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TITRE PREMIER

DU MARIAGE ET DE LA SOCIÉTÉ CONJUGALE

JUSQU'A SA DISSOLUTION

NOTIONS GÉNÉRALES SUR LE MARIAGE ET LE CONTRAT
DE MARIAGE

Le mariage est l'acte essentiellement constitutif de la famille; on peut le définir l'union légitime de l'homme et de la femme.

C'est un acte purement civil; mais il est loisible aux époux, lorsqu'il a été régulièrement célébré devant l'officier public compétent, de faire bénir leur union, selon les rites d'une religion particulière et à leur choix.

Les unions libres, en dehors de tout acte solennel, civil ou religieux, sont assez fréquentes dans les sociétés modernes; nul ne songe à les poursuivre et à les réprimer par des lois pénales; mais, tout ministre d'un culte reconnu et salarié par l'État qui procéderait aux cérémonies religieuses d'un mariage sans qu'il lui ait été justifié de la célébration régulière du mariage civil s'exposerait pour la première fois, à une amende de seize à cent francs; pour la seconde fois, à un emprisonnement

de deux à cinq ans; et pour la troisième fois, à la détention. Pourquoi empêcher ceux qui répugnent au mariage civil de donner à leurs serments une solennité religieuse? Pour retirer aux ministres des divers cultes une institution qui est leur œuvre et dont ils ont eu le monopole et la garde, chez nous, jusqu'à la Révolution. Le législateur désarmé contre les unions libres a voulu sévir contre les prêtres qui consacreraient les mariages religieux non célébrés par les officiers de l'état civil. Dans la pratique de la vie ordinaire, il arrive fréquemment d'éluder cette entrave à la liberté individuelle en s'adressant aux prêtres libres qui pullulent dans les grands centres, ou en passant les frontières; mais ceux qui se contentent de cette solennité religieuse ne sont point mariés dans le sens légal du mot; leurs enfants ne sont point légitimes mais simplement naturels ; le lien familial n'existe pas à leur profit; ils sont dans une situation défavorable que nous expliquerons ultérieurement. Telle est la sanction de la loi contre les unions libres ou simplement religieuses.

L'acte de mariage est reçu par un officier municipal, le contrat de mariage par un notaire; le premier constitue le lien conjugal, l'autre ne fait que régler les intérêts pécuniaires des époux. Sans l'un, point de mariage; l'autre, au contraire, n'est que facultatif; c'est un simple arrangement d'affaires, et il est toujours loisible aux parties de s'en dispenser, car la loi a pris soin de suppléer par de sages et minutieuses précautions à leur oubli ou à leur omission volontaire. Le contrat de mariage, lorsqu'il en est fait un, doit précéder l'acte de mariage. Les époux qui l'ont omis ne peuvent plus, après la célébration de leur union, régler, à leur convenance, les intérêts de leur association; ils doivent accepter tout entières les clauses et conditions de la loi relatives à leurs apports et à leurs gains.

CHAPITRE I

DES QUALITÉS ET CONDITIONS REQUISES
POUR POUVOIR CONTRACTER MARIAGE

SECTION I

De l'âge et des dispenses.

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« L'homme avant dix-huit ans révolus, la femme avant quinze ans révolus, ne peuvent contracter mariage. Néanmoins, il est loisible au Président de la République d'accorder des dispenses d'âge pour des motifs graves. » (Art. 144 et 145.)

On n'accorde pas ces dispenses d'âge aux hommes avant dix-sept ans accomplis et aux femmes avant quatorze ans, sauf le cas de grossesse dûment constatée par un homme de l'art. Pas de dispense non plus, quand l'homme est de quelques années plus jeune que la femme. Mais quand le mariage projeté doit assurer à celui qui sollicite une dispense des moyens d'existence, quand il doit mettre ses mœurs à l'abri du danger, il Ꭹ a là autant de causes de dispenses. (Circulaires ministėrielles du 10 mai 1824 et du 28 avril 1832.)

La demande de dispenses est adressée au Gouvernement, et doit contenir l'indication des motifs. Elle est envoyée au Procureur de la République, près le tribunal de l'arrondissement où réside le solliciteur. Cette demande est signée par les futurs, par le père et la mère de chacun d'eux, ou par les autres ascendants dont le consentement est requis pour la validité du mariage. Ils sont indiqués ci-après. S'il s'agit d'un enfant naturel, sans père ni mère, vivants ou connus, la supplique sera signée par son tuteur ad hoc. A défaut de signature de la demande par les ascendants ou par le tuteur ad hoc, les

postulants devront justifier, par des actes réguliers, tels qu'ils sont indiqués au chapitre spécial ci-après, du consentement de ces personnes. Si, par hasard, les ascendants ne savaient pas signer, il suffirait d'une attestation du maire, certifiant que le consentement a été donné par-devant lui. La demande doit être accompagnée de l'avis du conseil de famille, quand le consentement de cette assemblée est nécessaire au mariage; elle doit l'être encore des actes de naissance des futurs époux, ou des actes de notoriété qui peuvent les remplacer. Il est indispensable également de joindre aux pièces ci-dessus les actes de naissance, de reconnaissance ou de décès des enfants issus des relations d'entre les parties, et l'acte de décès du conjoint, si l'un des époux était veuf. S'il y a grossesse, il est nécessaire d'adjoindre aux pièces le rapport d'un médecin, rapport qui doit être très explicite et très concluant; la moindre incertitude. occasionnerait des demandes d'explications et des retards souvent très longs. Toutes les pièces nécessaires doivent être rédigées sur timbre et les signatures dûment légalisées. Le Parquet les transmet au Ministre de la justice, avec son avis. Si les postulants sont dans l'indigence, le tout peut être rédigé sur papier libre et visé pour timbre gratis. Mais alors la preuve de l'indigence doit accompagner les autres pièces produites. Si l'indigent est étranger, un certificat émanant des autorités compétentes de son pays, revêtu de la signature du consul, ou de l'agent diplomatique de France, est suffisant.

Les lettres patentes du chef de l'Etat portant dispense d'âge sont inscrites sur un registre ad hoc au greffe du tribunal civil; une expédition en est remise aux parties afin d'être jointe à l'acte de mariage, et l'original doit être remis aux futurs, avec mention de l'enregistrement sur le revers.

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Si les parties sont indigentes il leur est fait remise complète des droits ci-dessus. Si, sans être dans l'indigence absolue, elles sont dans une situation peu aisée, il peut leur être fait remise de tout ou partie de ces droits. A cette fin ils justifieront: 1° du revenu réel de leurs propriétés; 2o des impôts dont elles sont grevées; 3° du produit de leur industrie; 4o des autres ressources possédées à un titre quelconque; 5° ils peuvent signaler les charges dont il sont grevés, etc... Toutes ces pièces et justifications doivent être adressées au Procureur de la République qui les joindra aux autres pièces et à la supplique dont voici un modèle facultatif.

MODÈLE DE SUPPLIQUE AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE, A L'EFFET D'OBTENIR UNE DISPENSE D'AGE

Saulieu, le 26 juillet 1890.

Monsieur le Président de la République,

Les soussignés :

1o Étienne Moreau, élève vétérinaire, né à Saulieu (Côted'Or), le 15 février 1873, fils légitime de Jean Moreau et d'Anne Bourgeois, son épouse, tous les deux sans profession, également soussignés, chez lesquels il est domicilié audit Saulieu, rue Carnot, no 4, mais résidant de fait à l'École vétérinaire de Maisons-Alfort (Seine);

2. Demoiselle Marguerite Gallois, sans profession, née à

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