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témoins à déposer dans un procès civil existant entre le sieur et un sieur pour lequel M. se trouvait momentanément chargé; que, s'il est vrai que la lettre circulaire de ce dernier n'ait pas eu, comme il le dit, pour objet la tentative coupable de corruption ou de subornation, qu'il n'ait voulu que s'assurer de la nature et de la force des preuves, il s'est permis du moins une démarche inconvenante, contraire aux règles de la profession et même aux intérêts des parties et de la justice qu'il pouvait priver ainsi des moyens de s'éclairer. »> Arr. 31 décembre 1820.

IV. L'avocat ne peut recommander son client au magistrat; mais, dans l'intérêt d'un accusé, il peut réclamer du Président des vérifications, un appel de témoins; dans ces cas, il prévient les avocats de la cause et surtout ses adversaires.

V. La règle qui défend de s'adresser à la partie adverse et de la recevoir, s'applique notamment à la partie civile. L'avocat ne peut conférer qu'avec l'avocat ou l'avoué de celle-ci. La réciproque est plus certaine encore. L'avocat de la partie civile ne peut s'adresser au prévenu sans conseil, pour traiter directement avec lui une question de dommages et intérêts.

L'avocat ne peut se charger de faire assigner les témoins, ni prendre des mesures, judiciaires ou extrajudiciaires, dans l'intérêt du détenu. Quand il en est besoin, ou il s'adresse au Président, ou il recommande au prévenu de se confier à un officier ministériel.

M. Mollot affirme à tort que l'usage permet à l'avocat de faire citer des témoins pour un accusé; ceux qui se livrent à cette complaisance deviennent des dépositaires

et des mandataires exposés aux plaintes et aux réclamations.

La situation paraît non moins grave quand l'avocat avance les fonds pour des citations à témoins; il devient le créancier de son client et permet de supposer que son prêt est intéressé.

L'avocat ne serait garanti contre le danger de ses complaisances que s'il obéissait à un mouvement de pure charité; il paie alors de ses deniers, sans promesse de remboursement; il n'a plus à redouter que la calomnie sur les mobiles de son action.

VI. L'avocat ne sort pas de son cabinet quand il visite un prisonnier qui l'appelle; mais ces relations donnent lieu à des difficultés qu'il doit prévoir et qui méritent son attention.

L'avocat a le droit de communiquer avec son client quand le secret n'a pas été ordonné et que l'interrogatoire a été subi; l'article 302 du Code d'instruction criminelle dit « Le conseil pourra communiquer avec l'accusé après son interrogatoire.

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Le droit de demander des conseils est, pour le détenu, celui de la libre défense. Quand il est appelé par l'accusé, quand il est nommé d'office, quand il est sollicité par la famille, l'avocat peut donc demander au magistrat chargé de l'instruction une permission qui lui sera accordée.

Si le magistrat instructeur la refuse, l'avocat, avant d'en référer au parquet, doit avertir le Bâtonnier d'une difficulté qui peut intéresser le droit de tous; le chef de l'Ordre donne alors sa décision, et il intervient si le refus n'est pas légitime.

M° Lacan a autorisé par avance ces affirmations en écrivant :

« Il est certain que la communication de l'avocat et du client est un droit; que l'exercice de ce droit ne relève nullement du bon plaisir de l'administration; qu'il est soumis au seul contrôle de l'autorisation judiciaire. Quand l'instruction est terminée, quand le prévenu est assigné, ou lorsque l'interrogatoire de l'accusé a eu lieu, il est délivré à l'avocat un permis de communiquer qu'il ne serait même pas au pouvoir du magistrat de lui refuser. Le permis constate l'état de l'affaire et l'identité de l'avocat qui va se mettre en rapport avec son client. » — Consultation Barreau Saint-Étienne, 5 février 1873.

Un peu plus tard l'honorable Bâtonnier ajoutait :

« Les avocats n'ont le droit de communiquer avec leurs clients qu'après la clôture de l'instruction. Tant que l'instruction n'est pas terminée, c'est le juge qui apprécie s'il doit ou non autoriser la communication et accorder un permis. En fait, les permis se donnent généralement sans difficulté, même au cours de l'instruction. Mais enfin, si le juge croit avoir des motifs graves pour les refuser, il en a le droit. Consultation Barreau Lille, 20 février 1874.

Les autorisations de communiquer avec les clients dont la condamnation n'est pas définitive sont données par le parquet du Procureur général. La préfecture de police délivre les permis pour les visites au condamné dont les recours judiciaires sont épuisés; elle a reconnu depuis longtemps que la forme du permis à signalement, délivré aux familles et aux amis, ne pouvait être imposée aux avocats. Ceux-ci communiquent librement avec le condamné qu'ils ont défendu ou qui les appelle, sur la représentation de l'autorisation spéciale du bureau des prisons délivrée aux avocats sans signalement.

En 1836, les avocats de Montpellier protestèrent contre un arrêté du Préfet qui limitait à une fois par semaine, la communication du défenseur avec le condamné. Une autre difficulté fut soulevée à Saint-Etienne, en 1873, par l'exigence du visa du Préfet. Pour permettre la communication, l'administration voulait ajouter son contrôle à l'autorisation du juge. Elle se fondait sur une jurisprudence qu'il faut citer. Les arrêts disaient

<< La loi a voulu rendre secrètes les instructions criminelles jusqu'au moment où l'accusation est prononcée, puisque le conseil de l'accusé ne peut communiquer avec lui et prendre communication des pièces de la procédure qu'après l'interrogatoire. >> - R., 19 mai 1827, S. C. N. 1.601.

« C'est à partir de cet interrogatoire que commence pour l'accusé le droit de conférer avec un conseil. >> Cour Poitiers, 30 janvier 1832, S. D., 1832.2.403.

« Le caractère légal et officiel de conseil n'est acquis à l'avocat conformément aux articles 294 et suivants du Code d'instruction criminelle, qu'après la mise en accusation. » Cour Aix, 21 juillet 1832, S. D. 1832.2.460.

« On ne saurait reconnaître de conseil tant que l'interrogatoire n'a pas été subi devant le Président de la Cour d'assises. » Cour Toulouse, 2 août 1847, D. 1847.2.488.

<«< Aucune communication ne peut être valablement demandée pendant le cours de l'instruction qui est essentiellement secrète. » Req., 13 août 1863, S. D., 1864.1.149.

« C'est à partir de l'interrogatoire que commence pour l'accusé le droit de conférer avec un conseil et d'avoir copie ou communication des pièces de la procédure. Ce principe général n'admet aucune exception; au cas où le prévenu use de la faculté de fournir un mémoire (art. 217 Instruction criminelle), cette communication n'est point une conséquence nécessaire de ce droit du prévenu, puisque dans le système du Code sa défense, purement personnelle pendant la durée de la procédure écrite, ne devient contradictoire qu'au moment où commence la procédure civile. » - Cass., 5 juillet 1853, S. D., 1855.1.854.

Cette jurisprudence était jadis combattue par M. Dupin (S. D., 1827.1.601), et le Barreau a toujours soutenu qu'elle s'appliquait seulement à la communication des pièces et de la procédure. Le Barreau de Saint-Etienne a donc protesté contre l'arrêté du Préfet. On insiste sur ce que l'administration décidait, en règle générale et absolue, que l'avocat n'a pas le droit de communiquer avec le prévenu tant que l'instruction n'est pas close, alors même qu'il a la permission du juge, s'il n'a pas celle du Préfet.

Satisfaction a été donnée à la juste réclamation des défenseurs, le 12 juin 1873, avec le concours du Conseil de l'Ordre de Paris. Devant le Garde des sceaux, Me Lacan a soutenu avec raison que la mission de l'avocat était de faciliter et d'assurer à son client la mise en liberté provisoire (art. 113 Instruction criminelle), de plein droit, facultative (art. 113, 114, 116); les requêtes à présenter; les mémoires utiles; - les questions de compétence à soulever; les notifications à la partie l'appel; -le pourvoi en cas

civile;

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l'opposition;

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A la suite des communications de la Chancellerie, M Lacan pouvait écrire :

« L'avocat qui se voit empêché de communiquer avec le client, malgré le permis de la justice, parce qu'il n'a pas l'agrément de l'administration, ne peut que faire constater à l'audience l'entrave qui a été apportée à la liberté de la défense. Le Tribunal ne peut passer outre, et il faut bien alors que le Ministère public intervienne, pour qu'il soit mis un terme à un état de choses abusif. »> Consultation Barreau Saint-Etienne, 5 février 1873.

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