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qui sont les diverses branches du droit public interne.

Ce sont elles qui consacrent ou mettent en œuvre les principes de droit public proclamés par la Révolution française; et il n'est pas plus possible de distraire du droit constitutionnel et du droit administratif les parties qui paraissent s'y rattacher le plus directement, que d'arracher de nos Codes pénal, d'instruction criminelle ou autres, ceux de leurs articles qui présentent le même caractère, pour en faire un droit distinct et spécial.

Le titre même de ces Etudes de droit public provoquait de notre part cette démonstration.

C'est une première étude sur la définition et la notion du droit public, que nous plaçons ainsi avant les seize autres contenues dans ce volume.

Nous ne faisons du reste que justifier l'emploi que nous avons fait du mot droit public dans nos ouvrages, comme dans notre enseignement, depuis trente ans.

Au commencement de l'année 1886, nous avons appelé déjà l'attention sur la nécessité de dégager une semblable notion de toute équivoque et de toute confusion. Nous écrivions alors un long article bibliographique sur l'édition, récemment publiée, du Traité théorique et pratique de droit public et administratif de notre éminent et regretté collègue M. Batbie. En rendant un légitime hommage aux rares mérites de cette vaste publication, nous faisions, sur certaines parties des conceptions de l'auteur, des réserves qui d'ailleurs accentuaient notre haute estime pour l'ensemble de l'œuvre.

En ce qui concerne la partie de cet ouvrage que

l'auteur a appelée le droit public, et dont il a composé le second de ses huit volumes, nous disions ce qui suit:

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« A cet égard, nous devons avouer que nous n'en<< tendons pas le mot droit public de la même manière. << Nous l'entendons comme Rossi. Pour nous, comme «< pour lui, le Droit se divise en deux grandes branches: << le droit public et le droit privé; et dans le droit public se trouvent le droit constitutionnel et <«<le droit administratif, formant le droit public interne, << dans lequel nous plaçons aussi le droit pénal (1); il << y a de plus le droit public externe ou droit des gens. << Mais nous nous refusons à reconnaître l'existence <«< d'un droit public distinct des éléments constitutifs << de cette grande division de notre droit national, et << du droit de tous les pays du monde (2). »

Une telle et si récente dissidence nous imposait aussi le devoir de nous expliquer ici, en intitulant le présent ouvrage: Etudes de droit public, dans le sens qui nous a toujours paru, à la suite de Rossi, le seul conforme à la véritable notion du droit public.

C'est dans ce sens que la loi du 22 ventôse an XII sur les Facultés de droit plaçait déjà dans l'enseignement de ces Facultés, « le droit public français, et «<le droit civil dans ses rapports avec l'administra«<tion publique (art. 2, § 2). »

Plusieurs des auteurs qui ont écrit sur l'ensemble

(1) Et, en outre, tout ce qui tient à l'organisation de la puissance sociale, et par conséquent de la justice, même civile, comme nous l'avons établi plus haut.

(2) Revue générale du Droit, t. X (1886), p. 187.

du droit administratif, et qui ont, comme M. Batbie et avant lui, placé dans le titre de leurs ouvrages les mots <«<droit public et administratif », ne s'en sont pas écartés.

M. de Gérando, qui eut l'honneur d'inaugurer l'enseignement du droit administratif en France, avait publié, en 1819, un programme de cours de droit public et administratif à la Faculté de droit de Paris. En employant cette formule, il suivait le titre même de la chaire créée le 29 mars 1819, mais qui n'a existé que jusqu'à l'ordonnance du 6 septembre 1822, laquelle la supprimait par voie de prétérition.

Après l'ordonnance du 19 juin 1828 qui rétablissait une chaire « de droit administratif », et y faisait remonter M. de Gérando, l'éminent écrivain a, comme elle, écarté le mot droit public du titre de ses Institutes du droit administratif français, ou Eléments du Code administratif réunis et mis en ordre, publié par lui

en 1829.

Foucart, qui fut notre prédécesseur à la Faculté de Droit de Poitiers, et, dès 1832, le premier professeur de droit administratif en province, a persisté, dans le titre des quatre éditions de ses Eléments de droit public et administratif, à réunir les deux termes. Mais il ne doit pas davantage être classé parmi les auteurs dissidents. Dès sa première édition, il donne du droit public la même définition que nousmême, en ce qui concerne le droit public interne, en disant qu'«< il a pour objet les rapports de la << société avec les individus » (1), et il cite la défini

(1) Tome Ier (1834), pages 3 et 7.

tion d'Ulpien

« quod ad statum reipublicæ spectat ». Du reste, le titre de l'ouvrage est suivi d'un sous-titre qui montre, dès cette première édition, que l'auteur tient le droit administratif pour une branche du droit public; il est ainsi conçu: « ou exposition raisonnée << des principes du droit public positif, suivis d'un << appendice contenant le texte des principales lois et << ordonnances de droit public »>.

Dans le Cours de droit public et administratif de M. l'inspecteur général Laferrière, nous voyons aussi que, sur trois chapitres dont se compose la partie de l'ouvrage intitulée droit public, deux sont consacrés, l'un au droit international, et l'autre au droit constitutionnel, ce qui est absolument conforme à la notion du droit public telle que nous l'avons exposée. Quant au troisième chapitre, intitulé par l'auteur << droit << public ecclésiastique », il rentre, malgré le caractère traditionnel de cette formule, dans le système que nous avons réfuté, et appartient évidemment au droit constitutionnel et au droit administratif. Quelque équivoque subsiste aussi sur le point de savoir si, dans la pensée de l'auteur, le droit administratif est bien une partie intégrante du droit public. L'introduction de la cinquième édition permet d'en douter, et sur ce point capital nous aurions le regret d'être aussi en désaccord avec un tel maître. Nous constatons au contraire avec satisfaction que l'auteur lui-même a reproduit sans protestation un passage dans lequel M. Robert de Mohl appelait son ouvrage << un manuel systématique du droit public positif »><, ce qui comprend

« du

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bien le droit administratif sous cette dénomination. Macarel, qui avait écrit en 1833 des Eléments de droit politique, dix ans plus tard (comme de Cormenin, de 1818 à 1840, dans ses Questions de droit administratif; comme de Gérando, dans ses Institutes du droit administratif de 1829), n'a pas introduit le mot droit public dans le titre de son principal ouvrage. Il l'a purement et simplement appelé, en 1844, Cours de droit administratif. C'est à cet exemple de Cormenin, de Gérando, de Macarel, que nous nous sommes conformé, en 1860, dès la première édition de notre Cours de droit administratif, en nous bornant à ce titre, tout en proclamant le droit administratif une branche du droit public, comme le droit constitutionnel, et en ayant soin d'étudier les rapports nombreux de ces deux branches du droit public.

Il nous semble que M. Léon Aucoc s'est placé dans le même ordre d'idées, dans ses Conférences sur le droit administratif.

C'est aussi ce qu'a fait Dufour dans son Traité géné– ral de droit administratif appliqué.

Cette terminologie qui ne donne prise à aucune équivoque, nous paraît donc préférable à celle des auteurs qui ont cru devoir allier dans le titre de leurs ouvrages les deux mots « droit public et administratif ». Mais nous venons de voir que leur emploi n'implique pas nécessairement une notion du droit public contraire à celle que nous avons exposée, et qu'il n'y a qu'un petit nombre de dissidents.

Du reste, ce n'est pas seulement de nos jours que le mot droit public a été employé dans des acceptions. diverses.

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