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par un acte d'appel, attendu qu'il s'agissait là du désistement d'un acte isolé de procédure et non pas du désistement de l'instance qui, seul, est soumis aux formalités de l'article 402.

Au reste, l'on sent que, si un pareil désistement n'avait pour but que de proroger un délai que l'acte retiré avait commencé à faire courir, la partie adverse pourrait s'y opposer, si son intérêt le commandait. (Voy. Question 1459 bis, et un arrêt de la cour de Limoges, du 22 juin 1822, qui le décide ainsi, à l'égard de la signification du jugement qui ordonne une enquête.)]

1456. Le désistement doit-il, à peine de nullité, être signé des parties ou de leurs mandataires spéciaux? [ Alors même qu'il n'est pas fait en la forme de l'article 402?]

Nous remarquerons d'abord que le Code ne dit point que le mandataire sera muni d'un pouvoir spécial; mais il paraît, dit Berriat, h. t., | note 6, qu'à raison de l'importance de l'acte, telle a été l'intention du législateur; c'est aussi ce que supposent tous les auteurs.

Il est bien certain que l'avoué, muni d'un semblable pouvoir, peut signer le désistement, sous la double qualité de mandataire et d'avoué, mais s'il ne le signe que sous la dernière, et en vertu du pouvoir général qui lui est donné pour diriger la procédure, nous croirions que la nullité du désistement pourrait être prononcée par le motif que la loi, ayant exigé que le désistement fût signifié par la partie ou par son mandataire, a nécessairement parlé d'un mandataire ad hoc; autrement elle eût déclaré qu'à défaut de signature de la partie, celle de l'avoué suffirait, ou plutôt elle n'aurait pas exigé la première.

Nous concluons de là que le désistement qui n'est pas signé par la partie, ou par son mandataire, fondé de pouvoir spécial, est nul, parce que cette signature est une condition essentielle de la validité de l'acte. Telle est aussi l'opinion de Pigeau, t. 1, p. 316, no 448, et de Berriat, h. t., note 7. (V. la Quest. 1350.) Hautefeuille, p. 212, parait d'un sentiment contraire.

Il y aurait également nullité si l'avoué, pour suppléer au défaut de signature, avait mentionné dans l'acte des causes qui empêcheraient la partie de signer; il n'a aucune qualité pour suppléer au defaut de cette signature: en un mot, elle est indispensable, si elle n'est suppléée par celle d'un mandataire spécial. (V. Quest. de Lepage, p. 264.) (1).

(1) Mais on pourrait, par un acte subséquent, réparer l'omission de la signature. (Aix, 3 mars, 1807; Sirey, t. 14, p. 458.)

[Pigeau, Proc. civ., liv. II, 2° part., tit. V, chap. 5, n° 3, Favard, t. 2, p. 80, no 3, Dalloz, t. 9, p. 174, no 1 et 2, Thomine, no 450, et Boitard, t. 2, p. 45, partagent, ainsi que nous, l'opinion de Carré sur la nécessité de la signature des parties, ou de la spécialité du mandat en faveur de celui qui signerait pour elles. Mais c'est à tort que Pigeau et Favard veulent que ce mandat soit donné en forme authentique. Pour le désaveu, la loi l'a bien exige, à cause des conséquences; mais ce motif n'existe plus pour le désistement.

Un grand nombre d'arrèis ont prononcé la nullité d'actes de désistement non signés de 25 mai 1810 (Sirey, t. 14, p. 550), Amiens, la partie. Ce sont les arrêts des cours de Brux., 2 juin 1821 (Dalloz, t. 9, p. 178), Lyon, 14 déc. 1810 (Dalloz, t. 9, p. 187), Besançon, 17 fév. 1820 (Dalloz, t. 9, p. 174), et Lyon, 31 juin 1831. La cour de Besançon a même annulé, le 20 fév. 1807, celui qu'avait signé l'avoué parce qu'il ne représentait pas la procuration spéciale donnée à cet effet par la partie. Le mandat ad lites n'est pas en effet suffisant pour lui octroyer le pouvoir de signer un désistement, pas plus qu'il ne le serait d'après la cour de cass., 28 juillet 1824 (Sirey, t. 24, p. 331), pour lui donner qualité de recevoir, au nom de la partie qui aurait succombé, le désistement du bénéfice du jugement, de la part de celle qui aurait obtenu gain de cause.

Mais, comme la nullité résultant de cette sorte d'irrégularité n'est pas d'ordre public, les parties peuvent renoncer à la proposer et elles sont censées l'avoir fait par leur silence, en sorte qu'elles seraient irrecevables à s'en prévaloir en appel, après l'avoir négligée en première instance. (Rennes, 24 déc. 1829).

Un seul arrêt, émané de la cour d'Orléans, le 2 mai 1823 (Dalloz, t. 1, p. 110), a refusé de voir la nullité dans la disposition de l'article 402 du Code de proc. civ., mais il a été rendu à l'occasion d'un acte d'acquiescement, et l'on peut bien soutenir que les règles du désistement ne sont pas communes à l'acquiescement. Il n'y a donc aucune conséquence à tirer de cet arrêt pour la question actuelle.

Si la nécessité de la signature des parties ou de leurs mandataires spéciaux est universellement admise pour l'acte du désistement qui a lieu dans la forme de l'art. 402, il n'y a pas semblable unanimité pour le cas où une autre forme a été employée.

La cour de Toulouse a décidé, le 3 fév. 1832 (Sirey, t. 32, p. 601) que, lorsque le désistement est signifié par acte d'huissier, il est valable quoique non signé.

La signature, dit-on, dans l'intérêt de ce système, n'est exigée par l'art. 402 que pour la forme d'acte dont il s'occupe; or, cette forme est facultative; toute autre peut être adoptée,

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effet, il n'y a que la copie qui tienne lieu de titre à la partie à laquelle le désistement est signifié elle doit donc être revêtue de la formalité exigée pour la validité de cel acte.

Il est donc indispensable que la copie soit signée (Berriat, h. t., note 7), et, si elle ne l'était pas, on ne pourrait dire que la signature sur l'original fút suffisante. C'est ce qui a été

et rien n'annonce que la signature soit également une condition essentielle de celle-ci. Il était naturel de l'exiger lorsque le désistement avait lieu par acte d'avoué, parce que l'avoué remplissait en cela un ministère directement | opposé à la nature de ses fonctions : il n'y a plus lieu de le faire, lorsqu'on se sert de celui d'un huissier, qui est mandataire forcé pour toutes espèces d'actes. Mais ce raisonnement, qui sans doute n'aurait pas entraîné la déci-jugé par arrêt de la cour de Brux. du 23 mai sion de la cour de Toulouse, s'il ne se fût trouvé, dans l'espèce, une ratification tacite du désistement non signé, ne peut balancer l'argument qui se tire pour l'opinion contraire du principe que nul autre que la partie ne peut renoncer à ses droits ou à ses prétentions, s'il n'y est spécialement autorisé. Et, d'après l'art. 352, C. proc., n'est-il pas évident que T'huissier qui signifierait un désistement par acte extrajudiciaire s'exposerait à un désaveu, s'il ne rapportait la signature du désistant ou son mandat spécial?

Nous pensons donc que cette signature ou ce mandat sont nécessaires au désistement, lors même qu'il n'a pas lieu dans la forme de l'art. 402. Telle parait être aussi, quoiqu'ils ne s'en expriment pas d'une manière bien ex- | plicite, l'opinion des auteurs cités plus haut, puisqu'ils n'exemptent de cette nécessité que le désistement fait et reçu verbalement à la barre du tribunal, parce qu'alors l'attestation des juges supplée à l'authenticité de la signature pour constater le consentement des parties. (Voir la Quest. 1458.) Telle est enfin celle de la cour d'Agen qui, par arrêt du 28 janv. 1855 (Sirey, t. 53, p. 149), a décidé que le désistement d'un appel fait par acte d'huissier doit, comme s'il était fait par acte d'avoué, ètre signé de l'appelant.

L'abandon d'une partie de ses prétentions, par l'acquiescement que donne le demandeur aux offres de son adversaire, ou par une simple modification de conclusions qu'autorise l'art. 55 du décret du 30 mars 1808, n'est pas un désistement dans le sens de notre art. 402, et la cour de Bordeaux, le 14 juin 1858, et celle de Poitiers, le 5 avril 1857, ont jugé que les dispositions du Code de procedure ne lui étaient pas applicables, et qu'il pouvait être valablement contenu dans un acte d'avoué non signé de la partie. Il y a une décision analogue dans l'arrêt de la cour de Lyon du 30 juin 1831.] 1457. Faut-il que le désistement soit signé tant sur l'original que sur la copie? La signature, dit Pigeau, t. 1, p. 316, no 448, doit être apposée principalement sur la copie signifiée à l'adversaire, laquelle forme, en ses mains, la preuve du désistement; mais s'il est à propos, ajoute-t-il, que l'avoué fasse également signer l'original, cette dernière signature n'est pas rigoureusement nécessaire. En

1810 (Sirey, t. 14, p. 350). Il en est d'ailleurs une raison decisive; c'est que si l'original seul était signé, on pourrait, en le supprimant, ôter à l'adversaire le moyen de prouver que le désistement lui a été valablement proposé.

Mais on sent que cet inconvénient n'est plus à craindre si la copie réfère la signature apposée sur l'original; aussi pensons-nous qu'en cette circonstance, on ne pourrait arguer le désistement de nullité, sans que la partie intéressée s'inscrivit en faux.

[ Favard, t. 2, p. 80, no 5, et Dalloz, t. 9, p. 175, no 4, approuvent toutes ces solutions. Nous nous y rangeons également, avec celle seule restriction que la signature nous paraît aussi essentielle sur l'original, dans l'intérêt du désistant, qu'elle l'est sur la copie, dans l'intérêt de sa partie adverse. Si celle-ci, en effet, a besoin d'un titre au moyen duquel elle puisse constater l'existence du désistement et l'opposer au demandeur qui viendrait à s'en repentir et à le nier, le demandeur, de son côté, peut être dans la nécessité de l'opposer au défendeur, qui, voulant continuer l'instance, se bornerait à supprimer la copie qu'il a reçue. On sent qu'alors le désistant devant avoir en sa possession un original en règle, on ne pourrait pas objecter qu'il serait loisible à celui qui se désiste de mettre l'original en règle dès qu'il pourrait en avoir besoin, parce que la signification d'un acte n'est que la reproduction de cet acte, et que toute expression ou forme nouvelle lui ôterait le caractère spécial de copie signifiée et le transformerait en original in parte qui, ce qui ne peut pas être. C'est la partie elle-mème ou son mandataire qui sont chargés de reproduire sur la copie ce qui est (quant à la signification) sur l'original; en cette circonstance, ils viennent augmenter l'autorité de l'officier ministériel. Soutiendrait-on qu'un acte signifié n'a besoin d'être signé par un huissier que sur la copie? Toutes les règles relatives à la conformité de la copie et de l'o

riginal reçoivent ici leur application.

En fait, la partie qui s'est désistée pourrait être dans l'impossibilité de régulariser son désistement, ou parce qu'elle aurait perdu l'usage de l'écriture par un accident quelconque, ou parce qu'elle aurait cédé tous ses droits; et enfin, si elle était morte, ses héritiers n'auraient à faire valoir qu'un acte imparfait.

Il y a plus, nous pensons que l'acte du dé- | sistement, une fois signifié, ne pourrait plus ètre revêtu de la signature de la partie, sans qu'il y eût un faux commis par elle.

Ce serait là une addition à un acte consommé.]

1458. Le désistement et l'acceptation peurent-ils être faits de toute autre manière que celle indiquée par l'art. 402?

L'affirmative paraît résulter de ce que l'article est conçu en termes facultatifs : le désistement, comme l'acceptation PEUT, etc., et non doit, etc.; il peut dont être fait de différentes manières, par exemple, à l'audience, en présence du juge qui en peut décerner acte; mais il faut que le demandeur et le défendeur se trouvent à l'audience en personne ou par des mandataires: alors leur présence est constatée par le juge, et sans qu'il soit besoin de signa

tures.

Le contrat judiciaire est formé, parce qu'aucune loi n'exigeant que les parties ou leurs fondés de pouvoir signent leurs dires ni les arrangements qu'ils font à l'audience, l'intervention du tribunal, qui atteste et consacre ces arrangements, supplée éminemment les signatures (1).

[Pigeau, Proc. civ., liv. II, part. 2, tit. V, ch. 5, sect. 1re, art. 3, 3o, Favard, t. 2, p. 79, n° 2, Dalloz, t. 9, p. 175, no 3 et 5, Thomine, no 450, et Boitard, t. 2, p. 45, enseignent, avec raison, la même doctrine. (Voy. infrà, notre Quest. 1465.)

La forme indiquée par Carré a été suivie par la cour de Limoges, le 17 juillet 1816 (Dalloz, t. 9, p. 177).

Est également valable le désistement consigné dans un procès-verbal dressé par un juge de paix incompétent, pourvu qu'il soit signé des parties (Turin, 25 juin 1807);

Ou dans un exploit d'offres réelles faites pour obeir aux condamnations prononcées par le jugement de première instance (Nimes, 27 mars 1817; Dalloz, t. 9, p. 190);

Ou par acte d'huissier (Agen, 28 janv. 1835, Sirey, t. 33, p. 149, Besançon, 8 mai 1816, et autres arrêts cités sur la Quest. 1456);

Surtout en matière commerciale où la signification entre avoués ne peut avoir lieu (Paris, 25 mars 1814; Dalloz, t. 2, p. 512);

Ou par acte notarié signifié à la partie adverse; la mainlevée d'une saisie-arrêt, ainsi donnée et notifiée, emporte désistement de l'instance en validité. (Amiens, 11 août 1826.) Il ne résulte pas de l'arrêt de la cour de

Montpellier du 51 juillet 1831, que le désistement doive, pour être valable, être fait par acte d'avoué à avoué. L'art. 402 étant facultatif, il était impossible d'y voir des dispositions limitatives; mais la cour a jugé que la signification à l'avoué était nécessaire pour empêcher la procédure de continuer. C'est une question de bonne foi, qui consiste à décider si la partie au domicile de laquelle le désistement a été signifié, a eu le temps d'en avertir son avoué.

Mais il est sensible que, signifié à l'avoué de première instance, le désistement de l'appel n'aurait aucune valeur, puisque cet avoué n'est plus rien dans la cause. (Nimes, 20 mars 1812.)

Le désistement d'ailleurs ne se présume pas; il faut qu'il soit clairement exprimé. On ne pourrait donc voir un désistement tacite d'une instance en séparation de corps dans l'introduction simultanée d'une instance en séparation de biens; ainsi jugé implicitement dans une espèce où il s'agissait d'un divorce, par arrêt de la cour de Paris du 1er messidor an XII (Sirey, t. 4, p. 161). Il n'y aurait pas non plus désistement d'un appel incident dans l'obtention d'un arrêt par défaut pur et simple contre l'appelant principal. (Rennes, 26 juin 1810.)

On ne pourrait pas non plus faire résulter un désistement de la simple intention manifestée, ou du conseil donné par lettre de se désister (Besançon, 12 mars 1807, et Bourges, 28 fév. 1829);

Ni soutenir qu'une partie s'est désistée de l'assignation donnée à sa requête, lorsqu'elle donne surabondamment une nouvelle assignation en maintenant la validité de la première. (Cass., 27 avril 1815; Sirey, t. 13, p. 387.)

Toutefois, si une partie formait une demande incompatible avec celle qu'elle aurait dejà intentée, par exemple, si un failli, après avoir actionné ses créanciers en homologation du concordat, formait plus tard une demande en cession de biens, il serait bien censé se désister de la première, comme l'a reconnu la cour de Paris, le 22 janv. 1808 (Sirey, t. 8, p. 57).]

1459. Quand le désistement a été fait par acte d'avoué à avoué, le défendeur qui l'accepte peut-il, au lieu de signifier son acceptation de la même manière, demander qu'il lui soit décerné acte à l'audience?

Deux arrêts de la cour de Brux., l'un du 20 avril 1809 (Sirey, t. 12, p. 358), l'autre du 23 mai 1810 (Sirey, t. 14, p. 550), un arrêt de

(1) Telle est la solution qui nous paraît dériver d'un arrêt de la cour de cass. du 3 oct.1808 (Dalloz, t. 1, p.107; Sirey, t. 8, p. 558), et qu'un arrêt du 12 mai 1813 (Sirey, t. 14, p. 277), donne en termes formels, en pro

nonçant que le désistement d'une saisie immobilière est valable, quoiqu'il n'ait été fait qu'à la barre, et en l'absence du saisi, si toutefois celui-ci a été légalement appelé. (Voy. sur l'art. 725.)

la cour de Rennes du 31 janvier 1811, ont, résolu cette question pour l'affirmative, en se fondant, 1° sur les termes facultatifs de l'article 402; 2° sur ce qu'il peut être de l'intérêt de celui à qui le désistement est fait d'en obtenir un dont la minute repose dans un dépôt public, etc. (Voy. un autre arrêt semblable, rendu par la cour de Pau, le 22 avril 1809.)

Mais Hautefeuille, p. 212, est d'un avis contraire à celui que ces arrêts ont consacré. Ce serait, selon lui, faire des frais frustratoires, que de plaider ou d'obtenir un jugement dans l'espèce de la question que nous venons de poser, soit qu'il s'agît du désistement d'une | demande, soit qu'il s'agît du désistement d'un appel. Coffinières paraît adopter cette dernière opinion. (Voy. J. Av., t. 2, p. 255 et 236.)

Il est, à notre avis, une raison tranchante pour faire prévaloir la décision des arrêts que nous venons de citer; c'est, en effet, que, si la partie ne pouvait à l'audience obtenir acte de l'acceptation de son désistement, qui ne serait donné que par un simple acte d'avoué à avoué, la copie pourrait se perdre, et avec elle la preuve du désistement. (Voy. la Quest. 1467.) [Cette raison ne nous paraît pas suffisante pour légitimer le surcroît de frais que nécessiterait l'obtention d'un jugement. Que celui qui voudra augmenter ainsi sa sécurité poursuive cette obtention, mais que ce soit à ses dépens. | Le désistant ne peut être obligé de le lui fournir; car la copie du désistement qui lui a été notifiée, lui offre assez de garanties.

Un désistement équivaut à des offres, et certainement celui à qui elles sont faites ne pourrait exiger un acte solennel de la reconnais sance de son droit; il s'exposerait à une condamnation de dépens qui serait de toute justice.

D'ailleurs, l'acte qui contient le désistement ne doit-il pas être enregistré? il sera donc dans un dépôt public. La partie qui le reçoit ne peut-elle pas elle-même le déposer chez un notaire, ce qui se fait tous les jours; et pourrat-elle alléguer ensuite qu'elle n'a qu'un titre fragile et perdable?

A notre avis, à quelque phase de la procédure que ce soit, sécurité pour le plaideur qui déclare s'arrêter; à l'époque où il manifestera sa volonté par un acte signé de lui et remis à son adversaire, il connaîtra les frais faits et il ne devra pas en supporter d'autres. Il faut, le plus possible, faciliter les transactions sur procès. C'est dans ce sens que le désistement a été introduit dans le Code, comme l'attestent les observations du tribunat sur notre art. 402. (Locré, t. 9, p. 245, no 207.)

Notre opinion, enseignée par Pigeau, Proc.

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civ., liv. II, 2o part., tit. V, chap. 3, sect. 1", art. 3, 4o, Comm., t. 1, p. 693, n'est point celle de Favard, t. 2, p. 80, no 4. Dalloz, t. 9, p. 175, nos 6, 7 et 8, semble hésiter entre les deux.

Celle que nous combattons est, il faut l'avouer, adoptée par une nombreuse et presque unanime jurisprudence, qui, indépendamment des arrêts cités par Carré, se compose de ceux des cours de Rennes, 20 nov. 1816, Amiens, 2 juin 1821 (Dalloz, t. 9, p. 178), Limoges, 17 juillet 1816 (Dalloz, t. 9, p. 178), Caen, 19 fév. 1823, Rennes, 5 avril 1824, Riom, 7 juillet 1825 (Sirey, t. 26, p. 112), Bruxelles, 27 mars 1828 (J. de B., t. 1er de 1828, p. 253), Nîmes, 25 juin 1829, Nancy, 15 nov. 1831 (Sirey, t. 55, p. 134), et Toulouse, 30 janv. 1830 (Sirey, t. 30, p. 354), 26 nov. 1834, 19 fév. et 29 nov. 1836.

Quoique, à cette jurisprudence, on ne puisse opposer qu'un seul arrêt de la cour de Grenoble du 7 fév. 1834 (1), nous avons cru devoir persister dans l'opinion dont nous venons d'exposer le motif.

Le 25 janvier 1836, la cour de Rennes a adopté un terme moyen, en décidant que les tribunaux peuvent, suivant les circonstances de la cause, mettre à la charge du demandeur ou du défendeur, les frais exposés jusqu'au jugement qui, sur la demande de ce dernier, donne acte du désistement.

Il est certain, au reste, que le désistant en serait passible' s'il n'avait signifié son désistement qu'au moment où les juges allaient prononcer, de telle sorte que son adversaire n'eût pas eu le temps de l'accepter par un simple acte. (Bordeaux, 18 mars 1850; Sirey, t. 50, p. 371.) Il pourrait aussi être condamné à des dommages-intérêts si son désistement ne réparait pas le dommage que sa demande avait causé. (Cass., 15 nov. 1835.)]

[1459 bis. Le désistement n'est-il valable que par l'acceptation volontaire du défendeur, et, s'il la refuse, n'existe-t-il pas un moyen d'y suppléer?

Il paraît surprenant, au premier abord, que le consentement du défendeur soit exigé pour la validité d'un désistement; ne dependait-il pas originairement du demandeur d'intenter ou non le procès qui pend à juger? Ne doit-il pas dépendre de lui de le continuer ou de le faire cesser? De quoi pourra se plaindre le défendeur si, sans sa participation, on met un terme aux poursuites dirigées contre lui? At-il le droit de prétendre que l'on poursuive l'attaque? Cette conduite serait-elle raisonnable et peut-on supposer qu'il la tienne?

(1) [Carré, dans une de ses notes manuscrites, citait sans indication de recueil un arrêt de la 3e chambre de

la cour de Rennes, du 13 mai 1827, jugeant comme celui de Grenoble.]

Mais, en y regardant de plus près, on voit | p. 157) (1), et qu'enseignent Favard, t. 2, naitre l'intérêt éventuel du défendeur à s'op- p. 80, no 5, et Dalloz, t. 9, p. 182, no 7. Sans poser au désistement. entrer jusque dans ces détails, mais aussi sans les infirmer, Pigeau, Proc. civ., liv. II, part.2, tit. V, chap. 5. sect. 1re, art. 3, 3o, et Comm., t. 1, p. 691, Thomine, no 451, et Boitard, t. 2, p. 43 et suiv., exposent avec netteté les motifs que le défendeur peut avoir de refuser, et les cas où il ne serait pas admis à le faire.

Rappelons d'abord que, comme nous l'avons dit sur la Quest. 1451 bis, le désistement n'anéantit que la procédure et laisse subsister l'action.

Si donc il n'était fait que dans le but frauduleux d'éviter un jugement défavorable dont on est menacé, pour s'en ménager plus tard, au moyen d'une nouvelle instance, un plus avantageux, ou s'il tendait à soustraire la cause aux effets d'une déchéance légalement encourue, par exemple en matière d'enquête; s'il n'était pas, en un mot, légitimé par des contestations, ou du moins par des doutes fondés, | soit sur la régularité de l'exploit introductif d'instance, soit sur la compétence du tribunal saisi, soit sur la recevabilité actuelle de l'action; si, d'un autre côté, le défendeur a formé quelque demande incidente ou reconventionnelle qu'il veuille faire juger; dans tous ces cas il a intérêt, et souvent un intérêt puissant, à ne point accepter le perfide désistement qu'on lui offre; et, puisqu'il y a intérêt, il faut qu'il en ait le droit.

Le désistement ne devait donc pas dépendre uniquement de la volonté du demandeur.

Mais aussi il ne fallait pas que, le défendeur, à son tour, eût le pouvoir d'y opposer un veto absolu et capricieux, en exigeant son acceptation; l'art. 403 n'a pas entendu en faire une condition sine quâ non. En attribuant à cette acceptation la vertu de faire produire au désistement tous ses effets, et de plein droit, il n'a pas entendu le mettre au nombre des contrats qui ne peuvent exister que par le concours simultané des parties. Cette disposition signifie seulement que, lorsque ce concours a lieu, il n'est pas besoin de recourir à la justice pour le faire sanctionner.

Le refus du défendeur peut n'être pas légitime (voy. notre Quest. 1459); il n'est pas permis alors au demandeur de passer outre, mais il peut s'adresser au tribunal saisi de la cause, lequel, juge naturel de toutes les contestations qui surviennent entre les parties, prononcera sur le désistement non accepté et le déclarera valable ou sans valeur, sans pouvoir, avant cette décision, s'occuper de la nouvelle instance que le désistant aurait substituée à la première. (Bordeaux, 18 mars 1829.)

Telle est la doctrine parfaitement juste qu'à sanctionnée la cour suprême dans son arrêt du 12 déc. 1820 (Dalloz, t. 9, p. 191 ; Sirey, t. 21,

Appliquant les principes que nous venons d'exposer et usant du droit qu'elles ont de juger en fait la légitimité d'un désistement, les cours ont rendu à cet égard diverses décisions.

Ainsi la cour de Douai, le 26 fév. 1825, a déclaré que le désistement ne doit pas être accepté par le juge, lorsqu'il est dénué de motifs légitimes et qu'il paraît n'être formé que dans l'intention de se soustraire au jugement en conservant l'action; et celle de Bordeaux, le 9 juin 1837, que le demandeur ne peut être admis à se désister, sous prétexte d'une incompétence purement personnelle, lorsque le défendeur renonce à s'en prévaloir. Pigeau, Comm., t. 1, p. 692, exprime la même opinion; il fait observer qu'il n'en serait pas de même s'il s'agissait d'une incompétence matérielle, parce que la renonciation du défendeur ne mettrait pas son adversaire à l'abri d'un rejet prononcé d'office par le tribunal.

Le motif de la cour de Bordeaux ne nous paraît pas suffisant, car, en matière d'incompétence personnelle, le tribunal saisi n'est pas forcé de juger. (V. Quest. 721.) Mais il est vrai de dire que si, sur un désistement, le tribunal prononce un rejet, c'est qu'il consent à juger, et alors le désistement est sans intérêt, tandis que, s'il s'agit d'une incompétence ratione materiæ, le juge peut toujours et doit même renvoyer les parties devant qui de droit.

L'administration qui a obtenu et exécuté un jugement expropriant un individu pour cause d'utilité publique, ne peut se désister de la demande par laquelle elle a provoqué cette décision. (Bordeaux, 16 janv. 1832.)

Le 19 mars 1812 (Dalloz, t. 9, p. 197; Sirey, t. 12, p. 247), la cour de cass., et, le 21 novembre 1818, la cour de Rennes, ont aussi déclaré irrecevable le désistement d'une instance, donné sous prétexte de litispendance devant un autre tribunal postérieurement saisi; on sait en effet que, dans ce cas, c'est le tribunal le premier saisi qui doit garder la connaissance de l'affaire (2). (Voy. la Quest. 726.) Le 22 juin 1835, la cour de Liége a jugé différem

(1) [L'arrêt de la cour d'Angers du 8 déc. 1818, contre lequel était dirigé le pourvoi rejeté par celui que nous citons, semblait poser en principe que les tribunaux ne pouvaient refuser de donner acte d'un désistement non volontairement accepté, que lorsqu'il était

nul dans la forme. Ce système, qui aurait l'inconvénient de mettre le désistement à la disposition du demandeur seul, n'a pas été, comme on voit, adopté par la cour de cassation.]

(2) [Lorsque après s'être désisté, mais avant l'accep

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