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par une élection définitive, au remplacement du titulaire plutôt que de désigner un suppléant provisoire.

Si cependant le conseil municipal n'est pas au complet, il ne pourra pas procéder immédiatement à l'élection d'un maire définitif et il se bornera, dans ce cas, à désigner un maire provisoire.

686. Une autre question que la loi de 1855 avait laissée indécise, était celle de savoir comment il devait être pourvu provisoirement au remplacement des adjoints. La loi ancienne, de même que la nouvelle, ne parle, en effet, que du remplacement du maire. Mais la jurisprudence s'était, depuis un arrêt du Conseil d'État du 7 avril 1843, fixée en ce sens que les mêmes règles étaient applicables et que le préfet avait le droit de désigner un ou plusieurs conseillers pour seconder le maire en qualité d'adjoints; les fonctions d'adjoints pouvaient, à défaut de cette désignation, être exercées par les premiers inscrits. Cette solution nous paraît devoir aujourd'hui encore être admise, sous cette réserve que la désignation des conseillers appelés à faire provisoirement fonctions d'adjoints sera faite par le conseil municipal.

687. Nous avons vu (voir n° 684) qu'il était au moins douteux que l'on pût légalement contraindre les conseillers municipaux à accepter les fonctions provisoires de maire ou d'adjoints. Que devrait faire l'administration, si tous les conseillers refusaient cette délégation et se refusaient également à élire une municipalité définitive? La loi ne contient aucune disposition à cet égard. Elle a bien prévu le cas où un maire en exercice refuserait de faire un des actes de ses fonctions et elle autorise le préfet à en charger un délégué spécial (art. 85, no 690). Elle a prévu le cas où il serait impossible de constituer le conseil municipal et elle autorise alors le préfet à nommer une délégation pour faire fonctions à la fois de maire et de conseil municipal (art. 44 et 87, nos 288 et 716). Mais elle n'a

pas prévu le cas où, malgré l'existence d'un conseil, il serait impossible de constituer une municipalité même provisoire. La loi de 1855 gardait le même silence, mais on avait reconnu que le préfet puisait, en pareille circonstance, dans ses pouvoirs généraux d'administrateur, le droit de désigner un délégué pris, au besoin, dans une commune voisine pour gérer provisoirement la mairie.

Il semble que l'on puisse d'autant moins contester aujourd'hui au préfet le droit d'agir ainsi, que la loi nouvelle accorde expressément ce pouvoir au Gouvernement pour un cas analogue (art. 44 et 87). Il sera d'ailleurs facile de rentrer dans l'application de cet article en prononçant la dissolution du conseil municipal.

688.

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L'adjoint ou le conseiller municipal appelé à suppléer le maire absent ou empêché, le remplace, dit la loi, dans la plénitude de ses fonctions. Il exerce done toutes les attributions que le maire tient tant de la loi municipale que des lois spéciales; il aura le pouvoir de mandater les dépenses, de faire des règlements de police, de présider la commission chargée de la revision des listes électorales 1, de présider la commission administrative de l'hospice, etc.

Il conservera l'exercice de ses fonctions jusqu'à l'installation de son successeur définitif à la mairie dans les mêmes conditions que le maire titulaire.

689. A la séance du Sénat du 4 mars 1884, M. Delbreil a posé la question de savoir si les conseils municipaux pourraient, dès la promulgation de la loi nouvelle, user des pouvoirs que l'article 84 leur accorde de désigner le conseiller municipal appelé à remplacer provisoirement le maire suspendu ou révoqué, et si, par conséquent, ce conseiller remplacerait,

1. Dans ce sens, lettre du garde des sceaux du 13 février 1878 (Bulletin officiel du Ministère de la justice, 1878, p. 21).

dans la présidence du bureau électoral, le conseiller désigné par le préfet conformément à la législation précédente.

Le rapporteur a répondu qu'il croyait, quant à lui, que la loi devait être exécutée aussitôt après sa promulgation.

ART. 85.

Délégué spécial nommé pour agir en cas de refus du maire.

LOI DU 5 AVRIL 1884.

Dans le cas où le maire refuserait ou négligerait de faire un des actes qui lui sont prescrits par la loi, le préfet peut, après l'en avoir requis, y procéder d'office par lui-même ou par un délégué spécial.

LOI DU 18 JUILLet 1837, art. 15.

Dans le cas où le maire refuserait ou négligerait de faire un des actes qui lui sont prescrits par la loi, le préfet, après l'en avoir requis, pourra y procéder d'office par lui-même ou par un délégué spécial.

690. Le législateur a dû prévoir le cas où le maire refuserait de remplir un acte de ses fonctions. On ne pourrait l'y contraindre en le menaçant de poursuites judiciaires, car les tribunaux, malgré l'analogie, refuseraient de lui appliquer les peines dont nos lois criminelles frappent les dénis de justice. Il est souvent fâcheux et toujours difficile de triompher de sa résistance par une destitution, et l'administration, avant 1837, était forcée quelquefois de tolérer l'inexécution des lois 1. Aussi l'article 15 de la loi du 18 juillet 1837, que reproduit textuellement l'article 85, a-t-il autorisé le préfet à agir au lieu et place du maire, soit par lui-même, soit par un délégué spécial.

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691. Mais, il convient de le remarquer, cette disposition n'est applicable que pour les actes prescrits par la loi, tels que la rédaction des actes de l'état civil, la revision des listes électorales, etc. La Chambre des députés, lors de la discussion de

1. Exposé des motifs du projet de loi déposé à la Chambre des députés le 27 janvier 1836.

la loi de 1837, a manifesté très nettement son intention à cet égard. « Il faut, disait le rapporteur (M. Vivien), que le préfet ne soit admis à user du droit que le projet lui confère que pour les actes formels, précisément exigés par la loi, et qu'à l'aide de ce droit, il ne puisse pas annuler l'autorité municipale; pour prévenir toute incertitude, nous avons effacé de l'article tous les mots qui présentaient une signification vague et nous limitons le droit du préfet aux seuls cas où le maire a refusé ou négligé de faire un acte prescrit par la loi. » Le Conseil d'Etat, s'inspirant de la même doctrine, a annulé un arrêté préfectoral nommant un délégué spécial pour procéder à la réception de travaux communaux (22 juin 1888, Longpréles-Corps-Saints). A, au contraire, été reconnue légale la délégation donnée au sous-préfet de convoquer le conseil municipal pour l'élection du maire. (Cons. d'Ét. 24 juillet 1884, Bretenoux.)

692. La délégation prévue par cet article ne s'applique qu'à un ou plusieurs actes déterminés et ne saurait comprendre l'ensemble de l'administration communale. (Cons. d'Ét. 27 juin 1902, Seillet et autres.) Si donc tous les membres du conseil municipal refusaient de remplir les fonctions de maire, ce n'est pas dans cet article que le préfet pourrait puiser le moyen de pourvoir aux nécessités de l'administration. Nous avons expliqué, sous l'article précédent, comment il pourrait procéder dans ce cas. (Voir nos 684 et 687.)

693.

Pour l'application de l'article 85, il faut que le préfet ait mis d'abord en demeure le maire qui refuse ou néglige de remplir un de ses devoirs, en lui assignant un délai.

La délégation ne peut être donnée par le même acte qui contient la mise en demeure adressée au maire. (Cons. d'Et. 7 juin 1889, Arnay-le-Duc.)

La mise en demeure n'a pas besoin de revêtir la forme d'un arrêté. Il suffit que le maire ait été invité à se conformer à la

loi. Ainsi jugé par le rejet d'un recours dirigé contre la nomination d'un délégué spécial chargé d'installer un instituteur au refus du maire. (Cons. d'Ét. 8 mars 1901, Nouguès.)

694. Si le maire, après avoir refusé de faire un acte prescrit par la loi, revient sur son refus, il a le droit d'y procéder à l'exclusion du délégué spécial nommé par le préfet. (Cons. d'Ét. 23 juillet 1897.)

695. — La loi ne parle que du maire; mais il faut entendre par là tous ceux qui sont investis des fonctions municipales, par exemple l'adjoint faisant fonctions de maire ou le conseiller municipal qui, à défaut de maire ou d'adjoint, en remplit les fonctions. C'est ce que le Conseil d'État a déclaré à propos du conseiller municipal appelé, conformément à l'article 17 (voir n° 83), à présider le bureau électoral. Le préfet peut, en cas de refus de ce conseiller et après mise en demeure, nommer un délégué spécial pour la présidence des opérations électorales (23 juillet 1897, Grau-du-Roi). [Voir no 697.]

696. Un préfet ne peut autoriser le fonctionnaire spécial qu'il a délégué, à passer cette délégation à un autre agent, car la délégation prévue par la loi ne peut émaner que du préfet (27 février 1841, Bull. off: du Min. de l'int., 1841, p. 48).

697.

Souvent il arrive que le préfet est amené à nommer un délégué spécial pour présider, en cas de renouvellement intégral du conseil municipal, les opérations électorales, parce que l'ancien maire et l'ancien adjoint refusent de siéger ou sont révoqués ou suspendus et que l'on ne peut recourir aux anciens conseillers municipaux dont les pouvoirs sont expirés (art. 41). Le Conseil d'Etat a admis la régularité de ce procédé1.

1. Voir pourtant l'arrêt rendu le 19 janvier 1901 par la première sous-section du contentieux et qui paraît exiger, dans ce cas, la mise en demeure des anciens conseillers municipaux (no 85, note).

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