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Exemple.

Ordinairement, le moment exact du décès d'une personne est connu et certain, puisqu'il est constaté par l'officier public; mais, dans d'autres cas assez fréquents (naufrage, incendie, etc.), il n'est pas possible de savoir, d'une façon certaine, la seconde précise d'un décès, et cependant l'intérêt de la connaître peut être énorme. Deux frères, Pierre et Paul, n'ont aucun parent et ils sont tous les deux mariés. Si Pierre est mort le premier, sa succession est recueillie par Paul, qui l'a transmise avec la sienne à sa femme; si, au contraire, Pierre a survécu, la femme de celui-ci recueille les deux successions. Quand l'ordre de survie ne peut être prouvé dans une catastrophe, la loi admet des présomptions; en d'autres termes, elle fait des suppositions fondées sur des raisonnements. En pareil cas, on recherchera d'abord, en fait, s'il n'est pas possible d'établir le lieu d'origine de l'incendie, la situation respective des personnes dans l'éboulement, etc. Tout cela est souvent fort difficile à établir et prête à mille chicanes, d'autant plus probables que les textes législatifs sont à peu près muets.

Le législateur a divisé la vie en trois périodes: 1° De la naissance à 15 ans; 2° De 15 à 60 ans; 3° Au-dessus de 60 ans.

Quand deux individus décèdent ensemble dans la première période, c'est le plus âgé qui est réputé le plus fort et qui, en conséquence, est présumé avoir survécu.

Quand ils sont dans la période moyenne, de 15 à 60 ans, les forces étant réputées égales, on suppose la survie du plus jeune.

Si, au contraire, les deux individus dont il s'agit sont dans la troisième période de la vie, c'est-à-dire au-dessus de 60 ans, le plus jeune est présumé avoir survécu.

Cependant, si, entre les deux défunts, il y a différence de sexe, l'homme est présumé survivant, à âge égal, c'est-à-dire à un an près et dans la période moyenne.

Le Code a encore prévu le cas où les deux parents appartiennent, l'un à la première période, l'autre à la troisième, il attribue alors la présomption de survie au plus jeune.

S'agit-il d'une personne de la deuxième catégorie en présence d'une autre de la première ou de la seconde, les textes sont muets; mais il est évident qu'ici la présomption est suffisamment indiquée en faveur de cette personne dans toute la force de l'âge.

SECTION II

Des diverses espèces de successeurs.

Le Code divise les successeurs en deux classes : 10 Les héritiers légitimes;

2o Les successeurs irréguliers.

Les premiers sont les parents légitimes jusqu'au douzième degré; les autres sont : 1° les enfants naturels et leurs pères et mères; 2° le conjoint survivant; 3° l'Etat.

La différence capitale entre les héritiers et les successeurs irréguliers, c'est que les premiers sont saisis des biens du défunt, tandis que les autres ne le sont pas.

Qu'est-ce donc que la saisine ? On peut la définir: « Une disposition de la loi en vertu de laquelle les héritiers légitimes sont investis de plein droit de tous les biens, actions et obligations du défunt, au moment de son décès.» « Le mort saisit le vif son plus proche hoir », disaient énergiquement nos vieilles coutumes.

Les autres successeurs, n'étant pas saisis, ne peuvent s'emparer des biens du défunt de leur autorité privée; ils doivent se faire envoyer en possession, en s'adressant à la justice.

Qu'il s'agisse d'héritiers légitimes ou de successeurs irréguliers, toutes les dettes et charges d'une succession passent à ceux qui la recueillent, quand bien même elles dépasseraient la valeur du patrimoine laissé par le défunt.

Une loi toute récente a modifié le degré de successibilité des époux survivants. En voici le texte :

Loi du 9 mars 1891.

L'article 767 du Code civil est ainsi modifié :

Art. 767. Lorsque le défunt ne laisse ni parents au degré successible, ni enfants naturels, les biens de sa succession appartiennent en pleine propriété au conjoint non divorcé qui lui survit et contre lequel n'existait pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée.

Le conjoint survivant non divorcé qui ne succède pas à la pleine propriété, et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée, a, sur la succession du prédécédé, un droit d'usufruit qui est :

D'un quart, si le défunt laisse un ou plusieurs enfants issus du mariage;

D'une part d'enfant légitime le moins prenant, sans qu'elle puisse excéder le quart, si le défunt a des enfants nés d'un précédent mariage;

De moitié dans tous les autres cas, quels que soient le nombre et la qualité des héritiers.

Le calcul sera opéré sur une masse faite de tous les biens existants au décès du de cujus, auxquels seront réunis fictivement ceux dont il aurait disposé, soit par acte entre vifs, soit par acte testamentaire au profit de successibles, sans dispense de rapport.

Mais l'époux survivant ne pourra exercer son droit que sur les biens dont le prédécédé n'aura disposé ni par acte entre vifs, ni par acte testamentaire, et sans préjudicier aux droits de réserve ni aux droits de retour.

11 cessera de l'exercer dans le cas où il aurait reçu du défunt des libéralités, même faites par préciput et hors part, dont le montant atteindrait des droits que la présente loi lui attribue, et si ce montant était inférieur, il ne pourrait réclamer que le complément de son usufruit.

Jusqu'au partage définitif, les héritiers peuvent exiger, moyennant sûretés suffisantes, que l'usufruit de l'époux survivant soit converti en une rente viagère équivalente. S'ils sont en désaccord, la conversion sera facultative pour les tribunaux.

En cas de nouveau mariage, l'usufruit du conjoint cesse s'il existe des descendants du défunt.

CHAPITRE II

QUI PEUT SUCCÉDER?

Pour pouvoir recueillir le patrimoine d'une personne défunte, il faut :

1° Être vivant;

2o Avoir la jouissance du droit de succéder.

-

Être vivant. C'est-à-dire exister, et la loi considère comme existant l'enfant conçu au moment du décès de son parent. Ne serait-il pas inique, en effet, d'écarter de la succession de son père l'enfant posthume? Mais il ne suffit pas à cet enfant d'être conçu, il faut encore qu'il soit né viable. La viabilité est une question de médecine légale qui ne peut être traitée ici, et qui toujours est soumise, en cas de contestation, à un médecin expert; quant à la conception, c'est une question de fait que les juges auront à apprécier. Mais il faut bien remarquer que les présomptions dont il est parlé aux pages 217 et 218 ne sont point applicables ici, la jurisprudence étant unanime à reconnaître qu'elles ont été établies pour des cas spéciaux et qu'elles ne peuvent, par analogie, être appliquées en matière de succession.

Avoir le droit de succéder. Tout le monde a ce droit à moins d'en être déclaré indigne.

-

De l'indignité et de ses effets. Sont indignes : 1° Celui qui a été condamné pour avoir donné ou tenté de donner la mort au défunt; 2o Celui qui a porté contre le défunt une dénonciation capitale jugée calomnieuse; 3° L'héritier majeur qui, instruit du meurtre du défunt, ne l'aura pas déclaré à la justice. Cependant « le défaut de dénonciation ne peut être opposé aux ascendants et descendants du meurtrier, ni à ses alliés au même degré, ni à son époux ou à son épouse, ni à ses frères ou sœurs, ni à ses oncles ou tantes, ni à ses neveux ou nièces. » (Art. 728.)

On comprend, du reste, leur silence: devaient-ils livrer un membre de leur famille au bourreau?

L'indignité n'est pas encourue de plein droit, elle doit être prononcée par un jugement formel qui exclura l'héritier de la succession. D'où il résulte que l'indignité ne peut être prononcée après la mort du coupable, par cette raison fort simple qu'on ne traduit pas les morts à la barre en conséquence, les héritiers de celui qui aurait pu être déclaré indigne ne peuvent être, à sa place, exclus de la succession qu'il a recueillie de plein droit avant de mourir.

L'héritier déclaré indigne est dépossédé de la succession qui lui était dévolue. Il doit restituer les biens héréditaires avec tous les fruits qu'ils ont produits. S'il avait aliéné ces biens, en tout ou en partie, ils ne pourraient être revendiqués contre les tiers acquéreurs, à moins cependant que l'aliénation ne soit postérieure à la demande formée par-devant justice.

CHAPITRE III

DES DIVERS ORDRES D'HÉRITIERS

La loi reconnaît quatre ordres d'héritiers:

1° Les descendants;

2o Les père et mère, les frères et sœurs et descendants de ceux-ci;

3o Les ascendants;

4° Les collatéraux autres que les frères et sœurs et leurs descendants.

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D'abord les enfants, puis les petits enfants et autres descendants d'après le rang que leur assigne leur degré de parenté, sauf ce qui sera dit à propos de la représentation. Tous les enfants ont droit à des parts égales.

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