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tion sur la statistique des biens communaux et des sections de com

munes.

M. de Crisency commence par établir, d'apres le rapport sur la situation matérielle des communes pubüée en 1981 par le ministre de l'inté rieur, qu'a la fin de 1887 les biens communaux occupaient une superficie de 4,318.310 hectares, comprenant 2,058,707 hectares de bois et 2,257,603 hectares de terres dont 1,620,503 de terres productives et 637.100 de terres improductives.

Trois enquêtes avaient été faites à cet égard, la première, en 1847, pour la préparation du projet de loi sur l'amodiation des biens communaux; la seconde, en 1859, à l'occasion du projet de loi sur la mise en valeur de ces biens; la troisieme enfin, en 1863, sur la demande de la Commission chargée de rechercher les moyens de faciliter et d'étendre l'application de cette loi.

Ces statistiques sont loin de présenter la concordance nécessaire, et leur comparaison permet de supposer que si l'on a relevé avec plus ou moins d'exactitude les biens communaux proprement dits, on a négligé souvent d'inventorier les biens appartenant aux sections de communes.

Il résulte de ce défaut de concordance, que l'on constate d'une période à une autre une diminution du domaine communal, tandis que certaines périodes accusent une augmentation qu'on doit considérer comme inadmissible; le domaine communal tend en effet à diminuer par des améliorations successives, et ne peut, en aucun cas, augmenter. Il serait donc nécessaire de faire à nouveau un inventaire exact des biens communaux et sectionnaires et de se tenir au courant, chaque année, des modifications qui se sont produites dans ce domaine.

Quoi qu'il en soit, il est une de ces statistiques, celle de 1863, où l'on a classé séparément les biens communaux proprement dits et les biens sectionnnaires.

En rapportant la superficie des biens communaux au territoire on trouve que dans les trois départements des Hautes-Alpes, des Hautes-Pyrénées et de la Savoie, ces biens représentent 51, 43 et 42 p. 100 de la superficie totale. Puis viennent 9 départements pour lesquels la proportion varie de 21 à 36 p. 100; 21, de 20 à 10; 10, de 8 à 5; 26, de 4 à 1, et, enfin, 18 au-dessous de 1/2 p. 100.

Il est facile de voir que les 12 départements rangés dans les deux premières catégories appartiennent aux régions montagneuses de l'Est et du Sud. Or, il est à remarquer que leurs biens se composent en grande partie de bois, circonstance qui explique la conservation de ce domaine communal, lequel se prêterait difficilement aux morcellements et aux partages et assure d'ailleurs aux habitants, sous forme d'affouages, des avantages très appréciés.

Quant aux départements où le domaine communal n'atteint pas le 1/2 p. 100 du territoire, ils forment une zone s'étendant assez régulièrement du Nord au Sud depuis le Calvados jusqu'au Gers. Là les terres ont généralement une grande valeur et deviennent par là susceptibles d'appropriation individuelle.

Passant aux sections de communes, M. de Crisenoy explique que la section de commune est formée par un groupe d'habitants possédant des biens et des droits communs auxquels n'ont pas part les autres habitants de la commune. Elle n'a donc d'existence qu'en raison de ses biens et de ses droits.

Le nombre des sections était en 1863 de 35.847 réparties entre 6.108 communes. On voit par là que la grande majorité des commune, de France ne possèdent pas de sections, cet élément ne présentant une certaine importance que dans une trentaine de départements au plus, groupés presque tous dans la région montueuse du centre de la France.

C'est le Puy-de-Dôme qui figure en tête, avec 4.537 sections, suivi de près par la Creuse qui en a 4.051; puis viennent la Haute-Loire, le Cantal, la Corrèze, et en dehors de cette zone, le Morbihan.

Les 25.000 communes possédant des biens communaux en ont 3.910.000 hectares, tandis que les 36.000 sections n'en possèdent que 721.000. Ces biens sectionnaires ont d'ailleurs relativement moins de bois et plus de terres, souvent à moitié incultes, mais qui pourraient être améliorées si l'on en opérait l'aliénation.

Après cette communication, M. de Crisenoy offre à la Société, au nom du Ministre de l'intérieur, la Situation financière des communes, d'après les budgets primitifs de 1887, et fait ressortir en peu de mots les modifications, généralement peu importantes, qui se sont produites depuis 1886. Il annonce enfin que le Ministre de l'intérieur publiera prochainement une situation financière des communes établie non plus d'après les budgets primitifs, mais d'après les comptes. Le même ministère s'occupe en outre de l'établissement d'une statistique détaillée de la situation financière des départements.

M. Gimel reconnait avec M. de Crisenoy qu'il y a lieu de faire une statistique exacte des biens communaux pour savoir de quelles modifications est susceptible la législation qui les concerne. Il voudrait seulement signaler un détail, au sujet du département des Hautes-Alpes, dans lequel, d'après le tableau qui vient d'être communiqué, les terrains communaux occuperaient plus de la moitié de la superficie du département. Or il y a lieu d'observer que, dans les Alpes, de vastes étendues s'y composent de rochers absolument dénudés, de glaciers sans valeur, qui ne sont susceptibles d'aucun emploi utile. Dans ces conditions, on éprouverait un véritable mécompte si l'on espérait avoir la moitié du 15 novembre 1887. 4o SÉRIE, T. XL.

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territoire à améliorer en aliénant ces biens pour les faire passer dans la propriété individuelle.

M. Chervin apprécie également la proposition de M. de Crisenoy tendant à obtenir une situation annuelle des biens communaux qui permette de suivre l'accroissement et la diminution du domaine communal. Il ajoute à ce propos que beaucoup de sections de communes qui ont des biens propres, refusent parfois de contribuer aux charges du bourg, et à titre d'exemple, il cite une section qui a refusé au bourg le bois nécessaire à la construction d'une école. Selon lui, les sections vivraient un peu aux dépens de la commune.

M. Hennequin croit devoir contester l'opinion formulée par M. Chervin. D'abord, le chef-lieu de la commune dans laquelle existent plusieurs sections ne peut éprouver un préjudice quelconque de l'existence des sections. Bier au contraire, la section qui possède des biens propres plus ou moins importants, est toujours un objet de convoitise pour les communes voisines qui cherchent à la faire incorporer dans leur circonscription ou à empêcher qu'elle ne soit érigée en commune séparée.

On sait, en effet, que trop souvent les communes ont une tendance à employer au profit des besoins généraux de la collectivité les ressources propres à la section. C'est même pour éviter autant que possible cette injuste application des revenus sectionnaires qu'il est prescrit de faire figurer dans un paragraphe à part du budget communal les ressources qui appartiennent à une section, et qui doivent être exclusivement réservées pour ses besoins personnels.

D'autre part, la résistance qu'on rencontre assez fréquemment chez les municipalités pour contribuer à des dépenses communales se produit à l'occasion d'une dépense à effectuer hors du chef-lieu, par exemple pour la construction d'une école sectionnaire, et c'est le chef-lieu communal ou même le conseil municipal qui refuse de consentir cette dépense par le motif qu'elle profite à la section et non à la commune. C'est même expressément dans le but de vaincre le mauvais vouloir de certaines municipalités à l'égard des sections, que sont intervenues les lois de 1878 et de 1883, relatives à l'obligation de construire des écoles et principalement des écoles sectionnaires et de hameau.

Dans le cas signalé par M. Chervin, en refusant le bois nécessaire à la construction de l'école du chef-lieu, la section n'a fait qu'user d'un droit incontestable. Et si la commune a dù, en suite de ce refus, faire ailleurs l'acquisition de ce bois, la section a elle-même supporté une partie de cette dépense comme de toutes les dépenses réputées d'intérêt général; seulement, au lieu d'acquitter sa part contributive en nature de bois, elle l'a payée en argent. De plus, cette part contributive, comme celle de toutes les autres sections, n'a pas été déterminée arbitraire

ment par l'autorité municipale, mais bien proportionnellement à l'importance du principal de ses quatre contributions directes. Aussi on peut dire d'une manière générale et sauf très rares exceptions que c'est la commune qui tire avantage de la section et non la section qui grève la

commune.

M. de Labry pense que M. de Crisenoy a été trop absolu dans une de ses affirmations, en disant que le domaine communal diminue, mais n'augmente jamais, car la commune peut recevoir des biens soit par legs, soit par donation, et elle peut quelquefois, comme dans le cas d'une carrière, par exemple, trouver avantage à en faire l'acquisition. M. de Crisenoy ne conteste pas le fait, mais, dit-il, ce ne peut être qu'une exception.

M. Gimel parle des terrains que les communes ont à acheter pour étendre leurs cimetières. Avec le temps ces acquisitions doivent arriver à un total assez important. Cette observation viendrait à l'appui de celle qu'a présentée M. de Labry.

M. Flechey exprime le vœu que, dans la statistique annoncée des biens communaux, une colonne soit attribuée, à côté de leur superficie, à la valeur vénale de ces biens.

M. Turquan pense qu'il serait utile de déterminer, avec les états de dénombrement, la population des sections de communes, statistique qui pourra offrir un certain intérêt.

M. Gimel répond que, en effet, les états du dénombrement séparent de la commune chef-lieu les hameaux et maisons isolées, mais ces portions de commune peuvent ne pas posséder de biens propres et ne sont pas, par conséquent, des sections dans le sens qu'il faut attribuer à ce mot.

M. Levasseur pose une question à M. de Crisenoy à propos du document relatif à la situation financière des communes, pour l'année 1887, qu'il vient de présenter. Ce document contient, entre autres détails, le relevé en hectares de la superficie de chaque commune et, par suite, de chaque département.

Il s'étonne que la superficie totale varie chaque année tout en se rapprochant de plus en plus de la superficie donnée par le cadastre, laquelle est de 52.885.490 hectares. La différence est encore de près de 71.000 hectares en moins.

M. de Crisenoy répond que la superficie indiquée a été relevée dans. les registres du cadastre, mais qu'il est possible qu'à part les erreurs de transcription inévitables commises par quelques communes, un certain nombre d'entre elles aient substitué la superficie imposable à la superficie totale, sans qu'on puisse se rendre compte, dans la totalisation, des erreurs commises en ce sens; erreurs qu'on s'empresse de corriger quand elles sont connues.

M. Louà dit que, pour une superficie de 53 millions d'hectares, une différence de 71.000 n'a rien d'excessif; malheureusement cette différence est le résultat de compensations, de sorte que quelques départements offrent avec les chiffres officiels des dissemblances parfois très considérables.

M. de Foville dit qu'il a signalé ces différences au Conseil supérieur de statistique, et qu'il lui a paru urgent d'essayer d'arriver à une expression aussi parfaite que possible de la superficie de la France et de ses départements. Déjà, dit-il, les travaux du savant géographe russe, M. Strelbitsky, ont appelé l'attention sur la véritable évaluation de la superficie dans divers pays et notamment en France et en Italie. Il y a tout lieu d'espérer que le travail entrepris, sur la demande même du Conseil supérieur de statistique, par l'État-major français, pour fournir la mesure la plus approchée possible du territoire de la France, viendra dissiper les doutes qui résultent de tant d'évaluations contradictoires. Du reste, ajoute M. Levasseur, ce travail de l'État-major est sur le point d'être terminé, et l'on en connaîtra bientôt les résultats.

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