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L'une des fonctions habituelles et ordinaires des brigades de gendarmerie est de correspondre périodiquement entre elles, à des jours et sur des points déterminés par les chefs de l'arme.

Les points de correspondance sont toujours assignés, autant que possible, à égale distance des brigades qui doivent s'y rendre, et dans des lieux où les sous-officiers, brigadiers et gendarmes chargés de ce service peuvent trouver un abri momentané pour eux-mêmes et pour les individus confiés à leur garde, pendant le temps nécessaire à la remise des personnes et des objets. (Art. 366 dudit décret.)

Ces correspondances périodiques ont essentiellement pour objet le transfèrement des prisonniers de brigade en brigade, et la remise des pièces qui les concernent.

Elles ont également pour objet, de la part des sous-officiers et gendarmes qui s'y rendent, de se communiquer réciproquement les renseignements et avis qu'ils ont pu recevoir dans l'intervalle d'une correspondance à l'autre, sur tout ce qui intéresse la tranquillité publique; de concerter leurs opérations relativement à la recherche des malveillants de toute espèce dont ils auront connaissance; de se remettre réciproquement les signalements des individus prévenus de crimes et délits, évadés de prison ou des bagnes; et enfin de s'éclairer mutuellement sur les moyens à prendre pour concourir à la répression de tout ce qui peut troubler l'ordre social. (Art. 367 dudit décret.)

Soit pour les sûretés à prendre contre les évasions, soit dans l'intérêt des prisonniers et des gendarmes, les transfèrements ne doivent avoir lieu que de jour; mais, dans toutes les saisons, et principalement en été, le départ doit s'effectuer de grand matin. De même que l'on a fixé les jours de correspondance, les points intermédiaires et les lieux de gîte, on doit indiquer les heures du départ et de l'arrivée aux différentes stations, afin que les diverses escortes, parties de plusieurs points, arrivent en même temps, et que la surveillance des officiers puisse être exercée fructueusement. A cet effet, les commandants de compagnie ont soin de désigner les heures d'été et les heures d'hiver. Les heures d'été sont indiquées à dater du 1er avril au 30 septembre, et celles d'hiver, du 1er octobre au 31 mars; de cette manière, on garantit, autant que possible, les prisonniers et la troupe de la chaleur et du froid.

Les officiers s'assurent continuellement si ce service, qui est un des plus importants de l'arme, se fait avec ponctualité, humanité et régularité, et si les gendarmes sont toujours armés et dans une bonne tenue; à cet effet, ils se transportent à l'improviste, le plus souvent possible, aux divers points de correspondance indiqués.

Ils vérifient si les reçus sont donnés exactement sur les carnets, si les feuilles de service sont à jour, et ils signent les uns et les autres pour constater leur présence. (Circ. du 29 mai 1835.)

Le nombre des gendarmes employés-pour chaque correspondance est proportionné au nombre des prévenus ou condamnés transférés.

Les gendarmes chargés d'une conduite, soit qu'elle ait lieu par la correspondance, soit qu'elle ait dû être continuée jusqu'à la première brigade, doivent rentrer le même jour à leur résidence, à moins d'empêchement résultant du service ou de la distance des lieux; dans aucun cas, ils ne peuvent outrepasser la résidence de cette première brigade sans un ordre positif du commandant de la compagnie, si ce n'est lorsqu'ils en sont re

quis par le commandant de ladite brigade. (V. § 5, d'autre part; art. 11 du décret du 18 juin 1811.)

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Circonstances qui imposent aux gendarmes l'obligation de s'éloigner de la grand' route en retournant à leur résidence.

Les sous-officiers, brigadiers et gendarmes qui n'ont point de prisonniers à ramener de la correspondance, ne doivent pas revenir directement à leur résidence par la même route; il leur est enjoint de se porter dans l'intérieur des terres, de visiter les hameaux, de fouiller les bois et les lieux suspects, et de prendre, dans les fermes et maisons isolées, toutes les informations qui pourraient leur fournir des renseignements utiles. Cette marche leur est d'ailleurs tracée par le commandant de brigade, qui doit prévoir le cas. (Art. 383 du décret du 1er mars 1854.)

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Tenue et marche des gendarmes aux correspondances.

Les gendarmes, dans leurs correspondances, courses et tournées, s'ils sont montés, marchent toujours à cheval, dans une bonne tenue militaire et complètement armés, le mousqueton non recouvert du couvre-platine, avec cartouches dans la giberne; s'ils sont à pied, ils portent également leurs armes et des cartouches.

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S4. Transfèrement des prisonniers. - Formalités à remplir avant, pendant et après.

L'officier de gendarmerie ou le commandant de brigade à qui l'ordre ou le réquisitoire du transfèrement est adressé rédige un ordre de conduite, et détermine sur cet ordre le nombre de gendarmes dont l'escorte doit être composée; il désigne pareillement le sous-officier ou gendarme qui en a le commandement et est chargé de la conduite jusqu'à la station ordinaire de la brigade. Les signalements de prisonniers doivent toujours être inscrits à la suite de l'ordre de conduite. (V., au formulaire, le modèle d'ordre de conduite.)

Si les prévenus ou condamnés sont transférés en vertu d'un mandat de justice, une copie de la réquisition de l'officier de police judiciaire doit toujours être jointe à l'ordre de transfèrement et énoncer (s'il y en a) les pièces qui doivent suivre les prévenus ou les condamnés; ces pièces sont cachetées et remises au commandant de l'escorte, qui en donne son reçu au bas de l'ordre et dans les termes suivants : Reçu l'ordre et les pièces y mentionnées. (Art. 369 du décret du 1er mars 1854.)

Toutes les fois qu'il s'agit de transférer les prévenus ou condamnés de brigade en brigade, par tous moyens de transport ordinaire ou extraordinaire, les officiers de gendarmerie ont seuls le droit de donner des ordres de conduite. Dans les chefs-lieux de département, ce droit est dévolu aux commandants de compagnie; mais c'est à l'officier commandant l'arrondissement qu'il appartient de désigner et d'inscrire, en marge de ces ordres, le nombre des gendarmes et le nom du sous-officier, brigadier ou gendarme qui a le commandement de l'escorte, et qui est chargé de la conduite jusqu'à la station ordinaire de la brigade.

Si les prisonniers sont de différents sexes, ils doivent être transférés séparément. (Art. 368 dudit décret.)

Lorsque la translation par voie extraordinaire est ordonnée d'office ou demandée par le prévenu ou accusé, à cause de l'impossibilité où il se trouve de faire ou de continuer le voyage à pied. cette impossibilité est constatée par certificat de médecin ou chirurgien. (Art. 374 dudit décret.)

Les prévenus ou accusés qui peuvent faire les frais de leur transport et du retour de l'escorte, sont conduits directement à leur destination, en se soumettant aux mesures de précaution que prescrit le magistrat qui a autorisé la translation. (Art. 375 dudit décret.)

Les conduites qui ont lieu jusqu'à destination, en vertu d'un ordre ministériel, donnent droit, si les gendarmes sortent de leur département, à une indemnité fixée par les règlements d'administration. (Art. 376 dudit décret.)

Dans le cas où les prisonniers doivent être conduits en poste, en vertu d'ordres supérieurs, l'escorte prend place dans les voitures avec les prisonniers. (Art. 384 dudit décret.)

Les prévenus ou condamnés sont généralement conduits à pied de brigade en brigade, ou par les voies de fer; néanmoins ils peuvent, si des circonstances extraordinaires l'exigent, être transférés, soit en voiture, soit à cheval, sur les réquisitions motivées des officiers de justice. (Art. 385 dudit décret.)

Les officiers, sous-officiers, brigadiers et gendarmes sont exempts des droits de péage et de passage des bacs, ainsi que les voitures, chevaux et personnes qui marchent sous leur escorte. (Art. 636 dudit décret.)

L'autorité militaire est seule compétente pour ordonner la levée de l'écrou d'un militaire détenu en vertu d'un jugement ou d'ordre militaires. (Circul. du min. de la guerre du 21 fev. 1837.)

Lorsqu'il existe plusieurs individus à transférer, les ordres de conduite doivent toujours être individuels, quel que soit le nombre des prévenus ou condamnés, afin que, dans le cas où l'un deux viendrait à tomber malade en route, il puisse être déposé dans un hôpital, sans retarder la marche des autres (art. 370 du décret du 1er mars 1854). Toutes les formalités étant remplies, les gendarmes lèvent l'écrou.

Pour opérer la levée de l'écrou, les gendarmes font transcrire littéralement, en leur présence, sur le registre des concierges, les réquisitoires ou les ordres dont ils sont porteurs, et donnent un reçu au concierge, au bas de la transcription des pièces du prisonnier qui leur est remis. (V., au formulaire, le modèle de l'acte de levée d'écrou.)

$ 5.-Autorités devant lesquelles sont conduits, ou lieux où sont déposés les transférés. — Formalités à remplir.

Les prévenus arrêtés spontanément sont conduits immédiatement pardevant l'officier de police judiciaire compétent de l'arrondissement. Le procès-verbal d'arrestation, les papiers et effets saisis sur le prévenu lui sont remis.

Les condamnés et autres transférés de brigade en brigade sont déposés à la maison d'arrêt, dans chaque lieu de gîte.

Il est défendu à la gendarmerie d'escorter des prisonniers militaires

marchant isolément ou en détachement, s'ils ne sont pas munis de feuilles de route individuelles portant indication des fournitures qu'ils doivent recevoir en route.

En conséquence, toutes les fois que les commandants de brigage ont à faire de ces sortes d'escortes, le sous-intendant militaire, ou, à son défaut, le sous-préfet du lieu de départ, doit préalablement délivrer aux militaires des feuilles de route portant les indications ci-dessus. (Art. 395 du décret du 1er mars 1854.)

Les mesures ordonnées pour le transfèrement des prisonniers civils sont les mêmes que pour le transfèrement des prisonniers militaires, sauf les modifications ci-après: Les militaires escortés doivent être conduits régulièrement le même jour d'un gîte d'étape à l'autre, sans pouvoir être déposés dans les communes intermédiaires (Art. 396 et 397 dudit décret.)

Tout militaire ou individu appartenant à l'armée, qui est arrêté par une brigade de gendarmerie dont la résidence n'est pas gîte d'étape, peut être déposé, le jour de son arrestation, dans la maison d'arrêt de cette résidence. Tout militaire ainsi déposé dans une commune non gîte d'étape ne peut y rester plus de deux jours, celui de l'arrestation compris. (Art. 399 dudit décret.)

La conduite des militaires envoyés aux compagnies de discipline doit se faire, sans interruption, de brigade en brigade, et sans attendre les jours de correspondance. (Art. 401 dudit décret.)

Les individus arrêtés en vertu de mandats d'arrêt ou par jugements sont immédiatement écroués en vertu de ces pièces.

Ceux arrêtés en vertu de mandats d'amener sont conduits devant les juges mandants.

Dans chaque lieu de gîte, les prévenus ou condamnés sont déposés dans la maison d'arrêt.

En remettant les prisonniers au concierge, gardien ou geôlier, le commandant de l'escorte doit faire transcrire, en sa présence, sur le registre de la geôle, les ordres dont il est porteur, ainsi que l'acte de remise des prisonniers au concierge de la maison d'arrêt ou de détention, en indiquant le lieu où ils doivent être conduits. Le tout doit être signé, tant par les gendarmes que par le geôlier; celui-ci en délivre une copie au commandant de l'escorte pour sa décharge. (Art. 371 du décret du 1er mars 1854. - V., au formulaire, le modèle d'acte d'écrou.)

Il n'est pas exigé, à peine de nullité, que l'acte en vertu duquel a eu lieu une arrestation ou la détention d'un individu, soit transcrit en entier sur le registre d'écrou. L'inscription par extrait de cet acte est suffisante pour la validité de l'arrestation ou de la détention. (Cass., 5 fév. 1835.)

Dans le cas où il n'y a pas de maisons d'arrêt ou de détention dans le lieu de la résidence d'une brigade, on dépose les prisonniers dans la chambre de sûreté de la caserne de gendarmerie; ils y sont gardés par les gendarmes de la résidence jusqu'au départ du lendemain ou du jour fixé pour la correspondance; mais, si les prisonniers sont de différents sexes, les femmes sont remises à la garde de l'autorité locale, qui pourvoit à leur logement.

En cas de refus du maire de pourvoir à la subsistance des prisonniers déposés dans la chambre de sûreté, la gendarmerie, après l'avoir constaté par procès-verbal, est tenue de leur fournir les aliments déterminés par

les règlements en vigueur, sauf remboursement par l'autorité administrative. (Art. 372 du décret du 1a mars 1854.)

S'il n'existait ni prison ni chambre de sûreté à la caserne de la gendarmerie, pour y déposer les prisonniers, le maire pourvoirait aux moyens de les loger, et la gendarmerie les garderait.

A l'arrivée dans un lieu de station de brigade, le commandant de l'escorte remet immédiatement les prisonniers confiés à sa garde, l'ordre de transfèrement et toutes les pièces, au commandant qui doit le relever; celui-ci est tenu d'inscrire sur sa feuille de service et sur son livre carnet les noms des prisonniers, le nombre des pièces qui lui ont été remises, et le lieu où ils doivent être conduits; il devient dès lors reponsable du transfèrement. Cette inscription est toujours faite en présence du commandant de l'escorte qui a amené les prisonniers; il signe sur le registre avec le commandant de la brigade, et, en l'absence de ce dernier, avec le gendarme qui doit le suppléer; si les prévenus ont été déposés dans la chambre de sûreté de la brigade, le commandant de l'escorte qui a effectué ce dépôt s'en fait donner un reçu sur son carnet et sur le journal ou feuille de service dont il est porteur. (Art. 377 du décret du 1o mars 1854.)

Les mêmes dispositions sont suivies successivement dans toutes les brigades. Lorsque les prisonniers arrivent à leur destination, le commandant de la dernière escorte, après la remise des prévenus ou condamnés à qui de droit, se fait donner une décharge générale des prisonniers conduits et de toutes les pièces qui lui ont été confiées; à son retour à la résidence, il fait mention de cette décharge sur son registre et la joint aux autres pièces qui concernent le service de la brigade, afin de pouvoir la représenter au besoin. (Art. 378 dudit décret.)

Lorsque le transport des prévenus ou condamnés s'opère par la correspondance des brigades, le commandant de l'escorte qui a été chargé de la conduite jusqu'au point de réunion, après avoir fait vérifier, par le commandant de la nouvelle escorte, l'identité des individus confiés à sa garde, lui remet toutes les pièces mentionnées dans l'ordre de transfèrement et se fait donner un reçu du tout sur la feuille de service et sur son carnet de correspondance.

Si le nombre des prisonniers amenés à la correspondance, ou des circonstances particulières exigent un supplément, de force, le commandant de la nouvelle escorte peut requérir, parmi les gendarmes présents, le nombre d'hommes nécessaires à la sûreté des prisonniers, et les obliger à continuer l'escorte. (Art. 379 dudit décret.)

Il est expressément recommandé aux gendarmes sous l'escorte desquels marchent les prévenus ou condamnés civils ou militaires, d'empêcher qu'ils fassent un usage immodéré de vin, cidre et autres boissons enivrantes; ils doivent surtout leur interdire absolument l'usage des boissons spiritueuses. Ils peuvent aussi interdire l'emploi du tabac à fumer, lorsque cette précaution leur paraît nécessaire.

La fermeté et l'exactitude que la gendarmerie met à l'exécution de cet ordre préviennent le retour de circonstances fâcheuses, et ôtent aux prévenus l'occasion de nouvelles fautes, qui ne peuvent qu'aggraver leur position. (Art. 381 du décret du 1o mars 1854.)

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