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et 3 juill. 1815 (Dalloz, t. 25, p. 452; Sirey, t. 14, p. 291 et 455), la cour de Colmar a persisté dans sa jurisprudence qu'avait aussi adoptée la cour de Douai, le 29 juin 1812 (Dalloz, t. 25, p. 347); mais elle y a dernièrement renoncé, le 15 avril 1857, en décidant que lorsque, par suite de récusations, un tribunal de commerce s'abstient tout entier, il y a lieu de se pourvoir devant la cour royale à fin d'indication d'un autre tribunal, et le renvoi doit être ordonné devant le tribunal de commerce le plus voisin, l'affaire n'étant pas dévolue de droit au tribunal civil de l'arrondis

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Elle est forcée relativement à l'amende, parce qu'elle est au profit du fisc, et que d'ailleurs les expressions de la loi sont impératives sous ce rapport; elle est facultative quant aux dommages-intérêts, puisque l'article porte que la condamnation sera prononcée, s'il y a lieu. Il faut remarquer, en outre, qu'un tribunal ne peut accorder de dommages-intérêts qu'autant qu'ils sont demandés; car il ne saurait prononcer d'office une condamnation qui ne tient qu'à l'intérêt purement privé des parties.

[ Nulle difficulté sur ce point. ]

ART. 375. Si le renvoi est prononcé, qu'il n'y ait pas d'appel, ou que l'appelant ait succombé, la contestation sera portée, devant le tribunal qui devra en connaître, sur simple assignation, et la procédure y sera continuée suivant ses derniers errements.

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CCCXII. Lorsque le jugement rendu sur unc demande en renvoi n'est pas attaqué par la voie d'appel, ou que l'appelant a succombé, rien n'empêche d'en poursuivre l'exécution.

Pour cet effet, la partie la plus diligente le fait signifier à l'autre partie, suivant la règle qui ne permet pas d'exécuter un jugement non | signifié.

Si le renvoi est prononcé, la signification du jugement est faite à personne ou domicile, avec simple assignation pour comparaître devant la cour ou le tribunal désigné pour connaître de la demande principale. Sur cette assignation, qui n'a pas besoin d'être libellée, la procédure est, non pas commencée, mais continuée d'après ses derniers errements.

Si le renvoi est rejeté, le jugement est simplement signifié d'avoué à avoué, avec sommation d'y obéir, c'est-à-dire de continuer devant les mêmes juges la procédure commencée.

1360. L'assignation prescrite par l'art. 375

doit-elle être donnée au domicile réel des parties, ou à celui de leurs avoués ?

Cette assignation, suivant Hautefeuille, p. 199, serait donnée à domicile d'avoué; mais Lepage, Quest., p. 247 et 248, estime, au contraire, qu'elle doit être donnée à domicile réel.

On peut dire, pour l'opinion de Hautefeuille, que l'assignation dont il s'agit n'est qu'une est jugée dans le tribunal indiqué par le jugecontinuation de procédure, puisque la cause ment de renvoi sur les derniers errements, c'est-à-dire qu'elle est reprise à partir du dernier acte qui a été fait devant les juges primitivement saisis: d'où il suit que l'assignation peut être remise aux avoués chez lesquels les parties ont leur domicile de droit pour tout ce qui concerne la contestation.

Lepage oppose qu'en principe général toute assignation est faite à personne ou à domicile; mais qu'il n'y a d'exception qu'autant que la loi prononce formellement, comme elle l'a fait, par exemple, dans l'espèce de l'art. 365. (Voy. nos questions sur cet article.) Or, elle dans l'art. 372, et l'on ne peut étendre une ne s'est point exprimée de la même manière exception d'un cas à un autre, ici surtout, où l'espèce diffère essentiellement, et où les motifs de décider ne sauraient être les mêmes.

Au surplus, quoique l'assignation donnée en vertu d'un jugement de renvoi ait pour objet de continuer la procédure suivant les derniers

2o C'est devant le juge de paix du canton le plus voisin dans l'arrondissement du tribunal civil, et non devant celui d'un autre canton plus proche situé hors de cet arrondissement, que les parties doivent être renvoyées en cas d'empêchement d'un juge de paix et de ses suppléants. (Bourg, 19 mars 1806.)]

errements, il n'en faut pas moins que les parties constituent, dans le nouveau tribunal, des avoués auxquels elles ont à donner des pouvoirs plus ou moins étendus, et qui touchent le fond de la contestation. Les parties seules peuvent remplir cette obligation: il faut donc qu'elles soient assignées à personne ou domicile.

Nous pensons que ces raisons doivent l'emporter sur celles que nous avons alléguées en faveur du sentiment de Hautefeuille ; du moins, croyons-nous que la prudence exige que l'on suive l'opinion de Lepage.

[Nous partageons entièrement l'opinion de Carré et les raisons qu'il fait valoir. ]

[ 1360 bis. La partie opposante à un jugement de défaut, au principal, qui, sans faire juger le fond, obtient le renvoi à un autre tribunal, et qui, sur la nouvelle assignation à elle donnée pour y comparaître, se laisse débouter par défaut de son opposition, serait-elle admise a former opposition à ce second jugement?

Si la partie opposante s'était laissé débouter par défaut de son opposition par le tribunal même qui avait rendu le premier jugement, il est clair qu'une seconde opposition de sa part ne serait pas recevable, car opposition sur opposition ne vaut, et d'après l'art. 165, C. proc., l'opposition ne peut jamais étre reçue contre un jugement qui a débouté d'une première opposition.

En sera-t-il autrement, parce que la partie une fois opposante aura demandé et obtenu son renvoi devant un autre tribunal ? Assignée devant ce dernier, que viendra-t-elle y soutenir, sinon le mal jugé de la sentence qui l'avait condamnée par défaut? quelle autre contestation viendra-t-elle y soulever que celle qu'elle avait introduite devant le tribunal premier saisi, par la voie de l'opposition? C'est donc le même procès qui se continue, qui seulement se déplace: ainsi il faut le continuer sur les mêmes errements, et considérer le jugement de défaut qui interviendra comme un véritable débouté d'opposition, non susceptible d'être de nouveau attaqué par la même voie.

Il est vrai que le second jugement de défaut peut dans ce cas être encore un jugement contre partie, ce qui n'aurait pas eu lieu si l'affaire fût restée au même tribunal, puisque, sur l'opposition, la partie avait nécessairement constitué un avoué; d'où l'on pourrait dire que, l'avoué ne veillant pas pour elle, on ne devrait pas la traiter si rigoureusement.

Mais cette différence de position, qui est le résultat de son propre fait, ne doit pas lui donner le droit de proroger indéfiniment les procédures, d'accumuler, sans mesure, opposition sur opposition. L'art. 168 ne souffre point d'exception.

C'est au reste l'opinion qu'embrasse Pigeau, dans son Comm., t. 1, p. 647. (Voy. notre Quest. 695 ter.) ]

ART. 576. Dans tous les cas, l'appel du jugement de renvoi sera suspensif.

C. proc., art. 592 à 395, 457.

CCCXIII. Tout jugement par lequel un tribunal de première instance a statué sur une demande en renvoi est sujet à l'appel, soit qu'il ait accueilli, soit qu'il ait rejeté la demande, soit que la cause principale ne doive être jugée qu'à charge d'appel, soit qu'elle puisse l'être en dernier ressort; car, ainsi qu'on l'a dit, il s'agit ici d'une véritable récusation

exercée contre un tribunal entier.

La loi déclare, dans l'article présent, que dans tous les cas cet appel sera suspensif : ce serait donc inutilement que le tribunal aurait ordonné l'exécution provisoire de son jugement. Cette disposition demeurerait sans effet, et la procédure sur la demande principale continuerait d'être suspendue jusqu'à ce qu'il eût été statué par la cour royale.

[1360 ter. Peut-on appeler quand l'objet du procès au fond est susceptible d'être jugé en dernier ressort?

cide pour les jugements sur récusation; or Oui par argument de l'art. 391, qui le dé

les demandes en renvoi sont de véritables récusations; et de l'art. 454 qui admet l'appel de tous les jugements où il s'agit d'incompetence; or les demandes en renvoi sont de véritables contestations sur la compétence. Enfin, les demandes en renvoi ayant, pour celui qui les forme et pour son adversaire, des conséquences bien plus importantes que les simples récusations, les motifs qui ont dicté la disposition de l'art. 391 trouvent ici une application encore plus directe. C'est au reste l'avis de Pigeau, Comm., t. 1, p. 648; de Favard, t. 4, p. 868, n° 9, et de Thomine, no 424. ]

[1360 quater. Qui peut appeler? Les juges du chef desquels le renvoi est ordonné le peuvent-ils ?

Voyez infrà nos observations sur la Question 1409, et appliquez les mèmes principes. ] 1360 quinquies. Si, pendant l'instance d'appel, il était rendu jugement, soit par le tribunal qui aurait refusé le renvoi, soit par celui auquel il aurait renvoyé, ce jugement serait-il nul, encore bien que la compétence du tribunal dont il serait émané fùt plus tard reconnue par la cour?

Voyez infrà la Quest. 1409 bis, et appliquez les mèmes principes. 1

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douter de la faculté du pourvoi, lorsqu'il y a d'ailleurs ouverture.

Quant à l'effet suspensif, la règle générale est que les demandes en cassation ne suspendent pas l'exécution des arrêts. Pour faire ex

Il se porte à cette cour; c'est une consé- ception à cette règle, il faudrait qu'une loi quence des art. 575 et 376. [Cela est incontestable.]

1362. Quand le renvoi est prononcé par une cour royale, y a-t-il lieu au pourvoi en cassation, et le pourvoi, en ce cas, estil suspensif?

Le Code de procédure laisse ces questions indécises. Néanmoins nous pensons, avec Jour dain (Code de compét., t. 2, p. 253), qu'il n'y a pas lieu, en ce cas plus qu'en tout autre, de

l'eût consacrée. L'art. 376 attribue, à la vérité, l'effet suspensif à l'appel du jugement de disposition sur le pourvoi. renvoi; mais on ne trouve pas une semblable

du chap. des Renvois, exprime la même opi[Pigeau, Proc. civ., à l'art. 5, no 4, note, nion, que nous adoptons. ]

ART. 377. Sont applicables audit appel, les dispositions des art. 392, 393, 394, 595, titre de la Récusation, ci-après.

TITRE XXI.

DE LA RÉCUSATION (partielle) (1).

La récusation est une exception par laquelle une partie refuse d'avoir pour juge un ou plusieurs des membres du tribunal saisi du procès.

Cette exception se range naturellement dans la classe des exceptions déclinatoires, puisqu'en récusant un magistrat on évite de se soumet

tre à son autorité.

Comme le remarque Poncet, Traité des actions, p. 262, la récusation est introduite en premier ordre dans l'intérêt personnel de la partie récusante; mais elle influe nécessairement sur d'autres intérêts, et tend à compromettre celle de la partie adverse, en la privant d'un ou de plusieurs juges dans lesquels elle avait peut-être une confiance particulière. L'intérêt public s'y trouve indirectement engagé, puisqu'elle a pour fondement nécessaire un motif plus ou moins injurieux à la magistrature. Enfin, le juge récusé peut être aussi particulièrement intéressé à obtenir la réparation de l'injuste agression dont il aurait été l'objet.

De là résultent les principales règles que le Code de procédure renferme en matière de récusation, et dont l'objet est de concilier ces intérêts divers.

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ART. 378. Tout juge (2) peut être récusé pour les causes ci-après :

1° S'il est parent ou allié des parties ou issu de germain inclusivement; de l'une d'elles, jusqu'au degré de cousin

alliée de l'une des parties, ou si le juge est 2o Si la femme du juge est parente ou parent ou allié de la femme de l'une des parties, au degré ci-dessus, lorsque la femme est vivante, ou qu'étant décédée, il en existe des enfants: si elle est décédée et qu'il n'y ait point d'enfants, le beau-père, le gendre, ni les beaux-frères ne pourront être juges;

dée s'appliquera à la femme divorcée, s'il La disposition relative à la femme décéexiste des enfants du mariage dissous;

3° Si le juge, sa femme, leurs ascendants et descendants, ou alliés dans la même ligne, ont un différend sur pareille question que celle dont il s'agit entre les parties;

4. S'ils ont un procès en leur nom dans un tribunal où l'une des parties sera juge; s'ils sont créanciers ou débiteurs d'une des parties;

ges, soit pour vider un partage, Le ministère public est également récusable (voy. art. 381); mais le greffier ne l'est pas. (Rennes, 3 janv. 1818, Quest. 591; juste, est faite aussi par Favard, t. 4, p: 762, no 1, Dalloz, t. 18, p. 237.) [Cette remarque parfaitement Dalloz, t. 23, p. 330, no 6, et Thomine, no 425.)]

5o Si, dans les cinq ans qui ont précédé | motifs; mais chaque partie ne pouvait récuser la récusation, il y a eu procès criminel péremptoirement qu'un seul juge. entre eux et l'une des parties, ou son conjoint, ou ses parents ou alliés en ligne directe;

6° S'il y a procès civil entre le juge, sa femme, leurs ascendants et descendants, ou alliés dans la même ligne et l'une des parties, et que ce procès, s'il a été intenté par la partie, l'ait été avant l'instance dans laquelle la récusation est proposée; si, ce procès étant terminé, il ne l'a été que dans les six mois précédant la récusation;

7° Si le juge est tuteur, subrógé tuteur ou curateur, héritier présomptif ou donataire, maître ou commensal de l'une des parties; s'il est administrateur de quelque établissement, société ou direction, partie dans la cause; si l'une des parties est sa présomptive héritière;

8° Si le juge a donné conseil, plaidé ou écrit sur le différend, s'il en a précédemment connu comme juge ou comme arbitre; s'il a sollicité, recommandé, ou fourni aux frais du procès; s'il a déposé comme témoin; si, depuis le commencement du procès, il a bu ou mangé avec l'une ou l'autre des parties dans leur maison, ou reçu d'elles des présents;

9° S'il y a inimitié capitale entre lui et l'une des parties; s'il y a eu, de sa part, agressions, injures ou menaces, verbalement ou par écrit, depuis l'instance, ou dans les six mois précédant la récusation proposée.

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C. pr.,

Ordonn. de 1667, tit. XXIV, art. 1 à 12. art. 14, 197, 563 et suiv., 514, 1014.[Devilleneuve, vo Récusation, nos 1 à 13 bis. Carré, Compét., 2o part., liv. Jer, tit. ler, chap. 6, art. 57, Q. 83, et art. 58, et liv. II, tit. 6, art. 306, Q. 369 et 370.Locré, t. 9, p. 162, 242, 262, et suiv.] (1).

CCCXIV. Outre la récusation pour causes déterminées, qui faisait l'objet d'un titre dans l'ord. de 1667, nous connaissions, avant le Code de procédure, une autre espèce de récusation nommée péremptoire, qu'une loi du 23 vend. an iv avait empruntée de l'ancien droit romain. La récusation péremptoire était faite par une simple déclaration au greffe, sans déduction de

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Quoique la récusation péremptoire eût encore quelques partisans, l'abus en a paru trop facile pour qu'elle méritât d'être conservée.

Toute partie qui veut récuser un juge doit donc avoir maintenant, comme avant la loi du 24 vend. an IV, des motifs ou causes légitimes de récusation.

La loi, soigneuse de céder aux justes appréhensions des parties, sans pourtant rien abandonner à leurs passions aveugles, non plus qu'à la crainte imaginaire, a pris soin d'énumérer les causes qui peuvent donner lieu à la récusation dans les tribunaux inférieurs et dans les cours. Rangeant ces causes en neuf classes, elle a dit que tout juge pouvait être récusé. elle a établi, contre le juge, la présomption léElle a fourni une série de cas dans lesquels gale de partialité, qui peut servir de fondement à la récusation. Il est facile de s'apercevoir, à la lecture de l'article, que toutes ces causes se rattachent à quatre motifs principaux, qui sont: l'intérêt, l'affection, la haine ou la prévention du juge.

Si nul témoin ne peut être entendu dans sa propre cause, aucun juge, à plus forte raison, ne doit prononcer entre son intérêt et celui d'un tiers: Nemo jus sibi dicere debet. Voilà pourquoi le juge devient récusable, lors même qu'il n'a qu'un intérêt éloigné ou indirect à la

décision de l'affaire. Ceux que la loi désigne le donataire des parties, ou l'une delles; comme intéressés sont l'héritier présomptif ou celui qui soutient un différend sur une pareille question que celle à juger; celui qui reçoit un présent d'une partie, ou qui trouve dans cette partie son juge, son créancier ou son débiteur.

L'affection peut également faire dévier la raison du juge, car presque toujours les mouvements du cœur empêchent les opérations du jugement. Comme l'affection est un sentiment naturel dans un tuteur, un curateur, un administrateur, un commensal, un maître, elle devient, dans les juges investis de l'une de ces qualités, une cause de récusation. Il en est de même des liens de parenté ou d'alliance, lorsque les degrés n'en sont pas encore trop éloignés. Cependant il faut sur ce point remarquer, avec la loi, que la cause de récusation n'existe qu'entre les parties et les juges qui sont unis par ces liens, mais qu'elle ne s'étend pas jus

posant le tribunal devant lequel il exerce, lorsque ce tribunal est appelé à juger une question de discipline qui le concerne. (Bourges, 13 déc. 1808.)

30 Il existe une cause valable de récusation contre un procès-verbal dressé par un garde-vente, d'une coupe de bois, lorsqu'il est en même temps caution solidaire de l'adjudicataire. (Cass., 7 nov. 1817; Sirey, t. 18, p. 162; Dalloz, t. 25, p. 123.)]

LIVRE II.

qu'aux personnes qui représentent simplement | tions de sa haine, tandis que le juge prévenu une partie. Si donc le juge n'est parent que du consultera vainement sa raison et ses lumières; tuteur, du curateur, de l'administrateur ou dirigé insensiblement par son amour-propre, mandataire de l'une des parties, il n'y a pas lieu tous ses efforts ne tendront qu'à lui fournir des à récusation, à moins que lesdits tuteurs, armes pour accréditer et défendre l'erreur qu'il curateurs, administrateurs ou mandataires aura d'abord embrassée : c'est donc avec raison n'aient dans la cause un intérêt distinct et per- que la loi a mis au nombre des juges récusasonnel. bles, celui qui d'avance a fait connaitre son opinion, soit comme conseil, comme avocat, comme avoué, comme juge ou comme arbitre, soit en sollicitant pour une partie, en fournissant aux frais du procès, en déposant comme témoin dans l'affaire, etc.

Si l'intérêt ou l'affection empêchent le juge de voir avec exactitude, et de peser avec impartialité les moyens d'une affaire, la haine, cette passion qui maîtrise l'homme, et dénature à ses yeux les rapports les plus simples comme les faits les plus évidents, n'est pas un obstacle moins difficile à surmonter pour lui; c'est pourquoi tout ce qui décèle, de la part du juge, inimitié capitale ou simple animadversion, des agressions, des injures ou des menaces, un procès criminel dont la mémoire ne peut encore être effacée, un procès civil existant ou récemment terminé, sont rangés au nombre des causes de récusation.

Mais de tous les obstacles qui peuvent empêcher la vérité de parvenir jusqu'à la conscience du juge, la prévention est sans doute le plus dangereux et le plus difficile à surmonter. Un magistrat intègre peut se tenir en garde contre les séductions de son intérêt, contre les penchants de son affection, contre les tenta

L'ordonnance de 1667, après avoir énuméré la plupart des causes de récusation que nous avons rapportées, ajoutait : « N'entendons exclure les autres moyens de fait ou de droit, pour lesquels un juge pourrait être valablement récusé. »

Cette disposition trop générale avait engagé la plupart des auteurs à rechercher quels étaient les moyens de fait ou de droit qui permettaient de récuser un juge, quoiqu'ils ne fussent pas écrits dans l'ordonnance. Les rédacteurs du Code, en consultant l'expérience, ont tâché de prévoir et de fixer tous les cas où peut avoir lieu la récusation. C'est sans doute par ce motif qu'ils n'ont pas cru devoir maintenir la disposition citée. (Voy. la question suivante.)

QUESTIONS SUR L'ENSEMBLE DE L'ARTICLE.

1363. Les causes de récusation de juges peuvent-elles étre admises comme causes de reproche contre les témoins?

Pigeau, t. 1, p. 202, no 320, dit que l'on peut adopter pour principe que les causes de récusation contre les juges sont causes de reproche contre des témoins, toutes les fois qu'il n'y a pas de raisons particulières pour en décider autrement.

Mais on remarquera que, si le législateur a étendu les causes de récusation de juges au delà des cas où l'art. 283 autorise à reprocher les témoins, c'est, comme l'ont dit tous les auteurs, par la raison qu'il est plus facile de remplacer des juges, qu'il ne l'est de suppléer des témoins. Nous ne croyons donc pas que l'on doive admettre en principe que les causes de récusation soient, de plein droit, des causes de reproche, et nous pensons que l'on doit appliquer au cas où l'on opposerait contre un témoin celles des causes qui donneraient lieu à récuser un juge, mais qui ne seraient pas mentionnées en l'art. 283, ce que nous avons dit sur la Quest. 1101.

dans l'art. 378 sont-elles les seules qui puissent être proposées?

Cette question divise les auteurs; les uns, et entre autres Lepage, Quest., p. 251, et Demiau, p. 279, estiment que la justice exige que l'on admette les causes de récusation autres que celles qui sont détaillées dans le Code, toutes les fois qu'elles seraient de nature à faire concevoir de justes craintes de partialité; d'autres, comme Thomine, no 425, et Hautefeuille, p. 200, pensent, au contraire, qu'on ne peut aller au delà des dispositions de l'article 378. Il n'y a, disent-ils, rien d'arbitraire en matière de récusation de juges; la loi désigne tous les motifs et les SEULS motifs de récusation.

Cette dernière opinion a été consacrée par un arrêt de la cour d'Agen du 28 août 1809 (Dalloz, t. 23, p. 347; Sirey, t. 10, p. 505), et nous paraît conforme à l'esprit du législateur, qui n'a énuméré les causes de récusation qu'afin de prévenir des inculpations vagues et injurieuses à la magistrature; inculpations dont la décision serait abandonnée à l'arbitraire, et qui d'ailleurs pourraient, en obligeant le juge à se récuser lui-même par délicatesse, produire en définitive l'inconvénient de mettre au pou1364. Les causes de récusation indiquées voir d'une partie d'écarter, par des allégations

[Voy. aussi nos observations sur la Question 1101.]

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