INTRODUCTION SEPTEMBRE 1904 Amené, par des circonstances dont le lecteur trouvera plus loin le récit, à rechercher l'emblème qui pourrait remplacer le RF provisoire de nos écussons, j'ai, en 1892, proposé le coq gaulois; je pensais qu'une idée aussi simple, en harmonie si parfaite avec la tradition populaire et avec la vérité historique, devait faire son chemin toute seule. Mais j'avais compté sans l'esprit de parti: ma proposition souleva des protestations violentes, basées principalement sur ce préjugé que le coq n'a jamais été que le symbole de la monarchie de Juillet. J'ai combattu cette erreur manifeste et ma campagne de presse a enfin porté ses fruits puisque le coq figure aujourd'hui sur nos monnaies d'or, voire même sur la grille de l'Élysée. Cependant mes adversaires, parmi lesquels je m'honore de compter un certain nombre de lettrés et de savants d'une grande érudition, ont cru bon de prolonger la lutte et d'essayer de prouver que, quand bien même j'aurais. avec moi l'opinion publique, je ne pourrais scientifiquement me recommander de l'Histoire. J'ai donc continué ma campagne et poursuivi passionnément mes recherches. C'est ainsi que j'ai réuni une collection certainement unique au monde (je puis le dire sans vanité, car tout le mérite en revient à mes nombreux et inlassables correspondants), faisant appel indistinctement à toutes les sortes de documents: gravures, monuments, médailles, monnaies, jetons, armes, équipements militaires, caricatures même. De plus, j'ai fouillé les musées, les bibliothèques, les collections particulières. Cette universalité fait la force de la thèse que je soutiens, car mes adversaires sont seulement numismatistes ou seulement compilateurs de textes d'une authenticité parfois douteuse et reproduisant le plus souvent des légendes où la part de la fantaisie excède de beaucoup celle de la vérité. Dans les chapitres qui vont suivre, j'ai surtout cherché à convaincre par les yeux, et les nombreux documents que j'ai reproduits n'ont été accompagnés à dessein que de brèves explications; cependant j'ai l'espoir que ce travail fixera définitivement un point de notre histoire, celui de l'emblème national que tout le monde connaît et que pour cette raison, sans doute, personne n'avait eu la curiosité d'étudier, sinon ceux qui ont intérêt à le nier. Quoique le but principal de ce livre soit la réhabilitation du coq, je passerai rapidement en revue tous les autres emblèmes français et aussi les drapeaux auxquels il fut si souvent associé. Là encore, l'histoire a été faussée ainsi, le drapeau blanc ne remonte pas, comme on le croit généralement, à Henri IV qui, personnellement, avait une bannière formée de bandes verticales rouges, bleues et blanches; il date de la Révolution et fut, dans le principe, le signe de ralliement des émigrés. Le drapeau blanc ne devint royal qu'à la restauration des Bourbons. Une étude approfondie, puis un résumé historique très simple et impartial des emblèmes de la France m'ont semblé constituer une ceuvre utile. Cette (euvre, toute désintéressée, aurai-je su la mener à bien ? ARTHUR MAURY |