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Ce fait, confirmé par la Société française d'archéologie, est un trait de lumière des plus précieux.

On peut la rapprocher de cette phrase trouvée dans Suétone que

« les Coqs (Galli) avaient réveillé Néron par leur chant »> voulant par là exprimer que les Gaulois avaient inquiété Rome (1).

Enfin le même auteur latin, dans un passage relatif à l'empereur Vitellius, fait encore un rapprochement entre les mots Coq et Gaulois. La traduction suivante que nous empruntons à un livre ancien (2) contient le texte et son explication appuyée sur l'histoire :

« Comme l'Empereur Vitellius étoit dans son tribunal, à Vienne en Dauphiné, un coq se jeta sur son épaule, ensuite sur sa tête on augura de cet évènement qu'il succomberoit sous les coups de quelque Gaulois il fut en effet assassiné quelque temps après par un nommé Antonius, natif de Toulouse, et Tribun des troupes du parti ennemi ».

Moyen-Age

Les persécutions des derniers empereurs romains, l'affai blissement de leur autorité et, surtout, les exactions de leurs représentants dans les Gaules soulevèrent à plusieurs reprises les populations réduites à la misère; c'est ainsi que se préparait la grande invasion des barbares.

Wisigoths, Vandales, Suèves, Bourguignons, Francs, pillaient, dévastaient les riches contrées de la Gaule romaine ; ils s'enhardirent au point d'en entreprendre la conquête. Les Francs se montrèrent de beaucoup les plus habiles et, politiquement, ils régnèrent jusque dans Rome.

Ce fut Clovis qui, par sa victoire de Soissons, anéantit ce qui restait de la domination romaine.

Durant ces temps effroyables d'invasions, de massacres, de dévastation, on comprend que le coq emblématique disparait. Le mélange des Gaulois et des Francs s'opéra lentement et, chose singulière, les vainqueurs adoptèrent la langue et, pourrait-on dire, la civilisation latine des Gaulois.

(1) Suétone, Neron, 45.

(2. Traité historique du Blason. Paris, 1751, chez C.-A. Jombert.

Cependant le gros de la nation française, dès lors en formation, se convertit au christianisme et tout ce qui était paien fut voué à la destruction.

Cogs des Clochers. - Les emblèmes, de même que les œuvres d'art qui surgissent alors, sont presque exclusivement religieux. Bientôt les coqs apparaissent, seulement ils sont au faite des clochers, aussi bien des plus modestes églises de villages qu'aux somptueuses cathédrales; il n'y a que peu d'exceptions.

Cet usage remonte à une date fort ancienne qu'il a été impossible de déterminer; M. l'abbé Barraud, dans une recherche sur les coqs des églises (1), cite, d'après le Livre Noir de Coutances, la relation d'un orage arrivé en 1091; la foudre renversa plusieurs parties de la cathédrale de Coutances et détruisit, en particulier, le coq qui se trouvait au-dessus de la grande tour.

La signification de ces coqs a, naturellement, été très discutée.

« C'est pour ce que nous sommes Gaulois ou des Gaules, car ce terme gallus ou galli vaut autant à dire que Gaulois,

et que cet oyseau est gallus » a dit un auteur ancien (2).

Les écrivains religieux y ont vu le symbole de la vigilance qu'exercent les ministres du culte et l'indication qu'ils doivent adresser leurs prières au ciel dès le lever du soleil.

L'usage des coqs placés au sommet des églises s'est répandu de la France à l'étranger.

(1) Bulletin du Comité historique des monuments écrits de l'histoire de France. Paris 1855.

(2) De Bras, Recherch. et antiq. de Caen, 133.

Abraxas. Nous croyons qu'il faut intercaler ici la description des abraxas, sortes de talismans ou d'amulettes assez communes dans nos musées et qui ressemblent singulièrement aux grylles dont nous avons parlé précédemment; ce sont en effet des onyx ou des cornalines de petites dimensions, gravés souvent avec art, où l'on retrouve des têtes de coqs. Ces amulettes étaient répandues par les adeptes du gnosticisme, religion inutile à décrire ici, mais qui remonte probablement à l'antiquité la plus reculée; on prétend qu'elle fut celle de nos ancêtres, avant qu'ils adoptassent le druidisme?

Les plus anciens abraxas des Gaulois ont dû leur être fournis par les Égyptiens; mais il se peut qu'ils en aient gravé eux-mêmes plus tard car ils avaient le don de l'imitation, comme on l'a vu par leurs monnaies.

Les abraxas qui proviennent du sol français représentent divers sujets fantastiques et souvent des personnages à têtes de coq avec des attributs du culte solaire. Les deux spécimens que nous reproduisons ici doivent dater du moyen-âge.

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ABRAXAS

Agrandissements`

Jetons. Si le coq n'apparait pas sur les monnaies du moyen âge, du moins en découvre t-on sur plusieurs jetons. On sait qu'autrefois les jetons servaient à compter sans le secours de l'écriture; la fantaisie présidait à leur fabrication, aussi, pour les rendre attrayants et en augmenter d'autant la vente, changeait on souvent leurs types. Pourtant la fabrication n'en était pas entièrement libre en France; elle se faisait dans les ateliers monétaires sous la juridiction des

généraux maîtres des monnaies, pour les jetons destinés aux officiers du roi. Quant aux jetons banaux, la frappe en appar tenait, suivant toute apparence, aux orfèvres. En 1672, deux arrêts de la Cour des monnaies portent défense de fabriquer des jetons ailleurs qu'au balancier du Louvre.

Ces petits monuments métalliques fournissent, sur les usages du temps passé, des renseignements précieux : ils rappellent parfois les faits les plus saillants de l'histoire, quand ils ne sont pas au chiffre des personnages qui les faisaient frapper pour leur propre usage. Nous en aurons souvent à présenter dans la suite de notre travail. Le catalogue de la collection Rouyer, Jetons et méreaux du moyen âge, en indique

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onze qui ont le coq pour type, nous reproduisons ici les principaux; ils ont au revers la croix fleurdelisée, ou la croix potencée, généralement cantonnée de globules, leurs inscriptions sont bizarres et quelquefois incompréhensibles, à cette

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époque elles étaient plutôt destinées à donner aux jetons une apparence de monnaies de même, on fait aujourd'hui des imitations de billets de Banque avec inscriptions de fantaisie.

Parmi les légendes qui se trouvent sur les jetons au coq de la collection Rouyer nous relevons les suivantes :

« CE SONT LES GETON » afin de prévenir que « ce sont des jetons » et non des monnaies usuelles, ou encore :

« DE LATON SUI NOU MES >> c'est-à-dire « DE LAITON SUIS NOMMÉ. » Puis des devises quelconques, exemple :

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« PAR AMOUR SUIS DONNÉ. » « PATER NOSTER QUI ES IN C (cœlis)» et des inscriptions incompréhensibles : « CET ÉTRANGE COURONNE »?« JETES CONTES SOMME BIEN. » Faut-il comprendre : «Jette et le compte se trouve bien. »>?

M. L. Quantin, dont la science numismatique est bien connue, nous a répondu ce qui suit à propos de ces intéressants documents :

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Le coq que l'on voit sur le jeton au nom de Paumier pourrait appartenir à des armoiries particulières; cependant j'ai cherché ce nom parmi les blasons et les sceaux des familles, même celles qui sont éteintes, et je n'y ai pas trouvé cet oiseau...

En résumé, dans cette belle réunion de jetons au coq, je vois un type courant, banal, qui ne pouvait avoir qu'une signification allusive au nom des Gaulois. C'est un sérieux atout de plus pour faire triompher l'emblème qui vous intéresse.»

Féodalité

La Féodalité exclue complètement l'idée qui fait d'une nation une collectivité ayant besoin d'un signe distinctif unique. Les seigneurs : ducs, comtes, barons, etc., ne cherchaient alors qu'à consolider, à étendre leur propre pouvoir aux dépens de leurs voisins et tous disputaient au roi luimême, ses prérogatives; volontiers ils recherchaient l'alliance de l'étranger. L'idée de Patrie sommeillait.

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