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appeler incidemment; ceux de la cour de Turin des 9 fév. et 19 mars 1808 (Dalloz, t. 2. p. 167), et de la cour de Poitiers, 19 août 1831 (inédit), l'ont expressément jugé. Enfin les auteurs, principalement Poncet, no 324, Berriat, h. t., note 57, Pigeau, Comm., t. 2, p. 16, Thomine, no 496, Boitard, t. 3, sur l'art. 443, bien loin d'élever aucun doute, expriment cette vérité transitoirement comme un axiome à l'abri de toute controverse. Mais il faut avoir le soin de renfermer cette solution dans ses véritables limites.

C'est ici, c'est en matière de délai que le texte de l'art. 445 doit nous servir de règle: nous avons bien pu ( Quest. 1575) décider que l'appel incident par acte d'avoué ou par conclusions verbales est permis, non-seulement à l'intimé contre l'appelant principal, mais encore à celui-ci contre l'intimé, à l'intimé contre un autre, non-seulement contre le mème jugement qui est l'objet de l'appel principal, mais encore contre d'autres jugements; et cela sans nous préoccuper du silence que l'art. 445 garde sur ces derniers cas; car ce n'était pas à cet article que nous empruntions la base de notre solution, sa disposition n'étant pas destinée à introduire l'appel incident, mais uniquement à le soustraire dans certains cas à l'observation du délai.

Lorsque nous demandions: Qui peut former appel incident? Contre quelles sentences? Dans quelles formes? C'étaient les art. 537 et 470 qui nous fournissaient les réponses.

Mais quand la question est ainsi posée : Dans quel délai cet appel incident doit-il étre relevé? Nous n'avons plus à consulter que l'art. 445.

Or, cet article limite, d'une manière générale, au délai de trois mois à compter des circonstances qu'il indique, la faculté de tout appel. Il admet une seule exception dans un cas soigneusement déterminé, savoir : en faveur de l'intimé contre l'appelant principal et à l'égard du même jugement (1).

Ainsi, dans tous les autres cas, l'appel incident, que nous déclarons admissible (Question 1573), ne le sera néanmoins que pendant les trois mois qui sont donnés pour l'appel principal, et sera soumis aux mèmes fins de non-recevoir, acquiescement ou autres, que l'appel ordinaire.

C'est aussi l'avis de Poncet, no 325, de Pigeau, Pr.civ., liv. II. part. 4, tit. ler, chap. 1er, sect. 3, no 5 3o, et de Merlin, Quest., v° Appel incident, § X.]

peler incidemment, lorsqu'il a commencé à exécuter le jugement qui est l'objet de l'appel principal? [ En général, quand peut-on opposer l'acquiescement comme fin de non-recevoir à l'appel incident de l'intime?]

Aussi longtemps que la partie condamnée n'a pas manifesté l'intention d'appeler du jugement qui lui est signifié, celui à requête duquel cette signification a été faite a dû croire qu'elle acquiescerait au jugement, et il a été fondé à en poursuivre l'exécution. Mais dès que son adversaire interjette appel, qu'il remet ainsi en question tout ce qui a été jugé, qu'il change la position et l'intérêt de son adversaire, la justice exige que celui-ci ait le droit d'appeler de quelques chefs qui lui seraient préjudiciables, et auxquels il n'aurait acquiescé que dans la confiance, que l'autre partie eût elle-mème acquiescé aux condamnations prononcées contre elle. On peut donc interjeter incidemment appel, nonobstant un commencement d'exécution du jugement, c'est ce qui nous paraît résulter clairement de l'exposé des motifs du titre de l'appel, et telle est aussi l'opinion que soutient Lepage, Questions, p. 505 et 304.

[ Cette question et la suivante peuvent se réduire à celle-ci plus générale : Quand peuton opposer l'acquiescement comme fin de non-recevoir à l'appel incident de l'intime?

Il est certain d'abord que l'appel incident n'est pas plus que l'appel principal à l'abri d'une semblable fin de non-recevoir. L'artible 443, en le permettant en tout état de cause à l'intimé, n'a pas entendu le relever des déchéances qu'il aurait pu encourir par toute espèce d'acquiescement. Car, encore une fois, cet article ne règle pas les conditions intrinsèques de la faculté d'appel, mais seulement le délai pendant lequel cette faculté peut être exercée.

C'est donc la nature même de l'appel incident, son but et son motif qu'il faut consulter pour lui faire une juste application des règles de l'acquiescement.

Il est néanmoins un genre d'acquiescement que notre art. 445 déclare sans effet quant à l'appel incident de l'intimé, c'est celui qui résulterait (voy. la Quest, 1564 ) de la signification qu'il aurait faite du jugement sans protestation ni réserves: ainsi nulle difficulté sur ce premier point que la cour de cassation a néanmoins eu l'occasion de décider trois fois in terminis, les 23 fruct. an xII (Dalloz,

1576. L'intimé conserve-t-il la faculté d'ap. t. 2, p. 149; Sirey, t. 7, p. 764), 12 fév. 1806

(1) [A l'égard du même jugement : à l'égard d'un autre jugement, le motif de la paix rompue ne serait pas applicable il n'a de portée que lorsqu'il s'agit d'une CARRÉ, PROCÉDURE civile. — TOME III.

seule et même contestation. (V. aussi notre précision de la Quest. 1577 bis.]

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(Dalloz, t. 2, p. 168; Sirey, t. 6. p. 917), et 10 mai 1820 (Sirey, t. 20. p. 458), et la cour de Rennes, le 8 mars 1814 (Dalloz, t. 21, p. 466; Sirey, t. 14, p. 278).

Quant aux autres sortes d'acquiescement, voici les règles que la raison suggère.

vants cass., 11 fruct. an IX, 6 frim. an XIII, 51 oct. 1809; Brux., 5 fév. 1813; Rennes, 3 août 1819; Brux., 22 juin 1820 (J. de B., t. 2 de 1820, p. 200), 10 oct. 1823 (ib., t. 2 de 1823, p. 502), 15 mai 1822, 3 fév. 1825 (rapportés par Merlin, Quest., t. 2, p. 104); Amiens, 30 juin 1824; Poitiers, 27 juill. 1824; Agen, 5 août 1824; Aix, 15 janv. 1826; Bor

ges, 7 mai 1831. A cette imposante jurisprudence se joint l'enseignement de la doctrine. (Voy. Pigeau, Comm., t. 2, p. 16, Merlin, Quest., vo Appel incident, § 1er, Favard, t. 1, p. 174, no 13, Thomine, no 497, Boitard, t. 3, sur l'art. 443, et Talandier, no 409.)

S'il est antérieur à l'appel principal, nul acquiescement, soit exprès, soit tacite, soit résultant de la signification ou même de l'exécu-deaux, 28 juill. 1827 (Sirey, t. 27, p. 176); Bourtion du jugement (Brux., 12 mars 1842; J. de B., 1842, p. 110), ne fait obstacle à l'appel in- | cident; car il est toujours censé conditionnel et valable seulement pour le cas où l'adversaire n'appellera point. Mais si celui-ci n'accepte pas les propositions de paix qui lui sont faites, tout est dès lors remis en question et l'intimé autorisé à retirer ses pacifiques avances. Tel est l'avis de Pigeau, Comm., t. 2, p. 16, de Merlin, Quest., vo Appel incident, § 1er, de Thomine, no 497, et de Talandier, no 409, consacré par les arrêts de la cour de cass., 21 août 1811 (Dalloz, t. 2, p. 153; Sirey, t. 21, p. 263), et des cours d'Orléans, 6 fév.1813 (1), de Metz, 26 mars 1821 (Sirey, 1. 23, p. 126), Amiens, 11 déc. 1821 (Dalloz, t. 1, p. 402; Sirey, t. 22. p. 503); Bordeaux, 15 fév. 1828, et 19 juill. 1831; cass., 9 avril 1833. On s'étonne, dit avec raison Talandier, que la cour de Turin ait méconnu cette vérité dans son arrêt du 19 mai 1813 ( Dalloz, t. 28, p. 198). | Si, au contraire, l'acquiescement de l'intimé est postérieur à l'appel principal, il ne peut plus être regardé comme conditionnel, il est bien plutôt une renonciation au droit, déjà ouvert à cette époque, de relever appel incident. C'est la conséquence inévitable de la précédente solution; aussi est-elle enseignée par les mêmes auteurs et confirmée par la jurisprudence im-il s'agit, des réserves ne peuvent guère avoir posante que nous allons bientôt analyser.

Il est un genre d'acquiescement qui, ne pouvant avoir lieu qu'après l'appel principal, rentre, à ce titre, dans la seconde partie de notre division et devient par conséquent un obstacle à l'appel incident; ce sont les conclusions de l'intimé tendant à la confirmation pure et simple du jugement. C'est à ce cas particulier qu'ont trait tous les arrêts rendus sur la matière; mais ils font certaines précisions qu'il est bon d'examiner.

L'arrêt de la cour de Toulouse du 23 nov. 1824 (Dalloz, t. 10, p. 97; Sirey, t. 25, p. 415) est le seul, en France, qui ait jugé, d'une manière générale, qu'après avoir conclu purement et simplement, lors de la position des qualités, à la confirmation du jugement, l'intimé pouvait encore, par la suite, en interjeter appel incident (2). Mais le principe contraire a été reconnu et consacré par les arrêts sui

(1) [* ., dans ce sens, Brux., 20 nov. 1817 ( Pasicrisie belge, à cette date). ]

Cependant il a été jugé que, tout en concluant à la confirmation pure et simple du jugement, l'intimé pouvait se mettre à l'abri de la fin de non-recevoir, s'il accompagnait ses conclusions de réserves suffisantes pour constater qu'il n'acquiesce au jugement qu'à condition que l'adversaire renoncera lui-même à son appel, mais que, dans le cas contraire, il se propose de l'attaquer à son tour. (Metz, 24 août 1813; cass., 26 déc. 1815, 26 août 1823, Dalloz, t. 18, p. 242, Sirey, t. 25, p. 31, 30 déc. 1824, Sirey, t. 25, p. 116, 15 juillet 1828, Sirey, t. 28, p. 165, 15 déc. 1830, Sirey, t. 32, p. 515, 17 avril 1833, Sirey, t. 53, p. 468.)

Mais tandis que la plupart de ces arrêts se contentent de réserves générales, celui de la cour d'Angers, du 25 fév. 1829, déclare de telles réserves insuffisantes et veut qu'elles comprennent spécialement celle d'interjeter incidemment appel. Sa décision nous paraît trop sévère; car, dans les circonstances dont

d'autre objet. La cour de Grenoble, plus facile, trouve que des réserves originairement faites dans la signification du jugement sont suffisantes pour conserver le droit d'appeler incidemment, alors même que, depuis l'appel principal, on aurait conclu à la confirmation (29 mai 1821).

Lorsque les conclusions à la confirmation du jugement n'ont été prises que pour obtenir un arrêt de défaut, nous pensons qu'elles ne peuvent pas, lors même qu'elles ne sont pas accompagnées de réserves, constituer une renonciation à l'appel incident pour le cas où l'appelant principal reviendrait par opposition; car d'un côté, tant que celui-ci ne se présente pas pour soutenir son appel, on peut croire que, par un retour à des idées de transaction, il accepte enfin celle que l'intimé lui avait proposée, et, dès lors, l'acquiescement reprend son caractère conditionnel; d'un autre côté,

(2) V., dans le même sens, Liége, 7 juillet 1824 et 13 août 1835 (J. de B., t. 2 de 1856, p. 48).]

n'avons-nous pas vu ( Quest. 1572) que, dans | le cas de défaut de l'appelant, l'intimé ne peut sur l'audience relever appel incident? Cette position particulière est une suffisante excuse de n'avoir pas relevé appel incident par exploit séparé. Enfin l'intime peut demander son renvoi par défaut-congé sans faire statuer sur le fond; autre considération qui doit faire regarder la sentence qui intervient comme laissant toutes choses entières.

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du jugement ne peut non plus être considéré comme un acquiescement aux autres chefs. (Brux., 5 nov. 1823; Rec. de Spruyt, 1824, l. 1, p. 258.)

1577. Mais si l'intimé conclut, sans réserves, à la confirmation du jugement dont est appel, peut-il ensuite en interjeter appel incident?

Par son appel, la partie adverse de l'intimé D'ailleurs, en admettant même que, par ses constitue ce dernier en demeure d'appeler inconclusions prises en défaut, l'intimé eût re- cidemment des conclusions qui, de la part de noncé à son appel incident, l'opposition de celui-ci, tendent purement et simplement à la l'adversaire ne lui en rendra-t-elle pas la confirmation du jugement, établissent donc faculté, de même qu'il serait relevé d'un ac- un acquiescement formel et absolu, qui le quiescement antérieur par le seul fait de l'ap- rend non recevable à appeler incidemment. pel principal? L'opposition fait tomber l'arrêt Ici l'on distingue l'acquiescement donné avant de défaut qui n'est plus qu'un acte d'instruc- l'appel du condamné, comme dans l'espèce de tion; et si, voyant que vous ne souteniez pas la précédente question, de l'acquiescement votre appel, j'ai renoncé à devenir appelant donné depuis. Il y a plus c'est que les conmoi-même, je ne me suis pas néanmoins interdit clusions qui, sur le defaut de l'appelant, aud'interjeter appel incident quand vous pourraient été prises par l'intimé à fin de confirmasuivriez votre appel principal; de même que, tion du jugement, opéreraient cette fin de nonpour avoir laissé d'abord expirer mes trois mois, recevoir contre l'appel qu'il interjetterait sur pensant que vous feriez de même, je ne me l'opposition de l'appelant principal. Telle est suis pas privé de mon droit d'appel, si vous la solution qui résulte de trois arrêts de la cour venez à tromper mon attente. (Rennes, 26 juin de cass. des 6 frim. an XIII, 31 oct. 1809 et 1810, Bourges, 30 janv. 1827, Sirey, t. 27, 23 janv. 1810, et d'un arrêt de la cour de Brux., p. 147, et Toulouse les 29 fév. et 7 avril 1832.) du 25 janv. 1816 (Pasicrisie belge, à cette A plus forte raison le déciderait-on de la sorte date). Contrà, Brux., 20 nov. 1817; ib., si l'intimé n'avait obtenu et signifié son arrêt Br., 2 fév. 1825 (Rec. de Spruyt, 1825, t. 1, de défaut que sous toutes reserves. (Cass., p. 589); Merlin, Quest., t. 2, p. 104. 15 juill. 1828; Sirey, t. 28, p. 165; Bourges, 15 fév. 1830.) Talandier, no 409, n'admet que la doctrine de ces deux derniers arrêts; il repousse celle des arrêts précédents, et soutient que l'obtention pure et simple d'un arrêt de défaut confirmatif du jugement est un acquiescement formel et irrévocable; il peut invoquer l'autorité des cours de Bourges, 8 mars el 16 juin 1813, et de Bordeaux, 19 mars 1833 (Sirey, t. 33, p. 414).

Au reste, nous n'irons pas jusqu'à dire que l'intimé, sur l'opposition à l'arrêt de défaut relevée par son adversaire, pourrait encore, sans s'interdire l'appel incident, conclure purement et simplement au débouté de l'opposition; il est clair qu'alors il se replace dans la position de celui qui conclut contradictoirement à la confirmation, et que, par conséquent, il acquiesce. Telle est la décision des cours de cass., 23 janv. 1810, et d'Agen, 16 fév. 1815 (Dalloz, t. 2, p. 152). Inutile de faire observer que l'intime n'est pas déchu de son droit d'appel incident, par cela que, sur l'appel principal d'un jugement ordonnant une preuve par témoins, il demande une audience prochaine pour plaider sur l'appel. (Cass., 21 août 1811; Dalloz, t. 2, p. 153; Sirey, t. 21, p. 263.) Ce n'est certainement pas conclure à la confirmation.

Un premier appel incident sur un des chefs

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Néanmoins, l'intime ne se rendrait pas non recevable dans un appel à minimâ, en obtenant purement et simplement un arrêt par défaut contre l'appel principal. (Rennes, 26 juin 1810.)

Il n'y a point de contradiction entre cette décision et celle de l'arrêt de la cour de cass. du 23 janv. 1810, sur laquelle nous avons établi la proposition du numéro précédent, attendu qu'il existait entre cet arrêt et celui de Rennes, que nous rapportons ici, cette difference que, dans l'espèce du premier, l'appel à minima était interjeté sous le cours de l'opposition à l'arrêt par defaut.

[Voir nos observations sur la Quest. 1376.] [1577 bis. L'appelant principal, devenu intimé par uppel incident de son adversaire, peut-il à son tour relever incidemment l'appel des chefs qu'il avait d'abord respectés? Le peut-il en tout état de cause?

Une dissertation, que nous avons recueillie dans les manuscrits de Carre, traite la question en ces termes :

« Pour la negative, on peut dire que l'artiacle 445 a réservé seulement à l'intimé la fa» culté de relever incidemment appel, et ne l'a point reservée à l'appelant, que celui-ci ayant » été libre de restreindre son appel ou de

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» l'étendre à volonté, ne peut plus revenir sur l'acquiescement formel qu'il a donné dans » son exploit d'appel aux chefs du jugement qu'il n'a point attaqués. Mais on peut répon»dre que, si l'art. 445 n'accorde qu'à l'intimé » la faculté de relever incidemment appel, l'appelant devient lui-même intimé sous l'appel incident de l'adversaire; que son ac» quiescement a pu n'être donné que condi>>tionnellement, et dans l'espoir que la partie » adverse n'appellerait pas incidemment d'au» tres chefs que de ceux qui ont été l'objet de » l'appel principal.

"

» Je suis condamné par plusieurs chefs d'un » même jugement qui, par plusieurs autres » chefs, condamne aussi ma partie adverse; je » relève seulement appel d'un des chefs qui » me condamnent et j'acquiesce aux autres, » dans l'espoir que cette concession de ma » part engagera mon adversaire à se borner à » soutenir le jugement, ou que, s'il use de la » faculté qui lui est accordée par l'art. 443, il >> restreindra du moins son appel incident au » seul chef qui fait l'objet de l'appel principal. | » Si, au contraire, il remet en question tous » les chefs qui le condamnent et qui me don» nent gain de cause, il me relève par là de » mon acquiescement et se rend lui-même non » recevable à me l'opposer; car si, comme l'a » décidé la cour de cass. dans son arrêt du » 22 mars 1826, la disposition de l'art. 443 qui » autorise l'intimé à relever incidemment ap» pel en tout état de cause a eu essentiellement » pour objet de rétablir l'équilibre entre les » droits et prétentions respectifs des parties, » cet équilibre n'existera plus et les chances » ne seront plus égales, mon adversaire ayant » la liberté de quereller toutes les dispositions qui le condamnent et qui me donnent gain » de cause, tandis que, limité dans mon appel >> principal, j'en serai réduit à faire valoir mes » griefs contre le seul dispositif qui en fait l'objet et à soutenir le bien jugé des autres dispositifs du jugement. Ma position sera » donc bien plus defavorable que celle de l'in» timé qui pourra m'attaquer comme il l'en» tendra, sans que je puisse désormais diriger » aucune nouvelle attaque contre lui. Vaine»ment objectera-t-on que j'ai dû faire mes >> reflexions et examiner attentivement quels » étaient les chefs qui me causaient grief avant » de me décider à limiter mon appel; qu'ayant » pris ce parti, je me suis moi-même prescrit » des bornes qu'il ne m'est plus permis de » franchir. Ce raisonnement serait juste, sans » doute, si la faculté accordée à mon adver»saire de se porter incidemment appelant avait » été restreinte au seul chef attaqué par appel » principal; mais, dès que cette faculté est il»limitée, dès qu'elle s'étend indifféremment » aux chefs séparés et distincts de celui dont » il y a appel principal, comme à ceux qui en

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Nous embrassons volontiers cette doctrine. Si l'intimé originaire, comme on l'a vu sur la Quest. 1576 in fine, n'est pas censé, par un appel incident restreint à quelques chefs, acquiescer aux autres chefs du jugement, et conserve le droit de les rendre l'objet d'un nouvel appel incident, quoique non provoqué par de nouvelles attaques de la part de l'appelant principal, à plus forte raison celui-ci, qui est entré le premier en lice, et qui avait mis dans sa première attaque une modération dont l'intimé n'a pas cru devoir tenir compte, sera-t-il relevé de son acquiescement partiel, si tant est qu'il existe, par l'appel incident de son adversaire. Nous pensons donc que l'appel incident de l'appelant principal ne peut être repoussé par la fin de non-recevoir résultant de l'acquiescement.

Mais quelle forme doit-il observer? A quel délai est-il soumis?

Quant à la forme, les principes que nous avons exposés sur la Quest. 1575 ne permettent pas de douter qu'il ne puisse employer celle du simple acte d'avoué à avoué. Quant au délai, il sera régi par les mêmes principes qu'à l'égard de l'intimé principal (qu'on nous passe l'expression). L'appelant principal est devenu réellement intime, et le motif de la paix rompue, qui le fait relever de l'acquiescement, doit le faire relever aussi de la déchéance du délai. Les deux positions sont identiques. (Voy. notre Quest. 1575.)]

1578. Une partie qui n'a pas été intimée sur l'appel d'un jugement dans lequel elle a figuré, peut-elle, si elle a intérêt à la confirmation de la disposition de ce jugement attaquée par l'appelant, intervenir et appeler elle-même INCIDEMMENT, et même après le délai de trois mois, d'une autre disposition du méme jugement?

L'arrêt de la cour de cass. du 26 oct. 1808 (Dalloz, t. 2, p. 157; Sirey, t. 9, p. 98), déjà cité sur la question 1572, a prononcé affirmativement sur celle-ci, attendu que celui qui avait été partie au jugement appelé devait être intimé sur cet appel; qu'il se trouvait ainsi placé dans l'exception portée à la dernière disposition de l'art. 445; que son appel était un appel incident qui n'était pas susceptible de l'application des autres dispositions du même article, et de celles des art. 444 et 456.

[Nous approuvons cette décision, avec Merlin, Quest., l. 7, p. 575, v° Appel incident, §8. (17, la Quest. 1575, in fine, et Quest. 1574.)]

1579. Lorsqu'une partie interjette appel tion, attendu que, dans ce second cas, l'appel d'un jugement, et que la partie adverse principal n'a pas cessé d'exister, puisqu'au reconnait que ce jugement peut être ré-contraire il a été statué sur les griefs proposés formé sur certains points dans l'intérêt par la partie qui l'avait interjeté (1). de l'appelant, doit-elle en interjeter appel incidemment?

Il est plus naturel qu'elle déclare, par acte signifié à sa partie adverse, qu'elle se désiste du bénéfice du jugement, relativement aux dispositions sur lesquelles elle a lieu de craindre qu'il soit réformé. Si l'appelant est satisfait de ce désistement, il en fait décerner acte par la cour; si, au contraire, il continue ses poursuites, et que la cour juge que cet abandon de l'intimé était suffisant, il sera condamné aux frais qui auront été faits postérieurement, parce qu'il en est ici comme d'offres réelles qui, n'ayant pas été acceptées, seraient néanmoins jugées suffisantes pour désintéresser celui auquel elles auraient été faites. (Voy. Demiau, p. 321 et 322.)

[Cette solution est évidente.] 1580. Si l'appel principal était jugé non recevable ou mal fondé, n'en serait-il pas moins fait droit sur l'appel incident? [Quid, en cas de désistement de l'appel principal?]

[Talandier, no 408, décide aussi et par les mêmes raisons, que, si l'appel principal est nul ou non recevable, l'appel incident ne peut plus subsister. Les cours de Rennes et de Bourges ont consacré cette doctrine, la première, le 25 janv. 1826, la seconde, le 16 août 1828."

Cependant nous ne la croyons pas exacte : puisque le fait seul de l'appel principal rend à l'intimé le droit qu'il avait perdu d'attaquer les chefs du jugement qui lui font grief, rien ne peut plus le priver de ce droit, une fois qu'il s'est mis en devoir de l'exercer.

C'était par amour de la paix et dans l'espoir que son adversaire ne la troublerait point, qu'il s'était résigné à garder lui-même le sifence. Mais cette paix est rompue par le fait de l'appelant principal: l'intimé rentre dès lors dans tous ses droits, non-seulement pour se défendre, mais encore pour attaquer à son tour. Qu'importe que l'appel principal soit nul dans la forme ou irrecevable? Il n'en est pas moins une déclaration de guerre. Qu'importe que l'intimé le fasse anéantir par l'un de ces moyens! Il use de la voie de défense qui lui paraît plus simple et plus facile ; cela change

Nous pensons que, dans le premier cas, il n'y aurait pas lieu à statuer sur l'appel inci-t-il rien à son droit d'attaquer? dent, parce que l'appel principal, étant déclaré non recevable, par exemple pour n'avoir pas eté interjeté dans le délai, serait considéré comme non avenu. Or, l'appel incident, ne procédant qu'autant qu'il y a appel principal, nous paraît devoir, par conséquent, être lui-même envisagé comme non avenu; en un mot, comme le dit Hautefeuille, p. 262, la fin de non-recevoir contre l'appel principal entraîne l'anéantissement de l'appel incident.

Mais il faut, dira-t-on, et c'est la raison donnée par Carré, à la note, pour soutenir un appel incident, un appel principal qui en soit la base; si l'intimé fait anéantir l'appel principal, il reconnait par là que la base de son appel incident n'existe plus, il ne peut être admis à invoquer un appui que lui-même il vient de détruire.

|
Nous répondrons: que l'appel principal soit
nul, irrecevable ou mal fondé, il n'en existe
pas moins cependant, tant que la nullité, l'irre-
cevabilité ou le peu de fondement n'en ont pas
été prononcés. Or, c'est toujours avant que la
décision soit intervenue sur ces divers points
que l'intimé relève son appel incident. Celui-ci
a donc, à son origine, une base certaine et so-

Mais, dit le mème auteur, il pourrait arriver que l'appel principal fût jugé mal fondé, c'est à-dire qu'il fût déclaré, au regard de l'appelant, qu'il a été bien jugé, mal et sans griefs appelé: cela n'empêcherait pas que l'on ne fit droit en l'appel incident, qui se trouverait fondé. Nous admettons aussi cette distinc-lide, une raison légale d'exister, de prendre

(1) Cependant nous avons dit, no 1455, que le désistement de l'appel principal n'empêcherait pas de prononcer sur l'appel incident auquel il donnerait lieu, si l'intimé refusait d'accepter ce desistement, par le motif qu'il ne serait donné que pour faire tomber son appel, en annulant l'appel principal. Il n'y a aucune contradiction entre cette solution et ce que nous venon de dire, que l'appel principal, déclaré non recevable, fait tomber l'incident. La raison de cette différence, c'est que la faculté de former incidemment appel en tout état de cause n'est accordée à l'intimé que par suite de la présomption, qu'il n'eût pas appelé, si son adversaire n'avait pas appelé lui-même. Or, l'intimé, faisant déclarer non recevable l'appel de ce

dernier, se replace volontairement dans l'état où il était avant cet appel, et, par conséquent, celui qu'il a incidemment formé doit être réputé non avenu comme celui-ci. Mais il doit en être autrement dans le cas du désistement, puisqu'il est l'effet de la volonté de l'appelant principal, duquel il ne pent dépendre de priver l'intimé du droit qu'il a acquis de faire prononcer sur son appel. En un mot, en opposant une fin de non-recevoir contre l'appel principal, l'intimé renonce à son appel incident; mais il ne peut être contraint à cette renonciation par un acte de sa partie adverse.

Voy. nos observations au texte, et sur la Question 1455.]

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