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nommer que MM. Chazourne, avocat, David, Bourgué, les frères Charpy.

Metallier,

Cependant la ville de Lyon, objet principal de l'attaque, vit bientôt pour son malheur, les rebelles se faire de ses murs un boulevart, et le point d'appui de leur défense.

Avec Buonaparte, et même avant lui, s'étaient réfugiés dans cette ville un grand nombre d'agens de la rebellion, d'étrangers, d'inconnus. C'est de cette source impure que sortaient chaque jour cette foule de nouvelles absurdes, de contes ridicules, de mensonges grossiers dont on se servait pour irriter la populace de la ville et des campagnes, contre tout ce que la société a de respectable, et pour corrompre l'opinion en faisant accroire que la cause du Roi était perdue.

Les journaux jouaient un grand rôle dans ce système de déception.

Tantôt il nous réconciliaient avec l'Angleterre, qui aimait, disaient-ils, à justifier sa révolution par la nôtre; tantôt, attachant l'Autriche à leur cause, ils supposaient entre elle et Buonaparte une correspondance active, et attendaient de Vienne Marie-Louise et son fils, pour les couronner; tantôt, pour rassurer les esprits sur les intentions de nos voisins les Suisses, ils en faisaient une puissance neutre qui protégerait une partie de nos frontières; tantôt ils désavouaient les résolutions du congrès,

les armemens de l'Europe, l'insurrection du midi : puis, lorsque ces jongleries étaient trahies par les événemens, de nouveaux mensonges venaient le lendemain remplacer les mensonges de la veille. Le roi d'Angleterre, qui ne se réconciliait pas, ils le faisaient mourir pour supposer des dissentions dans sa famille ; ils chassaient de sa capitale le roi d'Espagne, pour l'occuper de lui-même et non de nous; ils menaçaient de la peste et des Turcs les frontières de la Hongrie et de la Russie, et déjà même avaient rasé Bucharest; ils faisaient avancer Murat victorieux dans l'Italie, qu'ils soulevaient toute entière à sa voix. Quant à ces troupes fidèles du midi qui se dirigeaient immédiatement sur Lyon, et dont il n'était plus possible de cacher la marche, « ce n'était, à les >> en croire, qu'un méprisable rassemblement » d'hommes égarés, la plupart sans patrie (1);

ce n'était qu'un ramassis de canaille auquel on » donnait quarante sous par jour (2); ce n'étaient » que des hordes égarées, des satellites soldés par » la tyrannie, laissant tomber leurs poignards de >> leurs tremblantes mains (3). » Enfin, des voyageurs dignes de foi, attestaient, disait-on, que

(1) Journal de Lyon, 11 avril.

(2) Lettre de M. Ganière, de St-Vallier, dans le journal de Paris, du 10 avril.

(3) Proclamation du général Dessaix, du 1er avril 1815.

Valence était en feu, que les brigands avaient juré d'incendier et raser Lyon, etc., etc. (1)

Il s'en fallait de beaucoup toutefois que les rebelles eussent conçu un tel mépris de l'armée qui s'avançait rien ne prouve mieux combien ils en redoutaient la valeur, que les apprêts immenses qu'ils firent pour se défendre.

La précaution de mettre Lyon en état de siége; l'arrivée du régiment des flanqueurs de la garde et d'un bataillon du 5. de ligne; celle du 6. et du 49.o de ligne ; la marche enfin des troupes en garnison à Lons-le-Saunier, et de celles qu'amenait le général Grouchy (2); la présence même de cet officier fameux, tout cela ne put rassurer les rebelles on crut indispensable de faire des levées extraordinaires d'hommes par tous les moyens que la terreur peut inventer. On ordonne le doublement et l'entier équipement de la garde nationale de Lyon (3), sans distinction d'âge; on promet des récompenses aux gardes nationaux qui voudraient s'enrôler contre les hordes du midi, c'est le nom que l'on donnait à l'armée royale; puis, pour exciter les campagnes ainsi que les départemens voisins, par des exemples, on supposa qu'il

(1) Tableau historique, page 63.

(2) Journal de Lyon, des 21, 25 mars, 2, 4 et 8 avril. (3) Proclamation du 25 mars 1815, par M. de Fargues.

y avait eu neuf à dix mille enrôlemens à Lyon (1), tandis que la faction eut bien de peine à trouver 93 prosélytes (2) dans la garde nationale.

En même temps, on donna l'ordre aux maires de campagne de faire partir, sous des peines sévères, dans les vingt-quatre heures, tout ce qui était en état de porter les armes. Bientôt on vit arriver dans les murs de Lyon (3) des troupes de Nestors aux cheveux blancs, des Achilles imberbes, des bossus, des boiteux, armés de piques, de barres de fer, de bâtons, de faulx: à la tête de ces étranges bataillons que poussait la contrainte, ou qu'animait l'espoir du pillage bien plus que l'amour de la patrie, on voyait quelquefois des femmes, ou plutôt des bacchantes, chanter, le sabre en main au lieu de thyrse, ça ira, ou la Marseillaise, parcourir les cabarets, danser dans les églises, et partout offenser la pudeur par les propos de la licence la plus dégoûtante.

Enfin, pour que rien n'y manquât, on fait un appel à tout ce que la populace a de plus corrompu et de plus vil, pour s'organiser en corps libres. Bientôt ils se répandent comme des furieux dans le Dauphiné, pour y prêcher le pillage et en donner l'exemple: ils soulèvent au son du tocsin, la popu

(1) Journal de Paris, 10 et 11 avril.
(2) Tableau historique, page 63.
(3) Tableau historique, page 62.

lation épouvantée, traînent sur leurs pas, sans équipages, sans armes et sans vivres, les hommes les plus timides; désolent le tranquille habitant des campagnes, par des réquisitions et des prétentions sans bornes; commettent les plus horribles excès chez un grand nombre d'ecclésiastiques; brisent les portes des églises, violent le sanctuaire, assassinent enfin à St-Marcellin, un jeune maire, pour avoir refusé de se joindre à leurs bandes effrénées.

Tels étaient les épouvantables auxiliaires avec lesquels les factieux prétendaient nous rendre à la liberté, au bonheur et à la gloire.

De pareils ennemis n'étaient pas dangereux, et ce ne furent ni leurs menaces, ni leurs approches qui déterminèrent la retraite de M. le duc d'Angoulême. Il céda à des événemens d'une tout autre considération.

On sait que sa droite était appuyée aux Alpes par le général Ernouf, qui, à la tête de ses fidèles Marseillais, avait pris position à Sisteron, et par les généraux Gardanne et Loverdo, qui, à la tête du 58.o, du 83. et de quelques gardes nationales, se dirigeaient sur Grenoble.

Après quelques engagemens dans les montagnes de la Mure et de Corp, le 58.o de ligne passa avec son général sous l'aigle des rebelles. Le 83., à l'exception du colonel et de quelques officiers,

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