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pour deux ou trois districts au delà de ce nombre.

La délibération se compliquoit, lorsque M. Démeunier s'est mis à dire que les amendemens étoient hors de saison, & que la question à décider étoit de savoir, comme l'avoit proposé M. Goupil, s'il y auroit, oui ou non, un tribunal par district. L'assemblée a été consultée, & l'affirmative a été prononcée ainsi : il y aura un tribunal par chaque district.

La seconde question est, suivant moi, a continué M. Démeunier : Quel sera le nombre de juges pour chaque tribunal de district.

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M. Péthion a développé en précurseur une opinion contraire au plan du comité, & M. de Chabroud l'a développée en messie. Voici l'opinion de l'un & de Tautre. Si l'on admet des tribunaux d'appel autres que les tribunaux de districts vous vous exposez à faire revivre l'ancien régime de l'ordre judiciaire, même ambition, même coalition mêmes passions à craindre dans les tribunaux d'apqel que dans vos cours de parlemens ces juges feront corps, s'entendront entr'eux, substitueront ce qu'on appeloit jurisprudence, à la lettre & à l'esprit de la Joi. Pour avoir une machine sagement combinée, dont les rouages simples produiroient l'effet que vous proposez dans votre constitution, placez tous les juges sur la même ligne. En vain me direz-vous que vos juges d'appel n'auront aucune suprématie quoique vous puissiez décreter, L'opinion publique décretera le contraire.

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Je sais qu'on peut dire que l'espérance de parvenir à une place plus éminente, aiguillonnera

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l'émulation des juges de district; mais cette considéra ion est bien peu de chose, comparée à l'avantage qu'il y a à attacher un juge au même lieu, sur-tout si l'on fait attention qu'il n'y a de bons jugemens que ceux qui sont calqués sur l'instruction.

Je voudrois donc que les tribunaux de districts fussent juges d'appel les uns des autres, de maniere cependant qu'il ne pût s'établir aucune réciprocité entr'eux. L'appel aura lieu à tel ou tel tribunal de district dans une certaine circonscription; & si les parties ne s'accordoient pas, je voudrois que le sort en décidât; vous éviterez par-là la jalousie que l'établissement des tribunaux d'appel fera naître nécessairement entre les différens départemens. Car, puisqu'il ne doit y en avoir qu'un pour trois départemens, les deux qui en seront privés seront mécontens, & le seront avec d'autant plus de raison, qu'ils seront obligés d'aller chercher plus loin la justice que le département qui possédera cet établissement aura à sa discrétion.

Le plan que je propose ne peut trouver d'opposition que dans les partisans des grandes villes dont une grande partie des habitans vivoit aux dépens des peuples. Mais cette industrie immorale doit avoir son terme, & ce terme est la constitution. Il a conclu, conformément à son opinion, à n'admettre que des tribunaux de district connoissant de l'appel au gré des parties, & en cas de contestation qui seroient désignés par le sort pour en connoître.

Cette opinion a paru être du goût d'une infinité de personnes ; & je crois bien qu'elle auroit

été enlevée, sans M. Bouchotte, qui s'expliquant assez médiocrement, est parvenu à faire ajourner cette question jusqu'après demain. Il est vrai qu'il a été soutenu par M. le Chapelier.

M. le président à fait lecture d'une lettre de M. Necker, par laquelle il promet de faire parvenir demain un état des recettes & dépenses du premier mai 89, jusqu'à la même époque go.

M. de Gouy a demandé & obtenu la permission de donner lecture à l'assemblée de lettres & délibérations de Saint-Domingue très-satisfaisantes.

Tout est tranquille dans nos isles, sur tout à Saint-Domingue: le décret du 8 mars y a causé une joie universelle. L'assemblée coloniale du Nord a voté des remerciemens à M. Barnave & à tous les membres qui composent le comité des colonies. Le dévouement & l'attache+ ment à l'assemblée nationale de France sont sans bornes dans cette colonie ; mais il paroît que M. de la Luzerne n'est point raccommodé avec les colons: ils demandent encore sa démission. Si on n'em+ ploie point la contrainte pour le destituer, disent-ils, la honte de ses mensonges le fera descendre de la place qu'il occupe.

Les oreilles timorées des noirs ont été scandalisées d'entendre parler ainsi d'un ministre ; ils ont déserté les bancs. Nous n'avons pas be soin de venir ici, si l'on ne peut parler des ministres, s'écrioient M. Charles de Lameth & d'autres. M. de Gouy a continué la lecture, qui a fait différentes sensations, suivant les personnes, La séance s'est levée à 3 heures.

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3.

Séance du soir, 20 juillet.

Après quelques adresses, M. Reubell a donné lecture du procès-verbal de la derniere séance.

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Un membre du comité des rapports a rendu compte, au nom de ce comité & de celui des recherches réunis, de ce qui vient de se passer à Soissons. La municipalité, voyant le prix du bled diminué a cru devoir diminuer également le prix du pain; mais la communauté des boulangers s'en est plaint au bailliage, & ce tribunal a cassé l'ordonnance municipale. Le peuple irrité s'est porté chez le procureur qui a occupé pour les boulangers, puis à la maison commune, pour faire rétablir la taxe. La municipalité rassemblée a cru devoir y accéder pour rétablir le calme; mais le bailliage a commencé contre elle une procédure criminelle. L'avis du comité a été d'annuller & de regarder comme non-avenue la procédure du bailliage, vu que le calme a suivi le rétablissement de l'ancienne taxe. Le projet de décret du rapporteur étoit rédigé en conséquence.

MM. Woydel & Chabroud ont appuyé le projet de décret Plus de 200 personnes, ont-ils dit, lors de l'insurrection, ont fait une soumission solidaire de fournir du pain au prix de la taxe. Par conséquent elle n'est pas injuste. Il ne s'agit donc plus que d'examiner si cette taxe est un acte administratif ou contentieux : or c'est un acte de pure administration: il n'eût été contentieux qu'autant que la municipalité auroit condamné à une amende. Plusieurs décrets pré

cédens attribuent cette police aux municipalités, & seulement l'appel de leurs jugemens aux tribunaux. Mais une taxe n'est pas un jugement.

par

M. Regnaud a soutenu, au contraire, que c'étoit un jugement formel. Il a placé d'un côté les boulangers, de l'autre le peuple, & au milieu le juge leur donnant les écailles de l'huître. Enfin, il a dit qu'il existoit un tarif ordonné le parlement de Paris, & exécuté par M. Parmentier, pour établir l'échelle de taxation sur le prix du bled. En conséquence, sur sa motion & celle. de M. Dumets, l'assemblée a ordonné l'apport des pieces, & le renvoi au comité de constitu

tion.

M. le président a annoncé que la cérémonie funebre ordonnée en l'honneur de Francklin par la commune de Paris, auroit lieu demain au Panthéon, à six heures du soir. Il a nommé la députation qui doit y assister.

Le reste de la séance a été occupé par un rapport du comité des domaines sur les droits d'habitation, protection & tolérance que paient les juifs de Metz & autres du royaume. Ceux de Metz paient seulement à M. de Brancas une somme annuelle de 20,000 liv. en sa qualité de courtisan. L'assemblée en a décrété l'abolition, sans indemnité. J'en rendrai compte demain.

LE HODEY.

De l'Imprimerie du RÉDACTEUR, au coin de la rue Fromenteau, place du Palais-Royal.

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