape croit d'abord devoir indiquer ce que sont les congrégations dans l'Eglise: il déclare qu'elles appartiennent à la constitution même de l'Eglise, qu'elles en sont un des éléments On invoque, il est vrai, les articles orgaessentiels qu'en effet, dans l'accomplisse-niques et on prétend les opposer au silence C'était notre droit et c'était notre de- ment de sa haute mission sociale, l'Eglise du Concordat sur ce point. Tout d'abord les voir. En cela nous n'étions que les conti- qui a le devoir de l'apostolat, de l'enseigne- articles organiques ont été faits en dehors nuateurs de la tradition séculaire qu'on ment et de la charité, trouve dans ces orga- du saint-siège et, à l'égard du pape, ils ne rappelait tout à l'heure et qui est lanes essentiels le moyen d'exercer la charité, peuvent pas plus compter que ne comptetradition monarchique française, d'après raient des articles qu'on aurait ajoutés au traité de Francfort après qu'il a été signé laquelle le pouvoir civil et politique reste indépendant de toute influence du souveavec l'Allemagne. (Très bien! très bien! à droite.) rain pontife, en même temps qu'il laisse au chef de l'Eglise toute liberté pour la défense des intérêts religieux dont il a la garde. (Très bien! très bien! à droite.)

D'ailleurs ceux qui ont suivi cette politique du ralliement peuvent en connaître aujourd'hui les fruits amers. Jamais, on peut le dire, les catholiques ne furent poursuivis de rancunes aussi sectaires; jamais entreprises plus hardies ne furent tentées contre eux, depuis les lois fiscales concernant les congrégations, et les mettant en quelque sorte hors la loi, jusqu'au projet de loi lui-même que nous allons discuter et qui raye d'un trait de plume les associations religieuses en même temps qu'on nous ré

d'évangéliser et d'éclairer les peuples par
les missions et de les instruire par son en-
seignement et par l'exemple des vertus.
(Très bien! très bien! à droite.)

Il fallait que cette déclaration fut faite,
car on cherche à créer la confusion, et on
semble vouloir isoler l'Eglise des congré-
gations qui ne font qu'un avec elle, qui
sont un élément essentiel de son existence
et de sa force et qui sont, je le répète,
dans sa constitution même.

De plus, le pape rappelle leur origine, les services incontestables qu'elles ont rendus à l'humanité et à la France; il s'efforce de dissiper les malentendus qu'on cherche à faire naître et les légendes qu'on crée de toutes parts et il réclame pour les congrégations le droit commun de tous les citoyens.

Les articles organiques ne sont qu'une loi de police intérieure, et Portalis, Talleyrand, au moment même de la discussion, s'expliquaient nettement sur ce point. Talleyrand disait au conseil d'Etat :

« Le Concordat est le résultat de la volonté de deux puissances contractantes; les articles organiques, au contraire, ne sont que le mode d'exécution adopté par l'une de ces puissances. >>>

Par conséquent, le mode d'exécution adopté par l'une de ces puissances, comme le dit si bien Talleyrand, ne saurait être opposé au saint-père; vous ne sauriez invoquer envers lui que le Concordat, qui est

« PreviousContinue »