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lement que les témoins instrumentaires qui signent les actes notariés n'assistent pas d'ordinaire à la rédaction de ces actes.

L'effet de la donation doit être actuel, c'est-à-dire produire le dessaisissement définitif du donateur, en lui enlevant le droit de disposer de la chose qu'elle à pour objet, et en transférant immédiatement la propriété au donataire.

C'est pourquoi, si la donation avait été faite sous la condition que la chose donnée ne serait transférée au donataire qu'au décès du donateur, cette donation serait nulle. Voici en quelle forme, dans la pratique parisienne, se fait une donation :

FORMULE OU MODÈLE DE DONATION ENTRE VIFS

Par-devant M Couturier et Me David, tous deux notaires à Paris, soussignés.

Ou bien:

Par devant Me Couturier, etc., en présence des témoins ciaprès nommés.

A comparu: M. Louis-François Lhomond, capitaine d'infanterie en retraite, chevalier de la Légion d'honneur, demeurant à Asnières, département de la Seine;

Lequel a, par ces présentes, fait donation entre vifs, par préciput et hors part, conséquemment avec dispense de rapport à sa succession,

A M. Alfred Lhomond, son neveu, domicilié à Dijon, mais résidant à Paris, rue Victor-Cousin, no 8,

Ici présent et acceptant expressément,

Des biens dont la teneur suit (désigner tous les biens comme dans les actes ordinaires).

Transcription et purge.

Le donataire fera transcrire une expédition des présentes au bureau des hypothèques de.....; il remplira en outre, s'il le juge à propos, les formalités prescrites par la loi pour la purge des hypothèques légales, le tout à ses frais.

A cet effet, le donateur déclare:

1° Qu'il est célibataire ;

2° Qu'il n'est et n'a jamais été tuteur de mineurs ou d'interdits, ni comptable des deniers publics.

Le notaire, en cas de non transcription, devra ajouter à son acte la mention suivante :

Me Couturier, notaire soussigné, a averti le donataire de la nécessité de faire transcrire une expédition de cette donation au bureau des hypothèques de Dijon, pour qu'elle produise son effet à l'égard des tiers, mais le donataire a observé qu'il n'avait pas, quant à présent, l'intention de remplir cette formalité, et qu'il se réservait de faire transcrire lui-même plus tard, s'il le jugeait à propos.

Pour la perception du droit d'enregistrement, les parties évaluent les immeubles donnés à la somme de quatre-vingtdix mille francs, et les meubles à celle de cinq cents francs.

La lecture du présent acte par Me Couturier et la signature par les parties ont eu lieu en présence de Me David, notaire en second (ou en présence de M. Louis Dural, pharmacien), et de M. Armand Dupont, propriétaires, demeurant tous deux à Paris, témoins instrumentaires.

Réserve de jouissance. Si le donateur se dessaisit immédiatement et irrévocablement de la propriété des biens compris dans la donation, il peut néanmoins s'en réserver la jouissance ou l'usufruit.

-

Droit de retour. Il est également permis au donateur de stipuler que les objets donnés redeviendront sa propriété, au cas où il survivrait au donataire, ou au donataire et à ses enfants.

SECTION II

Exceptions à la règle de l'irrévocabilité des donations.

Si la loi n'a pas voulu abandonner au caprice du donateur la faculté de revenir sur sa détermination, elle a néanmoins prévu certains cas dans lesquels l'irrévocabilité serait contraire à toute justice; les voici :

1. Inexécution des conventions. Si le donataire ne

remplit pas les engagements qu'il peut avoir pris dans l'acte, ou les conditions qui lui ont été imposées.

2° Ingratitude du donataire. Il y a ingratitude si le donataire a attenté à la vie du donateur; s'il s'est rendu coupable envers lui de sévices, délits ou injures graves; s'il lui a refusé des aliments en cas de besoin.

La révocation n'a pas lieu de plein droit; elle peut même être évitée, s'il y a eu pardon de la part du donateur, et ce pardon est légalement acquis, si le donateur n'a pas demandé la révocation dans le délai d'un an.

Ce délai court à partir du jour où a été commis le fait d'ingratitude ou, si le donateur a ignoré ce fait, du jour où il en a eu connaissance.

Les héritiers du donateur ont le droit de demander la révocation quand celui-ci est mort sans avoir perdu le droit de la demander. Mais les héritiers du donataire ne peuvent pas être poursuivis quand la révocation n'a pas été prononcée du vivant du donataire. Cette révocation est, en effet, une peine qu'il a encourue pour manquement grave envers son bienfaiteur, et il est de règle en droit que les peines sont personnelles.

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Des effets de la révocation pour cause d'ingratitude. De ce que la révocation est une peine personnelle, il résulte que les tiers ne peuvent en supporter les conséquences. Donc, si le donataire avait consenti des actes d'aliénation, des hypothèques ou des servitudes, la révocation ne pourrait atteindre les droits des tiers légalement constatés et acquis. Mais à partir du jour où la demande en révocation est formée devant la justice, les actes d'aliénation que pourrait consentir le donataire deviendraient nuls et caducs, si cette demande était portée à leur connaissance.

Pour atteindre ce but, le donateur qui voudra faire mettre à néant, pour les motifs ci-dessus indiqués, les effets de la donation, fera mentionner sa demande en

marge de la transcription qui aura été faite au bureau des hypothèques.

Par l'effet de cette précaution, tout acquéreur, avant de s'engager avec le donataire, n'aura qu'à consulter l'état de transcription; alors il verra que la situation de la partie avec laquelle il voulait traiter est menacée et il s'abstiendra jusqu'à la solution du procès,

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3° Survenance d'enfant. La révocation d'une donation entre vifs peut avoir lieu pour cause de survenance d'enfant; mais pour cela deux conditions sont nécessaires; il faut donc :

1° Que le donateur fût sans enfants légitimes au moment où la donation était consentie et acceptée;

20 Que, postérieurement à la donation, il naisse un enfant légitime du donateur. La loi suppose, en effet, que le donateur n'aurait pas consenti cet acte de libéralité, s'il avait eu une descendance légitime. C'est pourquoi, s'il en avait un au moment de la donation, cette supposition ne serait pas fondée, et il n'y aurait pas lieu à révocation.

Si, postérieurement encore à la donation, il y avait légitimation d'un enfant naturel, ce fait équivaudrait à la naissance d'un enfant légitime, mais à la condition cependant que cet enfant soit né depuis la donation. N'est-il pas évident, en effet, que si cet enfant existait lors du contrat de dessaisissement, les sentiments du père étaient fixés et qu'il agissait en pleine connaissance de cause?

Effets de la révocation pour cause de survenance d'enfant. La révocation d'une donation entre vifs pour cause de survenance d'enfant a lieu de plein droit, c'està-dire que du jour de la naissance de cet enfant, et sans qu'il soit besoin d'avoir recours à aucune formalitė judiciaire, les choses sont remises au même état que si la donation n'avait pas été faite; de telle sorte que le dona

teur redevient propriétaire des choses par lui données. Néanmoins, il ne peut en réclamer les fruits civils ou naturels que du jour à partir duquel il a fait connaître au donataire la survenance de l'enfant ; jusque-là le donataire, ayant joui en vertu d'un titre régulier, n'est tenu à aucune restitution. Cependant, si ce dernier avait fait des actes d'aliénation, ces actes seraient non avenus, car il n'a jamais été propriétaire définitif, tant que sa qualité a été menacée par l'éventualité prévue par la loi.

Quand une donation a été anéantie pour la cause qui nous occupe, elle ne peut plus revivre; la mort même de l'enfant ne pourrait la valider; mais une donation nouvelle serait parfaitement permise.

Prescription. Le donataire ou ceux qui ont traité avec lui, ou encore ceux qui sont devenus ses héritiers, ne peuvent plus être inquiétés après trente ans. Ce délai ne commence à courir que du jour de la naissance du dernier enfant du donateur. Cette règle est assez inexplicable, aussi est-elle vivement attaquée par tout le monde. Ne serait-il pas plus juste, en effet, de faire partir les délais à partir du jour de la survenance du premier enfant, survenance qui seule doit être notifiée au donataire ? Et pendant ces trente ans, le donataire pourrait-il être soumis au rapport ainsi qu'à la réduction, dans le partage de la succession? Oui.

Observations. Toutes les donations sont révocables pour cause de survenance d'enfant, à l'exception cependant de celles que se font deux futurs époux dans leur contrat de mariage. On remarquera de suite que s'il en était autrement, ces donations seraient le plus souvent illusoires, puisque le résultat du mariage est presque toujours la survenance d'enfant.

Quant aux donations faites par les ascendants aux conjoints en vue du mariage, il ne peut en être question, car

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