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racines, en s'introduisant dans l'intérieur des canaux, pourraient porter atteinte à leur solidité et troubler la pureté de l'eau. En récompense de ces soins, ils étaient exempts de toutes charges publiques, et obtenaient un dégrèvement de leurs impositions. Mais, en cas de négligence, ils étaient punis par la confiscation da fonds (1).

Dans nos mœurs, l'inspection des aqueducs est confiée à une administration particulière, qui décharge les propriétaires voisins de responsabilité, toutes les fois qu'il n'y a pas de leur faute.

Il était défendu, sous la même peine (de confiscation du fonds), de planter des arbres à une distance de quinze pieds de l'un et de l'autre côté des aqueducs, pour prévenir le dommage causé par l'extension des racines; l'officier chargé de l'inspection des aqueducs, devait faire couper les racines toutes les fois qu'il y avait à craindre qu'elles fussent nuisibles (2).

Nous n'avons pas de lois générales sur la distance entre les plantations d'arbres et les aqueducs; mais on trouve des réglemens particuliers qui mériteraient d'être convertis en lois.

Tel est, par exemple, l'arrêt du conseil, du 22 juillet 1669, rendu au sujet de l'aqueduc d'Arcueil, qui fait :

« Défenses à toutes personnes de prendre les eaux, «et gåter et fouiller les pierrées, planter aucuns arbres le long d'icelles ni des aqueducs et conduits à quinze « toises près, à peine de 1,000 liv. d'amende ».

(i) Quod si neglexerint, amissione possessionum, mulctabantur. Ibid. (2) Prætereà scire eos opportet, per quorum prædia aquæductus commeat, ut dextrâ læváque ex ipsis quindecim pedibus intermissis, arbores habeant; observante officio judicis, ut si quo tempore pullulaverint y excidantur, ne eorum radices fabricam formæ corrumpant. Ibid.

Tel est encore celui du 16 mars 1764 pour l'aqueduc de Languedoc, qui porte :

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« DÉFENSES aux propriétaires voisins de l'aqueduc de travailler sur les fonds des francs-bords ni au-des« sus de la conduite, dans les parties enterrées, d'y planter des arbres, à moins que ce ne soit à la dis«tance de dix toises des francs-bords, si ce sont des «mûriers, figuiers ou ormeaux, et à celle de cinq toises « pour les oliviers, chênes verds et autres, et enfin à « celle de trois pieds pour les souches de vigne

».

Les entrepreneurs ou fermiers de l'entretien et réparation de l'aqueduc, sont tenus de veiller à l'exécution de ce règlement, et responsables des dégradations et écroulemens que les entreprises qu'ils auraient tolérées à cet égard pourraient occasionner. Ils sont aussi obligés, par leur bail, de tenir toujours l'aqueduc en état de neuf, et d'empêcher que les voisins n'en détournent l'eau pour leur usage particulier, soit en perçant la conduite, soit de toute autre manière, etc.

Une ordonnance de 1669, sur les fontaines publiques de la capitale, porte les dispositions suivantes : Afin que · « les eaux de ces fontaines puissent venir sans intermis«sion aux regards et lieux de distribution en ladite

ville, seront les aqueducs, pierrées, conduites, et « réservoirs nettoyés et rétablis soigneusement; tant en «la campagne qu'en ladite ville et faubourg, etc.

« Pour tenir un ordre exact en la distribution des <eaux et fontaines publiques, et faire en sorte que le

public et les particuliers en reçoivent à proportion de « la quantité qui sera conduite à chaque regard, seront « les bassinets des particuliers ouverts par des cui« vreaux qui ne contiendront que la jauge de concession; et pour empêcher toutes contraventions, sera

« mis en chacun regard une plaque de cuivre, qui « marquera la quantité des eaux tant du public que des particuliers.»

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Il y a au village d'Issy, près de Paris, des aquedues qui reçoivent les eaux de la montagne et qui les conduisent dans des cuvettes.

Une partie de ces eaux est destinée pour la communauté des habitans. L'autre pour différens particuliers qui possèdent des maisons dans ce village.

L'un de ces propriétaires (le sieur Delahaye) ayant creusé un puits dans un terrain qui lui appartenait sur la montagne, plusieurs habitans du village réclamèrent contre cette opération, sur le prétexte que ce puits, envahissant les eaux, intercepterait leur écoulement dans la plaine et contrarierait la destination de l'aqueduc.

Sur quoi il intervint arrêt au parlement de Paris, qui ordonna la visite des lieux, à l'effet de vérifier si cette construction portait quelque préjudice aux aqueducs.

Le résultat ayant été favorable aux réclamans, un autre arrêt ordonna la suppression du puits. (Voy. Brillon, au mot Eaux, No 3. (1)

[[ Le propriétaire de l'héritage asservi peut, aux termes de l'art. 701 du Code civil, demander que l'aqueduc soit changé de place, lorsque l'exercice de la servitude par l'endroit précédemment assigné, lui est devenu trop onéreux et qu'il offre d'ailleurs un emplacement aussi commode que le précédent. Mais lorsque l'emplacement a été fixé par convention formelle, par l'établissement sans réclamation, ou par la justice, le concessionnaire ne peut le changer sans le consentement du

(1) Brillon (Pierre-Jacques), né en 1671, avocat au Parlement de Paris en 1699, et mort en 1756. Il est auteur d'une énorme compilation connue sous le nom de Dictionnaire des Arrêts, 6 vol. in-fol., publiés en 1727.

propriétaire du fonds, à moins que cette innovation ne soit devenue tellement nécessaire que, sans elle, il ne pourrait user de son droit. Si cependant il avait été expressément convenu que telle partie du fonds serait seule affectée à l'usage de la servitude, non seulement aucun changement ne pourrait être fait; mais il serait encore vrai de dire que la servitude serait éteinte s'il n'était plus possible d'en user par l'endroit déterminé.

L'art. 696 du Code civil porte : « Quand on établit une servitude, on est censé accorder tout ce qui est nécessaire pour en user ». Ainsi la servitude de puiser de l'eau à la fontaine d'autrui emporte nécessairement le droit de passage.

Il en doit être de même pour celui à qui appartient une servitude d'aqueduc. Il doit avoir la faculté de passer sur la propriété asservie, à l'effet d'inspecter la prise, le cours d'eau et l'état du canal, et d'y faire les réparations qu'il exige. Celui auquel est due une servitude a droit de faire tous les ouvrages nécessaires pour en user et la conserver. (Cod. civil., art. 697) ]]

S XXXIII. ARBITRAGE.

L'arbitrage est le moyen le plus simple qui a dû s'offrir aux hommes dans l'enfance des sociétés.

JACOB dit à Laban: Pone hic coram fratribus meis et fratribus tuis, adjudicent inter me et te. Gen. 31. v. 36 et 37.

Les premiers souverains étaient les arbitres des querelles de leurs sujets, et même très-souvent de celles des peuples voisins. (Grotius et Barbeyrac, Droit de la guerre. Liv. 2., ch. 23., § 8).

Les Perses avaient beaucoup de considération pour le

voisinage. Ils le regardaient comme une espèce de parenté civile, qui, en certaines occasions, entraînait les mêmes effets que la parenté naturelle. Plus le voisinage était rapproché, plus l'affinité leur paraissait étroite, et c'était par la voie de l'arbitrage que les différends entre voisins étaient jugés (1).

On rencontre les traces de cette opinion chez les Ro

mains.

Dans l'ordre des liaisons, le voisinage tenait le premier rang, après l'amitié.

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CHREMES, dans Térence, dit : « Votre vertu, et le voisinage que je regarde comme une espèce d'amitié, « m'autorisent à vous parler avec franchise.

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« Vel virtus tua me, vel vicinitas (quod ego in propinquâ parte amicitia puto facit ut te audacter mo« neam et familiariter. (Heautontimorumenou, act. I", « scène I.re.)

La loi des douze tables, en assimilant les voisins à des parens, ordonnait que les contestations qui s'éleveraient entre eux, au sujet des limites de leurs propriétés, seraient jugées par trois arbitres. Si jurgant ad fines, finibus regundis, prætor arbitros tres addicto.

Ces trois arbitres se prenaient dans un collège de douze prêtres, institués par Romulus sous le nom de frères ou compagnons Arvales (2), et qui, étant consacrés au dieu Therme, avaient des connaissances particulières en matière de limites.

Mais les frères Arvales ne jouissaient pas, à cet égard du droit exclusif de servir d'arbitres entre voisins; et ceux-ci pouvaient prendre des arbitres ailleurs.

(1) Persæ viciniam, in proximâ parte statuerunt, ut qui viciniores, hos arctioris necessitudinis vinculo, junctos, existimabant.

(2) Idcircò, dit Cujas, terminorum finiumque, jurgiis finiendis sacerdotes interveniunt, FRATRES ARVALES.

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