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ler ou étre intimés.

[1581 bis. Qui peut appeler?

naissance. Après cela, il doit continuer à exis- |§ IV. De ceux qui peuvent ou doivent appeter par ses propres forces, quel que soit le sort de l'appel principal; autrement il faudrait dire que c'est à la réussite de ce dernier que tient l'existence de l'autre. Et cette conséquence n'est pas admissible, puisque personne ne conteste que, si l'appelant principal succombe au fond, il ne doive être statué sur l'appel incident (1).

Dans une cause de première instance, la demande reconventionnelle formée par le défendeur ne pourrait-elle recevoir jugement, parce que la demande originaire serait écartée par nullité ou fin de non-recevoir?

La cour de Grenoble a rendu, le 15 janv. 1813, dans une espèce à peu près identique à la nôtre, un arrêt dont nous pouvons invoquer la solution. Une partie avait fait signifier un jugement sous la reserve d'en appeler dans le cas où son adversaire en appellerait luimême. Cette condition s'étant réalisée, la partie qui avait signifié le jugement usa de la faculté qu'elle s'était réservée, et appela à son tour. L'appel de l'autre ayant été déclaré nul, on prétendit que la condition s'évanouissait, et que dès lors le second appel était irrecevable. La cour ne s'arrêta point à ce moyen, et considéra qu'il suffisait, pour rendre l'appel recevable, que la condition eût existé au moment où il avait été relevé. (V. aussi notre Question 1273 quater.]

1581. L'appel d'un jugement autorise-t-il à réformer les dispositions de ce jugement qui ne seraient point attaquées ?

La négative est de règle générale, et cependant il paraît qu'elle a été l'objet d'un doute, puisqu'on a cru nécessaire de la confirmer par un avis du conseil d'État, du 23 oct. 1806, approuvé le 12 nov. suiv. Cependant elle avait reçu une application formelle par arrêts de la cour de cass. des 9 et 19 prair. an vIII (Sirey, t. 1, p. 245; Dalloz, t. 22. p. 45), portant que, sur l'appel de quelques dispositions d'un jugement, celles qui ne sont pas attaquées ne peuvent être réformées au profit de la partie qui n'a pas interjeté appel.

[Les deux arrêts cites par Carré furent rendus sur les conclusions de Merlin, dont les réquisitoires sont rapportés en ses Quest., t. 1, p. 89, § 5. La cour de Douai a jugé dans le même sens le 7 mars 1835. Il est impossible de ne pas adopter cette décision.]

Il est clair que toute personne qui a été partie dans un jugement peut en appeler s'il lui fait grief.

Il suffit donc qu'une partie demanderesse, en intentant une action contre les syndics d'une faillite ait mis en cause la femme et les héritiers du failli, pour que cette femme et ces héritiers aient le droit d'interjeter appel, malgré l'acquiescement des syndics au jugement qui a accueilli la demande (cass., 26 déc. 1836); et que le donataire ait été reçu intervenant dans l'instance en interdiction dirigée contre son donateur, pour qu'il puisse appeler du jugement qui la prononce. (Bord., 2 avril 1835.) Le saisi peu d'ailleurs, aussi bien que le tiers saisi, interjeter appel du jugement qui statue tout à la fois et sur la demande en validité et sur la demande en déclaration affirmative. (Toulouse, 20 juin 1838.) Et, par la raison des contraires, celui qui n'a pas été partie ne peut appeler: il ne lui reste, si le jugement lui porte préjudice, que les voies de la tierce opposition ou de l'intervention. (Turin, 21 août 1807; Dijon, 21 janv. 1808; Lyon, 29 nov. 1829) (2).

Un tiers non fondé de procuration ne pourrait donc interjeter appel au nom de la partie condamnée, c'est là une conséquence de la maxime nul ne plaide par procureur, dont nous avons explique le sens et indiqué la saine application sur la Quest. 290. (Cass., 24 brum. an Ix et 16 prair. an x11; Dalloz, t. 2. p. 61; Sirey, t. 4, p. 545; le 22 brum, an XII; Sirey, t. 4, p. 282; Dalloz, t. 2, p. 62.) La mème cour avait, il est vrai, décide que l'administrateur des biens d'un individu pouvait interjeter appel au nom de son commettant; mais il resulte des considérants de l'arrêt que le commettant fut expressément dénommé dans l'acte d'appel comme y étant seul intéressé; ce qui rentre parfaitement dans notre doctrine de la Quest. 290, confirmée, en matière d'appel, par un arrêt de la même cour, du 18 juin 1825 (Sirey, t. 24, p. 233; Dalloz, t. 2, p. 63), qui a emis des considérants desquels il résulte que l'appel qui aurait été interjeté par un fondé de pouvoir en son nom qualifié serait nul, quoique cependant il pût être ratifié valablement par la comparution de la partie sur cet appel ́avant l'expiration des délais. (Aix, 18 fév. 1808; Si

(1) [On peut ajouter, d'ailleurs, que l'intimé a pris la forme de l'appel incident, parce qu'il existait un appel principal, et que, sans l'existence de cet appel principal, il eût eu le droit d'interjeter appel principal lui-même, dans les délais de l'art. 443.]

(2) [La cour de Grenoble a décidé, le 18 janv. 1855,

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que la femme qui a donné son consentement à la réduction de son hypothèque légale, n'est point partie au jugement qui l'homologue, et que, par conséquent, elle ne peut en appeler. Cette décision, susceptible de controverse, a été rendue contrairement aux conciusions de l'avocat général.]

rey, t. 8. p. 109; Dalloz, t. 14, p. 400, et Li-
moges, 30 déc. 1823.) Il faut donc que l'appel
soit interjeté au nom de la partie elle-même,
poursuite et diligence du procurateur. (Rennes,
25 avril 1811.) Inutile de faire observer que
l'appel interjeté par une personne sans pouvoir
ne saurait être utilement ratifié après l'expira-
tion des délais. (Cass., 24 brum. an Ix; Sirey,
t. 1. p. 418.)

Au reste, l'appel étant une nouvelle instance,
une procuration spéciale est nécessaire pour
pouvoir l'interjeter; celle qui aurait été don-
née pour représenter la partie en première in-
stance ne suffirait pas (Rennes, 23 avril 1811);
pas même le mandat légal confié à l'avoué pour
représenter la partie devant les premiers ju-
ges, car il expire avec le jugement qui éteint
la première instance. Il en serait autrement de❘
celle qui donnerait pouvoir d'appeler de tous
jugements. (Cass., 5 sept. 1806; Sirey, t. 7,
p. 35; 12 sept. 1812; Sirey, t. 16, p. 456;
Dalloz, t. 2, p. 188; 28 janv. 1815; Dalloz,
t. 2, p. 192; Sirey, t. 16, p. 456.)

. Quoique, pour avoir le droit d'interjeter ap-
pel, il soit nécessaire d'avoir été partie au ju-
gement, il n'est pas néanmoins indispensable
d'y avoir figuré en personne; celui qui y a été
représenté soit par ses auteurs, soit par ses
ayants cause, soit par la personne dont il est
légalement chargé d'administrer les biens, soit
par la personne qui est légalement chargée
d'administrer les siens, jouit de la même pré-
rogative.

Tels sont l'héritier, lorsque le jugement a
été rendu contre la personne à laquelle il suc-
cède;

L'acquéreur à l'égard des jugements exécu-
toires contre lui, quoique rendus contre le
vendeur. (Colmar, 28 mai 1806.) Il en est de
même du cessionnaire par rapport au cédant.
Mais le vendeur, le cédant, à leur tour ne
peuvent appeler du jugement rendu contre
l'acquéreur, le cessionnaire, à moins, pour le
cas du second, que l'acte de cession n'ait pas
été notifié aux tiers intéressés. (Bord., 29 avril
1829; Sirey, t. 29, p. 350.)

Ainsi encore les créanciers peuvent appeler
du jugement rendu contre leur débiteur (ar-
ticle 1166, C. civ.); voyez-en des applications
dans les arrêts des cours de Besançon, 5 août
1808, de Poitiers. 6 juill. 1824 (Sirey, t. 25,
p. 329), de Bord., 7 déc. 1829, de Lyon, 21 déc.
1831, et de la cour de cass., 13 nov. 1835 et
7 fév. 1852.

La caution peut appeler du jugement rendu
contre le débiteur principal, avec lequel elle
est censée ne faire qu'une seule et même per-
sonne, mais seulement en ce qui concerne des
moyens qui leur seraient communs et point
personnels à elle-même, et pourvu que la
chéance ne soit pas acquise déjà contre le débi-
feur principal. (Grenoble, 18 janv. 1832.)

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Le tuteur pent appeler du jugement rendu
contre une personne interdite depuis, et dont
il a pris la tutelle; le mineur devenu majeur,
| du jugement rendu avec son tuteur. Quant au
subrogé tuteur, voir la Quest. 1592.

Le mari peut interjeter appel du jugement
rendu avec sa femme avant le mariage à l'égard
des biens dont il a l'administration, mais il ne
pourra appeler du jugement rendu contre elle
personnellement depuis le mariage, sous pré-
texte qu'elle n'avait pas son autorisation; ce
n'est pas à lui, non partie au jugement à re-
lever cet appel, il doit autoriser sa femme et
la faire agir. (Paris, 5 avril 1827; Gaz. des
Trib. du 6.)

Les syndics ou les agents de la faillite peu-
vent interjeter appel au nom des créanciers,
(Paris, 23 avril 1812 ; Sirey, t.14, p. 31 ; Dalloz,
t. 2, p. 67.)

Le ministère public peut interjeter appel du
jugement qui fait grief à un absent (Toulouse,
24 mars 1836), et, suivant Locré, Esp. du Code
de Comm., t. 9, p. 186, dans tous les cas, lors-
qu'il s'agit d'un appel pour incompétence ra-
tione materiæ, mais cette décision nous paraît
contestable.

Le failli étant dessaisi de l'administration de
ses biens ne peut en interjeter appel; mais,
dans le silence des créanciers, le ministère pu-
blic ne peut, de son chef, faire déclarer un tel
appel non recevable. (Bord. 31 janv. 1832.)
Cependant le droit d'appeler est rendu au failli
par le concordat qu'il conclut avec ses créan-
ciers. (Rennes, 4 oct. 1811; Dalloz, t. 14,
p. 293.)

Tous ces détails sont résumés par Talandier,
n° 4 à 34.]

[1581 ter. Qui peut et doit être intimé ?

En règle générale on doit intimer, sur l'ap-
pel, toutes les personnes qui, ayant été parties
au jugement attaqué, ont un intérêt à son
maintien, sous peine de voir le jugement ac-
quérir force de chose jugée en faveur de celles
qu'on n'aura pas appelées (sauf en matière in-
divisible, voir Quest. 1565), ou même de voir
demeurer sans effet l'appel relevé contre quel-
ques-unes des parties seulement, si la cause ne
peut être jugée qu'avec la présence de toutes
les parties. (Rennes, 20 août 1812.)

Mais on ne doit point, on ne peut pas même
intimer, sur l'appel, les personnes qui, ayant
figuré en première instance, n'ont pas néan-
moins d'intérêt aux contestations que l'appel
fait renaître, encore moins celles qui n'ont pas
été du tout parties au jugement.

Ce principe évident a été appliqué par les
cours de Rennes, 3 fév. 1815 et 13 août 1813;
Paris, 6 mars 1815 (Sirey, t. 16, p. 529). S'en-
dé-suit-il que le failli ne puisse pas être intimé
sur l'appel du jugement dans lequel ont figuré
les syndics de ses créanciers? Oui, d'après la

cour de Paris, 18 juin 1812. Mais la cour de Brux. a jugé, le 29 juin 1856 (J. de B., t. 2 de 1856, p. 462), que la femme commune en biens pouvait être intimée sur l'appel d'un jugement intéressant la communauté où son mari seul avait comparu, parce qu'elle est censée y avoir été représentée par lui. Or, les syndics sont autant les représentants du failli que ceux des créanciers, d'où il nous semble résulter une décision contraire à celle de la cour de Paris que nous venons de citer; au reste, la cour de cassation a jugé, le 19 avril 1826 (Sirey. t. 27, p. 198), que le failli peut suivre l'appel dont les syn- | dics se sont désistés au nom des créanciers, ce qui semble justifier notre opinion.

Au moins ne pourra-t-on contester que le failli lui-même doive être intimé lorsque, par un jugement d'homologation, il a été remis à la tète de ses affaires. (Colmar, 21 mars 1856.) Inutile de faire observer que, si deux défen- | deurs ont figuré en première instance, à raison de deux chefs distincts de demande, la partie qui relève appel sur un chef seulement n'a besoin d'intimer que celui de ses adversaires que ce chef intéresse ; la présence de l'autre, bien loin d'être utile, serait frustratoire. (Rennes, 24 juill. 1810; Sirey, t. 14, p. 134.)

Mais, lorsque plusieurs parties ont dû être intimées et qu'on a négligé d'appeler quel

qu'une d'elles, on n'est pas admis à réparer cette omission en demandant à la cour d'ordonner sa mise en cause. Si on ne se trouve plus dans les délais pour appeler régulièrement, on doit subir toutes les conséquences de la faute qu'on a commise. (Bord., 22 mars 1851.)

Si néanmoins la partie non intimée se présente volontairement, constitue avoué et se joint aux conclusions des autres intimés, elle ne peut plus, sous prétexte qu'il n'a pas été appelé contre elle, se faire rejeter des qualités. (Metz, 22 nov. 1827.)

Dans le cas où la partie qui a obtenu et fait signifier le jugement, a postérieurement cédé ses droits à un tiers, ce n'est pas nécessairement ce tiers cessionnaire, même après la signification du transport, qui doit être intimé sur l'appel. (Douai, 5 mars 1827, et Trèves, 5 juin 1807; Sirey, t. 7, p. 304; Dalloz, t. 28, p. 196.) L'appelant ne peut être forcé de discater ses droits avec un autre que son créancier primitif dont la présence peut être indispensable à l'effet de répondre à des faits personnels, à des interrogatoires et autres actes étrangers au cessionnaire. Il sera done libre d'intimer celui-là même avec qui le jugement a été rendu.]

FIN DU TOME TROISIÈME.

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