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Pour les permis de stationnement accordés par le préfet sur le refus du maire, voir nos 1112 et suivants.

1111. - Droits de police sur les cours d'eau navigables. L'article 98, qui donne au maire la police de toutes les voies de communication en ce qui touche la circulation, ne s'applique qu'à la voirie par terre ; mais la voirie par eau reste soumise à des règles spéciales. C'est ainsi que la police des cours d'eau navigables appartient au préfet.

Le Conseil d'État l'a reconnu en rejetant le pourvoi formé par le maire de Lyon contre un arrêté préfectoral qui avait accordé à une société l'autorisation de donner des joutes et autres jeux nautiques sur la Saône. En vain le maire invoquait-il les dispositions du 2 de l'article 98 qui l'autorisait à donner, moyennant le paiement des droits fixés par un tarif, des permis de stationnement sur les rivières, ports et quais fluviaux; le Conseil d'État a déclaré que l'autorisation sollicitée ne rentrait pas dans la catégorie des permis qu'il appartient au maire de délivrer en vertu de l'article 98 (9 février 1899, Jurisprudence municipale et rurale, 1900, III, p. 65).

Droit du préfet d'accorder des permissions de voirie refusées, sans motifs légitimes, par le maire.

1112. Nous abordons, avec le dernier paragraphe de l'article 98, un autre ordre d'idées. Il ne s'agit plus des droits de police du maire sur les voies dépendant de la grande ou de la moyenne voirie, droits que le maire, nous l'avons vu, partage avec l'autorité supérieure, mais de l'exercice des droits du maire sur les voies publiques placées dans ses attributions, c'est-à-dire sur la voirie urbaine et les chemins vicinaux ordinaires ou ruraux. C'est au maire, en effet, qu'appartient le droit de délivrer les autorisations de voirie (alignements, autorisations de bâtir, de réparer, saillies, pose de canalisations, etc. (Voir no 764.)

1113. On admettait, même avant la loi de 1884, que si le maire refusait un alignement ou une autorisation de bâtir dans les limites prévues par le règlement, le préfet pouvait, en vertu de l'article 15 de la loi du 18 juillet 1837, se substituer au maire et accorder l'autorisation. Il s'agissait là, en effet, d'un acte prescrit par la loi au maire, qui ne peut priver arbitrairement les propriétaires du droit qu'ils ont de construire en bordure de la voie publique. Aujourd'hui, c'est en vertu de l'article 85 que le préfet statuerait.

1114. Mais lorsqu'il s'agit des autres permissions de voirie, telles que s illies, établissement de canalisations, etc., les particuliers ne pouvant invoquer un droit, le préfet n'avait pas, autrefois, le pouvoir de se substituer au maire pour les accorder (Cons. d'Ét. 10 décembre 1880, Poirel); or, il est arrivé quelquefois que le maire, abusant de ses pouvoirs, refusait arbitrairement, et sans motifs légitimes, de semblables permissions, alors qu'il n'aurait dû les refuser que dans le cas où l'intérêt de la conservation de la voie publique ou de la sécurité de la circulation lui en faisait un devoir. Ces abus soulevaient de nombreuses réclamations; ils entravaient les irrigations, le drainage, les prises d'eau, etc. Pour y mettre un terme, l'article 98 déclare que, quand le refus du maire n'est pas motivé par l'intérêt général, le préfet pourra accorder directement l'auto

risation'.

1115. Le préfet est, sous la réserve du recours hiérarchique au ministre, seul juge de l'intérêt général. Le maire ne

1. Le texte primitif portait que « le préfet ne pourrait, dans ce cas, motiver ses arrêtés que par cet intérêt général et spécialement par les nécessités de la circulation ou de la sécurité publique »; mais cette phrase a été retranchée par le Sénat, en seconde délibération, comme superflue. Il est évident que le préfet doit uniquement examiner si l'intérêt général permet d'accorder l'autorisation sollicitée on exige qu'elle soit refusée. Mais cette pensée est très suffisamment indiquée par le texte, qui porte que le maire ne peut motiver son refus que par l'intérêt général (séance du 15 mars 1884).

serait pas admis à discuter cette question devant le contentieux. (Cons. d'Ét. 31 janvier 1890, Pétose.)

1116.

Quant aux recours contentieux que peuvent diriger les particuliers contre les décisions rendues en matière de permissions de voirie, il faut distinguer s'il s'agit d'une permission constituant un droit pour le particulier, telle que l'autorisation de bâtir, ou si, au contraire, il s'agit d'une permission qui dépend du pouvoir discrétionnaire du maire.

Pour les premières, le refus peut donner lieu à un recours contentieux; pour les secondes, au contraire, le recours n'est pas admis, alors même que le refus ne serait pas basé sur l'intérêt de la voirie. (Cons. d'Ét. 6 mars 1885, Bonhomme ; 6 mars 1885, Saurin.)

Les retraits d'autorisation, quelles que soient les permissions, sont assimilés à la première catégorie par le Conseil d'État '.

1117. Les autorisations de voirie peuvent être subordonnées à certaines conditions et notamment au paiement d'une taxe. (Cons. d'Ét. 4 février 1897, Rivière.) [Voir ncs 1106 et 1108.]

Le préfet peut retirer l'autorisation si le permissionnaire ne remplit pas, dans le délai prescrit, les conditions imposées. (Cons. d'Ét. 29 janvier 1897.) [Voir no 1109.]

Ces permissions ne constituent pas pour ceux qui les obtiennent un droit exclusif, à moins qu'elles ne résultent d'un traité liant la commune. (Cons. d'Ét. 14 juin 1899, Bourges.)

Dans tous les cas, l'autorisation accordée par le préfet ne dispense pas le bénéficiaire de se conformer aux règlements géné

1. Le Conseil d'État a décidé, contrairement à un arrêt de la Cour de cassation, qu'un maire pouvait, sans détournement de pouvoirs, retirer à un entrepreneur d'éclairage électrique la permission d'établir des fils sur la voie publique, pour dégager la responsabilité pécuniaire de la commune et faire cesser une situation inconciliable avec l'autorité de la chose jugée (27 décembre 1901, Nevers; 6 juin 1902, Bar-le-Duc, Jurisprudence municipale et rurale, III, p. 116).

FOI MUNICIPALE. -- I.

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raux établis par le maire. (Trib. corr. de la Seine 7 janvier 1898, Revue gén. d'adm., 1898, t. I, p. 71.)

1118. Le droit du préfet s'étend, d'après le texte de la loi, aux «< permissions de voirie à titre précaire ou essentiellement révocable ayant pour objet, notamment, l'établissement dans le sol de la voie publique des canalisations destinées au passage ou à la conduite, soit de l'eau, soit du gaz ». Cette énumération n'est pas limitative; cela ressort clairement du mot notamment; mais faut-il y comprendre les simples autorisations de stationnement ou de dépôt ? Nous ne voyons dans le texte rien qui permette d'excepter ce genre d'autorisations.

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1119. Mais, si l'on admet que le préfet peut accorder, malgré le maire, des permis de stationnement ou de dépôt sur le domaine de la voirie purement municipale, on sera amené à reconnaître que le préfet pourra, à plus forte raison, en accorder sur les voies dépendant de la grande ou de la moyenne vicinalité, au moins lorsqu'il existera un tarif1, puisque les pouvoirs du maire, à l'égard de ces voies, sont moins étendus et que le droit d'y délivrer les autorisations de stationnement ( 2 de l'article 98) ne lui a été concédé que par une sorte de délégation de l'autorité de laquelle ces voies relèvent.

ART. 99.

Droit du préfet de prendre les mesures de police que le maire refuserait ou négligerait de prendre.

LOI DU 5 AVRIL 1884.

Les pouvoirs qui appartiennent au maire, en vertu de l'article 91, ne font pas obstacle au droit du préfet de prendre, pour toutes les communes du département ou plu

(Cet article n'a pas de correspondant dans la législation municipale antérieure.)

1. Nous disons: quand il existera un tarif, parce que la loi ne prévoit pas la concession de permissions à titre gratuit.

sieurs d'entre elles, et dans tous les cas où il n'y aurait pas été pourvu par les autorités municipales, toutes mesures relatives au maintien de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques.

Ce droit ne pourra être exercé par le préfet à l'égard d'une seule commune qu'après une mise en demeure au maire restée sans résultat.

1120. Cet article n'existait pas dans le projet voté en première délibération par la Chambre des députés. Il a été introduit par la commission entre les deux lectures, sous la forme suivante, et adopté sans observation (séance du 27 octobre 1883):

Si le maire refuse ou néglige de prendre les mesures exigées par une bonne police municipale ou rurale, le préfet, après une mise en demeure restée sans résultat, y pourvoit selon les circonstances, soit par des arrêtés individuels, soit par des règlements applicables à toutes les communes du département ou à plusieurs de ces communes.

Contesté dans le sein de la commission du Sénat comme constituant un empiétement sur les franchises municipales, ce texte fut maintenu par la commission, qui a pensé qu'il se justifiait « d'abord par l'impossibilité absolue, en fait, de fixer exactement la ligne de démarcation entre la police d'intérêt général et la police municipale proprement dite, et ensuite par la nouvelle situation d'indépendance créée au maire par son origine même ». (Rapport de M. Demôle, 26 janvier 1884.)

Mais avant que la discussion s'ouvrit, la commission modifia sa rédaction. Le nouveau texte qu'elle soumettait au Sénat était ainsi conçu :

Si le maire refuse ou néglige de prendre les mesures de police municipale ou rurale qui rentrent dans ses attributions en vertu de l'article 97, le préfet pourra, après une mise en demeure restée sans résultat, y pourvoir d'urgence.

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