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provoqué l'interdiction, parce que leur impartialité peut n'être pas entière. Cependant le conjoint et les enfants de la personne dont l'interdiction sera provoquée, pourront y être admis sans y avoir voix délibérante.

Quand le conseil de famille est assemblé, le greffier du juge de paix dresse procès-verbal de la délibération, sur timbre, en mentionnant l'avis et les observations de chacun des parents. Une expédition de cette délibération est remise à l'avoué du demandeur, lequel la communiquera au tribunal.

<< Après avoir reçu l'avis du conseil de famille, le tribunal interrogera le défendeur à la chambre du conseil : s'il ne peut se présenter il sera interrogé dans sa demeure, par un des juges à ce commis, assisté du greffier. Dans tous les cas, le procureur de la République sera présent à l'interrogatoire. » (Art. 496.)

Disons de suite que le défendeur devra avoir connaissance de la requête et de la délibération du conseil de famille. Elles devront lui être signifiées. C'est-à-dire qu'il en aura copie entière.

Si, d'après les pièces produites et l'interrogatoire, la conviction des juges est faite, ils prononceront l'interdiction. Si, au contraire, ils hésitent encore, le tribunal pourra ordonner une enquête. Le Code de procédure (art. 893), dit à ce propos : « Il pourra ordonner, si les circonstances l'exigent, que l'enquête sera faite hors de la présence du défendeur; mais, dans ce cas, son conseil (en d'autres termes son avoué) pourra le représenter. » Administrateur provisoire. Après le premier interrogatoire, le tribunal commettra, s'il y a lieu, un administrateur provisoire, pour prendre soin de la personne et des biens du défendeur. (Art. 497.)

La loi ne dit pas quels sont les pouvoirs de cet administrateur, mais on s'accorde à reconnaître que, à moins de pouvoirs déterminés par le tribunal, il ne pourra que

faire des actes conservatoires relativement aux biens du défendeur, veiller à sa sécurité et pourvoir à la satisfaction de ses besoins.

Il arrive souvent (et cette pratique ne saurait être trop recommandée pour éviter des frais) que la demande d'interdiction est faite dans le simple but d'obtenir la nomination d'un administrateur provisoire; puis, cette nomination faite, on laisse l'instance de côté, jusqu'à la mort de l'aliéné ou de l'imbécile, ou (ce qui est plus rare) jusqu'à sa guérison s'il est fou; quant aux imbéciles, il est bien évident, d'après la définition que nous en avons donnée, qu'ils ne peuvent pas être guéris.

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Du jugement. « Le jugement sur une demande d'interdiction ne pourra être rendu qu'à l'audience publique, les parties entendues ou appelées.

<< Tout arrêt ou jugement portant interdiction ou nomination d'un Conseil judiciaire, sera, à la diligence des demandeurs... inscrit sur les tableaux qui doivent être affichés dans la salle de l'auditoire et dans les études de notaires de l'arrondissement. » (Art. 501.)

SECTION V

Des effets de l'interdiction et de la tutelle des interdits.

L'interdit est frappé d'une incapacité générale, qui a pour résultat de nécessiter sa mise en tutelle et de frapper de nullité les actes qu'il pourrait consentir, et même certains d'entre ceux qu'il aurait consenti antérieurement au jugement rendu contre lui:

« S'il n'y a pas eu d'appel du jugement d'interdiction rendu en première instance, ou si le jugement est confirmé sur appel, il sera pourvu à la nomination d'un tuteur et d'un subrogé-tuteur à l'interdit. L'administrateur provisoire cessera ses fonctions et rendra compte au

tuteur, s'il ne l'est pas lui-même. » (Art. 895 du Code de procédure civile.)

« Le mari est de droit tuteur de sa femme interdite »>, dit encore la loi. Cependant, malgré les termes généraux et impératifs de cette prescription, on s'accorde à reconnaître qu'il n'y aurait pas lieu de l'appliquer en cas de séparation de corps.

Bien qu'il y ait rarement lieu de faire interdire une femme mariée, puisqu'elle a pour protecteur naturel son mari, il peut cependant se présenter des cas où il y ait lieu de lui appliquer ce supplément de protection. 1o Si son contrat de mariage lui laisse certaine liberté d'administration de ses biens; 2° S'il y a lieu d'accomplir certains actes: une constitution de dot, par exemple; 3° S'il y a lieu de craindre qu'elle ne dépouille sa famille de son bien par un testament.

<< La femme pourra être nommée tutrice de son mari. En ce cas, le conseil de famille règlera la forme et les conditions de l'administration, sauf le recours de la femme devant les tribunaux, si elle se croyait lésée par l'arrêté de la famille ». (Art. 507.)

La femme qui est investie de la tutelle de son mari n'est pas pour cela relevée de l'incapacité qui la frappe comme femme mariée, seulement elle devra demander à la justice les autorisations nécessaires dont elle peut avoir besoin (voir contrat de mariage). Elle administrera, comme un tuteur ordinaire, les biens personnels de son mari et ceux de la communauté, mais elle ne pourra les aliéner, ni emprunter, ni consentir d'hypothèques sans y être autorisée par le Conseil de famille. Cette autorisation ne lui sera accordée qu'en cas de nécessité absolue et pour un avantage évident. Le Conseil de famille indiquera les immeubles qui devront être vendus de préférence, à quelles conditions et dans quelles formes.

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Si la femme est tutrice, le conseil de famille peut res

treindre les pouvoirs qui, d'après la règle ordinaire, devraient appartenir à un tuteur. Mais si la tutelle du mari est confiée à un autre qu'à la femme, ce tuteur exercera tous les droits du mari, tant sur les biens personnels de la femme que sur ceux de la communauté. Cependant, la puissance maritale ne lui sera pas dévolue.

Dans la tutelle ordinaire, le tuteur, à moins de motifs graves, est obligé de conserver la tutelle du mineur; ici, au contraire, « nul, à l'exception des époux, des ascendants ou des descendants, ne sera tenu de conserver la tutelle d'un interdit au-delà de dix ans. A l'expiration de ce délai, le tuteur pourra demander et devra obtenir son remplacement. » (Art. 508.)

La loi veut en outre qu'il soit réalisé, autant que pos sible, des économies sur les revenus du mineur; ici, au contraire, « les revenus d'un interdit doivent être essentiellement employés à adoucir son sort et à accélérer sa guérison. Selon les caractères de sa maladie et l'état de sa fortune, le conseil de famille pourra arrêter qu'il sera traité dans son domicile, ou qu'il sera placé dans une maison de santé, et même dans un hospice, »> (Art. 510.)

<«< Lorsqu'il sera question du mariage de l'enfant d'un interdit, la dot ou l'avancement d'hoirie et les autres conventions matrimoniales seront réglées par un avis du Conseil de famille, homologué par le tribunal, sur les conclusions du procureur de la République. » (Art. 511.)

Mais l'enfant d'un interdit peut avoir à s'établir autrement que par mariage; il peut vouloir acheter une étude ou un fonds de commerce. Que décider, en ce cas ? Les tribunaux et les juristes s'accordent à reconnaître qu'en suivant les formalités ci-dessus, il pourrait être fait à l'enfant les avancements d'hoirie indispensables.

SECTION VI

Des actes passés par l'interdit.

Des actes accomplis dans l'avenir. «L'interdiction aura son effet à partir du jugement. Tous actes passés postérieurement par l'interdit seront nuls de droit. »> (Art. 502.) Cependant la nullité de ces actes doit être prononcée par la justice; en disant nuls de droit, la loi a voulu dire que les tribunaux ne pourraient pas en prononcer la validité et qu'ils doivent les déclarer nuls sans en pouvoir examiner le mérite. L'action en nullité se prescrit par dix ans.

Actes antérieurs à l'interdiction. Les actes antérieurs à l'interdiction pourront être annulés, si la cause d'interdiction existait notoirement à l'époque de l'interdiction.» (Art. 503.)

« Au cas ou la cause d'interdiction n'existait pas noloirement, un acte antérieur à l'interdiction peut néanmoins être annulé, s'il porte en lui-même la preuve de l'imbécillité ou de la démence. » Ainsi décide la Cour de Cassation, en son audience du 5 juin 1882.

« Après la mort d'un individu, les actes par lui faits ne pourront être attaqués pour cause de démence, qu'autant que son interdiction aurait été prononcée ou provoquée avant son décès; à moins que la preuve de la démence ne résulte del acte même qui est attaqué. » (Art. 504.)

L'interdiction d'un individu cesse, tout naturellement, par sa mort. Mais la main-levée peut en être prononcée par la justice, si l'individu a repris l'entière possession de ses facultés intellectuelles.

« L'interdiction, dit l'article 512, cesse avec les causes qui l'ont déterminée; néanmoins la main-levée ne sera prononcée qu'en observant les formalités prescrites pour parvenir à l'interdiction, et l'interdit ne pourra reprendre

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