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Un agent politique à l'armée des Alpes,

Par M. DELACHENAL.

M. Lefèvre-Pontalis : Le livre de M. Delachenal, sous ce titre : Un agent politique à l'armée des Alpes, est un livre de recherches et de documents qui met en lumière un inconnu de l'époque révolutionnaire, Pierre Chépy.

Chépy faisait partie des nombreux agents politiques du ministère des Affaires étrangères qui remplissaient d'une façon plus ou moins occulte une double mission de surveillance à la fois diplomatique et militaire. Il s'était installé à Grenoble, pour mieux dissimuler le rôle qu'il avait à remplir, et en profitait pour jouer au proconsul dans le Dauphiné. « Il « n'y a pas de rapports plus abondants que les siens et sa correspon« dance vaudrait la peine d'être publiée », écrivait Taine dans son Histoire de la Révolution. C'est cette publication, tirée des Archives du ministère des Affaires étrangères, que M. Delacheral a entreprise, et il a su la rendre instructive par les éclaircissements qu'il a tirés pour l'histoire du temps aussi bien que pour la biographie du personnage qu'il mettait en scène. Il se garde bien de vouloir le surfaire, il prétend seulement le faire connaître, en le caractérisant comme plus remuant qu'important. >

C'est, en effet, une vie toute agitée que la sienne; M. Delachenal ne s'en est pas tenu aux rapports de Pierre Chépy avec le commandant en chef de l'armée des Alpes, Kellermann, et avec tout son état-major, ni aux négociations de Pierre Chépy avec le Piémont et les cantons suisses. Dans l'introduction qu'il lui a consacrée, M. Delachenal, après avoir recherché ses débuts malheureux en Belgique, a signalé l'ambition opiniâtre qu'il avait d'être employé et d'être pris au sérieux comme diplomate, au risque de toutes les aventures et de tous les déboires qu'il eut plus tard à subir, quand il se fit envoyer comme vice-consul à Rhodes, et comme commissaire des relations commerciales à Jersey.

M. Delachenal l'a suivi également dans la part active qu'il prit à Grenoble au mouvement révolutionnaire dont il s'était fait le propagateur

passionné, plutôt encore en paroles déclamatoires qu'en actions. Il a trouvé en lui les traits saillants de toute une catégorie de ses congénères, avec les phases par lesquelles ils ont passé. Pierre Chépy commence en 1790 par l'éloge du « monarque honnête homme, qui trop grand pour n'être < qu'un despote, a trouvé dans son cœur le besoin d'être roi d'un peuple ‹ libre. » Il fait ensuite l'emphatique éloge de ceux qui au 10 août ont tué l'hydre dévorante de la royauté ». Après avoir encensé les Girondins il se fait le dénonciateur de Barnave qu'il envoie de Grenoble au tribunal révolutionnaire de Paris. Après avoir dénoncé à l'indignation publique les massacres de Septembre, il demande que la guillotine, le tribunal ambulant et la force révolutionnaire marchent pour que tout aille au mieux ». Il n'en finit pas moins par trouver, avec le Consulat et l'Empire, l'emploi de ses aptitudes comme commissaire général de police à Brest, en ne marchandant, ni à Napoléon, ni à ses ministres, les témoignages d'une fidélité sans bornes. Il a justifié ainsi une fois de plus ce qu'on a dit de Napoléon, c'est que l'Empereur était dans le vrai, en faisant d'un grand nombre de jacobins « des expéditionnaires et des souschefs>. Il vécut ensuite fort modestement jusqu'à sa mort, en 1822, d'une pension qu'il avait obtenue du gouvernement de Louis XVIII.

La correspondance de Pierre Chépy, telle que M. Delachenal l'a reproduite, n'est que l'annexe de sa vie, et sa vie, telle qu'il l'a retracée, est comme un fragment de miroir où l'on peut retrouver avec quelques traits épare la physionomie de tous ceux qui ont ressemblé ou qui ressembleraient encore à Pierre Chépy.

Traité théorique et pratique du contrat d'assurance

sur la vie,
(Tome I),

Par M. Joseph LEFORT, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation lauréat de l'Institut (1).

M. Lyon-Caen:- Le développement des assurances sur la vie en France s'est pendant longtemps heurté à des obstacles légaux et à

(1) Thorin, éditeur (1894).

des préjugés. La grande Ordonnance de 1681 sur la marine défendait l'assurance sur la vie des hommes. Depuis longtemps sans doute cette prohibition est considérée comme abrogée. Mais des idées peu favorables à ce genre d'opérations les ont entravées. Elles ont été combattues au nom de la religion et de la morale. Les uns ont prétendu que celui qui se fait assurer sur la vie pèche par manque de confiance dans la Providence. D'autres ont allégué que l'assurance sur la vie pousse l'assuré au suicide et le bénéficiaire de l'assurance au crime en l'excitant à tuer l'assuré, pour hâter le moment où le capital assuré sera payé. Le bon sens public a fait peu à peu justice de ces imputations. Des jurisconsultes, des économistes, des prêtres ont démontré le caractère licite et moral en même temps qu'avantageux des assurances sur la vie; elles supposent chez l'assuré le dévouement aux siens, le travail, l'économie et la prévoyance.

Aujourd'hui, sans être aussi répandues qu'en Angleterre et dans les États-Unis d'Amérique, les assurances sur la vie se sont multipliées en France, surtout dans les trente dernières années. Des statisticiens ont constaté qu'en 1876 il y avait sur notre territoire un assuré sur 360 habitants, il y en aurait aujourd'hui un sur 131.

Les ouvrages consacrés aux assurances sur la vie se sont multipliés avec le nombre de celles-ci. Mais, jusqu'à présent, aucun n'avait traité de ce vaste sujet dans son ensemble. Les uns se sont occupés de l'assurance sur la vie au point de vue des combinaisons financières, sur lesquelles elle repose. Les autres se sont efforcés d'en faire comprendre les avantages économiques et moraux. D'autres, enfin, ont eu pour objet l'étude de ces assurances au point de vue juridique.

M. Joseph Lefort a eu l'heureuse idée d'embrasser dans son œuvre tout ce qui concerne cette matière, en insistant principalement sur les questions de droit sans nombre qui s'y rattachent.

Le tome I, seul publié jusqu'ici, est divisé en trois parties. La première contient des notions générales; le but, les avantages, l'histoirə des assurances sur la vie en France et dans les principaux États y sont exposés. A propos du rôle de l'État en cette matière, l'auteur se prononce énergiquement contre le système des assurances par l'État. Mais il croit

trouver dans la nature aléatoire et compliquée des assurances sur la vie une justification de la surveillance exercée par l'État sur les Sociétés anonymes qui se livrent à ces opérations. D'intéressantes explications techniques sont enfin données sur les bases financières de ces assurances et sur les combinaisons très variées auxquelles elles se prêtent.

Dans les deux parties suivantes, le côté juridique est abordé par l'étude des éléments constitutifs du contrat (prime, risques, capital assuré), des personnes qui y jouent un rôle (assureur, assuré, bénéficiaire), des conditions exigées pour sa validité et de la police qui sert à le constater. Au point de vue juridique, le contrat d'assurance sur la vie a un caractère spécial qui rend difficile l'étude des règles qui le régissent. Notre législation écrite ne renferme aucune disposition sur ce contrat. Il a fallu que les tribunaux comblassent cette lacune et fissent, pour ainsi dire, eux-mêmes la loi. L'exposé et l'appréciation de la jurisprudence formée d'arrêts très nombreux et parfois contradictoiree, au moins en apparence, sont hérissées de difficultés. M. Lefort les surmonte toujours et parvient à rendre claires des décisions quelque peu obscures. Il rend à l'œuvre de la Cour de cassation un juste hommage; ses arrêts sont, en général, conformes à la fois aux principes généraux du droit et aux besoins de la pratique. Aussi, le jour où l'on se décidera à légiférer sur la matière, suffira-t-il sur beaucoup de points de coordonner les solutions admises par la Cour suprême.

Toutefois la jurisprudence ne devrait pas alors être seule consultée. Beaucoup de pays étrangers ont, à la différence de la France, des lois spéciales. Il y aurait à leur faire de nombreux emprunts. M. Joseph Lefort l'a bien compris. Aussi, ne manque-t-il jamais de citer et d'apprécier les dispositions des lois étrangères, en les comparant aux décisions de notre jurisprudence.

Conçu sur un plan aussi vaste et aussi bien établi, l'ouvrage de M. Lefort comble une lacune de la littérature juridique ; il rendra, sans aucun doute, de grands services au législateur de l'avenir comme à tous ceux qui, à un point de vue quelconque, ont à étudier et à appliquer notre législation dans son état actuel.

Los Codes français,

Par MM. TRIPIER et MONNIER.

M. Glasson : — J'ai l'honneur de faire hommage à l'Académie, de la quarante-quatrième édition des Codes français, par MM. Tripier et Monnier. S'il ne s'agissait que d'une édition mise au courant des lois nouvelles, je me bornerais à un simple dépôt sur le bureau de l'Académie. Mais en réalité M. Monnier, professeur à la Faculté de droit de Bordeaux, a procédé à une refonte complète de la collection Tripier. Son ouvrage est tout nouveau et bien supérieur pour la méthode et le choix des matières aux autres publications de même nature. Il va sans dire que toutes les lois ont été collationnées sur les textes officiels. Ce qui est plus intéressant et plus scientifique, c'est le rapprochement des articles de nos codes et des dispositions correspondantes de nos coutumes ou des lois de la Révolution. Les codes sont suivis d'un supplément contenant par ordre chronologique les lois les plus usuelles. M. Monnier a eu soin d'exclure les lois qui ont un caractère spécial et pour ainsi dire professionnel. Il n'a publié que les lois de nature à intéresser tous les Français. Son recueil est incontestablement indispensable à tous ceux qui, à un titre quelconque, sont obligés de consulter plus ou moins souvent les textes de nos codes ou ceux de nos lois fondamentales.

Étude sur les Syndicats professionnels,

Par M. Michel REVON.

M. Arthur Desjardins : - J'ai l'honneur d'offrir à l'Académie, de la part d'un de ses lauréats, M. Michel Revon, professeur à l'Université de Tokyo, une étude sur les Syndicats professionnels, tra duite en langue japonaise.

Il est presque inutile d'ajouter que nous n'avons pu vérifier la fidélité de la traduction. Si nous pouvions avoir quelque crédit sur l'esprit des Japonais, nous les inviterions à pratiquer l'institution des syndicats dans un esprit de tolérance et d'équité.

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