Page images
PDF
EPUB

bien, d'ailleurs, que, sans cette circonstance, la cour de cassation et l'arrêt attaqué auraient jugé différemment. (Voy., au reste, l'état de la jurisprudence, que nous avons rapporté sous le no 1199.]

1197. Le greffier du juge de paix doit-il

écrire sous la dictée de l'expert?

Le rapport doit être écrit par le greffier, dit Demiau, p. 231, mais sous la dictée de l'un des experts.

[ocr errors]

ficile d'annuler un rapport d'experts par le motif qui a déterminé le parlement d'Aix. Telle est notre opinion, que nous fondons non pas sur la disposition de l'art. 1030, qui veut qu'aucun acte de procédure ne soit annulé, si la loi, mais sur l'art. 1057, qui n'interdit rila nullité n'est pas formellement prononcée par goureusement de faire un jour de fête légale d'autres actes que les significations et exécu tions. Sans doute, comme les juges, les experts dont les actes sont judiciaires seront blåmables de procéder un jour de fête légale ; mais nous ne voyons pas que la loi prononcé formellement la nullité des actes qu'ils auraient faits dans ces jours, que la loi ne désigne d'ailleurs aux juges que comme jours de va

cance.

Nous pensons bien que telle est l'intention de la loi, puisqu'elle ne charge le greffier que d'écrire. Mais il faut convenir que, dans le cas où aucun des experts ne le saurait faire, il n'est guère vraisemblable que celui qui dicterait fit une rédaction aussi correcte et aussi claire que le greffier. Nous ne croyons donc pas que l'on puisse arguer de nullité un procès-verbal qui n'aurait pas été écrit sous la dictée. Dans la circonstance que nous venons de supposer, il faut considérer le greffier comme le notaire qui écrit toujours les conventions des parties, mais qui souvent les ré-[1198 bis. Un rapport peut-il étre déclaré nul, s'il n'est signé que par deux exdige; il suffit que la rédaction soit conforme à ce qui lui est exprimé, pour que l'on n'ait perts? rien à reprocher à l'acte (1).

[Tel est aussi, et avec raison, l'avis de Favard, t. 4, p. 705, no 6; Dalloz, t. 14, p. 348, n° 4, et Pigeau, Comm., t. 1, p. 570.] 1198. Le rapport peut-il être fait un jour

de dimanche ou de féte légale ?

On lit au Nouv. Rép., vo Expert, le passage suivant :

« C'est encore parce que les experts font, à certains égards, la fonction de juges, qu'il leur est défendu de faire des rapports les jours de dimanche ou de fète. Par arrêt du parlement de Provence du 18 nov. 1694, on a jugé, dit M. le président de Bézieux, liv. II, chap. 6, S2, de qu'un rapport étant daté d'un jour de fête solennelle, il ne pouvait pas subsister; mais comme ce défaut venait de la propre faute des experts, la cour ordonna qu'il serait refait à leurs dépens. » (V. Delaporte, t. 1, p. 304.)

Les auteurs du Comm. inséré aux Ann. du Not., t. 2, p. 320, ont appliqué cette décision à notre Code actuel.

Mais aujourd'hui, disent les auteurs du Prat., t. 2, p. 256, qu'aucune disposition de la loi n'interdit aux experts de vaquer les jours de dimanche et de fête, il semble qu'il serait dif

[Nous adhérons à cette solution, avec Favard, t. 4, p. 70%, no 5, et Dalloz, t. 14, p. 350, no 17; quoique Pigeau, Comm., t. 1, p. 569, enseigne que l'art. 1037 est applicable. ]

La question de savoir si les opérations peuvent valablement être faites par deux des trois experts, le troisième refusant d'y procéder, est indépendante de celle-ci. Elle est résolue pour la négative, par Favard, t. 4, p. 703, n° 7, et Dalloz, t. 14, p. 349, no 12; il ne peut s'élever le moindre doute sur ce point. (V.l'arrêt de la cour de cassation du 2 sept. 1811, cité sous le n° 1158.)

Mais lorsque les opérations sont terminées et le rapport dressé, s'il arrive que l'un des experts refuse d'y apposer sa signature, faudra-t-il nécessairement que l'expertise soit recommencée sur nouveaux frais, après que l'expert refusant aura été remplacé? Pigeau, Comm., t. 1, p. 570, décide l'affirmative, en réservant aux parties l'action en dommages contre l'expert qui occasionne ces frais et ce retard. Au contraire, Favard, t. 4, p. 703, no 7, Boncenne, no 380, Dalloz, t. 14, p. 349, n° 12, et Thomine, no 571, enseignent, avec raison, selon nous, que le caprice ou le refus d'un des experts ne peut avoir pour effet de priver les parties et la justice de l'utilité d'un rapport à la confection duquel il a lui-même participé; que l'avis des experts se formant à la majorité, le refus de signer, de la part d'un seul, ne peut infirmer l'exactitude de ce qui

(1) Il y a plus: c'est que, dans le cas même où il y a lieu à ce qu'un des experts écrive le procès-verbal, rien ne s'oppose à ce que, d'un commun accord, ceux-ci chargent un tiers de la rédaction, afin d'y mettre plus de clarté et moins de temps, s'ils ne croyaient pas qu'ils eussent la capacité nécessaire. (F. Comm. inséré aux

Ann. du Not., t. 2, p. 320.) Aussi l'art. 317 ne dit-il pas que la rédaction sera faite, mais qu'elle sera écrite par un des experts, et signée par tous. Voilà, ce nous semble, tout ce que la loi exige pour la validité du rapport.

est attesté par les deux autres; que la signature de ceux-ci est donc suffisante pour constater ce qui s'est passé, et pour relater même l'avis dissident de leur coexpert; qu'autrement l'avis d'un seul prévaudrait sur celui de la majorité; qu'enfin cette doctrine s'appuie, par analogie, sur la disposition de l'art. 1016 du Code de procédure civile, qui déclare valable le jugement arbitral que la minorité des arbi- | tres aurait refusé de signer.

Ces principes ont été consacrés par arrêts de de la cour de cass. du 21 nov. 1820; de la cour de Bourges du 19 mars 1822 (Dalloz, t. 14, p. 339; Sirey, t. 21, p. 592); de la cour de cass. du 30 nov. 1824; de la cour d'Orléans du 18 juin 1812 (Dalloz, t. 14, p. 352), et de la cour d'Agen du 30 juill. 1828 (Sirey, t. 28, p. 352. (V. encore les arrêts rapportés sur la Quest. 1199).

[ 1198 ter. L'indication du jour et du lieu de la rédaction du rapport est-elle prescrite à peine de nullité?

Si la partie n'est pas présente au moment où les experts indiquent le jour et le lieu de la rédaction de leur rapport, faut-il, à peine de nullité, l'en prévenir par acte exprés?

en

Quant à la première partie de cette question, l'affirmative est certaine et enseignée par Boncenne, no 379; faute de cette indication, effet, les parties n'auraient pas la faculté d'expliquer leurs dires, de leur donner le développement nécessaire, et de les faire insérer au procès-verbal, avant sa clôture. Ce serait une de ces irrégularités substantielles dont nous parlons sur la Quest. 1199.

Nous ne pouvons donc approuver un arrêt de la cour de Rennes du 12 nov. 1836, qui décide que l'omission de cette indication n'est pas une cause de nullité. (V. toutefois, quant à l'assistance des parties lors de la rédaction du rapport, la distinction posée sur la Question 1193.)

|

|

rey, t. 38, p. 609), cité et approuvé par Boncenne, no 379.] 1199. L'omission des formalités prescrites par l'art. 317 emporte-t-elle nullité? Ce procès-verbal n'est qu'un acte de procédure, comme celui qui constate la prestation de serment, etc.; et, par les mêmes raisons que celles sur lesquelles nous avons résolu la 1185 question, on ne peut, d'après l'art. 1030, en prononcer la nullité, pour cause d'omission des formalités que prescrit l'art. 317; mais il n'en est pas moins vrai que le rapport est irrégulier dans sa substance, si, par exemple, les experts ont mis les parties hors d'état de requérir les apurements tendant à la découverte de la vérité, et, en ce cas, l'art. 525 déclarant que les juges ne sont point astreints à suivre l'avis des experts, il nous semble que le juge peut ordonner une nouvelle expertise, ce qui produit en définitive les mêmes effets que si le procès-verbal était frappé de nullité pour défaut de forme. (Rennes, 16 juill. 1818; Dalloz, t. 14, p. 345.)

[Les décisions de la jurisprudence et les opinions des auteurs varient beaucoup sur mais sous des points de vue spéciaux, aux cette question, que nous avons déjà traitée,

n° 1185, 1186, 1196, 1198 bis et 1198 ter. Ici elle se représente sous une physionomie générale. Quelques jurisconsultes et quelques arrêts, se fondant sur ce que le titre qui nous occupe ne contient aucune disposition irritante, ont prétendu que, dans aucun cas, les juges ne pouvaient prononcer la nullité; c'est notamment l'opinion développée par Dalloz, vo Expertise, sect. 1", art. 7 et 9.

Essayons d'analyser les nombreuses décisions judiciaires intervenues sur cette question.

La cour de Besançon, en jugeant, le 18 juin 1812 (Dalloz, t. 14, p. 348), que le procèsverbal ne doit pas nécessairement mentionner l'accomplissement des formalités, et qu'on doit les supposer observées, quand l'acte n'offre Quant à la seconde partie de la question, point la preuve du contraire, a implicitement nous répondrons oui, si, n'ayant pas été léga-jugé que, pour un certain nombre au moins, lement avertie du jour où les experts devaient procéder, la partie n'a pas à s'imputer de ne s'y être point trouvée, ce qui, au reste, serait déjà un premier motif de nullité. (V. la Ques. tion 1186.)

Mais s'il n'a tenu qu'à elle d'assister à la réunion des experts là où l'indication a été donnée, si elle a été instruite par les voies légales, c'est sa faute de ne pas s'y être rendue. Nul n'est obligé de la mettre à l'abri des inconvénients qui pourront résulter pour elle de son absence. (V. la Quest. 1186.)

Ce serait violer la loi que d'exiger une sommation, ainsi que l'a décidé la cour de cassation, par un arrêt rendu le 19 juin 1838 (Si

[ocr errors]
[merged small][ocr errors]

ces formalités étaient rigoureuses; il en est de même de l'arrêt de la cour de Brux. du 24 mars 1829 (J. de B., 1829, 2e, p. 224). Un autre arrêt de la même cour de Besançon du 5 juin 1826, et un de la cour de Nanci, du 10 sept. 1814 (Dalloz, t. 14, p. 345; Sirey, t. 16, p. 52), se sont prononcés dans le même sens d'une manière formelle, en statuant sur une nullité prise de ce que le rapport paraissait n'avoir pas été rédigé dans un lieu prealablement désigné par les experts. Mais les cours de Bourges, les 2 août 1810, 20 avril 1825 (Sirey, t. 25, p. 432) et 30 mars 1829 (Dalloz, t. 9, p. 460); de Paris, 21 juin 1814; de Colmar, 2 juill. 1814 (Dalloz, t. 14, p. 347); de Montpellier, 19 juin

1821 et 26 mars 1824; d'Orléans, 12 juin 1822; de Toulouse 10 oct. 1825; de Metz, 13 nov. 1823; d'Agen, 16 juill. 1828; de Bordeaux, les 3 août, 4 juill. 1832. et 2 août 1833; de Rennes, 12 nov. 1856; et la cour de cass., les 7 déc. 1826 (Sirey, t. 27, p. 205), 10 août et 11 nov. 1829 (Sirey, t. 22, p. 406), et 19 juin 1858 (Sirey, t. 38, p. 609), ont décidé, au contraire, que la rédaction du procès-verbal sur le lieu contentieux, ou dans un autre lieu désigné par les experts, n'était pas requise à peine de nullité. On voit que c'est là une jurisprudence bien assise; nous la croyons conforme aux véritables principes.

Nous n'en dirons pas autant des décisions qui ont traité avec la même indulgence le rapport qui n'était pas écrit de la main d'un expert, et signé de tous, ou bien écrit par le greffier du juge de paix; nous avons à cet egard exprimé notre sentiment sur les Quest. 1196 et 1198 bis ; la jurisprudence qui le combat est néanmoins presque aussi imposante que celle que nous venons de rapporter. Elle se compose des arrêts des cours de Paris du 21 juin 1814 (Dalloz, t. 19, p. 460); d'Orléans, 14 nov. 1817, et 6 mai 1824 (Dalloz, t. 14, p. 331); de Rouen, 6 et 24 juill. 1826 (Sirey, i. 27, p. 29); d'Agen 30 juill. 1828 (Sirey, t. 28, p. 352), et de la cour de cass., 21 nov. 1820 (Dalloz, t. 14, p. 339; Sirey, t. 21, p. 392), et 50 nov. 1824 (Dalloz, t. 14, p. 352).

[ocr errors]

le principe qui devra guider les décisions sur ce point, c'est que la forme est essentielle lorsqu'elle a pour but d'obtenir un rapport éclairé, consciencieux, authentique, parce que, sans ces trois qualités, le but de la loi n'est pas rempli. Ainsi l'ont jugé les cours de Rennes, 16 juill. 1818 (Dalloz, t. 14, p. 545), et de Brux., 15 et 18 janv. 1827 (J. de B., 1827, 1re, p. 197). En partant de ces principes, il nous semble qu'on ne peut plus être arrêté par cette considération que le titre XIV du Code de procédure ne prononce, dans aucune de ses dispositions, la peine de nullité. Aussi la cour de Bordeaux a-t-elle décidé, le 25 mars 1828, que la nullité d'un rapport d'experts peut être prononcée pour l'inexécution de certaines formalités, dans les cas où la loi ne la prononce pas.

Cependant nous n'irons pas jusqu'à dire, avec l'arrêt de la cour de Rouen du 23 nov. 1826, que les nullités, lorsqu'à notre avis il en existe, soient en quelque sorte d'ordre public, de façon qu'elles ne puissent être couvertes par le silence des parties.

Au contraire, nous croyons qu'elles peuvent y renoncer et qu'elles sont censées le faire implicitement, lorsqu'elles font usage du rapport (Rennes, 4 fév. 1826); ou bien, s'il s'agit de nullités antérieures aux opérations, lorsqu'elles y ont comparu sans réclamation (Toulouse, 17 janv. 1837; Dalloz, t. 14, p. 332, et cass., 30 nov. 1824); et qu'à plus forte raison elles ne peuvent, pour la première fois, en appel, demander la nullité d'une expertise (Montpellier, 19 juill. 1821), quoique néanmoins il ne soit pas nécessaire, pour pouvoir proposer les

veloppés devant les premiers juges: il suffit d'y avoir formellement conclu à la nullité du procès-verbal. (Bourges, 12 mai 1830.) On est également déchu du droit de se plaindre de l'inexécution des formalités, lorsqu'on a soimême empêché l'observation de la loi par sa propre résistance. (Liége, 16 juill. 1825; J. de B., 1826, 2, p. 19. — V. Questions 667 et 1172.)

Peut-on, en cette matière, poser des règles générales? Nous croyons devoir adopter l'avis général des auteurs, qui est de prononcer la nullité lorsqu'il y a omission des formes substantielles ou de l'une d'elles. (V. Berriat, h. t. note 3; Favard, t. 4, p. 705, vo Rapport d'ex-vices de forme devant la cour, de les avoir déperts, no5, et t. 1, § 3, no 7; Pigeau, Comm., t. 1, p. 576 et 577, et le Prat., t. 2, p. 265.) Pigeau classe presque toutes les formalités parmi les formalités substantielles; mais celui qui a combattu avec le plus de force la tendance de la jurisprudence à ne donner aucune sanction spéciale aux art. 315 et 317, est Demiau, qui a dit, p. 232: « L'acceptation par les experts du mandat qui leur a été donné, constitue un quasi-contrat par lequel ils se sont obligés, tant envers la justice qu'à l'égard des parties, de satisfaire à toutes les conditions que la loi leur impose, du moins quant au mecanisme de leur opération; et, en prêtant serment entre les mains du commissaire, ils ont contracté, sous les auspices de la Divinité, l'engagement solennel de ne consulter dans leur operation que la loi, leurs lumières et leur conscience.»

Si donc ils ont omis des formes essentielles, ils ont manqué à leur devoir, ils n'ont pas accompli la mission que la justice attendait d'eux. Il est vrai qu'on pourra n'être pas d'accord, lorsqu'il s'agira de déterminer les formes qui ont ou non le caractère de substantielles ; mais

ART. 318. Les experts dresseront un seul rapport; ils ne formeront qu'un seul avis à la pluralité des voix.

Ils indiqueront néanmoins, en cas d'avis différents, les motifs des divers avis, sans faire connaître quel a été l'avis personnel de chacun d'eux (1).

Ord. de 1667, tit. XXI, art. 12 et 13. — C. civ., art. 534, 1679. — C. pr., art. 210, 956. [Locré, t. 9, p. 261.]

CCLXV. La délibération des experts termi

(1)[ Autant que faire se pourra, car dans l'espèce de

née, si les trois experts sont d'accord sur un même avis, cet avis est inséré comme unanime; s'ils sont partagés entre deux avis différents, l'avis adopté par la pluralité, c'est-à-dire par deux experts, est simplement admis dans le rapport; si enfin chacun des trois se trouve d'un avis différent, et qu'ils y persistent, le rapport indique chaque avis, et les motifs de son auteur, mais sans nommer celui-ci, rien ne devant faire connaitre quel a été l'avis personnel de tel ou tel expert (1).

1200. Les experts, pour former la pluralite, sont-ils tenus de se réduire a deux opinions, ainsi que l'art. 117 le prescrit

aux juges?

plissent pas leur mandat; s'ils font plus, ils en excèdent les bornes.

Dans le cas même où ils ne s'occuperaient que des objets désignés dans le jugement qui ordonne l'expertise, ils doivent encore borner leur rapport à ce qui est de leur art: ce qu'ils disent sur le droit des parties est inutile et ne peut être pris en considération, à moins que les observations qu'ils feraient à cet égard ne fussent nécessairement liées aux apurements qu'ils auraient donnés sur la qualité, l'état, la valeur, etc., des choses qui font l'objet de leur rapport. (Voy. Brodeau sur Paris, art. 185, Poullain, t. 9, p. 480.) no 7; Jousse, sur l'art. 12 du tit. XXI; Duparc

[Nous partageons cette opinion, avec Boncenne, no 378.]

des témoins?

Le 22 avril 1825, la cour d'Orléans a décidé cette question négativement en termes généraux et absolus qui résument selon nous toute la difficulté: « Les experts, a dit cette cour, commis par un tribunal, pour vérifier s'il a été fait des améliorations à un immeuble et en quoi elles consistent, ne peuvent entendre des témoins. Le droit de faire enquête n'appartient qu'aux magistrats, et est hors du caractère et des attributions reconnus par la loi aux experts. »

Il suffit de lire en son entier l'art. 518, pour se convaincre que cette obligation ne leur est point imposée. Il résulte, en effet, de l'ensem-[1201 bis. Les experts peuvent-ils entendre ble de cet article, que les experts ne doivent, comme les juges, qu'un seul avis, à la pluralité des voix, mais qu'ils sont tenus, à la différence de ceux-ci, auxquels on ne demande pas compte de la manière dont se forme parmi eux la pluralité des suffrages, d'indiquer les diverses opinions et les motifs particuliers de chacun. Ils ne sont donc pas tenus, comme les juges, de se réduire à deux opinions; chacun | peut avoir la sienne, différente de celle des deux autres, et alors il suffira que chaque avis soit motivé le tribunal, saisi de la contestation, choisira entre les trois avis, puisque ce mode d'instruction n'est fait que pour l'éclairer, et il appliquera les dispositions de l'article 322, si aucun des avis ne le satisfait. (Voy. Comm., inséré aux Ann. du Not., t. 2, p. 322.)

[Pigeau, Comm., t. 1, p. 571 et 572, enseigne, avec raison, la même doctrine; mais Delaporte, t. 1, p. 305, est d'un avis contraire.]

1201. Les experts peuvent-ils donner, soit des renseignements, soit un avis, sur des objets qui n'auraient pas été mentionnés dans le jugement qui ordonne l'expertise? Sous l'empire de l'ordonnance, comme depuis la publication du Code, on a énoncé comme un principe certain que les experts doivent se renfermer dans la limite de la mission qui leur est donnée, c'est-à-dire qu'ils ne doivent, comme le dit entre autres Hautefeuille, p. 176, faire ni moins ni plus que ce qui leur est ordonné. Et, en effet, s'ils font moins, ils ne rem

notre Quest. 1108 bis, les experts sont bien forcés de faire connaître l'avis personnel du dissident.]

(1) Nous lisons dans les motifs de la loi de procédure du canton de Genève que « la disposition opposée a » paru aux rédacteurs de cette loi plus conforme au » système général de publicité qu'elle admet, et plus » propre à éclairer le juge, dont la mission consiste

A la vérité, d'un second arrêt de la même cour du 18 nov. 1825, il paraîtrait résulter une doctrine contraire, doctrine qui est enseignée par Pigeau, p. 219, no 339, Favard, t. 4, p. 700, no 1, et Dalloz, t. 14, p. 542, no 4.

Nous persistons néanmoins à penser, avec Boncenne, no 378, édit. de la Soc. Typ., que les tribunaux ne peuvent pas déléguer aux experts le droit de faire une enquête. Dans le cas ou cette délégation paraîtrait permise, les experts devraient alors être considérés comme insolite, toutes les formalités prescrites par le des juges-commissaires; et, pour cette enquête mème professe que les témoins ainsi entendus titre XII devraient être accomplies. Pigeau luipourraient être reprochés. ]

1202. L'avis se formant à la majorité des voix, l'expert qui ne partage pas le sentiment de la majorité peut-il donner ses motifs?

Tel est assez généralement l'usage; mais, en ce cas, l'expert ne se nomme pas. A ce moyen,

» moins à compter les voix qu'à les peser. » On a vu, au Commentaire de l'art. 317, que cette loi laisse au juge l'option d'ordonner le rapport par écrit, par exemple dans les cas de partage de biens, de dépouillement et de vérification de comptes, ou d'entendre les experts à l'audience.

le tribunal, qui n'est pas assujetti à suivre l'avis des experts, peut trouver des renseignements utiles pour adopter une opinion contraire, en même temps que l'on n'a pas à craindre qu'il soit influencé par la considération de la per

sonne.

Les 15 pluv., 24 niv. et 21 therm. an xi (Dalloz, t. 14, p. 366; Sirey, t. 3, p. 361), la cour de cass. a jugé, d'après le même principe, que les experts opérant, en vertu de l'art. 1er de la loi du 19 flor. an vi, pour savoir s'il y avait lésion dans les ventes faites en papiermonnaie, n'étaient pas tenus d'établir le produit de l'immeuble et d'indiquer une valeur comparative. Il suffisait qu'il résultat du rapport qu'ils avaient eu égard à ce produit, ce qui, du reste, était exigé à peine de nullité, suivant un autre arrêt de la même cour du

[Pigeau, Comm.,.t. 1, p. 571, renonçant à l'opinion qu'il avait émise dans sa Procédure civile, reconnaît que les avis des experts doivent être motivés alors même qu'il n'y en aurait que deux. Il avait pensé d'abord que les motifs n'étaient exigés que dans le cas où les trois experts seraient d'avis différents. Sa dernière opi-11 flor. an XIII. (Dalloz, t. 14, p. 366; Sirey, nion est la plus exacte, quoique la première t. 3, p. 239. V. notre Quest. 1198 bis.)] soit partagée par Demiau, p. 231.Pigeau ajoute, p. 572, que si les experts sont du même avis, par des motifs différents, ils doivent exprimer

ces motifs.

La cour de Colmar a jugé, le 5 mai 1809 (Dalloz, t. 14, p. 544), que le défaut d'énonciation des motifs dans un procès-verbal d'experts n'en emporte pas la nullité. La cour de Brux. a jugé directement le contraire, le 20 novembre 1820 (J. de B., 1823, 2, p. 200). Comme l'insertion des motifs est requise principalement pour éclairer la justice, si les tribunaux trouvent d'ailleurs des éléments suffisants pour juger, nous croyons qu'ils peuvent se contenter du procès-verbal non motivé. Mais si, faute de motifs, leur incertitude n'était point dissipée, ils auraient incontestablement le droit d'ordonner une nouvelle expertise, et même d'annuler la première pour en faire retomber les frais sur les experts négligents. (Voy. les Quest. 1210 et 1216.)

Il n'est pas douteux, au surplus, que les experts ne soient tenus de faire connaître les bases de leurs estimations, afin que le juge puisse en apprécier la justesse, ainsi que l'ont décidé deux arrêts, l'un de la cour de Rouen du 23 nov. 1826, et l'autre de la cour de Grenoble du 19 janv. 1827, sans que néanmoins ils soient obligés de faire connaître les valeurs partielles d'un immeuble qu'ils ont prises en considération pour fixer la valeur totale. (Nîmes, 3 pluv. an XIII; Dalloz, t. 14, p. 344; Sirey, t. 5, p. 496.)

Au reste, les motifs des divers avis sont suffisamment énoncés, si les magistrats peuvent les induire de la comparaison de chaque opinion. (Besançon, 19 mars 1822.)

[blocks in formation]

[10 Des superfluités qui se trouvent dans un rapport d'experts doivent seulement être rejetées de la taxe, mais elles n'opèrent point la nullité de l'expertise (Orléans, 30 juill. 1818; Dalloz, t. 14, p. 349);

20 Quand un rapport d'experts fait mention, lors de la clôture du procès-verbal, du nombre des vacations qui ont été employées, il est régulier, quoiqu'il ne soit pas divisé par séances; la loi exige que les vacations des experts soient taxées par le président, au bas de la mi- | CARRÉ, PROCÉDURE CIVILE.

ТОМЕ III.

ART. 319. La minute du rapport sera déposée au greffe du tribunal qui aura orla part des experts: leurs vacations seront donné l'expertise, sans nouveau serment de taxées par le président, au bas de la minute; et il en sera délivré exécutoire contre la partie qui aura requis l'expertise, ou qui l'aura poursuivie, si elle a été ordonnée d'office.

[Tar. rais., no 238.] Ord. tit. XXI, art. 12 et 14.— C. pr., art. 209, 301, 957. — [Devilleneuve, vo Expertise, nos 41 à 45. Carré, Comp., 2o part., liv. Ille, tit. III, art. 359 (1).] — (Voy. FORMULE 276.)

CCLXVI. L'expertise entièrement faite et la minute du rapport achevée, les experts ou l'un d'eux, ou même le greffier de la justice de paix, suivant les cas, dépose ou fait déposer cette minute au greffe du tribunal. Le greffier dresse acte de ce dépôt; les frais et vacations dus aux experts, ainsi que ceux de rédaction du greffier de la justice de paix, s'il a fallu recourir à cet officier, sont taxés par le président du tribunal, et le greffier en délivre exécutoire si la partie qui doit payer les frais n'a pas acquitté d'avance le montant de cette taxe.

1203. Le Code de procédure établit-il une exception à l'obligation de déposer la minute du rapport au greffe du tribunal?

Oui, et cette exception se trouve dans l'article 957, qui veut qu'en matière de vente d'immeubles par un notaire commis par un tribunal, le procès-verbal rapporté pour constater

nute (art. 119): il faut donc que le nombre de ces vacations soit indiqué; mais le législateur n'a point spécialisé le mode d'après lequel cette indication doit avoir lieu (Orléans, 5 mai 1819; Dalloz, t. 14, p. 349);

50 L'expert que les parties ont choisi pour faire entre elles le partage d'une succession indivise peut suivre, pour le règlement des vacations, la marche indiquée par l'art. 519 du Code de procédure civile, quoiqu'il ait été nommé avant l'introduction d'aucune instance en justice. (Cass., 17 avril 1838 ; Sirey, t. 58, p. 439.)]

6

« PreviousContinue »