Page images
PDF
EPUB

Un secrétaire a fait lecture d'une lettre des commissaires du roi au département de la Charente inférieure. Ils annoncent que le sieur Vallentin, maire de Saint-Jean-d'Angely, s'est opposé à l'organisation d'un district dont s'étoit chargé un des commissaires pour plus de célérité, sous prétexte que sa municipalité n'étoit pas encore organisée. Une trentaine de membres de la garde nationale de cette ville se sont oubliés jusqu'à menacer ce commissaire de le massacrer, s'il passoit outre. Il n'en sera sans doute rien; mais les commissaires ont cru devoir en prévenir l'as

semblée nationale.

Cette lettre a été renvoyée au comité des rap

ports.

A l'ordre du jour étoit la reprise de l'ordre judiciaire. M. Thouret, membre du comité de constitution, a présenté le nouveau travail du comité rédigé d'après les bases déjà décrétées. L'ordre judiciaire, a-t-il dit, étoit si dénaturé en France que le comité a cru devoir faire précéder son travail d'un titre qui pût convenir à tous les tribunaux, à tous les juges. C'est ainsi que vous avez placé en tête de la constitution la déclaration des droits de l'homme & du citoyen.

L'assemblée a décrété tout le titre premier.

Titre premier. Des juges en général.

« ART. I. La justice sera rendue au nom du roi, II. La vénalité des offices de judicature est abolie pour toujours; les juges rendront gratuitement la justice, & seront salariés par l'état. III. Les juges seront élus par les justiciables.

IV. Ils seront élus ration de ce terme, tion nouvelle, dans pourront être réélus.

pour six années : à l'expiil sera procédé à une éleclaquelle les mêmes juges

V. Il sera nommé aussi des suppléans, qui, selon l'ordre de leur nomination, remplaceront, jusqu'à l'époque de la prochaine élection, les juges dont les places viendront à vaquer dans le cours des six années. Une partie sera prise dans la ville même du tribunal, pour servir d'assesseurs, en cas d'empêchement momentané de quelques-uns des juges.

Les juges élus & les suppléans, lorsqu'ils devront entrer en activité, après la mort ou la démission de l'un des juges, recevront du roi des lettres-patentes, scellées du sceau de l'état, lesquelles ne pourront être refusées, & seront expédiées, sans retard & sans frais, sur la seule présentation du procès-verbal d'élection.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

VII. Les lettres-patentes seront conçues dans les termes suivans: « Louis, &c. Les électeurs << du (ou du ressort du tribunal d'appel de. ) nous ayant fait présenter le procèsverbal de l'élection qu'ils ont faite, conformément aux décrets constitutionels, de la personne du sieur... pour remplir, pendant six années, un office de juge dans le (ou dans le tribunal d'appel de. ) Nous avons déclaré & déclarons que le dit sieur . est juge du .. (ou du tribunal d'appel de ); qu'honneur doit lui être porté en cette qualité ; & que la force publique sera employée, en cas de nécessité , pour l'exécution des jugemens auxquels il concourra, après avoir prêté le serment requis, & avoir été duement installé, »

[ocr errors]

VIII. Les officiers chargés des fonctions du ministere public, seront nommés à vie par le roi. Les juges & les officiers du ministere public ne pourront être destitués que pour forfaiture duement jugée par juges compétens.

IX. Nul ne pourra être élu juge, ou suppléant, ou chargé des fonctions du ministere public, s'il n'est âgé de 30 ans accomplis, & s'il n'a été pendant cinq ans juge ou homme de loi exerçant publiquement auprès d'un tribunal.

X. Les tribunaux ne pourront prendre directement ou indirectement aucune part à l'exercice du pouvoir législatif, ni empêcher ou suspendre l'exécution des décrets du corps législatif sanctionnés par le roi, à peine de forfaiture.

XI. Ils seront tenus de faire transcrire purement & simplement dans un registre particulier, & de publier, dans la huitaine, les lois qui leur seront envoyées.

XII. Ils ne pourront point faire de réglemens; mais ils s'adresseront au corps législatif, toutes les fois qu'ils croiront nécessaire, soit d'interprêter une loi, soit d'en faire une nouvelle.

XIII. Les fonctions judiciaires sont distinctes & demeureront toujours séparées des fonctions administratives; les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler, de quelque maniere que ce soit, les opérations des corps administratifs ; ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions.

XIV. En toute matiere civile ou criminelle les plaidoyers, rapports & jugemens seront publics; & tout citoyen aura le droit de défendre

lui-même sa cause, soit verbalement, soit par écrit.

XV. La procédure par jurés aura lieu en matiere criminelle, (& l'instruction sera faite publiquement ainsi qu'il sera déterminé ci – après. Ajourné. )

XVI. Tout privilege en matiere de jurisdiction est aboli; tous les citoyens, sans distinction, plaideront en la même forme, & devant les mêmes juges, dans les mêmes cas.

XVII. L'ordre constitutionnel des jurisdictions ne pourra être troublé, ni les justiciables distraits de leurs juges naturels par aucunes commissions, ni par d'autres attributions, ni évocations que celles déterminées par la loi.

XVIII. Tous les citoyens étant égaux devant la loi, & toute préférence pour le rang & le tour d'être jugé étant une injustice, toutes les affaires, suivant leur nature, seront jugées dans l'ordre selon lequel le jugement aura été requis par les parties.

XIX. Les loix civiles seront revues & réformées par les législatures, & il sera fait un code général de loix simples, claires & appropriées à la constitution.

[ocr errors]

XX. Le code de la procédure civile sera incessamment réformé, de maniere qu'elle soit rendue plus simple, plus expéditive & moins coûteuse, XXI. Le code pénal sera incessamment réformé, de maniere que les peines soient proportionnées aux délits; observant que les peines soient mo→ dérées, & ne perdant pas de vues cette maxime, (de l'article 8 des droits de l'homme,) que la lot ne doit établir que des peines strictement nécessaires.

Sur l'article premier, M. Péthion a observé qu'autre chose étoit de dire que les jugemens seront exécutés au nom du roi, ou de dire que la justice sera rendue au nom du roi. La justice est une dette que la société doit à chacun de ses membres ce n'est que pour acquitter cette dette que s'exerce la justice: les jugemens se rendront donc au nom de la nation?

C'est pourquoi vous avez ordonné que le peuple nommeroit ses juges; vous avez interdit au roi & au corps législatif la faculté de prononcer des jugemens. Je demande que l'article soit décrété ainsi : Les jugemens rendus par tribunaux seront exécutés au nom du roi.

les

M. le rapporteur & M. de Fraisse ont répondu que cet article étoit déjà décrété depuis longtems, & qu'on ne pouvoit y rien changer.

Cela est vrai, a dit M. Fréteau; & comme vos décrets postérieurs l'ont suffisamment interprêté. Je ne vois pas d'inconvénient à passer outre. Son avis a été suivi.

Sur l'article 5 on a demandé au rapporteur si, dans le cas de déport des juges & suppléans, les gradués ne devoient pas les remplacer.

Il est indubitable, a répondu M. Thouret, qu'il n'y a aucun changement là-dessus, & que dans ce cas les gradués, selon l'ordre du tableau, doivent toujours tenir la place des juges & des suppléans.

Sur l'article 8 M. de Fraisse observoit : Il a été décrété que le procureur & l'avocat du roi seroient nommés par sa majesté. Le comité sembleroit vouloir éluder cette nomination ou la circonscrire,

« PreviousContinue »