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réclamé en nature par le donataire, qu'autant que l'effet, par le partage, tombe au lot des héritiers du mari; si l'effet ne tombe point dans le lot de ces héritiers, le légataire doit être récompensé de la valeur totale de l'effet donné, sur la part des héritiers du mari dans la communauté et sur les biens personnels de ce dernier.

Supposons maintenant que j'aie légué à Paul les trois quarts des biens de la communauté, ma femme sera autorisée à n'en délivrer que la moitié, mais le légataire pourra se faire payer en argent par mes héritiers la valeur du quart qui ne lui a pas été délivré.

Nous verrons au titre des successions que le legs de la chose d'autrui est nul; ce pouvoir du mari de léguer une chose qui ne lui appartient pas est donc une dérogation aux règles générales qui régissent les successions.

3° Condamnations criminelles. Le mari peut être condamné à des amendes par la justice répressive et la communauté les paiera sauf son droit à récompense sur ses biens personnels.

Si le mari était condamné à des dommages-intérêts, la communauté les paierait encore, mais cette fois sans avoir droit à récompense; distinction difficile à justifier.

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<<< Les actes faits par la femme sans le consentement du mari, et même avec l'autorisation de justice, n'engagent point les biens de la communauté. » (Art. 1426.)

Quelle serait donc la situation d'un créancier envers lequel la femme se serait obligée avec l'autorisation de justice? Il se fera payer sur les biens personnels de la femme, et sur la nue-propriété seulement, car l'usufruit appartient à la communauté.

Si la femme s'était engagée sans aucune autorisation, son engagement serait nul. Mais si sa dette résultait

d'un crime ou d'un délit, son créancier aurait encore droit de poursuite sur la nue propriété de ses biens personnels.

Si la femme est marchande publique (et elle ne peut l'être qu'avec l'autorisation de son mari), tous les engagements qu'elle peut contracter l'engageront personnellement sur ses biens propres, sur ceux de la communauté, et les biens personnels du mari seront eux-mêmes le gage des créanciers de la femme commerçante.

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Nous avons dit que les actes accomplis par la femme, même avec l'autorisation de justice, n'engageaient point la communauté; il y a cependant à cette règle deux exceptions:

1° Lorsqu'il s'agit de tirer le mari de prison. La justice pourra autoriser, dans ce cas, la femme à emprunter, et l'engagement qu'elle aura pris aura les mêmes effets que si elle avait été autorisée maritalement.

2o Lorsque la femme veut pourvoir à l'établissement d'un enfant commun, et que son mari est absent. Ici, il lui est impossible de se pourvoir de l'autorisation maritale, en conséquence l'engagement contracté avec permission de justice aura tous les effets qu'il aurait produits si le mari avait donné son autorisation.

La femme qui ne peut engager la communauté par ses actes licites, le peut encore moins par ses crimes et par ses délits. Si cependant il s'agissait d'un vol et que la communauté en eût profité, il est bien évident que la communauté serait engagée dans ce cas; tout au contraire, les amendes encourues par la femme ne pourraient être recouvrées que sur la nue propriété de ses biens personnels. Et cette décision doit s'appliquer aux dommages-intérêts.

SECTION V

De l'administration des biens personnels de la femme.

De même que le mari a le droit de jouissance sur tous les biens personnels de la femme, de même il en a la libre administration. Mais s'il administre la communauté en souverain' maître, l'administration des biens propres de la femme lui impose certaines obligations : il est responsable de tout dépérissement des biens personnels de sa femme, s'il y a faute de sa part.

Passons à ses droits.

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1o Actions en justice. Elles sont mobilières ou immobilières.

Le mari a l'exercice de toutes les actions mobilières qui appartiennent à sa femme. Il peut poursuivre en justice tous les débiteurs qu'elle peut avoir pour les forcer à payement; d'où résulte pour lui le droit de toucher les sommes qui proviennent de ces poursuites, même si ces sommes représentent le prix d'un immeuble propre à la femme et aliéné avec son consentement. Le mari' n'a pas le droit de vendre un propre de sa femme; mais si celle-ci le vend, cette vente a pour résultat de transformer l'immeuble en une somme d'argent que le mari a le droit de toucher, parce qu'une créance est de sa nature' immobilière.

S'il s'agit d'actions immobilières, il faut distinguer entre les actions possessoires et les actions petitoires.

A. Actions possessoires. On appelle ainsi les actions relatives à la jouissance, à la possession, et qui laissent intacte la question de propriété; elles sont de la compé tence du juge de paix et seul le mari a le droit de les exercer en justice. A son défaut, la femme se fera autoriser par justice et les exercera elle-même.

B. Quant aux actions immobilières dites petitoires, c'est-à-dire qui peuvent soulever la question de propriété, elles ne peuvent être exercées que par la femme, avec l'autorisation maritale ou, à défaut, avec la permission de justice.

2° Aliénations. Le mari ne peut aliéner les immeubles personnels de sa femme sans son consentement; et il ne faut pas entendre par le mot aliéner seulement la vente, la donation ou l'échange; il faut encore savoir que toute concession d'usufruit, de servitude ou d'hypothèque sur les propres de la femme serait nulle, si elle avait été faite sans le consentement de cette dernière.

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A. Baux. Comme administrateur des biens de sa femme, le mari peut les donner à bail. « Les baux que le mari seul a faits des biens de sa femme pour un temps qui excède neuf ans, ne sont, en cas de dissolution de la communauté, obligatoires vis-à-vis de la femme ou de ses héritiers que pour le temps qui reste à courir soit de la première période de neuf ans, si les parties s'y trouvent encore, soit de la seconde, et ainsi de suite, de manière que le fermier n'ait que le droit d'achever la jouissance de la période de neuf ans où il se trouve. Les baux de neuf ans ou au-dessous que le mari seul a passés ou renouvelés des biens de sa femme, plus de trois ans avant l'expiration du bail courant, s'il s'agit de biens ruraux, et plus de deux ans avant la même époque s'il s'agit de maisons, sont sans effet, à moins que leur exécution n'ait commencé avant la dissolution de la communauté. » (Art. 1429 et 1430.)

Qu'arrivera-t-il si le mari outrepasse les limites cidessus, c'est-à-dire s'il a passé un bail de plus de neuf ans, ou s'il a renouvelé un bail de plus de trois ans pour les biens ruraux ou de deux ans pour les maisons avant l'expiration du bail courant?

Dans le premier cas, il a fait un bail de plus de neuf

ans. Ce bail est obligatoire pour le mari et le fermier, et la femme elle-même ne peut attaquer cette convention pendant la durée de la communauté. Mais si la société conjugale vient à être dissoute, la femme pourra deman. der la réduction de la durée du bail, s'il reste plus de neuf ans à courir au moment de la dissolution; comme aussi, elle pourra en exiger l'exécution complète, si elle le préfère. Les héritiers de la femme ont le même droit qu'elle. Et lorsque la femme ou ses héritiers demandent la réduction de la durée du bail, le fermier ou le locataire n'a droit à aucune indemnité pour la privation de la jouissance sur laquelle il comptait.

Dans certaines localités, notamment dans le sud-ouest, il est d'usage de payer par avance les loyers et les fermages. Le mari pourra, en se conformant aux usages locaux, faire une stipulation semblable; cependant, il dépasserait son droit en se faisant payer plusieurs années d'avance, et, à la dissolution de la communauté, la femme pourrait exiger un second paiement des fermages ou locations dont elle aurait été ainsi frustrée. Mais pendant le cours du mariage elle n'aurait rien à dire.

Dans le deuxième cas, le mari a renouvelé un bail de plus de trois ans avant l'expiration du bail courant pour un bien rural, ou de plus de deux ans pour une maison. Bail nul et sans effet si l'exécution n'en est pas commencée à la dissolution du mariage, et si la femme ou ses héritiers le veulent ainsi; bail valable au contraire selon la volonté de la femme ou de ses héritiers. Si au contraire l'exécution du bail consenti ou renouvelé est commencée à la dissolution de la communauté, ce bail sera obligatoire pour la femme ou ses héritiers pour une période de neuf ans, quand bien même il aurait été fait pour un temps plus long, et le surplus aura ou n'aura pas d'effet au gré de la femme ou de ses héritiers.

Ces dispositions de la loi ne sont applicables qu'aux

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