Page images
PDF
EPUB

Dans le sens du dessaisissement de la juridiction devant laquelle se sont produits les faits ou les paroles imputés à l'avocat, on citera encore cette consultation donnée au Barreau de Marseille le 28 janvier 1885.

« Un Conseil de préfecture qui a donné acte au Commissaire du Gouvernement de ses réserves de poursuite contre un avocat devant qui il appartiendrait, en déclarant l'incident clos, ne peut le lendemain prononcer une peine, notamment celle de l'article 91 du Code de procédure civile.

« Dans tous les cas, les principes les plus élémentaires du droit ne lui permettaient d'exercer une poursuite qu'à la condition de citer régulièrement la partie inculpée et de la mettre en mesure de se défendre. La décision rendue par défaut contre une partie non citée serait radicalement nulle.

L'article 91 du Code de procédure civile ne pouvait atteindre l'avocat; le Conseil de préfecture l'a reconnu implicitement en le considérant seulement comme un mandataire. » Consult. Barreau de Marseille, 28 janvier 1885. Le Conseil a longtemps persisté dans l'opinion qu'émettent les conclusions suivantes, prises devant la Cour dans un débat grave, le 8 juillet 1844 :

«Il plaise à la Cour, sur la compétence : « Attendu que les articles 102 et 103 du décret du 30 mars 1808 ne concernent que les officiers ministériels, et que l'article 16 de l'ordonnance du 20 novembre 1822 n'est applicable qu'aux faits qui se passent à l'audience. >>

<< Les Tribunaux étant obligés de motiver leurs décisions, ils doivent, en cas d'injonction, rapporter les termes offensants ou irrespectueux qui ont provoqué l'application des peines disciplinaires. » Metz, 20 mai 1820, C. N. 6.2.264. Contrà, Cass., S. V. 1830.1.197.

CHAPITRE III.

SURVEILLANCE DE L'HONNEUR ET DE L'INTÉRÊT DU
BARREAU. DÉFENSE CONTRE LES USURPATIONS.

257

L'exercice professionnel a été l'objet des revendications légitimes du Barreau. On ne peut accepter, sans compromettre l'honneur et les intérêts de l'Ordre, des usurpations qui portent atteinte aux droits du Barreau, autant qu'à la sécurité des justiciables.

I. A différentes époques, des avoués, en petit nombre, ont, devant le Tribunal, oublié les prescriptions qui leur interdisent de plaider au fond les affaires soit sommaires, soit ordinaires. De là les décisions suivantes :

« 1° Le Conseil, informé « que souvent, en première instance et en appel, les avoués plaident dans des causes autres que celles déterminées spécialement par l'ordonnance du 27 février 1822, charge M. Parquin de faire un rapport à ce sujet. Arr. 13 mai 1830.

-((

«2° Après avoir entendu, le 15 février 1842, le rapport de M. de Vatimesnil, l'un de ses membres, sur diverses infractions à l'ordonnance du 27 février 1822, et après en avoir délibéré :

Considérant qu'il résulte de ladite ordonnance, rapprochée des lois et règlements antérieurs, qu'en principe général, dans les affaires civiles, le droit de défendre,

C. Tome II.

17

devant les Cours et Tribunaux, appartient exclusivement aux avocats; que le ministère des avoués se borne à postuler et à conclure; que la faculté de plaider ne leur appartient qu'à titre d'exception, et seulement dans les cas suivants :

« 1° Ceux de ces officiers qui étaient licenciés et avoués, avant le décret du 2 juillet 1812, continuent de jouir du droit de plaider dans les affaires où ils occupent, conformément aux articles 32 de la loi du 22 ventôse an XII, 9 du décret du 2 juillet 1812, et 1er de l'ordonnance du 27 février 1822;

<< 2o Les autres avoués peuvent plaider, lorsqu'ils exercent leur ministère dans des Tribunaux de première instance, où il a été reconnu, selon les formes déterminées par les articles 2, 3 et 4 de l'ordonnance du 27 février 1822, que le nombre des avocats inscrits au tableau ou stagiaires est insuffisant;

« 3o Dans les Cours royales et dans les tribunaux de première instance, où le nombre des avocats est suffisant, les avoués qui ne sont pas compris dans la première des exceptions ci-dessus peuvent, conformément à l'article 5 de ladite ordonnance, plaider, dans les affaires où ils occupent, les demandes incidentes qui sont de nature à être jugées sommairement et tous les incidents relatifs à la procédure, mais ils ne peuvent plaider au fond dans aucune cause, soit ordinaire, soit sommaire;

« Considérant que les règles ci-dessus exprimées sont consacrées par une jurisprudence constante;

« Considérant qu'il résulte, tant des rapports que des renseignements recueillis par le Conseil; qu'en contravention à ces règles, plusieurs avoués près le Tribunal de la Seine plaident habituellement devant le Tribunal;

« Considérant qu'aucun de ces officiers ministériels n'était licencié et avoué avant le décret du 2 juillet 1812; que le Tribunal de la Seine n'est pas dans le cas prévu par les articles 2, 3 et 4 de l'ordonnance du 27 juillet 1822; que la plupart des affaires dans lesquelles ces avoués plaident journellement ne sont ni des demandes incidentes de nature à être jugées sommairement, ni des incidents relatifs à la procédure, mais des contestations au fond, et principalement des affaires dites d'observations. qui ont presque toutes le caractère de causes ordinaires et dont l'objet est souvent d'une grande importance; qu'ainsi les avoués dont il s'agit ne se trouvent dans aucun des cas d'exception ci-dessus énoncés;

((

<«< Considérant que, le Conseil étant expressément chargé par l'article 12 de l'ordonnance du 20 novembre 1822, d'exercer la surveillance que l'honneur et les intérêts de l'Ordre rendent nécessaire, il est de son devoir de provoquer la répression des contraventions qui portent atteinte aux droits du Barreau;

« Arrête ce qui suit :

« Les infractions ci-dessus énoncées seront signalées à M. le Procureur général près la Cour royale de Paris, à M. le Président et à M. le Procureur du roi près le Tribunal de la Seine. Ces magistrats seront priés de prendre les mesures nécessaires pour qu'elles ne se renouvellent pas; et, dans le cas où elles se renouvelleraient, M. le Procureur général et M. le Procureur du roi seront invités à poursuivre la répression.

[ocr errors]

Il faut ajouter à cette dernière consultation celle de M. Thureau, envoyée au Barreau de Mende, en 1858.

«Les avoués ont le droit de plaider devant les Tri

bunaux les affaires dans lesquelles ils occupent, en cas d'insuffisance du nombre des avocats nécessaires à la plaidoirie et à l'expédition des affaires. »

II. L'exercice de la profession a donné lieu à des revendications contre d'autres personnalités que celles des officiers ministériels.

Ainsi, un ancien avoué, se disant actuellement avocat à.... et ayant été repoussé dans sa demande à fin d'admission au tableau de Paris, se présente aux audiences pour plaider, en se fondant sur l'ordonnance de 1830 qui permet aux avocats de plaider dans toute la France, sans autorisation du Ministre. Le Conseil pense « que M** abuse de la disposition de l'ordonnance, et il charge le Bâtonnier de dénoncer le fait à M. le Procureur général, afin que ce magistrat veuille bien y mettre obstacle. >> Arr. du... 1833.

« Le Bâtonnier communique une lettre de M. le Procureur du roi, relativement à un sieur.... qui, n'étant ni avocat stagiaire, ni inscrit au tableau, a plaidé et indisposé le Tribunal par des faits d'inconduite personnelle. Le Conseil décide « que le Bâtonnier répondra, en assurant à M. le Procureur du roi que l'abus de profession sera évité, si le Président de chaque Chambre, lorsque l'individu qui se présente pour plaider n'est pas connu de lui, veut bien exiger l'exhibition de son diplôme ou la mention de son admission au stage et de la date de cette admission. » Arr. 17 janvier 1822.

M**, ayant formé une demande d'admission au stage, se présente aux audiences pour plaider, sans attendre qu'il ait été statué sur cette demande. Le Conseil, selon sa jurisprudence, « charge le Bâtonnier d'informer

« PreviousContinue »