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tentation en temps normal et peuvent constituer un grave danger au moment des crises.

Enfin, les rapports des classes jouent aussi un grand rôle dans la création et l'épanouissement des banques populaires. Ce ne sont pas les ouvriers qui les fondent et les dirigent: ce sont les bourgeois. Les Schulze-Delitzsch,les Raiffeisen, les Viganò, les Luzzatti, les Wollemborg, les d'Andrimont, sont des membres des classes dirigeantes qui se dévouent. Dans le remarquable compte rendu de son voyage en Italie, M. Léon Say constate que les banques populaires de ce pays sont administrées avec un enthousiasme et un dévouement qui ne se démentent jamais.

Or, en France, les ouvriers, épris d'indépendance, sont animés de défiances farouches vis-à-vis des bourgeois qui veulent se mêler de leurs affaires et auxquels ils prêtent toujours des arrière-pensées.

De leur côté, les bourgeois, découragés par l'accueil plus que froid qu'ont reçu leurs avances, se le tiennent pour dit et se cantonnent chez eux dans leur égoïsme et leur aveugle quiétude.

Le bienfait de ces institutions est pourtant de telle conséquence au point de vue social, au moins autant qu'au point de vue économique, qu'on ne peut se résigner à en laisser le privilège aux autres pays.

Sur les trois causes qui viennent d'être énumérées, la première, relative aux empiétements de la grande industrie et des villes, échappe presque entièrement à notre action; mais nous avons prise sur les deux autres. L'État peut restituer aux localités le maniement de leurs épargnes au lieu de les engouffrer dans ses caisses; les classes dirigeantes peuvent et doivent tendre la main à ces petits artisans, à ces ouvriers d'élite, que dévore ou que paralyse le crédit usuraire et que ferait prospérer le crédit coopératif. A force de dévouement, de désintéressement et de services, les défiances populaires peuvent être conjurées. Le salut du pays exige qu'elles le soient.

M. Ducret fait remarquer, pour redresser quelques indications données par les précédents orateurs, que le tiers du papier escompté par la Banque de France comprend des effets au-dessous de 100 fr. Du reste, les petits escompteurs prennent généralement un escompte inférieur à celui de la Banque même. Enfin ces petits banquiers sont toujours prêts à fournir au public, même le plus modeste, tous les renseignements qu'il lui faut.

Néanmoins, insiste M. LIMOUSIN, le petit crédit n'est pas si bien organisé en France que le crédit populaire n'y soit nécessaire. La séance est levée à onze heures vingt minutes.

Le Rédacteur du Compte rendu : CHARLES LETort.

OUVRAGES PRÉSENTÉS.

Ministère des travaux publics. Album de statistique graphique de 1886 1.

Turgot, par LÉON SAY '.

Statistica giudiziaria penale per 1885 *.

Précis d'économie politique, par PAUL LEROY-BEAULIEU

The recent rate of material progress in England, by ROBERT Giffen 3. Annali di statistica. Impiegati civili e militari dello Stato. Inchiesta statistica sugli istituti dei sordomuti e dei ciechi. Statistica industriale. Fasc. VII. Condizioni industriali della provincia di Mantova ".

Progrès de l'hygiène dans la République Argentine, par le Dr E. R. CONI.

La monographie d'atelier, par E. CHEYSSON .

Les sociétés coopératives de production, par ERNEST BRELAY 9. Note sur l'agriculture et les remontes de l'armée, adressée à la Commission du budget de 1888, par RICHARD (du Cantal) 1o.

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Verslagen aan den Koning betrekkelijk den dienst der Posterijen, der Rijkspostspaarbank en der Telegrafen in Nederland, 1886 11. Association amicale des auditeurs diplômés des cours du Comité d'encouragement des études commerciales. Annuaire no 7. 1886-87 12. Preussische Statistik. Fasc. LXX, XCII, XCIII ". Essays in finance, by ROBERT GIFFEN. 2d series 14.

1 Paris, impr. Nationale, 1887, in-4°.

2 Paris, Hachette, 1887, in-16.

3 Roma, tip. Eredi Botta, 1887, in-4°. Paris, Delagrave, 1888, in-18.

5 London, G. Bell, 1887, in-18.

6 Roma, 1887, 3 vol. in-4°.

7 Paris, J.-B. Baillière, 1887, gr. in-8°.

8 Paris, A. Chaix, 1887, in-8°.

9 Paris, Berger-Levrault, 1887, in-8o.
10 Paris, imp. Noizette, 1887, in-8°.
11 S-Gravenhage, 1887, in-4o.

Paris, 1887, in-8°.

13 Berlin, 1887, 3 vol. in-fol.

14 London, G. Bell, 1886, in-8°.

SOCIÉTÉ DE STATISTIQUE DE PARIS

RÉUNION DU 16 NOVEMBRE 1887.

Admission de nouveaux membres.

COMMUNICATIONS: Le Congrès des Sociétés savantes en 1888. - La Société de

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La séance est présidée par M. Yvernès, président.

Sont admis comme membres titulaires : MM. Fravaton, inspecteur de l'enregistrement, Paul Mougeolle, Sébastien Turquan, sous-chef de bureau au ministère de l'intérieur.

Le Président communique à la réunion le programme des questions proposées pour le prochain congrès des Sociétés savantes à la Sorbonne en ce qui concerne spécialement la section des sciences économiques et sociales. Ce programme a déjà été publié dans le Journal des Économistes dans un compte rendu de la Société d'économie politique.

M. Yvernès annonce ensuite que le conseil de la Société a pris les mesures nécessaires pour que celle-ci prenne part à l'Exposition universelle de 1889.

M. T. Loua, secrétaire général, analyse les ouvrages reçus par la Société depuis la précédente séance.

M. E. Cheysson présente, de la part du ministre des travaux publics, le huitième Album de statistique graphique.

Pour la première fois, l'Album fournit, sans lacune, le mouvement des voyageurs sur les diverses lignes de notre réseau français.

Il s'y trouve une planche intitulée: Carte des voies navigables, qui participe à la fois de la carte géographique et du cartogramme. Elle figure, en effet, outre les tracés des voies navigables, leur nature (canaux ou rivières, navigables ou flottables); leurs conditions de navigabilité suivant qu'elles ont ou non un mouillage supérieur a 2 mètres et les écluses d'au moins 38,50 de longueur et 5,20 de largeur; les longueurs de leurs sections; les cotes des distances de leurs principaux

points (ports, confluents, etc.), et les développements des itinéraires qu'on peut combiner en partant de diverses origines: Paris, Bordeaux, Nantes. La planche 14 figure, pour la période comprise entre 1851 et 1884, les tonnages des diverses voies de transport dont elle éclaire d'une vive lumière le rôle et les services.

Les vingt dernières planches, dont le ministère de l'agriculture a fourni les éléments numériques, traduisent les principaux résultats de l'enquête décennale agricole. Au point de vue de l'exécution statistique, elles constituent la première application de la méthode nouvelle que M. Cheysson a exposée devant la Société dans la séance du 17 février 1887, sous le nom de Méthode des cartogrammes à teintes dégradées et à écarts proportionnels, et qui a pour objet de rendre comparables les cartogrammes d'une mème série en donnant la même signification à la même teinte sur toutes les cartes, condition importante et méconnue par les systèmes usités jusqu'ici.

Outre leur intérêt de technologie statistique, ces planches présentent un véritable intérêt économique, comme suffit à le faire pressentir le simple énoncé de leurs titres : répartition du territoire entre les cultures les plus importantes; production du froment par hectare, par habitant et par cultivateur; surface consacrée aux céréales, au froment, aux cultures industrielles et fourragères: nombre des chevaux et poids du bétail (bœufs, moutons et porcs par hectare); rapport de la population rurale à la population totale; proportion des diverses catégories de travailleurs agricoles et des divers modes d'exploitation, enfin nombre des exploitations rurales distinguées d'après leur étendue.

M. Cheysson analyse encore brièvement une autre publication offerte à la Société par le ministère des travaux publics: Relevé général du tonnage des marchandises transportées sur les fleuves, rivières et canaux pendant l'année 1885.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion sur la question de l'alcool.

M. Victor Turquan a la parole. I exprime le regret que M. Claude (des Vosges), rapporteur de la commission sénatoriale d'enquête sur la consommation de l'alcool, ait été empêché par une indisposition de prendre part à la discussion, et de répondre lui-même aux critiques qui ont été adressées à son rapport par MM. Hartmann et Fournier de Flaix. Il donne ensuite lecture d'une note de M. Claude dans laquelle ces critiques sont examinées et combattues point par point.

Les principales observations de M. Hartmann portaient sur les emplois industriels de l'alcool qui, à son avis, sont plus considérables que ne l'a pensé M. Claude (des Vosges), sur l'accroissement de la consommation

véritable de l'alcool qui aurait cessé d'être inquiétant. M. Hartmann aurait désiré en outre qu'il fût tenu compte, dans le calcul des moyennes de consommation, des déplacements de population, une grande quantité de spiritueux devant être consommée par les voyageurs dans les villes d'eaux, ou de bains de mer, etc.

Enfin, M. Hartmann a voulu démontrer que le nombre de débits n'avait pas d'influence sur le développement de l'alcoolisme et qu'il s'en fallait de beaucoup que le nombre des cabarets ou débits fût égal au nombre des licences.

M. Turquan pense que l'arrêt constaté par les statisticiens dans la marche ascendante de la consommation officielle de l'alcool, ne saurait être considérée comme un symptôme rassurant, car les accidents dus à l'alcoolisme, c'est-à-dire le nombre de cas d'ivresse publique, de suicide, dus à l'excès de spiritueux, d'aliénation mentale alcoolique, ne font que s'accroître précisément dans les régions du Nord, du Nord-Ouest et de l'Ouest de la France, où, comme l'on sait, la consommation du vin est remplacée par celle de l'alcool.

En ce qui concerne la très forte consommation accusée par certaines villes comme Eu, Le Tréport, Dieppe, Le Havre, M. Turquan conteste qu'on puisse l'attribuer à la présence momentanée des familles parisiennes ou autres, car ce phénomène ne manquerait pas d'avoir lieu dans toutes les localités qui possèdent des plages fréquentées. Si la consommation est plus forte tout le long des côtes, c'est qu'elle résulte des habitudes bien connues de la population locale.

Quant au nombre de 400.000 licences, qui avait été pris comme base de certaines considérations statistiques par l'honorable rapporteur du Sénat, il était légitime de les compter pour autant de débitants de boissons, car l'administration des contributions directes n'avait pas. encore, il y a un an, fourni des renseignements relatifs à la classification des commerçants assujettis à la patente, pour vente de boissons au détail. Le tableau inséré au Bulletin de statistique et de législation comparée du ministère des finances ne fait que confirmer les chiffres sur lesquels s'est appuyée l'enquête sénatoriale; il ressort de cette classification qu'il y aurait en France actuellement 374.757 débits de toute nature. D'autre part, on a signalé l'accroissement très sensible du nombre des débits, et par conséquent de leur clientèle, dans des régions où la consommation taxée de l'alcool avait diminué : ne seraitce pas là un indice certain de la fraude?

M. Turquan reprend ensuite les théories qui avaient été émises par M. Fournier de Flaix dans la Revue scientifique et dans le Bulletin de la Société de statistique, en vue de prouver que le nombre des crimes, des suicides et des cas d'aliénation mentale est absolument indépendant

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